Résumés
Résumé
Les organisations publiques, longtemps critiquées pour leur style de travail bureaucratique et intrusif, sont dorénavant encouragées à collaborer dans l’utilisation des services (partage de services) au sein de réseaux. La mise en place de ces réseaux demeure une entreprise complexe, car les organisations sont multiples, elles sont dotées de ressources et d’une capacité d’absorption limitées et variées et leurs stades de développement diffèrent. Cette étude analyse le déploiement de trois projets de services partagés. Une stratégie de collaboration différente a été adoptée par chaque cas étudié. Les trois arrangements ont été comparés et liés à la situation de départ à l’aide des théories des compétences clés et de la capacité d’absorption. Nos résultats montrent que le développement d’un accord de services partagés est influencé par des facteurs dépendant de la trajectoire choisie, dont le type d’organisations impliquées, leurs relations, leur capacité d’absorption et leur situation géographique.
Abstract
Public Organizations (POs) have been slow in innovating their service provisioning bureaucracy. Recently, POs have been stimulated to cooperate with each other in loosely coupled organizational arrangements by making use of each other’s services – i.e., the sharing of services. The development of these networks is difficult, since they embrace several organizations whose developments are often out of sync and their resources and absorptive capacity are limited and diverse. This study analyzes and examines three cases in which three different collaboration strategies were adopted. Based on the core competency and absorptive capacity theory, the three cases are then compared. This comparison shows that of the variety of shared service collaboration strategies can be explained by several factors including path-dependencies, the organizations involved, their interrelationships, available resources, capabilities and geographical position.
Corps de l’article
La littérature aborde depuis quelque temps déjà la question de l’approvisionnement des technologies de l’information (TI) et d’autres processus d’entreprises tels que les ressources humaines, les finances et la comptabilité (Dollery et Akimov, 2007 ; Ulbrich, 2006). Or, le choix d’une stratégie d’approvisionnement demeure flou, caché derrière des euphémismes, interprété différemment par les groupes concernés et, généralement, difficile à analyser. La collaboration entre les organisations publiques peut jouer un rôle déterminant dans l’atteinte de leurs buts stratégiques tout en leur permettant d’épargner. Le partage de services réduit en effet le dédoublement d’activités communes par la concentration des activités similaires au sein d’une unité, ce qui permet de réaliser des économies d’échelle et d’envergure (Janssen et Joha, 2007 et 2006 ; Ulbrich, 2006). Un centre de services partagés ou un organisme de services partagés (OSP) devient alors une unité semi-autonome responsable et indépendante qui offre des services spécifiques prédéfinis aux entités opérationnelles de l’organisation sur la base de certaines conditions (Bergeron, 2003).
Dorénavant, les organisations publiques coopèrent au sein des réseaux de services publics (RSP) où chacune d’elles peut offrir ou utiliser les services d’une autre. De cette façon, elles améliorent leur offre de services tout en réalisant des économies d’efficience (Janssen et Joha, 2007). La mise en place et la gestion des services partagés dans un RSP demeurent néanmoins une entreprise complexe, car une multitude d’agences divergent en terme d’objectifs, de ressources, de capacités, de processus et de niveau de complexité des TI (Janssen et Joha, 2007 ; Janssen, Joha et Weerakkody, 2007). À l’aide d’une reconfiguration, d’une standardisation et d’une consolidation des activités, il est possible de détacher ces services des activités principales de l’organisation pour les offrir à tous les utilisateurs des organisations publiques impliquées dans le réseau (Ulbrich, 2006). Dans ce contexte, un OSP entretient des relations avec plusieurs utilisateurs des autres organisations qui doivent en outre être gérées. Sa mise en oeuvre est d’autant plus laborieuse en raison de la diversité des parties concernées et de leurs intérêts (Provan et Milward, 2001). Dans des pays comme le Royaume-Uni, les RSP sont perçus comme un effort d’intégration de prestation de services. Il est également avancé qu’ils pourraient transformer la façon d’aborder l’organisation du gouvernement à tous les échelons : local, régional et national. Martin, Currie et Finn (2008) constatent que les autorités d’un peu partout dans le monde tentent d’apporter des modifications aux services publics à l’aide de politiques qui cherchent à la fois à transformer les structures de la prestation des services publics et à faciliter le mandat des fonctionnaires.
La diversité des objectifs stratégiques, des capacités et des ressources caractérise souvent les organisations cherchant à partager des services dans un RSP. Les partenaires potentiels peuvent présenter des différences dans les processus et les niveaux de complexité des TI qui doivent être synchronisées avant de procéder au partage des services, et les relations interorganisationnelles au sein du RSP doivent être structurées de façon à ce que des services soient alloués aux OSP et que de nouveaux rôles leur soient attribués. La coordination entre ces derniers doit également être intégrée dans une stratégie de collaboration. Peu de recherches dans le domaine public utilisent les paradigmes théoriques pour étudier les services partagés. Notre recherche aspire à contribuer à ce champ d’études émergent à l’aide d’une analyse exploratoire de trois différents RSP.
