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Médias citoyens : un enjeu social et démocratique majeur[Notice]

  • Thierry Borde

La même passion qui guidait les pas des pionniers des radios pirates ou des premières télévisions participatives à la fin des années 1970 caractérise aujourd’hui les créateurs de médias web 2.0. Une même quête les anime. Celle de l’émancipation citoyenne à travers la mise en place d’une autre information, qui ne soit pas celle du « système » dominant, et par le développement de médias de communication sociale considérés comme outils d’éducation populaire. Le vingtième siècle a vu la communication audiovisuelle supplanter la communication écrite qui dominait la sphère informationnelle depuis bien longtemps. Les évolutions technologiques dans le domaine du numérique et de la mise en réseaux des données sont en train de dessiner un nouveau modèle de médias pour le XXIe siècle. Dans le domaine des médias, la remarquable vision de Manuel Castells lorsqu’il écrit la Société en Réseaux en 1996, se concrétise aujourd’hui par la création de nouveaux médias « web » intégrant différents supports et par l’évolution de médias existants vers des formes « on line ». Depuis, le caractère interactif que souligne Castells s’est encore accru avec l’apparition du web 2.0. Ces potentiels d’interaction impactent dès lors directement la capacité des médias à générer et à gérer des flux de plus en plus complexes d’informations, mais aussi à tisser des liens de proximité de plus en plus affirmés avec leurs publics. Si l’on voit déjà les horizons commerciaux qui se découvrent pour les médias les plus intéressés, l’on peut aussi imaginer l’ampleur des possibles pour des médias citoyens qui font de la communication sociale, de l’éducation populaire, de la mise en réseau et du lien social des objectifs premiers. Ces derniers sont des acteurs citoyens pour lesquels le média reste quoiqu’il en soit une forme, un vecteur au service d’un message qui prend son sens dans l’interrelation entre émetteur et récepteur et dans un jeu interactif de production et de diffusion. A l’opposé de la définition des médias dominants, médias du spectacle, que propose Neil Postmann, reprenant l’aphorisme de Marshall Mc Luhan : « le media est le message », les médias citoyens proposent dans leurs pratiques une distanciation qui rend au média sa vocation de simple outil. Qu’il soit radiophonique, télévisuel, écrit ou autre, le média citoyen est tout d’abord un média et, en tant que tel il produit des contenus informationnels, culturels, de divertissement etc. Il est citoyen parce qu’il assume pleinement le rôle sociétal que son statut lui impose. Citoyen encore parce qu’il établit de ce fait une relation particulière avec son public-acteur. Ce qui caractérise toutefois le mieux un média citoyen est son originalité. Chaque projet est spécifique et se construit en adéquation avec son objet, son territoire, les acteurs qu’ils rassemble. Le manque de cadre légal et financier de la majeure partie du secteur est aussi jusqu’alors le premier moteur d’une remarquable créativité. Quelques grands axes peuvent néanmoins être tracés pour commencer de dessiner les contours de ces médias du « tiers secteur ». Ils sont porteurs d’une vision spécifique de la production et de la diffusion de contenus : Entre vision traditionnelle de la presse, revenue aux valeurs fondamentales de la déontologie journalistique, et vision de l’utilité sociétale du média, entre « critique anti-hégémonique » et « critique expressiviste », les médias citoyens se caractérisent par des objectifs et des pratiques où priment soit la production d’informations, soit les processus de participation citoyenne. Mais il ne s’agit pas, comme le proposent Dominique Cardon et Fabien Granjon, d’une opposition entre deux types de médias, chaque média citoyen porte en lui les deux tensions à la fois mais crée son équilibre selon …

Parties annexes