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La discussion autour du rôle du nazisme et en particulier de l’antisémitisme dans la pensée de Martin Heidegger connaît un nouvel élan depuis décembre 2013 lorsque commencèrent à circuler dans la presse française des citations antisémites extraites des Cahiers Noirs de Martin Heidegger[1]. La recension présente est le premier volet d’une synthèse des récents débats menés en France et en Allemagne autour de l’importance de l’idéologie national socialiste dans la pensée de Heidegger. Une comparaison est faite pour les lecteurs français sur la manière dont la discussion fut menée en Allemagne en 2009 suite à la parution en allemand de l’ouvrage d’Emmanuel Faye. Un article à venir sera consacré aux Cahiers Noirs parus en mars 2014 à leur contenu ainsi qu’à leur réception médiatique en France et en Allemagne.
Le réveil du débat depuis 2005
La parution en 2005 du livre d’Emmanuel Faye L’introduction du nazisme dans la philosophie a changé le caractère du débat autour de l’implication politique de Martin Heidegger dans le national-socialisme. Le livre s’appuie sur des protocoles inédits de deux séminaires du penseur des années 1933–35[2] et constitue une remise en question de la pensée de Heidegger, de ses convictions politiques et de ses déclarations. Le livre déclencha lors de sa parution une vague d’indignation parmi les intellectuels français qui dépassa les controverses passionnées déjà suscitées, quelques années plus tôt, par les études de Víctor Farías et de Hugo Ott[3]. Une version augmentée parut quatre ans plus tard en allemand[4]. Si le livre de Faye dans son édition princeps ainsi que sa traduction allemande n’ont pas manqué de déclencher à leur tour de vives réactions, elles n’ont pas eu la violence des réactions outre-Rhin[5]. La presse allemande commenta dès la parution française du livre la radicalité des confrontations autour de Heidegger en France avec un mélange d’étonnement et d’amusement condescendants. On entretiendrait en Allemagne une relation plus neutre et sereine à la question du rapport de Heidegger au national-socialisme et l’on serait exempt de la passion et de la brutalité des conflits académiques du pays voisin[6].
Que le débat français autour de Heidegger soit mené sur la place publique et de manière plus passionnée qu’en Allemagne n’est pourtant pas attribuable à un tempérament national, et pas davantage à une prétendue superficialité française mais bien plutôt au fait curieux que la réhabilitation de Heidegger en Allemagne après 1945 est passée par le détour de la France. Les thèses de Faye ont engendré en Allemagne de nombreuses réactions, mais elles ont été plus modérées. Il y eut certes quelques analyses bien fondées[7], mais surtout de nombreux articles auxquels s’applique la constatation du journaliste Jürg Altwegg à propos de la France : « Il existe de nombreuses prises de position sur le pamphlet de Faye — mais bien peu de recensions que l’on puisse prendre au sérieux »[8].
Faye parvient à la conclusion que le rapport de Heidegger au national-socialisme va bien au-delà d’un engagement politique passager : dans la mesure où il se serait systématiquement efforcé de fonder ou de sublimer spirituellement l’idéologie nazie : « […] ses écrits continuent de diffuser les conceptions radicalement racistes et destructrices pour l’être humain qui constituent les fondements de l’hitlérisme et du nazisme » (509). Faye soutient donc que la pensée de Heidegger adhère aux principaux aspects de l’idéologie nazie. Il considère par conséquent que cette pensée ne mérite pas le nom de philosophie et plaide pour que dans les bibliothèques les œuvres complètes passent des rayons de philosophie à ceux de l’histoire[9]. Dans la postface de l’édition allemande de son livre, il plaide en outre pour « une révolution dans la conception du problème » : « il ne s’agit plus de chercher à comprendre comment une philosophie serait devenue nazie, mais comment, sous un langage qui se donne les apparences de la philosophie, Heidegger est parvenu à introduire un fond raciste et nazi dans le champ de la philosophie »[10].
D’après Faye « jusqu’à présent, on a trop peu tenu compte des corrélations, toujours précises, entre les textes de Heidegger et la situation historique et politique correspondante qu’il commente ou célèbre à sa façon » (389). Aussi dans son argumentation Faye fait-il un large usage d’arguments d’ordre philologique et historique sans jamais pour autant perdre de vue la pensée de Heidegger. Son interprétation approfondie des séminaires de 1933 et de 1935 dépasse en cela le cadre essentiellement historique des travaux de Farías et d’Ott[11].
De vieilles rengaines ?
Les auteurs des recensions allemandes soulignent certes avec insistance le caractère nuancé de leurs recensions. Pourtant, à en juger par la focalisation, efficace certes, mais très peu scientifique, sur deux aspects du livre de Faye, l’approche objective est également loin d’être la règle en Allemagne. Le premier aspect est l’hypothèse insuffisamment fondée de Faye — mais qui n’est pas une thèse contrairement à ce que l’on peut souvent lire — selon laquelle Heidegger aurait pu être le « nègre » de Hitler[12] ; le second aspect est la proposition de Faye consistant à faire désormais figurer les écrits de Heidegger dans les rayons d’histoire[13]. Dans les polémiques autour de l’œuvre de Heidegger, ces affirmations sont évidemment les bienvenues pour les adversaires de Faye. Bien qu’elles soient inutilement provocatrices et contreproductives elles ne justifient pourtant nullement d’ignorer ou même de dénigrer le reste de cet ouvrage comme polémique et non-scientifique. Trop souvent le grand nombre d’informations pertinentes et troublantes qui constituent l’essentiel de l’étude est tout simplement passé sous silence. Ainsi — pour ne donner qu’un exemple — pas un mot n’est dit sur les judicieux développements autour du rapport de Heidegger à Erich Rothacker ou encore à Ludwig Clauß, développements qui montrent que « la pensée de Heidegger ne se constitue pas de manière isolée » (1er chapitre, p. 25). Faye compare des concepts tels que « monde ambiant » (Umwelt), « historicité » (Geschichtlichkeit), « sol » (Boden), « empreinte » (Prägung) ou encore « lignage » (Geschlecht) avec l’utilisation qui en est faite par d’autres intellectuels de la droite conservatrice durant la république de Weimar, et il défait ainsi le mythe créé par Heidegger après la guerre autour de sa propre personne, celui du penseur maladroit en société et solitaire, cependant débonnaire. L’étude de la généalogie de ce mythe reste d’ailleurs à faire. De l’analyse de Faye il ressort qu’une comparaison systématique s’impose entre les textes de Heidegger antérieurs à 1933 et ceux d’intellectuels dont il était proche[14].