Dans cet article, nous définirons le concept de services partagés et nous discuterons plus précisément de son interprétation dans le contexte du secteur public. La méthodologie adoptée pour notre étude sera par la suite exposée alors que les études de cas seront illustrées par trois différentes formes de réseaux allant d’un réseau centralisé à un réseau décentralisé. Nous discuterons ensuite des résultats de notre recherche et de ses incidences théoriques et pratiques. Enfin, nous présenterons nos conclusions et formulerons des recommandations pour les recherches futures.
Les services partagés en tant que stratégie de collaboration
Le concept de services partagés renvoie à la standardisation et au renforcement des fonctions communes entre différentes organisations dans le but de limiter le processus de dédoublement de l’information et d’accroître le partage d’information et de connaissances (Miskon et autres, 2009). Le modèle de services partagés repose essentiellement sur l’optimisation des ressources ; il illustre une stratégie de coopération ou un processus de transition entre une organisation et ses divisions de même qu’avec des entreprises externes (Bergeron, 2003). Enfin, Aksin et Masini (2008) considèrent les services partagés comme une stratégie d’homogénéisation, de réforme et de renforcement des processus et des fonctions d’une organisation pour en augmenter l’efficacité et l’efficience afin de réduire les coûts et d’améliorer sa profitabilité.
Dans le contexte du secteur public, la littérature indique que le concept de services partagés s’est révélé être un élément essentiel lorsque l’on doit accroître l’efficience gouvernementale par la coopération (Becker, Niehaves et Krause, 2009). Janssen et Wagenaar (2003) prévoient également une hausse de l’efficience et une amélioration de l’offre de services grâce au partage de processus administratifs entre les agences publiques réformant par le fait même le secteur public. Becker, Niehaves et Krause (2009) appuient l’argument selon lequel un processus fait à plusieurs reprises par différentes divisions organisationnelles n’est exécuté qu’une seule fois dans un modèle de services partagés. En ce sens, les services partagés incarnent une forme de coopération gouvernementale définie en tant qu’accord volontaire entre deux ou plusieurs organisations pour l’offre de services gouvernementaux (Dawes et Préfontaine, 2003). Gil-Garcia, Chengalur-Smith et Duchessi (2007) avancent également que les projets coopératifs prennent de plus en plus d’importance dans la pratique et la théorie de l’administration publique. La justification en faveur d’une coopération et de l’établissement de services partagés dans les organisations publiques réside dans une offre de services efficiente reflétée par un avantage sur le plan financier et une plus grande qualité des services (Becker, Niehaves et Krause, 2009 ; Brockett, 2009 ; Janssen et Joha, 2006).
La littérature sur les transformations du secteur public (Ulbrich, 2006; Weerakkody et Dhillon, 2008) rapporte que le secteur public, visant toujours des pratiques exemplaires, a noté les bénéfices retirés par le secteur privé. Malgré les transformations majeures dans l’offre de services gouvernementaux, plusieurs démocraties mûres luttent toujours pour améliorer les services tout en gérant les coûts, c’est-à-dire en tentant d’atteindre le meilleur rendement pour leur investissement (Brockett, 2009 ; Dollery et Akimov, 2007). Bien que ce défi ne soit pas nouveau, les chercheurs relèvent que les promesses électorales de plus en plus élevées et les valeurs de références à la hausse fixées par les organismes du secteur privé ont considérablement augmenté à la fois les attentes des citoyens (en termes de qualité et de quantité) et les enjeux politiques du secteur public. Brockett (2009) s’inscrit dans cette ligne de pensée lorsqu’il écrit que plusieurs organisations publiques sont touchées par la dernière récession (tout en faisant face à des défis grandissant pour répondre aux besoins de leurs communautés) et qu’elles tentent de réduire de façon significative leur main-d’oeuvre, coupant par le fait même les coûts en s’appuyant sur les services partagés. Il illustre son propos à l’aide de trois exemples où les autorités locales de West London ont annoncé une entente exclusive de services partagés pour permettre à plusieurs autorités locales dispersées géographiquement de partager les ressources. Les motivations à l’origine de cet accord ont été influencées par la présence d’une autorité locale au sein de l’alliance qui possède la capacité et la compétence pour fournir ces services aux huit autres conseils (Brockett 2009). Blankene (2009) soutient, à l’aide d’un exemple de coopération de sept municipalités des Pays-Bas, qu’un plan de mise en oeuvre standard ne peut être tracé, mais que plusieurs formes de coopération sont possibles. La coopération en termes d’exécution des technologies de l’information et de la communication et des processus d’affaires n’implique pas nécessairement une coopération dans les autres aspects tels que l’élaboration de politiques.
En somme, le concept de services partagés dans le contexte du secteur public et plus spécialement au sein des autorités locales ne s’inscrit pas dans un cheminement habituel. Le programme de la modernisation des gouvernements locaux place les services partagés au centre de la politique gouvernementale selon le « Gershon Review » (Dollery et Akimov, 2007 ; Gershon, 2004). Qui plus est, en étudiant les conceptions théoriques déjà présentées, nous pouvons stipuler que les organisations publiques ne peuvent dorénavant considérer des activités sur une base individuelle comme la façon la plus lucrative de réussir. Cet argument est appuyé par Miskon et ses collaborateurs (2009) et par Wang et Wang (2007) qui avancent que l’affirmation de compétence potentielle et de gains en efficience, de services incorporés centrés sur le service à la clientèle et l’amélioration de l’exploitation des capacités et des compétences peu abondantes sont des gains que les OP tentent de tirer de leur collaboration mutuelle.
