Résumés
Résumé
Plusieurs textes des écrivaines de la francophonie interrogent de diverses manières les formes littéraires canoniques. Cet article examine le questionnement des genres et textes fondateurs dans trois romans qui procèdent à un décloisonnement interculturel et transgénérique. Dans L’espérance-macadam de Gisèle Pineau, c’est l’usage inapproprié du texte biblique et des contes merveilleux (« contes bleus ») qui est problématisé à travers des personnages qui n’ont plus de langage propre à force de reproduire fidèlement ces modèles consacrés. Chez Aminata Sow Fall, le romanesque fusionne avec la forme traditionnelle de l’épopée pour créer un métadiscours qui valorise la multiplicité des formes et des lectures et récuse toute hiérarchie qui instaure une discrimination entre formes (races ou individus) « supérieures » et « inférieures ». Ce principe de l’égalité des races, cultures et formes littéraires se trouve également au centre du roman de Malika Mokeddem, Le siècle des sauterelles, où l’Orient rencontre l’Occident, où oralité et écriture, poésie et histoire s’amalgament dans un métissage textuel éloquent. Ainsi, ces romancières ne se contentent pas de raconter des histoires plaisantes ; elles mettent en évidence l’un des fonctionnements essentiels de la littérature contemporaine, déjà conceptualisé par Glissant : relater, c’est-à-dire raconter mais aussi mettre en relation.
Abstract
Many texts by women writing in French question canonical literary forms in a variety of ways. This article examines the investigation of basic genres and texts in three novels that proceed to an intercultural and transgeneric decompartmentalization. In L’espérance-macadam, Gisèle Pineau calls into question the inappropriate use of the Bible and fairy tales (contes bleus) through characters who have so faithfully reproduced these time-honoured models that they no longer have their own language. In Aminata Sow Fall, fiction merges with the traditional form of the time to create a metadiscourse that enhances the multiplicity of forms and readings, and objects to any hierarchy establishing a discrimination between “superior” and “inferior” forms (races or individuals). This principle of the equality of races, cultures and literary forms is also found at the heart of a novel by Malika Mokeddem, Le siècle des sauterelles, where East meets West, where the spoken and written word, poetry and history mingle in an eloquent textual miscegenation. Thus, these female novelists do not content themselves with telling pleasant stories; instead, they highlight one of the essential functions of contemporary literature, already conceptualized by Glissant —relating, that is, recounting but also placing in relationship.