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L’archipel des îles de la Madeleine est situé dans le golfe du Saint-Laurent à proximité des côtes de la Nouvelle-Écosse et de l’île du Prince-Édouard, mais fait partie de la province de Québec. Reconnu pour ses longues plages de sable, ses spectaculaires falaises de grès rouge et sa culture unique, l’archipel accueille autour de 70 000 visiteurs par année, faisant du tourisme la deuxième industrie locale après la pêche.

C’est dans cette communauté que Michel Bonato s’est établi il y a une trentaine d’années. Il a d’abord occupé les postes d’agent de développement et de responsable du marketing de l’association touristique avant d’en devenir le directeur général depuis presque vingt ans maintenant. Nous le remercions sincèrement d’avoir pris le temps de répondre à nos questions.

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Michel Bonato, directeur général de Tourisme Îles de la Madeleine

Michel Bonato, directeur général de Tourisme Îles de la Madeleine
Crédit photo : Nigel Quinn, pour Tourisme Îles de la Madeleine.

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Accompagné du conseil d’administration et d’une équipe de professionnels, en concertation avec l’ensemble des partenaires socioéconomiques de l’archipel, il continue à œuvrer à un développement équilibré et équitable de la destination pour le bénéfice des diverses parties impliquées. Particulièrement fier de la stratégie touristique 2021-2026 de la destination, il reconnaît que d’importantes décisions à cet égard attendent l’archipel, dont le succès ne pourra être atteint que dans le cadre d’une vision collective et concertée de son développement.

Pouvez-vous présenter rapidement votre parcours et ce que vous faites aujourd’hui ? 

Mes différents emplois en tourisme ainsi que mes nombreux voyages et séjours dans les îles du monde m’ont permis d’observer et de comparer divers modèles de développement touristique. Établi aux îles de la Madeleine depuis une trentaine d’années, j’ai d’abord occupé les postes d’agent de développement puis de responsable de la promotion de la destination à l’Association touristique régionale (ATR) avant d’en devenir le directeur général depuis déjà vingt ans. Partageant ma vie avec une Madelinienne depuis mon arrivée sur l’archipel, et même quelques années avant, j’ai pu découvrir et vivre ce mode de vie insulaire qui me procure une qualité de vie et un dépaysement qui seront difficiles de retrouver ailleurs. 

Pourquoi le choix de travailler dans le développement touristique ? 

Mon parcours et mes expériences professionnels m’ont poussé naturellement vers le tourisme dès mon arrivée sur l’archipel. Le tourisme est un secteur générateur d’emplois dans les régions isolées, et les îles de la Madeleine n’y font pas exception. Mes premiers emplois saisonniers m’ont permis de réaliser une certaine intégration et d’obtenir une meilleure compréhension de ce milieu insulaire. Intégration qui, si elle est réussie, permet de passer à une autre étape et peut ouvrir la porte à des opportunités d’emploi au sein d’organismes publics locaux. C’est ce qui m’est arrivé avec l’ATR des Îles de la Madeleine après dix ans de vie sur l’archipel. Travailler pour une organisation responsable d’une des plus belles destinations touristiques du Québec représentait un certain accomplissement pour moi. 

Comment voyez-vous la place du tourisme par rapport aux autres acteurs du territoire ? 

Le tourisme est devenu au fil des ans un des deux moteurs économiques de l’archipel, avec l’industrie des pêches. Alors que cette dernière se concentre sur les débarquements et leur transformation, le tourisme a un impact beaucoup plus large sur le territoire et les résidents qui l’occupent. Il oblige ceux-ci à avoir une interaction quotidienne avec les visiteurs et génère une certaine pression durant les périodes de haute intensité. Je demeure convaincu qu’un rapport harmonieux entre visiteurs et visités constitue la pierre angulaire du succès d’une destination et que c’est à cette condition seulement que ce développement contribuera favorablement à la vitalité des territoires et des populations concernés. Le tourisme doit donc s’intégrer et être complémentaire aux autres secteurs économiques. Il doit œuvrer à la qualité du cadre de vie des résidents et à la conservation de la beauté de la destination. À cette fin, il oblige toutes les parties prenantes à concevoir des politiques, stratégies et règlements afin d’en baliser le développement. 

Comment vos actions contribuent-elles au développement de votre territoire ? 

Alors que le rôle des ATR a évolué depuis quelques années pour intégrer la gestion de la destination à leur mandat naturel qu’était la promotion, cette vision de la gestion du territoire a toujours été au centre de nos préoccupations et de notre mission. Sur des territoires restreints, il demeure facile et rapide de constater les impacts de nos décisions et de nos actions, que ce soit en termes d’allongement de la saison, de stratégies de promotion, de création de nouvelles expériences ou de mise en place de programmes de financement pour nos entreprises. La facilité de disposer de données collectées aux deux portes d’entrée de l’archipel permet également de mieux comprendre la gestion des flux de visiteurs et de tenter de trouver un certain équilibre durant les périodes de haute intensité. Nous réalisons aussi divers sondages afin de mieux comprendre le comportement des visiteurs durant leur séjour, dans le but d’optimiser les retombées touristiques auprès des résidents qui contrôlent la quasi-totalité de l’industrie.

Vous travaillez en contexte insulaire, quels défis viennent avec l’insularité ? 

Les problèmes que nous vivons en termes de pénurie de main-d’œuvre, de logement, de gestion des déchets ou de dépendance aux énergies fossiles, pour ne citer que ceux-là, sont accentués par la distance des grands centres et l’isolement de la destination en plein milieu du golfe Saint-Laurent. L’exiguïté du territoire fait ressortir constamment des enjeux d’occupation et d’utilisation où tous doivent faire des compromis et sont condamnés à s’entendre. Les révisions successives du schéma d’aménagement sont là pour le rappeler. Je suis particulièrement fier de la stratégie en tourisme durable de la destination 2021-2026 qui met l’accent sur les défis du territoire au-delà du tourisme et qui a réussi à rassembler tous les partenaires socioéconomiques, les entreprises touristiques et les résidents. Mais d’importantes décisions attendent notre archipel, dont le succès ne pourra être atteint que dans le cadre de cette vision collective et concertée de notre développement.

Quels territoires vous inspirent et pourquoi ? 

Les îles ont toujours suscité chez moi une attirance et une curiosité particulières faisant en sorte qu’elles finissent toujours par devenir la finalité de mes nombreux voyages. Quelle que soit leur étendue, elles dégagent toujours un certain art de vivre, une histoire qui leur est propre, et deviennent inspirantes à bien des égards. Que ce soient les îles Féroé, les îles du Ponant, Madère, l’Islande ou certaines îles des Caraïbes, toutes ont vécu ou vivront des défis qui ressemblent étrangement aux nôtres. Les territoires côtiers où la mer et le vent sont omniprésents, à l’image de la Bretagne, sont tout aussi intéressants en termes de promotion. Les pays scandinaves demeurent très inspirants par le développement touristique durable et les liens qu’ils établissent avec leurs populations. Ces pays du froid ont un mode de vie et des comportements qui s’apparentent naturellement à ceux du Québec et des îles de la Madeleine.