Le cadre théorique
En raison de la nouveauté relative des OSP et des RSP, peu de recherches dans le domaine public ont étudié ce concept en profondeur. Seules quelques études analysent le concept à l’aide de modèles théoriques (Janssen et Joha, 2007 et 2006 ; Niehaves et Krause, 2010). Il s’avère nécessaire de combler cette lacune afin que les praticiens et les chercheurs puissent comprendre comment exploiter stratégiquement les OSP et les RSP. En ce sens, plusieurs théories proposées par le passé pour étudier les réseaux organisationnels offrent une lunette conceptuelle pour bien saisir la coopération dans les RSP. La théorie des compétences clés (Drejer, 2002 ; Roos et Roos, 1997) et la capacité d’absorption (Cohen et Levinthal, 1990) sont susceptibles de nous aider à mieux appréhender le cheminement habituel d’un accord de services partagés.
La théorie des compétences clés
La théorie des compétences clés renvoie à une théorie pédagogique selon laquelle les associés d’une coalition tendent à travailler au sein d’une alliance pour améliorer leurs compétences (Drejer, 2002). Cette théorie suppose également une possibilité d’atteindre des avantages compétitifs durables (Hamel et Prahalad, 1994). Or, le type d’activités (c’est-à-dire les compétences clés ou les compétences complémentaires) d’une firme pouvant être externalisées ou partagées demeure controversé, car la communauté scientifique estime que les compétences clés d’une entreprise ne devraient pas être externalisées (Arnold, 2000). Il est en effet postulé que l’externalisation des compétences clés peut limiter les incitatifs à l’innovation au sein de l’entreprise, dévoilant des technologies critiques qui amplifient le potentiel des concurrents et par le fait même, vient effacer les bénéfices réalisés par l’externalisation. De façon générale, les décideurs préfèrent préserver les activités clés de l’entreprise et externaliser les activités complémentaires et non réutilisables aux fournisseurs externes (Arnold, 2000 ; Drejer, 2002).
Dans le domaine de l’administration publique, l’accent étant mis sur l’interaction avec le citoyen, le maintien des relations privilégiées est souvent perçu comme une compétence clé réservée à l’interne. En ce qui a trait aux organisations publiques impliquées dans les RSP, Janssen et Joha (2007) notent qu’elles doivent collaborer pour former un réseau, pour coordonner efficacement le bassin de ressources et les ajuster à l’aide de leurs compétences clés. Les organisations publiques sont alors encouragées à travailler plus efficacement et à partager au lieu d’externaliser, et ce, dans le but de garder le contrôle des services et d’assurer l’innovation et l’orientation des services vers les consommateurs. Cette orientation est susceptible d’être renforcée lorsque le RSP intègre des agences avec des ressources et des compétences clés. La théorie des compétences clés offre alors une explication conceptuelle pour le type de compétences susceptibles d’être partagées dans le contexte du secteur public.
La capacité d’absorption d’une organisation
Cohen et Levinthal (1990) innovent dans le domaine de la stratégie avec le concept de capacité d’absorption. Ce concept tiré des théories économiques (surtout schumpétériennes) analyse le rôle de la recherche et développement dans la performance économique. La perception d’une capacité d’absorption émane de recherches antérieures sur l’apprentissage organisationnel (Zahra et George, 2002). Ce type d’apprentissage a été défini comme une connaissance croissante et une restructuration réussie face aux problèmes organisationnels (Simon, 1969), un mécanisme de récupération des actions par une meilleure compréhension (Fiol et Lyles, 1985) et la capacité de l’organisation à évaluer et à agir sur un stimulus interne et externe de façon collective et ciblée (Meyers, 1990). À l’inverse, Cohen et Levinthal (1990) décrivent la capacité d’absorption comme la capacité d’une entreprise à identifier, à assimiler et à exploiter le savoir externe à des fins commerciales. Cet accent sur le savoir externe remonte aux recherches de March et Simon (1958) qui notent que la majorité des innovations résulte d’un emprunt et non d’une invention. En ce sens, une vision plus large des organisations nous apparaît appropriée pour les TI qui sont généralement fournies au secteur public et non pas développées à l’interne.
La capacité d’absorption peut être perçue comme la capacité d’une organisation à compléter un mécanisme d’apprentissage. Un effort important d’apprentissage est typiquement associé aux TI étant donné qu’elles représentent un processus complexe de mise en oeuvre. Pour faire face à la complexité des TI, la mise en oeuvre est habituellement incrémentale et accompagnée par des efforts continus d’intégration et d’application. Le degré d’intégration du système d’information d’une compagnie témoigne de la maturité et de la qualité des TI. En fait, l’intégration de services partagés mène à une amélioration de la performance par la capacité d’absorption, c’est-à-dire la capacité d’absorption dans un rôle de médiation. Dans le contexte des RSP, chaque membre organisationnel possède une capacité d’absorption qui influence la performance et le développement global. Malhotra, Gosain et El Sawy (2005, p. 151) définissent la capacité d’absorption comme « a set of organisational routines and processes by which organisations acquire, assimilate, transform, and exploit knowledge to produce dynamic organisational capabilities ». Qui plus est, ces auteurs stipulent que les mécanismes interorganisationnels incarnent un concept essentiel dans la capacité d’absorption, dont le pouvoir de décision conjoint (« [the] extent to which an enterprise and its supply chain partners make joint decisions related to their interlinked business activities »), la modularité du processus interorganisationnel (qui réfère à la façon dont les procédés interreliés entre l’entreprise et les fournisseurs sont structurés en tant que sous-processus relativement indépendants dotés d’interfaces bien définies) et les interfaces électroniques d’affaires standards (soit l’utilisation de spécifications ou de formats communs pour l’échange et le traitement de l’information à l’interface entre une entreprise et le partenaire fournisseur). Ces mécanismes sont essentiels à la gestion des relations entre les organisations des RSP.