L’annuaire heideggérien (Heidegger-Jahrbuch ; dorénavant : HJB) paru en 2009 en deux volumes et consacré à la question « Heidegger et le national-socialisme » est une démonstration, sans doute involontaire, du degré d’impéritie auquel parvient une approche qui se limite strictement au texte et ignore le contexte et le cadre historique. Le premier volume rassemble des sources jusqu’à présent peu ou pas connues censées éclairer le rapport de Heidegger au national-socialisme. Le protocole inédit du séminaire de l’hiver 1933 y occupe certainement la place centrale (HJB 4, 53–88). Le deuxième volume rassemble dix-neuf interprétations, cinq essais et deux comptes rendus sur l’état de la recherche sur « Heidegger et le national-socialisme ». Dans sa contribution, Charles Bambach décrit la « perte de l’enracinement dans le sol » (Bodenständigkeit) comme étant une double prise de conscience de « la dimension tragique de l’être-humain et de l’héritage œdipien de l’absence de patrie (Heimatlosigkeit) », à laquelle nous pourrions aujourd’hui utilement nous reporter, en assumant l’« héritage ontologique de l’absence de patrie » afin ainsi de « retrouver notre patrie (Heimat) dans l’Être » (HJB 5, 207)[15]. Pas un mot n’est dit dans cette analyse sur la signification raciale de l’ « absence de sol » et de la « patrie » dans le séminaire heideggerien de l’hiver 1933.
Il semble que le scandale déclenché autour de l’étude de Faye ait surtout l’avantage d’éviter un réel examen nécessaire des protocoles des séminaires publiés pour la première fois respectivement en 2009 et 2011[16] et de minimiser de manière péremptoire et simpliste leur importance puisqu’ils ne seraient qu’une répétition d’arguments familiers[17]. Or, le plaidoyer formulé par Heidegger dans « Sur l’essence et les concepts de nature, d’histoire et d’État » (semestre d’hiver 1933) en faveur d’une philosophie au service de la propagande politique dont l’objectif est d’ « inculquer (einsenken) la volonté du Führer Adolf Hitler dans l’Être, dans l’âme » du peuple n’est certainement pas aussi anodin que le suggère la formule du retour éternel du même. La fusion totale de l’individu avec le peuple et l’État et du même coup l’intégration de la philosophie dans la politique constitue le paroxysme du séminaire. Heidegger déploie une ontologisation de la politique et une politisation de l’ontologie grâce à quoi aucune distinction n’est plus possible entre les deux domaines : « Le peuple, l’étant entretient un rapport bien précis à l’Être ou encore à l’État » (HJB 4, 74)[18]. Il ne s’agit pas là d’une simple analogie avec le concept heideggérien clé de la « différence ontologique », mais bien d’une identification de ce concept avec la politique nazie[19]. Le fait de qualifier de banalité un plaidoyer qui foule aux pieds toute responsabilité humaine ne fait que confirmer l’affirmation de Faye selon laquelle l’idéologie totalitaire rejoint avec une aisance particulière la pensée de Heidegger. Quand bien même il n’y aurait là rien d’inédit pour le lecteur familier de la pensée de Heidegger, cela n’en est pas moins inacceptable.
Du débat au scandale
Ce qui irrita particulièrement la critique fut la prétendue « fureur du censeur »[20]. On observe là une inversion de la polémique qui ne reste pas limitée au débat qui a eu lieu en France : Faye serait un loup déguisé en agneau, l’exact opposé donc d’un représentant des Lumières. Ainsi n’hésite-t-on pas à suggérer que son attitude à l’égard des textes de Heidegger aurait quelque similitude avec la terreur des autodafés nazis de 1933[21] et qu’il serait temps de se demander si l’analyse de Faye n’est pas plus « funeste » que « l’infection nazie de la philosophie »[22], une affirmation pour le moins singulière qui témoigne de ce qu’en Allemagne, aussi, le débat peut tomber à un très bas niveau, y compris dans les colonnes de journaux renommés pour leur qualité. Par ailleurs, lit-on, Faye aurait lui-même recours à un savoir secret[23]. On croit entendre Tartuffe lorsque les éditeurs du quatrième volume de l’annuaire heideggérien de 2009 célèbrent comme un acte de clarification la publication du protocole de l’hiver 1933–1934 tout en passant sous silence le fait que Faye a été le premier à soumettre à un examen critique la douteuse politique éditoriale des œuvres soi-disant complètes[24]. Et puisque Faye fut également le premier à demander que soient ouvertes les archives Heidegger et à plaider pour des recherches approfondies[25], le reproche du recours à un savoir secret s’apparente à une falsification. Il n’est pas moins fallacieux de faire de Heidegger la victime sans défense du mépris public[26], alors qu’en réalité, en France comme en Allemagne, rares sont les spécialistes reconnus de Heidegger et rares aussi les journalistes qui osent remettre en question le lieu commun selon lequel nous aurions là le plus grand philosophe du 20e siècle.
Ainsi une recension de l’annuaire heideggérien de 2009 parue dans le grand quotidien allemand Franfurter Allgemeine Zeitung apprend-elle au lecteur que Heidegger aurait à partir de 1935 pris ses distances à l’égard du régime et qu’en 1938 il aurait même qualifié Hitler de « “criminel du siècle’ »[27]. Cette affirmation n’est pas nouvelle, elle circule en effet depuis la parution en 1989 de la monographie de Silvio Vietta : La critique heideggérienne du national-socialisme [28]. Or, Vietta s’appuie sur ce qui n’est qu’un souvenir rapporté par Heribert Heinrichs d’une promenade d’automne avec Heidegger, laquelle promenade datait de 1959. Des arguments fondés sur de telles anecdotes ne vaudraient pas la peine de s’y attarder s’ils n’étaient pas représentatifs du débat autour du passé de Heidegger tel qu’il est mené dans des revues à prétention scientifique et dans les colonnes de journaux de renom.
Jusqu’à présent, il n’y a pas eu en Allemagne et guère plus au niveau international de débat autour de l’analyse menée par Faye ni autour de ses commentaires sur les protocoles[29]. Pourtant, un mérite de son travail — et non des moindres — est de soumettre au débat la thèse soigneusement étayée selon laquelle « l’“ontologie’ de Heidegger est dans son essence une “politique’ » (Faye 173, cf. 217-218). Lorsque le concept de vérité de Heidegger est identifié à la volonté inconditionnelle de servir la souche (Geschlecht) allemande et l’État hitlérien (Führerstaat) et lorsque la philosophie est sans réserve dégradée en propagande, il n’est alors plus possible d’écarter la thèse de Faye selon laquelle « la totale identification de l’enseignement de Heidegger [est] au principe même de l’hitlérisme » (ibid., 187). La question aurait dû depuis longtemps être posée en ces termes et non d’être évitée en relativisant le rapport de Heidegger au nazisme, en le traitant à la légère et toujours en le minorant en « faute originelle », en « maladie professorale » ou encore en « exaltation narcissique »[30].
