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Toute histoire n’a pas son début et sa fin. Il en est dont les événements ne s’inscrivent pas dans une simple continuité et qui progressent par associations d’idées circulaires. La scène considérée comme son dénouement y sonnent faux, incomplets, car ce sont des histoires que nous portons en nous tel un sentiment indicible dont nous ignorons l’origine sans avoir pour autant envie de la connaître, pressentant que la connaissance des faits figera la couleur de nos émotions. S’il faut pourtant commencer cette histoire-ci quelque part, commençons-la par une certaine nuit sans lune de juin 1903, où Michał Grzegorz Garapich — propriétaire de terres à Cebrów et ses alentours dans le district de Tarnopol et député à la Diète de Galicie et au Conseil d’État de Vienne —, deux de ses fils — Kazimierz, 25 ans, et Paweł, 21 ans —, son majordome Jan et quelques autres domestiques partent en direction du cimetière munis de pelles et de pieds-de-biche. Ils ne vont pas à un enterrement, c’est même le contraire : ils vont procéder à une exhumation.
Cela faisait déjà quelque temps que Michał Grzegorz nourrissait l’intention de transférer son père Władysław et son frère Stanisław du cimetière contigu à l’église uniate du village dans la chapelle récemment édifiée à proximité de son manoir de Cebrów, sur la route de Worobijówka, le village voisin. Les raisons qui l’avaient amené à considérer qu’ils méritaient une nouvelle sépulture jettent un éclairage sur l’homme qu’il était, sur ses idées, mais surtout sur l’héritage confus qu’il a laissé à ses descendants. C’est un imbroglio de motivations parfois contradictoires, que l’on peut comprendre si on les remet dans le contexte de son époque. Au fil des années, elles sont aussi devenues un récit codé et ambigu qui circulait dans la mémoire, à déchiffrer par ses descendants pour pouvoir donner un sens supra-individuel à leurs propres actes, en particulier quand leurs recherches étaient accompagnées des grondements du monde en train de s’écrouler autour d’eux, leur monde. La réponse à la question de savoir pourquoi Michał a pris la décision d’exhumer les corps de son frère et de son père ne constitue donc pas uniquement la cause première de ce qui s’est produit ensuite. C’est plutôt ce même refrain de la peur de transgresser les lois de la vie et de la mort repris par les êtres humains aux prises tant avec la Grande Histoire marquée par les fosses de tir creusées dans les vieux parcs qu’avec cette petite histoire cachée derrière le rire d’un enfant qui franchissait le seuil du manoir de Cebrów. Membre des Podolak, groupe conservateur rassemblant les grands propriétaires fonciers au sein de la Diète de Galicie, et donc hostile aux réformes du droit électoral réclamées par les socialistes et les libéraux, et condamnant les aspirations politiques de la population paysanne, juive et ukrainienne, Michał Grzegorz n’était pas vraiment ce qu’on appelle un démocrate et, de toute évidence, voir les Garapich défunts voisins de cimetière des villageois ordinaires le dérangeait. Fréquentant les salons austro-hongrois, il pressentait dans le même temps les changements à venir et c’est peut-être bien le vent de l’histoire qui l’a poussé à cette exhumation. Dans son esprit, en effet, il fallait souligner à nouveau les divisions sociales, mises en cause avec une forte recrudescence par les révolutions, et rappeler aux Cebroviens les limites entre un propriétaire noble et un paysan. Certains événements antérieurs ont pu aussi jouer un rôle dans sa décision, cela n’est pas exclu. Six ans plus tôt, les élections au Parlement autrichien, auxquelles avait participé pour la première fois la classe paysanne pauvre, s’étaient terminées sur un scandale : pour la première fois, le peuple s’était élevé contre un Garapich et le staroste du district de Tarnopol avait dû faire appel à l’armée pour mettre fin à l’occupation du bureau de vote par les mécontents du résultat du vote des paysans. Ces troubles étaient liés à la propagande des activistes ukrainiens, mais l’incident avait assombri les relations entre le manoir et le village.