La méthodologie de la recherche
L’objectif de notre recherche était d’explorer les mécanismes de coopération présents dans l’offre de services électroniques utilisant les services partagés des réseaux du secteur public. Notre méthodologie se décline en trois phases (Jankowicz, 2000) : l’élaboration du projet, la collecte de données et l’analyse des données. Lors de la première phase, nous avons recouru à l’approche interprétative et qualitative d’étude de cas. L’aspect interprétatif nous a permis de naviguer et de mieux expliquer le phénomène, notamment parce que le monde social ne peut être réduit à des variables isolées telles que l’espace et la masse, mais doit plutôt être observé dans sa totalité (Saunders, Lewis et Thornhill, 2000). La recherche qualitative, avec sa dimension multi-méthode, sous-tend une approche interprétative et naturaliste (Denzin et Lincoln, 1994) ; les chercheurs qualitatifs doivent étudier le sujet dans son environnement naturel et saisir les événements dans le sens que les gens leur donnent. Le paradigme qualitatif demande aux chercheurs qu’ils observent le comportement humain et ses actions au moment où ils se produisent dans la vie de tous les jours (Schutz, 1967).
L’approche faisant appel à plusieurs études de cas a été employée pour nous permettre d’analyser le phénomène dans son environnement naturel et d’utiliser plusieurs méthodes de collecte de données pour recueillir l’information d’une ou de plusieurs entités, par exemple les personnes, les groupes ou les organisations (Walsham, 1995 ; Yin, 1994). Ces études de cas peuvent être simples ou multiples, mais une étude de cas unique ne pourrait fournir un aperçu suffisant pour illustrer la variété des mécanismes de coopération des services partagés possibles au sein des organisations publiques. Il existe plusieurs types et configurations d’OSP. L’approche à l’aide de plusieurs études de cas permet aux chercheurs d’examiner et de recouper les données solidifiant l’enquête pour la recherche (Herriot et Firestone, 1983). Notre recherche porte sur trois cas présentant trois types de réseaux allant de centralisé à décentralisé.
La procédure de collecte de données utilisée dans notre étude s’appuie sur la littérature normative pour la recherche sur le terrain (Yin, 1994). Les méthodes de recherche qualitatives adoptées incluent la collecte de données à l’aide d’entrevues formelles, structurées et semi-structurées, d’observation, de documentation électronique et d’archives. Les entrevues sont considérées comme le principal outil de la recherche qualitative pour la collecte de données (Denzin et Lincoln, 1994) et constituent la principale source de données. Les participants de chacune des organisations à l’étude ont été interrogés à l’aide d’une entrevue structurée. En plus d’avoir réalisé neuf entrevues structurées à l’aide d’un guide d’entrevue, nous avons mené plus de vingt-cinq entrevues semi-structurées avec des employés des trois organisations publiques, et ce, sans le guide d’entrevue. L’utilisation de ce type d’entrevue nous a permis de clarifier certaines questions dérivées des entrevues structurées. Enfin, le recours aux entrevues non structurées a rendu possible l’approfondissement des connaissances sur le cas à l’étude, dont la perception des employés et la nécessité de s’adapter à de nouvelles méthodes de travail.
Les études de cas
Dans le contexte des RSP, le partage de services entre des agences publiques autonomes requiert une grande collaboration. La réduction des budgets et les attentes en termes d’amélioration des services de la part des citoyens et des entreprises rendent nécessaire le partage de services au sein des RSP. Dans notre étude, les trois organisations publiques des Pays-Bas (cas 1, 2 et 3) présentent différentes formes de coopération, allant de centralisée à décentralisée telles qu’elles sont représentées à la figure 1. Tous les réseaux sélectionnés étaient déjà en service depuis plusieurs années, ce qui nous a permis d’adopter une vision rétrospective des développements.
