Corps de l’article
Demandez un référendum, la campagne des élections présidentielles vous offre cette possibilité. Certains parlent même d’un référendum sur les projets, le terme est galvaudé et renvoie à un imaginaire particulier des institutions de la Ve République[1]. La Constitution rappelle bien qu’à côté de la désignation des représentants, le référendum est possible. Il était au départ cantonné à des questions constitutionnelles, mais la loi du 4 août 1995 a étendu son champ à des grandes questions sociales engageant l’avenir de la nation. L’invocation du référendum est à apprécier selon l’importance du candidat et ses ressources au sein du système représentatif (soutien d’un parti représenté au Parlement). Plus le parti est contestataire et plus il aura tendance à faire appel au référendum. Le Front National en a même fait une méthode de gouvernement pour rendre la parole au peuple. Marine Le Pen propose entre autres un référendum constitutionnel transformant les institutions et établissant un mandat présidentiel de sept ans non renouvelable. Le référendum est ici associé à une souveraineté retrouvée à l’image du référendum organisé sur le projet de traité constitutionnel en 2005.
La président-candidat, Nicolas Sarkozy, a surpris l’opinion publique en promettant deux référendums, l’un portant sur le système d’indemnisation-chômage et l’autre sur le droit des étrangers. De son côté, François Bayrou propose un référendum pour moraliser la vie publique et retrouver les fondamentaux du débat démocratique. François Hollande prend le contrepied de cette démarche en tablant davantage sur le renouveau de la représentation politique et la clarté des fonctions : la fin du cumul des mandats, la responsabilité pénale du chef de l’État, la restauration de la démocratie sociale et l’introduction d’une dose de proportionnelle seraient ses innovations institutionnelles. En d’autres termes, il souhaite l’émergence de corps intermédiaires permettant d’atténuer ce dialogue illusoire institué entre le monarque républicain et le citoyen français. C’est en retrouvant un État impartial et un bon fonctionnement des institutions que la confiance des citoyens reviendra et non par des référendums susceptibles de figer les évolutions. Éva Joly renoue avec une tradition très forte de démocratie directe des écologistes avec des taux très bas de recueil de signatures pour les initiatives populaires. Jean-Luc Mélenchon souhaite quant à lui une nouvelle Constitution adoptée grâce à une assemblée constituante, le référendum d’initiative y est présent avec la valorisation de ce qu’il nomme « l’implication populaire ». Marine Le Pen propose d’introduire le référendum d’initiative populaire dans la Constitution. Nicolas Sarkozy avait néanmoins avancé dans cette direction avec l’instauration de l’initiative populaire nationale dont le décret d’application vient d’être entériné récemment. Aurons-nous pour autant des référendums durant le prochain quinquennat ? Fort probable en raison du marasme économique et du lien distendu entre les représentants et les électeurs. Si un référendum bien construit a des effets positifs en termes de légitimité, il ne faut pas oublier que l’efficacité du référendum dépend paradoxalement de la consolidation du régime représentatif. Plus un régime représentatif est solide et plus le référendum apparaît davantage orienté sur la question posée. L’initiative populaire reste encore un vœu pieux même s’il existe un droit d’initiative non contraignant à l’échelon local. Pourtant, l’initiative citoyenne existe au niveau européen, mais les opinions demeurent très nationales et cet instrument n’a pas le relief qu’il devrait avoir. Les associations et les syndicats de plusieurs pays européens gagneraient à s’associer pour secouer le Conseil européen et venir troubler les arrangements intergouvernementaux.
Parties annexes
Note
-
[1]
Voir à ce sujet dans la même revue « Les promesses de rénovation institutionnelle des candidats à la présidentielle » (article de février 2007), « Les instruments de la démocratie » (article de novembre 2007) et « La contrainte référendaire ou la perturbation du système référendaire » (article de juin 2007).