Heidegger sous un nouvel éclairage
L’analyse des protocoles des séminaires tient compte du contexte historique et philosophique, ce qui la rend à la fois complexe et captivante. Il y a à cela deux raisons : d’une part, le caractère exceptionnel de la période 1933–1945, et d’autre part le fait que les textes de Heidegger, aussi sibyllins soient-ils, ne sont pas des « vues intellectuelles et théoriques », mais bien, comme le souligne Faye, des « prescriptions et directives destinées à se traduire dans l’action » (Faye, 70). Dans les protocoles des deux séminaires, le rapport étroit des textes à la politique apparaît clairement (cf. chapitres 5 et 7). Faye est le premier à mettre en évidence le lien qui unit la pensée heideggérienne à la politique nazie dans sa radicalité. Là où les évènements politiques en Allemagne ont en général été perçus comme toile de fond de l’activité professorale, ces mêmes évènements apparaissent désormais comme le moteur politique persistant de la pensée de Heidegger et, pour parler comme Heidegger, comme le centre de son vouloir.
Au fil des premiers chapitres, Faye met en place le cœur de son étude (chapitres 5 à 7). Au deuxième chapitre, il porte son regard dans un premier temps sur la période de Weimar pour ensuite se pencher sur les premières années de la période nazie et examiner les prises de position politiques de Heidegger. Les textes sont ensuite analysés, en particulier quelques-uns de ceux rassemblées dans le volume 16 des « œuvres complètes », i.e. les conférences et discours de la période du rectorat (chapitre 3) ainsi que trois cours contemporains des séminaires inédits, cours qui furent pour la première fois publiés respectivement en 1998 et en 2001 (chapitre 4)[31].
L’objection selon laquelle bon nombre de ces textes seraient déjà connus, du moins en langue allemande, n’est pas recevable dans la mesure où même si un certain nombre d’entre eux sont en principe accessibles, cela ne signifie pas pour autant qu’ils soient connus : comment pourrait-il en être autrement alors qu’il est prévu que les « œuvres complètes » comprennent déjà 77 volumes et en comprendront un jour 102 ? C’est donc à double titre que la publication ne saurait être en soi un garant de la connaissance des textes : la seule quantité de textes limite le nombre de ceux qui en lisent plus qu’une modeste partie. Et pour ceux-là même la difficulté reste entière : séparer dans des textes dont les formulations sont souvent subtilement obscures ce qui fait partie du tout et ce qui n’est peut-être que développements accessoires. Même si l’on prend donc au sérieux les déclarations telles qu’elles se trouvent dans les protocoles des séminaires, et qu’on ne les considère pas comme les errements d’un penseur qui de temps à autre, quittait son refuge en montagne pour se plonger dans la réalité, il est loin d’être aisé de les relier à ce qui est déjà connu et de parvenir à une interprétation cohérente intégrant la multiplicité des textes. Et précisément du fait d’une politique éditoriale sélective et peu transparente, le travail d’analyse des textes à ce jour accessibles est loin d’être épuisé. Aussi n’est-ce pas le moindre des défis que de corréler les divers facteurs et les divers textes d’une manière pertinente.
Le mérite de Faye est d’avoir entrepris cette tâche ardue d’une manière exemplaire et d’avoir montré à quel point l’opinion répandue est fausse selon laquelle les déclarations faites par Heidegger durant la période nazie seraient certes de caractère extrême, mais, tant du point de vue de leur quantité que de leur contenu, marginales. Une déclaration telle que : « un peuple détermine pour lui-même la loi de ce qui est sain et de ce qui malade en fonction de sa grandeur intérieure et de l’extension de son être-là » (1933)[32] fut longtemps jugée comme un « manquement », ce qui ne laisse pas d’étonner. Or, à la lumière du protocole du séminaire de l’hiver 1933, le statut d’une telle déclaration au sein de l’œuvre de Heidegger doit être reconsidéré et la déclaration ne saurait plus être mise de côté au motif qu’elle serait secondaire.
Un dernier exemple permet de montrer que l’importance des recherches de Faye ne saurait être mesurée uniquement à l’aune de faits et de textes inédits. Farías a établi dans son livre en 1989 que peu après avoir renoncé au poste de recteur (avril 1934), Heidegger devint actif au sein de la « Commission pour la philosophie du droit » (Ausschuss für Rechtsphilosophie) — une section de l’Académie du droit allemand. Faye donne un nouvel éclairage de ce fait en attirant l’attention sur le rôle considérable que joua cette Académie dans l’élaboration des lois racistes de Nuremberg (septembre 1935). Le fondateur de l’Académie, Hans Franck, à cette époque commissaire de la justice du Reich, propagea la conception selon laquelle « le fondement de notre législation est la sauvegarde de la substance raciale de notre peuple et de sa valeur » (cit. Faye, 338). Dès lors, Faye en tire la conclusion, difficilement contestable, selon laquelle la « participation » de Heidegger « à la Commission pour la philosophie du droit, qui se poursuivit après la promulgation des lois racistes de Nuremberg, apparaît, compte tenu de l’évolution du régime hitlérien, comme moralement plus grave et plus compromettante encore que son rectorat » (339). C’est un des aspects de l’étude de Faye que les auteurs de ses recensions passent complètement sous silence[33].
Aussi convaincante que soit l’étude de Faye on aurait par endroits souhaité une argumentation plus rigoureuse et plus détaillée pour éclairer par exemple par quelles voies le jeune Heidegger en vint dans les années de la république de Weimar « à une conception radicale de l’historicité, de plus en plus politique et qu’il partage avec Erich Rothacker » (20). Au sujet du commentaire détaillé que Heidegger fit de la correspondance, publiée en 1923, entre le comte Paul Yorck von Wartenburg et Wil-helm Dilthey, Faye se contente d’écrire que ce commentaire « constitue vraisemblablement une matrice pour les conférences de Cassel et pour Être et temps » (26) sans s’appuyer sur les études existantes qui étaieraient cette thèse. Il serait également souhaitable que soit documenté le rapport étroit de Heidegger à Alfred Baeumler. Enfin, le renvoi à Dilthey pour affirmer que le terme de « génération » comporterait une dimension biologique est trop péremptoire et lapidaire.
Par ailleurs, le traitement d’Être et temps est trop rapide et reste incomplet. Le débat autour du rapport entre les notions de Dasein, d’histoire et de communauté est certes important, mais il n’est pas nouveau. Aussi aurait-il fallu présenter un bilan des recherches existantes afin de préciser les liens et d’éclairer l’état de la recherche sur le rapport entre l’œuvre de 1927 et les textes de la période nazie. La simple affirmation selon laquelle l’œuvre dans son ensemble culmine dans le § 74 n’est pas à elle seule convaincante. Il en va de même du jugement selon lequel « cette authenticité du soi n’a […] rien d’individuel » (31). De tels constats sont trop allusifs. Pourtant le seul commentaire aussi court soit-il du rôle joué par le comte Yorck dans l’œuvre de Heidegger est en lui-même un élément positif puisqu’il apporte un nouvel éclairage que de futures études se devront de ne pas ignorer.