Cas 1 : des services partagés centralisés
Dans le but d’éviter la duplication des efforts et de réduire les coûts, plusieurs programmes ont été mis sur pied pour créer des services partagés pour les communes néerlandaises. Les communes sont libres d’élaborer leurs systèmes, de choisir leurs options d’approvisionnement et d’opter pour la technologie la plus appropriée. Cette liberté a engendré une grande diversité dans les systèmes, et ce, même si, de nos jours, il est reconnu que les processus et les fonctionnalités sont généralement similaires parmi les communes. La modulation des services a d’abord commencé par les services déjà disponibles et déjà partagés par des communes au niveau local. L’attention a été portée sur les services relativement faciles à moduler et à partager, ce qui a engendré des gains rapides. De cette façon, les risques liés à l’innovation et au développement de services ont été limités et des économies d’échelle constituent les principaux bénéfices. Les utilisateurs potentiels des services partagés sont tous des organismes publics néerlandais. Favorisant l’adoption rapide de nouvelles technologies, l’accès pour toutes les agences à certains services représente le principal avantage de ces services partagés. Les organismes ayant un savoir et des ressources limités ont la possibilité de progresser grâce à l’aide offerte pour l’adoption et la mise en oeuvre de services partagés.
Le recours aux services partagés relève les organismes publics du fardeau de développer et de maintenir des services internes tout en répondant à la nécessité d’avoir une expertise interne. De même, ces services réduisent la fragmentation du développement de services similaires. Bien qu’ils amenuisent les ressources nécessaires à l’élaboration et à la gestion des applications des technologies de l’information et de la communication, ils consomment des ressources pour gérer les relations entre les utilisateurs et les OSP. Parce que les services sont fournis à plusieurs organismes et dans le but de minimiser les efforts de gestion, le centre de services partagés centralisés adopte l’approche « à prendre ou à laisser ». Bien qu’aucun service sur mesure ne soit offert, certaines configurations demeurent possibles. Pour ce type de services, le principal défi ne réside pas dans la création de services partagés, mais dans l’adoption des services par les utilisateurs. Avec le temps, on assiste à la conception d’un support qui définit le plan de mise en oeuvre, les mesures nécessaires de même que le support pour l’utilisateur.
Le comité d’administration de l’OSP est composé de représentants de haut niveau de tous les paliers gouvernementaux (émanant de ministères, de provinces, de communes et des organisations publiques respectives), il se concentre sur les questions à long terme et, au dire d’une personne interrogée, demeure déconnecté des utilisateurs : « Their awareness of our problems is limited and they are not talking about our real problems. » La grande distance entre le comité d’administration et la pratique quotidienne laisse peu de place à l’adaptation étant donné que cette personnalisation viendrait nuire aux économies d’échelle. L’offre de services est appuyée par les accords sur les niveaux de services normalisés (Standardised Service Level Agreements) offerts par les gestionnaires de comptes, lesquels sont responsables des communications avec le gouvernement local. Ce niveau permet d’établir des liens étroits avec les parties concernées. Les gestionnaires sont néanmoins critiqués. On leur reproche leur incapacité à donner suite aux propositions et à inventorier systématiquement et de façon structurée les problèmes. Les gestionnaires de compte sont malgré tout ceux qui identifient, assimilent et exploitent les connaissances des autres parties pour améliorer les services partagés. Leur présence a permis d’évaluer la qualité des services aux utilisateurs et la mise en oeuvre d’une nouvelle application pour fournir les services partagés.
Cas 2 : des services partagés fédérés
Le cas des services partagés fédérés se rapporte à la coopération de six communes. Bien qu’elle soit fédérée, cette collaboration est dominée par une grande municipalité qui fournit ses services aux municipalités avoisinantes de plus petite taille. La participation de ces petites communes tient surtout à leur incapacité à développer ces services par elles-mêmes, au manque de ressources, d’expertise et de compétences pour les réaliser parallèlement aux compressions dans les dépenses publiques et les budgets. Tel qu’il a été souligné lors des entrevues, chaque petite commune avait de deux à trois équivalents temps plein dans leur département des TI. Les plus grandes municipalités avaient développé leurs propres systèmes et utilisaient ces services à l’interne avant de les offrir aux autres. Le parcours de dépendance historique émane du lancement des services partagés à partir de services déjà en place. Les petites municipalités développaient leurs services et éprouvaient des difficultés avec les TI. Graduellement, elles ont utilisé les systèmes et les services des plus grandes municipalités. Le partage de services est alors apparu comme une extension naturelle du partage de ressources déjà en place. Les entrevues révèlent que les expériences antécédentes ont permis d’éviter des négociations complexes sur les services à utiliser et la création des modules et des interfaces.
Dans l’accord de services partagés fédérés, le pouvoir de décision et les responsabilités sont divisés entre les six municipalités, et ce, même si la plus grande municipalité demeure la plus influente et le leader naturel. Tous les partenaires du réseau possèdent des relations contractuelles et la plupart des services sont régis par les accords sur les niveaux de services normalisés qui portent principalement sur la disponibilité et la rapidité de livraison. Bien que les OSP soient concentrés dans une région géographique, l’une des conditions véhiculées par les petites municipalités résidait dans la présence des employés de l’OSP sur leur territoire pour assurer une réaction rapide aux besoins locaux et des interactions simples. Un service d’assistance a été mis sur pied pour agir en tant que guichet unique. Ce service hiérarchie les priorités parmi les requêtes des utilisateurs et les transmet à la personne responsable. L’OSP a été fondé en tant qu’entité légale avec ses propres responsabilités et devant rendre des comptes au conseil d’administration. Les membres du conseil d’administration sont des représentants des municipalités concernées et le conseil est dirigé par le représentant de la plus grande municipalité. Pour ce qui est de la prise de décision, elle est essentiellement conduite par cette municipalité : les décideurs politiques dans les municipalités soumettent des propositions quant à la direction stratégique et aux décisions à prendre dans le cadre de la coopération avec l’OSP et la plus grande municipalité exerce un contrôle et prend un rôle de premier plan relativement à ces propositions. Plusieurs personnes interrogées ont d’ailleurs soulevé la présence régulière de tensions entre les besoins des grandes et des petites municipalités parce qu’elles font faces à des défis divergents.
