Liminaire

Ne plus savoir à quel Josué se vouer[Notice]

  • Alain Gignac

…plus d’informations

  • Alain Gignac
    Institut d’études religieuses, Université de Montréal

Lorsque l’idée a surgi de rendre hommage à notre collègue Robert David en lui dédiant un numéro de la revue – dont il a été un des fondateurs, occupant longtemps le poste de secrétaire –, aussitôt, le projet d’une thématique centrée sur le livre biblique de Josué s’est esquissé. J’aimerais revenir ici sur le parcours universitaire du professeur David (scandé par un retour récurrent à Josué) et sur l’impertinence (ou la pertinence) de revisiter le sixième livre de la Bible. Il s’agira en quelque sorte de commenter la citation liminaire… de ce liminaire. Robert David a commencé son enseignement à l’Université de Montréal en 1977, puis est devenu professeur en 1988. Il a pris sa retraite en juin 2015 – comme le temps passe vite ! Comment résumer un tel parcours en quelques lignes ? Autrement dit, comment interpréter la bibliographie du collègue qu’on retrouve en ouverture du présent numéro ? Je discerne une orientation de fond et quatre fils conducteurs qui témoignent d’une grande cohérence et d’un souci herméneutique constant. La posture herméneutique fondamentale de David me semble assez bien cristallisée dans les citations suivantes : Pour David, il s’est agi, non pas de répéter les mots de nos ancêtres dans la foi – fut-ce les mots de la Bible – mais, en essayant de comprendre l’expérience religieuse ou spirituelle qu’essaient de dire ces mots, d’établir un pont entre cette expérience et la nôtre, expériences nécessairement analogues car profondément humaines, par leur quête de sens. Il s’est agi d’oser à notre tour placer des mots sur notre expérience mais dans le cadre d’une épistémologie propre à notre époque et donc compréhensible pour nos contemporains. On comprend alors aisément pourquoi le premier fil conducteur des études exégétiques de David – ici on devrait peut-être plutôt parler de ligne de force – soit d’inscrire sa lecture des textes bibliques dans le cadre de la philosophie processuelle – essentiellement dans la ligne du philosophe Alfred North Whitehead (1861-1947) (Whitehead 1993 [anglais 1933] ; Whitehead 1995 [anglais 1929]) – et de ses adaptations à la théologie, proposées entre autres par Charles Hartshorne (1897-2000) et John B. Cobb (né en 1925), et en français, par André Gounelle (né en 1933). L’article « Théologie du process » sur Wikipedia résume correctement les tenants et aboutissants de l’épistémologie processuelle : Dès 1991, s’interrogeant sur la manière de relire les récits d’origine de Gn 1–11 dans le cadre du contexte de la crise écologique, David propose d’adopter pour ce faire le cadre cosmologique du procès – une description qui recoupe et complète celle que je viens de citer : Au fil des ans, David tisse sa toile, appliquant la perspective processuelle à différentes thématiques, à l’occasion de « commandes » exégétiques : récits des origine (David 1991) et création (David 1994a ; 2001b), messianisme (1998b), liberté et (in)déterminisme (David 2001c ; 2006b), expérience de l’exil (David 2004), récits de vocation (David 2005a). Sans oublier deux recensions, des livres de Denis Hurtubise (David 2001g) et d’Isabelle Stengers (David 2005e). Il met aussi sur pied Nexus (Groupe de recherche théorique et pratique en exégèse du procès), dont on retrouve encore la page de présentation sur le web (David 2007a-b). Ce labeur culmine en 2006 par la publication de la monographie Déli_L’ÉCRITURE. Paramètres théoriques et pratiques d’herméneutique du procès (David 2006), qui « allie une présentation théorique de concepts d’herméneutique issus de la pensée du procès à une démarche systématique d’analyse des textes de l’ÉCRITURE », à partir du cas de Ex 32 (David 2007b). Cette présentation théorique et pratique fut plus tard complétée par un article plus synthétique (David …

Parties annexes