Si l’on veut rendre justice à une étude ambitieuse dans son étendue temporelle et dans sa méthode, il faut la considérer et la juger dans son ensemble. Faye ne cherche pas à livrer en tous points des connaissances inédites. Il met en rapport des éléments jusqu’à présent inconnus avec des éléments plus ou moins connus et réussit ainsi à dresser un nouveau tableau. Mettre en rapport les différents niveaux textuels, tenir compte des aspects biographique et politique sur une durée de plusieurs décennies tout en passant d’une mise au point proche à une mise au point lointaine, constitue une entreprise presque inévitablement incomplète et bien plus risquée que ne l’est une interprétation ponctuelle de textes. Faye ne cherche pas à fournir des réponses définitives mais soulève au contraire consciemment un certain nombre de questions auxquelles il importera d’apporter des réponses définitives. Aussi est-il dans la nature même d’une telle entreprise que certains passages soient lacunaires. Il reste enfin à noter que Faye a développé certains aspects de son livre sur la question du statut du § 74 dans Être et temps dans les débats qui ont suivi la publication de son livre, développements dont il faut tenir compte plus de huit ans après la première parution de son ouvrage[34].
Le rejet heideggérien de la raison
L’examen du cinquième volume de l’annuaire heideggérien montre que les protocoles des séminaires sont passés sous silence — séminaires que Faye a été le premier à commenter en détail. En effet, la plupart des contributions réunies dans ce volume réitèrent des lieux communs dépassés et ne tiennent aucun compte des arguments, thèses et hypothèses formulés par Faye. Seule la contribution de Marion Heinz se penche de manière critique sur le séminaire de l’hiver 1933[35]. Parce que sa contribution se distingue du reste du volume par une approche relativement sérieuse et nuancée et dans la mesure où le protocole d’hiver 1933 éclaire la pensée de Heidegger d’un jour nouveau, c’est sur son analyse qu’est focalisée la suite de cette recension.
Le bilan que dresse Heinz est ambivalent : d’une part elle rejoint l’appréciation de Faye selon laquelle le séminaire diffuse des éléments essentiels de l’idéologie nazie — une conception totalitaire de l’État, l’idéologie du sang et du sol, l’antisémitisme, une rhétorique guerrière (HJB 5, 56). D’autre part, elle soutient que, selon Heidegger, le peuple et l’État se définissent par la communauté de destin et non par la biologie (HJB 5, 61–62).
Cette ambivalence procède de ce qu’elle ne tient pas compte du statut de la pensée heideggérienne, tel qu’il s’exprime dans ce séminaire. En effet, Heinz voit à l’œuvre dans ce séminaire « une analyse de l’État » (Heinz, 64), des « considérations philosophiques sur l’État » qui viseraient « une connaissance de la chose » ou encore une « appréciation critique du subjectivisme tel qu’il voit le jour pendant la Renaissance ». Lorsqu’elle cite Heidegger sans plus d’examen : « chacun est appelé à développer un savoir sur l’État et à assumer sa responsabilité vis-à-vis de l’État » (64), elle accepte le sous-entendu implicite de Heidegger, à savoir qu’il en appellerait à une attitude critique et à des décisions fondées sur la raison.
Or, ce séminaire n’est pas guidé par une argumentation rationnelle. Bien au contraire, Heidegger se croit appelé à prendre le pouls de l’histoire allemande, il se fait le chantre de la volonté du Führer (cf. HJB 4, 86–88) et entend guider une « aristocratie politique » vers sa tâche historiale. Il n’est pas question de mettre en œuvre une éducation à la pensée critique, mais bien une « éducation politique » (HJB 4, 73) comprise comme éducation à s’ « adonner » (77, Hingabe) au Führer, légitime détenteur du pouvoir du fait de son Être. Cette éducation n’est pas un apprentissage, mais un éveil. Il importe « d’éveiller la conscience du peuple » (82) parce que celle-ci justement ne saurait être apprise. Les « nomades sémites » — et à l’époque tout allemand savait qui ce terme désignait — « n’auront sans doute jamais accès » (82) à cette conscience.
Ce dont il est question ici — aussi primitif que cela puisse paraître — c’est « d’imposer la volonté du Führer » (87) et de parvenir à la compréhension de ce que l’organisation étatique et par conséquent celle du peuple se fondent sur « la libre et pure volonté d’allégeance (Gefolgschaft) et [sur le] principe du Führer (Führerschaft), c’est-à-dire [sur] la volonté de combat et de fidélité » (77), sur la volonté du « sacrifice et du service » (87)[36]. Voilà en quoi seul consiste « le devoir de sujétion au destin völ-kisch » (74)[37]. Bref, l’éducation vise l’allégeance inconditionnelle, l’abandon de soi au service de la communauté et du Führer. Aussi est-il conséquent que ce que Heidegger appelle par une perversion des termes, aussi inconvenante qu’elle est brutale, « savoir », « méditation », « connaissance », « clarification », « compréhension » (73) exclut tout engagement sous forme d’une participation politique.
Faye est clairvoyant : « le propos de Heidegger relève de l’affect collectif et non de la pensée » (Faye, 221). L’appel à la « décision » n’a en effet rien à voir avec une pensée argumentée, elle est une décision de loyauté inconditionnelle et de sacrifice au Führer. Le « vrai savoir de l’État » sert uniquement à ce que l’État « forge notre essence […] et affirme ainsi sa puissance (Gewalt) » (HJB 4, 70)[38]. Sous la dénomination trompeuse de « méditation philosophique » le langage scientifique vise en réalité l’inféodation : « Le lien altier (höhere Bindung) assure la plus grande des libertés »[39] (88). Heidegger œuvre ainsi, comme le note à juste titre Faye, au « détournement des concepts philosophiques dans la langue du “IIIe Reich’ » (Faye, 208).
Étant donné le caractère factice du discours philosophique, la question se pose : l’« introduction » (Hineinführung, HJB 4, 73) à l’allégeance inconditionnelle ne s’apparente-t-elle pas à une corruption en règle dès lors que la pensée philosophique est décrite comme moyen « d’imposer la volonté des dominants » (Willensdurchsetzung des Herrschenden) par le biais du « pouvoir du discours » (Macht der Rede) (HJB 4, 86) ? Et au-delà de ce séminaire : Quel est plus généralement le rôle de ce pouvoir du discours dans la pensée de Heidegger ?
Pour une herméneutique de la précaution
Est-il légitime de persister à exiger des lecteurs de Heidegger une herméneutique de la confiance alors même que les faits indiquent que Heidegger a eu systématiquement et non momentanément recours à des stratégies de contrôle et d’exclusion vis-à-vis de ses lecteurs et de ses auditeurs[40] ? Si une herméneutique de la suspicion est risquée, une herméneutique de la confiance est non moins problématique et naïve. Il semble donc plus fécond de plaider pour une herméneutique de la précaution. Le protocole de l’hiver 1933 éclaire en tout état de cause le contenu d’une lettre écrite en 1931 à Elisabeth Blochmann :
« Pour nous, qui éduquons par la parole, c’est une question de grande importance de savoir comment et dans quelle mesure les choses essentielles doivent être dites. Au cours de ce se-mestre-ci, je fais de nouveau l’expérience qui ne cesse de m’inquiéter que ce qui est dit de manière indirecte frappe (einschlägt ) le plus sûrement et que nous continuons à sous-estimer le pouvoir des modèles et que nous travaillons trop peu en faveur de l’établissement d’un vrai modèle[41]. »
Ne serait-il pas légitime de cesser désormais de considérer ce passage comme une déclaration formulée à la légère ?