Cas 3 : des réseaux de services partagés décentralisés
En comparaison avec les deux premiers cas, ce type d’arrangement coopératif est la construction la plus complexe étant donné que chaque organisation peut être à la fois un fournisseur de services partagés et un utilisateur. La prestation de services est modularisée et les modules sont fournis par différentes organisations qui, en retour, utilisent les modules des autres organisations. Dans la pratique, environ les deux tiers des organisations sont à la fois fournisseurs et utilisateurs de services alors que les autres ne sont que des utilisateurs. Le réseau étudié compte douze parties. À la lumière des résultats des entrevues, il semblerait qu’il y ait eu un certain nombre de discussions sur l’identité des prestataires de services et sur les obligations ou non d’utiliser ces services. Certains de ces services sont naturellement fournis par des organisations spécifiques – cette organisation étant considérée comme le chef de file ou étant perçue comme ayant les meilleures pratiques dans le domaine –, alors que pour d’autres services, le fournisseur demeure flou. Bien que certaines organisations aient préféré devenir un OSP, plusieurs l’ont fait pour veiller à ce que certaines activités soient retenues. Plus spécifiquement, de petites organisations ne tenaient pas à partager certains services alors que les organisations relativement plus grandes (dont l’équivalent temps plein variait de six à douze) cherchaient à utiliser leur personnel existant en devenant un fournisseur de services partagés. Ainsi, plusieurs organisations offrent des services partagés similaires se différenciant en termes de qualité et de fonctionnalité. Après un certain nombre de problèmes non résolus au sein du réseau de services partagés décentralisés, les partenaires ont préféré ne pas admettre de nouveaux membres au sein du réseau. Bien que l’occasion ne se soit pas encore présentée, une entrevue indique qu’une exception pourrait être faite pour une organisation avec des capacités et des services non inclus dans le réseau actuel.
Les entrevues nous ont révélé la présence de plusieurs relations croisées devant être gérées au sein des organisations. Ce réseau est dominé par des accords de services formels et des rencontres régulières au niveau de l’organisation. Le conseil d’administration est doté de représentants de haut rang de toutes les organisations et des rencontres régulières sont tenues avec toutes les organisations de services partagés. Ainsi, plusieurs fournisseurs doivent participer à des réunions de fournisseurs et d’utilisateurs en plus d’envoyer des employés aux rencontres de niveau opérationnel. Une personne interrogée a d’ailleurs souligné : « Although we are fed up with talking to each other and sometimes just want to work, we have to talk and talk… stopping this would probably be the end our network. » D’autres ont fait mention de nombreux conflits antérieurs et de la grande probabilité de conflits dans le futur. Les conflits antérieurs étaient associés à la décision par plusieurs organisations d’abandonner le réseau, décision qui a mené à une formalisation des communications, à des plateformes de décision, à des accords sur les allocations budgétaires et le paiement de services ainsi qu’à des accords clairs sur le niveau de services. Pour mieux faire connaître le réseau, un bulletin incluant la présentation des membres du personnel et un répertoire des employés et de leurs responsabilités ont été distribués pour une identification rapide. Le développement et l’amélioration des services demeurent un processus complexe parce qu’il nécessite l’aval de toutes les parties concernées, engendrant par le fait même des retards dans la mise en oeuvre des changements et dans l’allocation des ressources pour procéder aux changements.
Discussions
La revue de littérature illustre la complexité du déploiement des services partagés au sein des RSP en partie parce qu’ils comptent de nombreuses organisations avec différents stades de développement et dotées de ressources et d’une capacité d’absorption limitées et variées. Malgré la présence de différents types de RSP, les études précédentes n’ont pas analysé en profondeur ces différentes formes. Qui plus est, la recherche sur la conceptualisation de ces réseaux et leur justification théorique demeure limitée.
Les trois études de cas présentent l’un des principaux éléments liés à la théorie des compétences clés : les organisations gouvernementales cherchent à se concentrer sur leur activité principale et considèrent les technologies de l’information et de la communication comme auxiliaires (Weerakkody et Dhillon, 2008). Elles veulent ainsi réduire leurs coûts et la gestion par l’utilisation d’OSP tout en ayant accès à de meilleurs services. Or, plusieurs personnes interrogées considèrent la livraison de services comme une compétence clé : « Yes this is a core activity, but the main thing is that given our budget and ICT-staff others can do much better. » Bien qu’elle soit moins importante que l’élaboration de politiques et que les activités préservant les valeurs de la population, telles que la sécurité, l’offre de services aux électeurs devenant de plus en plus électronique suggère néanmoins que la livraison d’un service par voie électronique peut être perçue comme une activité (partiellement) clé. En effet, même si la prestation de services peut représenter une compétence clé, les personnes interrogées admettent qu’il existe une diversité limitée de service de livraison au sein des villes parallèlement à l’urgent besoin de réduire les coûts par l’utilisation de ressources externes. D’ailleurs, le partage est perçu comme une option alors que l’externalisation n’est pas vraiment considérée comme telle en raison des risques qui lui sont associés. Bien qu’elles aient peu de chances d’exercer une influence, les organisations publiques partagent la même ambition et les mêmes objectifs et voudraient s’assurer d’offrir un niveau de service et d’innovation plus élevé que ce que demanderaient les citoyens. Ceci confirme l’affirmation d’Arnold et de ses collègues (2010) et de Miller, Kuranmaki et O’Leary (2008) à propos des réseaux d’affaires : les risques et la gestion des risques incarnent également une préoccupation dominante dans les réseaux publics.
