Résumés
Résumé
La traduction du vernaculaire noir : l'exemple de Zora Neale Hurston — La traduction du vernaculaire noir exige du traducteur une grande part de créativité. Le cas de la romancière et anthropologue Zora Neale Hurston en fournit un bon exemple. Capturant avec le même bonheur le rythme traînant des dialectes du Sud et le feu d'artifice verbal des marlous newyorkais, l'accent des fermiers du Delta ou des ouvriers itinérants, elle restitue une langue et une culture forgées par une vision tantôt folklorique tantôt biblique du monde qui permettait aux Noirs d'affirmer de manière codée leur résistance à l'oppression blanche. Ses oeuvres sont narrées dans un anglais classique, seuls les dialogues sont transcrits phonétiquement. Du point de vue du traducteur, l'auteur utilise non pas une langue « correcte » et un anglais dialectal mais deux langues différentes qu'elle place sur pied d'égalité : le texte classique mais nourri des traditions langagières noires de la narration, et le « parler noir » des dialogues qui situe chaque protagoniste en fonction de ses appartenances sociales et régionales. Le traducteur doit pouvoir reconnaître les subtiles techniques stylistiques de la narration afin d'en trouver l'équivalent en français. Et pour pouvoir rendre la langue traînaillante des dialogues, langue qui invente sa propre grammaire, joue des redondances et des métaphores, mêle argot et termes savants, survivances des langues africaines et anglais élizabethain, il doit « inventer » une langue qui permette de rendre visuellement le rythme, les accents et les inventions verbales du Black English.
Abstract
Black Vernacular in Translation : The Case of Zora Neale Hurston — To translate Black English, the translator must demonstrate a creative spirit. A good example is that of Zora Neale Hurston, a novelist and anthropologist, for she manages to capture with the same ease the drawl of Southern peasants and the quick tongue of Harlem boys, the accent from the Mississippi delta and that of travelling hired hands. Her writing is representative of a culture marked by folk and biblical storytelling, which uses coded language to assert African-American resistance to white oppression. Hurston's narratives are written in classical English, but her dialogues are in Black American, represented phonetically. The translator is not dealing with "correct" English on one hand and a dialect on the other, but rather with two different languages, both of which are equally important: the narrative, although written in "good" English, is informed by the African-American oral tradition; the dialogues are in Black American, transliterated with such uncanny precision that each character "speaks" in a way that situates him or her socially and/or regionally. The translator must be able to identify the subtle stylistic techniques used in the narrative. And in order to translate the drawl of the dialogue, with its peculiar grammar, its redundancies, its metaphors and similes, its mix of slang and scientific or pseudo-scientific terms, its use of Elizabethan vocabulary and grammatical forms reminiscent of its African past, the translator has to "create" a new language, a visual equivalent that will give the reader a feel of the rhythm, the accents and the verbal invention that are so typical of Black English.
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