Heidegger soulignant lui-même dans le séminaire d’hiver 1933 le rôle de la dissimulation, il est absurde de reprocher à Faye un soi-disant comportement d’inquisiteur[42]. Les analyses de Faye mettent en évidence la nécessité d’une lecture attentive et critique des textes. Elles aident à comprendre la raison pour laquelle le caractère cryptique des textes heideggériens passe souvent pour un signe de la grandeur de sa pensée et pourquoi toute méfiance à l’égard de ce caractère cryptique est qualifiée d’indigence intellectuelle. Or, si l’ambivalence de la pensée que Heidegger revendique est le trait caractéristique de son génie, il est alors permis d’ignorer ou bien d’interpréter librement toute mise en rapport scientifique ou historique susceptible de vérification.
Le journaliste Alexander Kissler fait un usage édifiant de cette liberté : selon lui l’annuaire heideggérien démontre que Faye soutiendrait des « non-vérités » car chacun pourrait lire dans le protocole de l’hiver 1933 « qu’en dépit de ses nombreuses voltes peu appétissantes Heidegger use d’arguments qui ne sont ni racistes ni antisémites », car « nulle part Heidegger ne parle de Juifs et nulle part d’extermination »[43].
Si l’on s’en tient strictement à la lettre du texte, une telle affirmation est possible, puisque dans le séminaire en question Heidegger parle non de Juifs mais de « nomades sémites » et dans un cours de la même période il explique à ses étudiants que l’ennemi du peuple réellement dangereux est l’ennemi invisible qui « s’est incrusté dans la racine la plus intime du Dasein » et qu’il importe donc de le « repérer » et « d’engager une attaque sur le long terme avec pour objectif l’extermination totale »[44].
La recherche heideggérienne dominante semble ignorer qu’avec de telles formulations Heidegger participe à la diffusion du lieu commun antisémite de l’« enjuivement » et de la soi-disant absence juive de racines. Le Juif invisible et intérieur — l’« animal nuisible par excellence et en même temps l’animal insaisissable »[45] — est un poncif de l’antisémitisme moderne qui a largement contribué à la théorie nazie du complot juif. Cela vaut également pour un autre poncif de l’antisémitisme : celui du Juif errant et dépourvu de sol. Comment est-il alors possible de soutenir que le Heidegger de 1933 nous permettrait de comprendre « l’absence de patrie » et que l’attribut « sémite » serait du point de vue de l’argumentation philosophique secondaire (Zaborowski HJB 5, 255) ?
Selon Heidegger certains peuples ne disposent pas de sol parce que leur essence en est dépourvue. Au fond, ils n’ont pas d’humanité parce qu’ils n’ont pas de lien à leur propre histoire et à leur propre finitude (cf. HJB 4, 76). Dans ce séminaire, il s’agit d’un appel à l’expansion géographique du peuple allemand aux dépens de peuples dont l’essence est d’être sans sol et qui, « déchus de leur propre essence » (77), sont tombés « en dessous de l’animal » (HJB 4, 76)[46]. Du fait de cette chute, qui implique la totale « perte de dignité » (ibid.), ces peuples s’apparentent au « diable » (ibid.) et doivent être combattus sans merci. On est bien loin par conséquent d’une étude philosophique du nomadisme. Quel que soit le jugement porté sur les différents textes, le vernis de l’abstraction ne devrait pas faire illusion : Heidegger n’a que trop souvent dans un langage philosophique, qui n’est pas moins dangereux que les diatribes explicitement haineuses, appuyé l’antisémitisme du national-socialisme et sa glorification de la violence. On ne peut également se permettre d’ignorer l’ambiguïté de ses textes si l’on veut comprendre par exemple avec quelle habileté Heidegger a pu, grâce à des distorsions sémantiques du terme « méditation » (Besinnung), renverser les connotations barbares pour en faire des connotations apolliniennes afin de faire passer le texte Besinnung de 1938–1939 pour une œuvre de résistance conçue durant les années les plus sombres.
Les vieux arguments ont la vie dure
L’appel à la nécessité d’une « appréciation du point de vue de l’histoire ou de l’histoire de la philosophie » (HJB 5, 19) dans l’annuaire heideggérien est depuis longtemps familier, mais n’est pas appuyé par une méthodologie subtile et précise relevant de l’histoire des idées[47]. Le livre de Silvio Vietta paru en 1989 a beau être qualifié dans l’annuaire de description apologétique et déformatrice, il n’en est pas moins vrai que la quasi totalité des contributions s’accorde pour faire de Heidegger le maître penseur du XXe siècle, qui ne se serait que brièvement fourvoyé durant le rectorat (par exemple HJB 5, 18)[48]. Ryôsuke Ohashi va jusqu’à dater le début de la prise de distance en 1933 (ibid., 193). Certes, tous les contributeurs ne vont pas jusqu’à reprendre sans critique l’autoreprésentation de Heidegger — d’ailleurs hautement ambiguë dans sa formulation — à savoir qu’il se serait efforcé, au travers du rectorat, « de gagner en influence dans le mouvement [nazi — S.K.] afin de le purifier et ainsi de le clarifier » (Denker, HJB 5, 357). Pourtant, aucun des auteurs ne met en doute que le penseur de l’Être ait, immédiatement après le rectorat, exercé « une critique acerbe à l’égard des machinations (Machenschaften) national-socialistes » (Bambach, 201) et, à partir de cette époque, tout mis en œuvre pour développer une « vision philosophique de l’avenir de l’Allemagne » (ibid., 202).
Selon le fil conducteur de l’annuaire, Heidegger a pu développer son autopsie magistrale du national-socialisme comme apogée des machinations modernes, non pas grâce à une rupture avec, mais grâce à la foi dans le national-socialisme (cf. HJB 5, 21, 257). Richard Polt regrette certes que Heidegger ait glorifié en 1933 la terreur et l’appel à l’extermination, mais cette erreur l’aurait rendu capable de saisir les mécanismes de l’automystification et surtout l’essence du mal (Polt, 155–156 ; cf. aussi Ohashi, 199). Ainsi Heidegger aurait-il « anticipé l’analyse faite par Hannah Arendt de la “banalité du mal’ dans les mécanismes des régimes totalitaires » (Polt, 183). Il aurait été persécuté par les nazis en raison de sa critique perspicace de la modernité (Zaborowski, HJB 5, 22). Sa « faute » s’expliquerait essentiellement par son « aveuglement face à la vérité » (id., 246 et 249 ; cf. aussi Mehring, 308) et son « manque de sensibilité » (Zaborowski, 266), qui n’excluait pas pour autant serviabilité et courtoisie comme des Juifs peuvent notamment en témoigner (id., 258). Qu’il se soit tu après 1945 s’explique vraisemblablement par une honte profonde (id., 24)[49]. Il serait clair, en outre, que Heidegger n’a pas été un antisémite, qu’il a tout au plus nourri « un ressentiment anti-judaïque » (id., 261).