Pour discuter des prises de décisions communes, de la modularité et des interfaces, nous nous appuyons sur la théorie de la capacité d’absorption. Dans les trois études de cas, la question des systèmes des TI et de la modularité des processus (dégroupage des services) était soulevée pour favoriser le partage des systèmes par plusieurs agences publiques. Les organisations doivent évaluer et sélectionner attentivement les partenaires du réseau (ce qui diffère de la capacité d’absorption). L’exemple du réseau centralisé est caractérisé par une relation moins serrée alors que les cas plus décentralisés présentent des liens plus étroits. Dans ces cas, les organisations sont subordonnées et le fonctionnement dépend du partenaire le plus faible. Cette relation est plus risquée en termes de capital propre aux transactions étant donné que beaucoup a été et est toujours investi dans ces relations et de par la perte du contrôle des ressources. Avec les accords sur les niveaux de services normalisés, la majorité des relations sont à caractère contractuel alors qu’il n’y avait qu’une surveillance limitée des accords sur les niveaux de services normalisés. Au sein du réseau centralisé, la gouvernance se faisait par des mécanismes formels assurant l’interaction. La nature centralisée et la base élargie des utilisateurs expliquent l’adoption de ces mécanismes. Les cas plus décentralisés mettent l’accent sur le partage de connaissances de même que sur les relations formelles et informelles.
Les petites municipalités font face à des choix limités et ont besoin des ressources externes pour améliorer leur offre de services. Il n’en demeure pas moins qu’elles doivent manifester une volonté réelle de s’engager, car le partage sous-entend une grande dépendance par rapport aux autres. Les ressources ne sont d’ailleurs pas nécessairement récupérables en cas de fin de relation. Au sein de l’entente fédérée, les petites municipalités sont soumises aux plus grandes, dont les recommandations en termes de développement et l’influence à long terme sur le développement stratégique sont considérées comme essentielles. Le partenariat doit alors être sélectionné attentivement pour éviter que soit interrompu le prolongement du réseau comme ce fut le cas dans la dernière étude de cas. Une relation serrée assure un haut niveau de partage d’information. Au sein des réseaux, les ressources sont distribuées de façon inégale entre les organisations et sont transférées de manière imparfaite d’où le besoin de posséder des mécanismes de gouvernance pour opérer les dépendances entre les ressources et en assurer une utilisation efficace (Sambamurthy et Zmud, 1999). Les trois réseaux étudiés diffèrent significativement les uns des autres et possèdent des structures de gouvernance variées. Le type d’arrangement est influencé par des facteurs tels que la proximité géographique, la présence de relations de travail et de disponibilité des ressources, les capacités de chaque organisation, la structure de pouvoir entre les membres du réseau de même que la facilité d’accès aux ressources de chacune. Deux principes en découlent : (1) les accords de services partagés ne doivent pas être considérés comme un concept homogène puisque plusieurs formes et structures possibles pour les réseaux apparaissent ; (2) les réseaux sont influencés par plusieurs facteurs et il ne semble pas exister d’arrangement parfait. Dans les deux domaines, davantage de recherches sont nécessaires.
La structure de gouvernance des TI au sein d’organisations en coopération divergeait dans les trois types de réseaux. Les organes de décision cherchaient à trouver des solutions à long terme et à faire des choix stratégiques. Alors que dans les services partagés centralisés, les décideurs étaient critiqués pour ne pas être à l’affût des problèmes réels, ces réprimandes n’ont pas été formulées dans les autres cas. Tous les arrangements s’appuyaient sur une base contractuelle et étaient guidés par les accords de niveau de services normalisés. Le réseau fédéré présentait les accords les moins formels alors que plusieurs relations entre les petites et les grandes municipalités ont évolué dans le temps. Le nombre élevé d’utilisateurs a rendu nécessaires les accords sur les niveaux de services normalisés dans le réseau de services partagés centralisés, alors que ces accords guidaient la complexité et les attentes dans les réseaux de services partagés décentralisés. Par ailleurs, les relations formelles et informelles étaient gérées de différentes façons : les services partagés centralisés s’appuyaient entièrement sur des relations formelles et des communications avec les utilisateurs tout en encourageant des relations d’information, par exemple en organisant des ateliers et d’autres activités, tandis qu’au sein des services partagés fédérés, la majorité du personnel était familier avec tout un chacun et l’entente contractuelle incluait un changement de personnel régulier devant oeuvrer aux plus près des utilisateurs. Enfin, le réseau de services partagés décentralisés se concentrait sur des communications formelles rehaussant la capacité de retracer le personnel et stimulant des relations informationnelles, et ce, dans le but de tisser des liens nécessaires pour travailler dans cet environnement complexe. La distance entre les décideurs et les employés au niveau opérationnel au sein des ententes de services partagés était très grande dans la situation centralisée, alors que les communications, les relations sociales et le fait de connaître les autres personnes semblaient importants dans les situations décentralisées. En ce sens, la littérature sur la capacité d’absorption d’une organisation et la théorie de compétences clés offre un cadre pour mieux comprendre l’utilisation des mécanismes de gestion des OSP et offre un raisonnement conceptuel permettant d’expliquer les motivations et la raison d’être des OSP dans le secteur public.
