Présentation[Notice]

  • Clara Foz et
  • Francisco Lafarga

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  • Clara Foz
    Université d’Ottawa

  • Francisco Lafarga
    Université de Barcelone

La traduction comme représentation et l’espace hispanique sont les deux pôles autour desquels est structuré ce numéro de TTR qui en comptera un deuxième, sur le même thème, « porteur », de toute évidence, pour employer une terminologie en vogue. Pourquoi la notion de représentation ? Parce qu’elle nous apparaît comme fondamentale en traductologie, la traduction (procédé et produit) à l’instar de l’architecture, de la peinture ou de la photographie, constituant une des formes de la représentation, comme l’histoire des pratiques traductives en témoigne. Les métaphores médiévales des oeuvres (ou Summae) à construire par la traduction ou celles, plus récentes, de l’envers et de l’endroit d’une tapisserie ou d’un tableau appliquées à un texte et à ses traductions témoignent bien de l’inscription de nos pratiques dans le champ du représentable. Cependant, du « travail de représentation », nous savons qu’il n’est ni simple réflexion mimétique ni perception d’une intention qui serait transcendante, mais qu’il est construit non seulement à partir de ce qui est à représenter mais aussi à partir de celui qui représente et bien entendu qu’il s’inscrit dans un discours au sens large, avec ses normes et ses règles. Et si la traduction demeure encore parfois instrumentalisée, voire occultée, sans doute du fait qu’elle est moins institutionnalisée que d’autres disciplines ou pratiques comme l’histoire ou l’anthropologie, à qui, sinon à nous mêmes traductologues, revient-il de montrer aux autres disciplines toute la complexité, la richesse et la variété des transferts culturels que la traduction permet ou facilite, mais aussi, ne soyons pas naïfs, peut éventuellement freiner ou suspendre? À la notion de représentation, par ailleurs, est clairement liée celle d’espace et de ce point de vue tant du côté des Amériques que de celui de l’Europe, pour généraliser, l’espace de la traduction ne cesse de s’affirmer tant par nécessité économique qu’en raison d’impératifs liés aux transferts de tous ordres (culturels entre autres) qui s’opèrent dans ces sociétés. Dans les Amériques, tout particulièrement : un continent de contrastes et de ruptures, où, du nord au sud, quatre grandes langues dominent et des dizaines d’autres survivent. En consacrant un numéro double de TTR à l’espace hispanique, l’Association canadienne de traductologie, « doyenne » dans le domaine, montre encore une fois qu’elle est bel et bien et depuis toujours réellement internationale et ouverte à tous les espaces. Ce numéro s’ouvre sur une traduction française de l’essai de José Ortega y Gasset, Miseria y Esplendor de la traducción. Pourquoi s’intéresser aux pages que ce philosophe et essayiste espagnol a consacrées à la traduction en 1937, pendant son exil en Argentine? Des pages, qui, rappelons-le, ont été publiées dans un premier temps par « épisodes » dans le quotidien La Nación de Buenos Aires. Parce que ce texte, comme en témoigne son inclusion dans l’anthologie parue en anglais aux Presses de l’Université de Chicago, tient une place considérable dans l'histoire de la pensée sur la traduction, aux côtés, dans le champ hispanique, de ceux de Jorge Luis Borges ou d’Octavio Paz. Parce que, s’il demeure en général peu connu du public francophone - en grande partie sans doute parce qu’il n’en existe, à notre connaissance, aucune traduction française publiée, mais sans doute aussi, plus indirectement, parce qu’il contient la critique d’une certaine « tradition française » en la matière, il a en revanche suscité un intérêt considérable en Allemagne où il a été l’objet, dans les années soixante, de deux éditions bilingues en livre de poche. Les lecteurs percevront aisément les liens étroits de ce texte avec ceux des penseurs allemands de la traduction, tout particulièrement Schleiermacher. Cette traduction est présentée …

Parties annexes