L’autodéfense de Heidegger après la guerre, qui a déjà été réfutée par Farías et Ott, s’est récemment révélée grâce à des recherches détaillées dans les archives heideggériennes comme une falsification savante[50]. Il est apparu qu’un texte décisif quant à la réhabilitation de Heidegger après la guerre, Die Zeit des Weltbildes, une conférence donnée en 1938, ne contenait pas à l’origine de critique de la technique et de la subjectivité, mais plaidait bien au contraire en faveur d’une subjectivité allemande comme dépassement d’une subjectivité « dégénérée » (entartet). Ces recherches récentes ont confirmé et étayé la thèse de Faye selon laquelle Heidegger aurait réécrit et falsifié ses textes des années 1933–1945 (cf. Faye, 398). La fiabilité de la Gesamtausgabe quant aux prises de position de Heidegger relativement au national-socialisme est bien le problème majeur et aussi incroyable que cela puisse paraître on ne sait aujourd’hui toujours pas ce que Heidegger a réellement dit dans ses conférences et dans ses cours des années 1933–44. D’une part tous les textes de cette période ne sont pas encore publiés[51] et d’autre part il reste à déterminer dans quelle mesure les textes publiés correspondent à ce que Heidegger a réellement dit et écrit dans les années du national-socialisme. Il conviendrait par conséquent de comparer de manière systématique les manuscrits de Heidegger avec les textes tels qu’il les a fait publier. Cela suppose au demeurant de rompre avec l’idée diffusée par Heidegger lui-même que l’étude philologique ne pourrait pas se confronter à la profondeur de sa pensée. Il est donc nécessaire de déjouer ce qui n’est que stratégies d’exclusion et de domination des lecteurs, stratégies dont l’efficacité est fatalement renforcée pour les lecteurs non germanophones, lecteurs donc des traductions.
Remarquons pour conclure que les lecteurs de la philosophie heideggérienne ont eu droit à plusieurs versions : celle du philosophe séduit un temps par une politique qui n’affecterait pas sa pensée, puis celle du philosophe qui trahirait sa propre pensée ; et enfin récemment celle du philosophe qui, ayant fait l’expérience du nazisme, aurait par là même été capable de comprendre le pire. Pourtant l’alternative n’est pas entre le penseur profond et le penseur déchu, la question se pose plutôt dans les termes suivants : dans quelle mesure est-il ou non possible d’isoler des pans philosophiques de sa pensée qui garderaient en dépit de prises de positions inacceptables leur valeur intrinsèque ? La monographie de Faye est une importante contribution à l’élaboration de cette question aujourd’hui en débat.
Parties annexes
Notes
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[1]
Le débat fut lancé par l’article d’Eric Aeschimann, « “Cahiers Noirs’ : vers une nouvelle affaire Heidegger », in : Nouvel Observateur, 7.12.2013.
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[2]
Faye, Emmanuel. Heidegger, l’introduction du nazisme dans la philosophie. Autour des séminaires inédits de 1933–1935, Paris, 2005. Les deux séminaires sont : 1) Sur l’essence et le concept de nature, histoire et État du semestre d’hiver 1033/34. 2) Le séminaire Hegel. Sur l’État du semestre d’hiver 1933/34, qu’il tint avec le juriste Erik Wolf.
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[3]
Pour une vue d’ensemble consulter par ex. Rockmore, Tom / Margolis, Joseph (éd.), The Heidegger Case. On Philosophy and Politics, Philadelphia, 1992.
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[4]
Faye, Emmanuel. Heidegger. Die Einführung des Nationalsozialismus in die Philosophie, trad. par Tim Trzaskalik, avec une postface d’E. Faye, Berlin, 2009.
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[5]
La violence du débat français est exprimée par l’un des « French Philosophers (who) fight back » (cf. http://parolesdesjours.free.fr/scandale.htm, consulté le 27.06.2013) : Hadrien France-Lanord qui affirme sans rire : « Il n’est pas nécessaire de lire ce livre, car Monsieur Faye n’est pas quelqu’un qui connaisse vraiment la pensée de Heidegger », in : Birnbaum, Jean, « Pour la jeune garde heideggérienne, l’œuvre est indemne de toute imprégnation nazie », in : Le Monde des Livres, 25.3.2005, p. VI.
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[6]
Cf. la présentation relativement objective du journaliste Altwegg, Jürg, « Wirkt sein Gift bis heute? Frankreich debattiert über Heidegger als Hitlers Philosoph », in : Frankfurter Allgemeine Zeitung, 21.05.2005, p. 31. Dieter Thomä en revanche affirme qu’au fond faire de la philosophie digne de ce nom n’est possible qu’en Allemagne : Thomä, D., « Alle zwanzig Jahre wieder. Eine neue französische Debatte über Heidegger und den Nationalsozialismus », in : Neue Zürcher Zeitung, 30.07.2005, Nr. 176, p. 63.
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[7]
Cf. par exemple Flasch, Kurt, « Er war ein nationalsozialistischer Philosoph », in : Süddeutsche Zeitung, 14.6.2005, p. 16. Taureck, Bernhard, « Martin Heidegger und das Ende einer Hermeneutik der Unschul-digsprechung », in : Freitext: Kultur – und Gesellschaftsmagazin, avril 2006, p. 41. Ou encore la recension de Lorenz, Kuno, in : Am Wendepunkt. Deutschland und Frankreich um 1945, Jahrbuch des Frankreichzentrums der Universität des Saarlandes, vol. 7 (2006–2007), pp. 360-363.
-
[8]
Altwegg, J., « Wirkt sein Gift bis heute? », op. cit.
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[9]
Cf. Faye, Heidegger : L’introduction du nazisme dans la philosophie, pp. 511 et 513.
-
[10]
Faye, Heidegger. Die Einführung des Nationalsozialismus in die Philosophie, op. cit., p. 444.
-
[11]
Ce qui n’a empêché l’étude de Faye d’été relativisée comme étant principalement historique cf. par exemple Fried, Gregory, « A letter to Emmanuel Faye », in : Philosophy Today, automne 2011, pp. 219-252.
-
[12]
Faye écrit : « Il n’est […] pas absurde de formuler l’hypothèse que parmi les réseaux cachés du nazisme aujourd’hui encore si mal connus, Heidegger ait pu jouer un certain rôle dans la conception en amont des discours de Hitler » (Faye, 243–244).
-
[13]
Cf. « Une telle œuvre ne peut pas continuer de figurer dans les bibliothèques de philosophie : elle a bien plutôt sa place dans les fonds d’histoire du nazisme et de l’hitlérisme » (Faye, 513).
-
[14]
Reinhard Linde a également attiré l’attention sur le rôle pour la pensée de Heidegger de Friedrich GottlOttilienfeld (1868–1958), de Karl Ernst von Baer (1792–1876) ou encore d’Eduard Spranger (1882–1963). Linde, R., « Devil’s Power’s Origin. Contribution au problème de “l’introduction du nazisme dans la philosophie’ par Heidegger », in : Le Coq héron, n° 205, 2011, pp. 103–118, p. 105.