Conclusion
Nous avons procédé à l’étude de trois cas de services partagés avec l’offre de services par voie électronique dans l’administration publique. Les stratégies de coopération de même que les ententes de partage de services ont été analysées à l’aide des concepts des compétences clés et de la capacité d’absorption. Bien que la théorie des compétences clés ait été d’abord développée pour le secteur privé, elle s’est avérée très utile pour le secteur public parce qu’elle justifie la préférence pour le partage de services au détriment de l’externalisation et de ses risques associés ; les services partagés sont préférés à l’externalisation dans la sphère publique. La capacité d’absorption d’une organisation montre pour sa part que le développement de services partagés est influencé par des facteurs, dont le type d’organisations impliquées, la proximité géographique, les relations entre les organisations, le type de services, la structure de pouvoir entre les membres, les budgets et les ressources disponibles. Les petites municipalités font face à un choix restreint et peuvent profiter des ressources des autres organisations pour améliorer leur offre de services. Elles doivent néanmoins manifester une volonté ferme en faveur d’un engagement, car le partage sous-entend une grande dépendance par rapport aux autres.
Les résultats de notre étude ont des répercussions importantes sur l’élaboration de théories et les recherches subséquentes. D’abord, le partage de services ne devrait pas être considéré comme un type de construction. Les raisons incitant à partager sont motivées de l’extérieur (par les coupes budgétaires) et renforcées à l’interne (par un manque de ressources et de capacités). Les organisations partagent d’abord les services qui touchent au fonctionnement de la livraison des services. Bien qu’elle ne soit pas aussi importante que l’élaboration de politiques et les activités préservant les valeurs de la population, la prestation de services peut être considérée comme l’une des compétences clés des organisations publiques. Deuxièmement, le type d’entente dans les OSP dépend du type d’organisation et des services devant être partagés et l’ampleur et les fonctions des technologies de l’information et de la communication d’une organisation déterminent son rôle dans un réseau. Les réseaux développés du bas vers le haut regroupent des organisations comparables en termes de grandeurs et géographiquement proches les unes des autres. Cette égalité entre les organisations et la proximité apparaissent comme des facteurs importants dans la création d’une telle constellation. À l’inverse, les réseaux du haut vers le bas, ou les réseaux caractérisés par un acteur dominant, découlent du besoin d’adopter la nouvelle technologie et les nouveaux services sans pour autant détenir les ressources ou les capacités internes pour le faire. Les organisations publiques considèrent alors le partage de services comme une meilleure solution de rechange à l’externalisation vers le marché (du point de vue des compétences clés). Bien que les possibilités d’exercer une influence soient limitées, l’idée dominante veut que les organisations publiques partageant la même ambition et les mêmes objectifs soient mieux placées que le marché pour assurer un niveau élevé de service et d’innovation. La perspective de la capacité d’absorption illustre l’importance des capacités d’un partenariat serré pour maintenir la volonté de s’investir dans cette relation et partager l’information. L’OSP devrait cibler, assimiler et exploiter le savoir des autres parties pour améliorer ses opérations et ses services et ainsi innover. Ceci influence de façon significative la gestion des TI. Bien que le partenaire dominant semble régner sur les autres organisations dans les deux cas étudiés, il est prêt à s’investir dans une relation, notamment en ayant des gestionnaires de compte, en organisant des conférences et des ateliers ou en relocalisant des employés à proximité des utilisateurs. Dans ce contexte, la capacité d’absorption a alors un effet positif sur la performance du réseau. L’évidence empirique dans notre recherche suggère que les trois réseaux se sont développés dans le temps et que les organisations ont appris les unes des autres. La capacité à entretenir des relations ouvertes et des structures de décision capables de répondre aux problèmes contribue à la durabilité du réseau. La théorie des compétences clés et la capacité d’absorption ont été appropriées pour analyser la coopération centrée sur le partage de services.
Dans le cadre de notre recherche, nous nous sommes limités à trois types de RSP, mais davantage d’études sont nécessaires pour explorer les autres types d’ententes et de modèles d’affaires. De futurs projets de recherches sont essentiels pour mieux comprendre l’influence et les effets des risques sur ces relations et la complexité de la gouvernance au sein d’une entente de services partagés.
Parties annexes
Note
-
[1]
Cet article a fait l’objet d’une communication lors du 45th Hawaii International Conference on System Sciences du 4 au 7 janvier 2012.
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