-
[15]
Bambach, Charles, « Heidegger, der Nationalsozialismus und die Griechen », in : HJB 5, Alfred Denker et Holger Zaborowski (éd.), Freiburg i.B., 2009, pp. 200–208.
-
[16]
Le séminaire « Hegel, über den Staat » (Hegel. De l’État) parut en 2011 comme volume 86 des œuvres dites complètes (Gesamtausgabe ; dorénavant : GA) : Seminare Hegel – Schelling, Peter Trawny (éd.), Frankfurt a. M: V. Klostermann, 2011.
-
[17]
À en croire le journaliste allemand Joseph Hanimann : « Une relecture de fond en comble ne s’impose pas » ; Hanimann, J., « Grundsatzdebatte auf schmaler Basis », Frankfurter Allgemeine Zeitung, 20.06.2005, p. 41. D. Thomä quant à lui note que le livre de Faye « a certes des mérites, mais n’apporte finalement pas grand chose aux lecteurs allemands » : Thomä, D. « Alle zwanzig Jahre wieder », op. cit. Kurt Flasch au contraire est d’avis que « tout est à refaire » : Flasch, K., « Er war ein nationalsozialistscher Philosoph », in : Süddeutsche Zeitung, 14.6.2005, p. 16.
-
[18]
« Von neuem sehen wir, daß ein Staat, der Bestand haben und reifen soll, gegründet sein muß im Sein des Volkes. Das Volk, das Seiende hat ein ganz bestimmtes Verhältnis zu seinem Sein, zum Staat » (HJB 4, 74).
-
[19]
Cf. Hanimann, J., « Grundsatzdebatte auf schmaler Basis », p. 41 : Le couple conceptuel État/peuple est certes, selon le journaliste, une « application hautement problématique » du couple Étre/Étant, mais dans l’ « ordre logique » ce couple ne serait pas « complètement disqualifié » par l’application en question.
-
[20]
Cf. par exemple Grosser, Florian, Revolution denken. Heidegger und das Politische 1919 bis 1969, München, 2011, p. 409. Et dans la presse allemande cf. Henning Ritter qui attribue à Faye une « ardeur inquisitoriale », in : « Aus dem eigenen Dasein sprach schon das Deutsche », Frankfurter Allgemeine Zeitung, 29.10.2005, p. 45.
-
[21]
Thomä, D., « Ausflug in den Abgrund » in : Literaturen, April 2008, pp. 26-29, ici p. 27 : « Vue de loin cette purification de la philosophie des salissures heideggériennes rappelle les actions de purification entreprises par les nazis eux-mêmes ».
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[22]
Voici la formulation en question : « Mais qu’est-ce qui est plus funeste : l’infection nazie de la philosophie ou la philosophie censée exorciser cette infection ? » Ritter, Henning, « Aus dem eigenen Dasein sprach schon das deutsche », in : Frankfurter Allgemeine Zeitung, 29.10.2005, Nr. 252, p. 45. À ce jour seul Reinhard Linde a commenté et attiré l’attention sur le caractère scandaleux de cette prise de position : « Devil’s Power’s Origin », op. cit., pp. 107–108.
-
[23]
Kissler, Alexander, « Alleingehenkönnen. Neues zu Martin Heidegger im Nationalsozialismus », in : Süddeutsche Zeitung, 4.5.2010, p. 14.
-
[24]
Certes deux contributions attirent l’attention sur l’absence totale de fiabilité d’un protocole de séminaire (HJB 5, pp. 56 et 254). En soi cela est juste, mais compte tenu de la politique éditoriale nébuleuse cela s’apparente à de l’hypocrisie.
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[25]
Ainsi Faye écrit-il dans la conclusion de son étude : « Ces fonds devraient être ouverts à tous les chercheurs au nom du droit à la vérité historique » (513). Ce qui lui importe est d’encourager un « débat de fond » et « d’autres recherches » (ibid.). Cf. son appel en faveur de l’ouverture des archives, paru en 2006 dans Le Monde : E. Faye, « Pour l’ouverture des archives Heidegger », in : Le Monde, 05.01.2006, p. 22. Cet appel fut repris sous forme d’une pétition dans la revue allemande theologie.geschichte : http://universaar.uni-saarland.de/journals/index.php/tg/article/view/138
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[26]
Zaborowski, Holger, « “Das Geniale ist zwielichtig’. Hermeneutische Überlegungen zur Diskussion über das Verhältnis Heideggers zum Nationalsozialismus », in : HJB 5, 2009. p. 16 : « Le jugement est porté. Heidegger représente pour beaucoup le “recteur nazi’ ou le “philosophe nazi’ ».
-
[27]
Thiel, Thomas, « Die Verwirklichung des Seins im Staat. Heidegger und der NS im Lichte neuer Dokumente », in : Frankfurter Allgemeine Zeitung, 4.8.2010, p. N3.
-
[28]
Vietta, Silvio, Heideggers Kritik am Nationalsozialismus, Tübingen, 1989, p. 46.
-
[29]
Font exceptions notamment : Quesada, Julio, Heidegger de camino al holocausto, Madrid : Biblioteca nueva, pp. 229–140. Philipse, Herman, « Emmanuel Faye’s Exposure of Heidegger », in : Dialogue, Volume 47, n° 1, décembre 2008, pp. 145–153.
-
[30]
Thiel, Thomas, « Die Verwirklichung des Seins im Staat », op. cit., p. N3. Busche, Jürgen, « Faye über Heidegger. Disparat in Führers Nähe », in : Tageszeitung, 1.4.2009. Geier, Manfred, Martin Heidegger, Berlin : Rowohlt, 2005.
-
[31]
Heidegger, M., Logik als die Frage nach dem Wesen der Sprache, vol. 38 de la Gesamtausgabe, Günter Seubold (éd.), Frankfurt a.M: V. Klostermann, 1998 [cours du semestre d’été 1934]. Heidegger, Sein und Wahrheit, vol. 36/37 GA, Hartmut Tietjen (éd.), 2001 [cours de l’été 1933 et de l’hiver 1933/34].
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[32]
Cette formulation de Heidegger date d’août 1933, il l’a utilisée à l’Institut d’anatomie pathologique de Friburg (vol. 16 de la GA, p. 150) : « Was gesund und krank ist, dafür gibt sich ein Volk und ein Zeitalter je nach der inneren Größe und Weite seines Daseins selbst das Gesetz ».
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[33]
Ainsi Richard Polt affirme-t-il sans autre forme de procès que Heidegger aurait au sortir du rectorat pris ses distances à l’égard de la politique : « Jenseits von Kampf und Macht », in : HJB 5, pp. 155–186, p. 185. Sur ce point il lui aurait fallu prendre en compte le constatation suivante de Faye : En 1935 « un décret du ministère du Reich durcit une directive formulée deux ans auparavant et interdit définitivement aux professeurs de faire de la politique dans leur cours » (Faye, 400). Reinhard Mehring pour sa part déclare sans plus de détails que « le rôle de Heidegger en tant qu’acteur politique se limita avant et après 1933 principalement à la politique universitaire » (HJB 5, 304).
-
[34]
Faye, « Pour un approfondissement des recherches sur le nazisme dans l’œuvre de Heidegger, » in : Dialogue. Canadian Philosophical Review, Cambridge University Press, vol. 47, n° 1, décembre 2008, pp. 167–179. Id., « Being, History, Technology, and Extermination in the Work of Heidegger », in : Journal of the History of Philosophy, Johns Hopkins University Press, vol. 50, n° 1, janvier 2012, pp. 111-130.
-
[35]
Heinz, Marion, « Volk und Führer. Untersuchungen zu Heideggers Seminar Über Wesen und Begriff von Natur, Geschichte und Staat (1933/34) », in : HJB 5, pp. 55-75.
-
[36]
« Der Führerwillen schafft allererst die anderen zu einer Gefolgschaft um, aus der die Gemeinschaft entspringt. Aus dieser lebendigen Verbundenheit geht ihr Opfer und Dienst hervor, nicht aus bloßem Gehorsam und Zwang von Institutionen » (HJB 4, 87).
-
[37]
« Es fehlt ihm noch [dem Volk — S.K.] Gefaßtheit und Kraft zur Verpflichtung an sein völkisches Schicksal » (HJB 4, 74).
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[38]
« Wir aber sollen uns um ein echtes Wissen um den Staat bemühen, damit er unser Wesen bilde und der Staat so Gewalt gewinne » (HJB 4, 70).
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[39]
« Die höhere Bindung schafft höchste Freiheit, während Ungebundenheit negative Freiheit ist » (HJB 4, 88).
-
[40]
Sur cet aspect, il n’y a jusqu’à présent que très peu d’études. Parmi les exceptions : Linde, R., « Devil’s Power’s Origin », op. cit. : Heidegger aurait, selon Linde, « présenté ses intentions principalement dans des textes extrêmement et volontairement obscurs » (p. 103). Waite, Geoffrey, « Heidegger, Schmitt, Strauss : The Hidden Monologue, or, Conserving Esotericism to Jusitify the High Hand of Violence », in : Cultural Critique n° 69, 2008, pp. 113–144, p. 116: « bedrock agreement on the necessity of esotericism to conserve order of rank ».
-
[41]
Blochmann, Elisabeth & Heidegger, Martin, Briefwechsel 1918–69, Joachim Storck (éd.), Marbach am Neckar : Deutsche Schillergesellschaft, 1989, p. 46. Lettre du 30.12.1931. « Für uns, die wir nur redend erziehen, ist es eine besondere Frage, wie u. wieweit wesentliche Dinge gesagt werden sollen. In diesem Semester mache ich wieder die Erfahrung, die mich immer wieder beunruhigt, daß das indirekt Gesagte am sichersten einschlägt u. daß wir immer noch zu sehr die Macht des Vorbildes unterschätzen u. zu wenig im Dienste des wahren Vorbildens arbeiten ».
-
[42]
Cf. sur le reproche récurrent d’approche inquisitoriale note de bas de page n° 20 ainsi que Hanimann, Joseph, « Wie Heideggers Zukunft aussieht », in : Frankfurter Allgemeine Zeitung, 5.2.2007, p. 35 : « l’obsession » de Faye « de tout associer au national-socialisme ».
-
[43]
Kissler, Alexander, « Alleingehenkönnen », op. cit., Süddeutsche Zeitung, Nr. 101, 4 mai 2010, p. 14. Cf. sur ce point Thiel, Thomas, « Die Verwirklichung des Seins im Staat », in : Frankfurter Allgemeine Zeitung, 4.8.2010, p. N3. « Ce passage [sur les nomades sémites — S.K.] autorise une lecture antisémite, sans pour autant que celle-ci soit nécessaire ».
-
[44]
Heidegger, « Vom Wesen der Wahrheit », in : Sein und Wahrheit, vol. 36/37 de la GA, Hartmut Tietjen (éd.), 2001, pp. 90–91. [cours de l’hiver 1933–34].
-
[45]
Drumont, Edouard, La France juive, 1er Tome, Paris : C. Marpon & E. Flammarion, 1886, p. 186. Cf. sur ce point Benz, Wolfgang, « Der ewige Jude » : Metaphern und Methoden nationalsozialistischer Propaganda, Berlin : Metropol, 2010. Ou encore Aschheim, Steven E., « “The Jew Within’. The Myth of “Judaization’ in Germany », in : Jehuda Reinharz/Walter Schatzberg (éd.), The Jewish Response to German Culture : From the Enlightenment to the Second World War, Hanover, NH 1985, pp. 212–241.
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[46]
« Die Höhe des menschlichen Bewußtseins birgt in sich die Möglichkeit des tiefen Verfalls in Bewußtlosigkeit. In der ständigen Ohnmacht der Bewußtlosigkeit und Gewissenlosigkeit sinkt der Mensch unter das Tier herab ». Les dangers auxquels doivent faire face le Führer et son peuple sont d’une part la « mort », d’autre part le « diable », c’est-à-dire, explique Heidegger, le « Abfall vom eigenen Wesen » (HJB 4, 76 et 77).
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[47]
Cf. sur ce point Skinner, Quentin, « Meaning and understanding in the history of ideas », in : Id., Visions of Politics, vol. 1 : Regarding Method, Cambridge, 2002 [1969], pp. 57–89.
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[48]
Il est question de « séduction », d’ « erreur fatidique » (Ohashi, 195), de « fourvoiement » (Trawny), de « brève excursion dans la caverne » suivie d’un retour à la lumière (Polt, 184).
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[49]
Cf. l’autoportrait de Heidegger après le guerre : « Si je ne suis plus venu dans votre maison depuis 1933 ce n’est pas parce qu’y vivait une femme juive, mais parce que j’avais tout simplement honte ». Lettre à Karl Jaspers du 7 mars 1950.
-
[50]
Cf. sur ce point la présentation condensée dans : Kellerer, Sidonie, « Quand Heidegger réécrit son histoire », in : Philosophie Magazine, numéro spécial consacré à « Philosophie et nazisme », février 2012, pp. 72–76. L’analyse détaillée est à paraître à l’automne : Kellerer, S. : « Un avatar idéologique ou le maquillage d’un texte. À propos d’une conférence de Heidegger de 1938 », in :E. Faye (éd.), Heidegger : le sol, la communauté, la race, Paris : Beauchesne [à paraître].
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[51]
Ainsi, et pour ne donner qu’un exemple, la conférence qu’il donna à Zurich le 18 janvier 1936, « Das Dasein und der Einzelne » et celle donnée le 7 juin 1941 « Zur Geschichte des Existenzbegriffs » ne sont — presque 60 ans après la fin du régime nazi — toujours pas publiées.