La décision de construire cette chapelle funéraire fut lourde de conséquences, non seulement cette nuit-là et le jour suivant, mais aussi des années et des décennies plus tard. Elles suivront leur lent cours tout au long du xxe siècle, se faisant sentir ici et là tantôt avec douceur, tantôt avec violence, et, à un certain moment, elles me réveilleront, moi aussi. Michał se doutait probablement que ce qu’il faisait n’était pas une plaisanterie et était susceptible d’avoir des suites graves. Ce n’est pas seulement que le nouvel endroit s’est révélé plutôt mal choisi vu que Cebrów a été traversé pendant les deux grandes guerres par des fronts et des armées qui semèrent la destruction sur leur passage. Cette fameuse nuit de juin, Michał ne pouvait pas le savoir, mais comme il attachait à la fois de l’importance aux détails qui faisaient d’un grand propriétaire terrien un grand propriétaire terrien et connaissait le peuple de Cebrów, il pouvait pressentir les conséquences d’une nature différente, plus magique, liées à l’exhumation. Dans cette partie du monde, ouvrir une tombe et en extraire un défunt enfreint un important tabou de la mort, selon lequel les défunts méritent avant tout de reposer en paix dans une sépulture qui doit demeurer inviolée. Ce n’est pas un hasard si l’épitaphe gravée sur la tombe de son grand-père arrivé des Balkans, appelé lui aussi Michał, dit : « Paix à son corps ». Non pas à « son âme », mais bien à « son corps ». L’ouverture d’une tombe, peu importait le but, devait se solder tôt ou tard par l’intrusion des morts dans le monde des vivants, ce qui exigeait réparation de la part de ces derniers, éventuellement la prise de certaines mesures de prévention. Aussi Michał voulait-il dissimuler son intention aux Cebroviens. Autrement, ils ne seraient pas partis pour cette escapade sous le couvert de la nuit. Ce n’était pas pour des considérations administratives, bien que, en tant qu’agent public de Galicie, il ait été assurément conscient de la réglementation relative à l’exhumation et au transfert de défunts. Étant un homme influent, il savait qu’il était possible de régler ce genre de choses sans s’embarrasser des formalités. Son fils Paweł, dans ses mémoires rédigés cinquante ans plus tard, évoque la situation en ces termes :
Papa désirait transférer dans ce tombeau les dépouilles de son père et de son frère inhumées dans le cimetière de Cebrów. Il sollicita auprès du staroste du district de Tarnopol l’autorisation d’exhumer leurs corps, mais le staroste lui dit que l’obtention de semblable autorisation officielle était liée à de multiples tracasseries et à la venue sur place d’une commission spéciale, et que pour éviter cela, il lui conseillait de transférer discrètement les corps sans demander d’autorisation, en veillant juste à prévenir toute dénonciation malveillante. Les corps ayant été enterrés plusieurs dizaines d’années auparavant, leur exhumation ne pouvait pas entraîner de contamination, aussi papa résolut-il de suivre le conseil du staroste.
L’oncle Paweł — c’est comme cela qu’on l’appelle dans la famille — ne dit pas la vraie raison de ce déménagement de ses ascendants, mais comme dans ses mémoires, ainsi que j’allais le découvrir, le silence est aussi éloquent que ce qu’il écrit, sinon plus, toute cette entreprise tournait en fait autour du prestige de la famille, qui serait conforté par un tombeau digne du rang auquel elle aspirait. Que des Garapich reposent dans la même terre qu’un Olejnik, un Świrski ou un Bodnar avait de toute évidence un trop fort parfum de socialisme et sentait trop la mode cracovienne qui voulait que les propriétaires terriens se marient avec des paysannes[1]. Par ailleurs, chez Michał, représentant de seulement la deuxième génération d’immigrés liés avec des familles de la noblesse polonaise par le destin et par leurs relations haut placées auprès du pouvoir habsbourgeois, la position sociale et ses attributs étaient un point sensible. Le silence de l’oncle Paweł signifie que la chose allait de soi.
Les portraits de Michał brossés à l’époque témoignent de sa sensibilité aux détails à partir desquels on bâtissait son prestige. Ils soulignent ses manières irréprochables, citent souvent sa moustache grise en croc. « Toujours vêtu avec élégance de costumes coupés par un tailleur viennois, il soigne son apparence, en particulier ses mains, manucurées, qu’il protège du hâle en ne quittant jamais ses gants », se souvient Paweł, et le journal socialiste cracovien Naprzód souligne pour sa part que c’est « un député chargé de missions spéciales, un homme de très belle prestance, à la belle moustache aristocratique ». Ignacy Daszyński[2] lui-même, dans les colonnes de Krytyka, attaque les Podolak en prenant pour cible Michał : « Ce Garapich a tout d’un homme d’État polonais. Sa superbe moustache polonaise, sa silhouette d’homme parfaitement nourri, son magnifique manteau au col en mouton de Perse noir font de lui, sur les clichés des photographes de Vienne, le type sublime du noble polonais. » Cette entrée en matière n’est qu’un leurre car on lit plus bas : « Sauf que noble, il ne l’est pas, et que son père était encore un avocat de ville insignifiant. À la deuxième génération, le fils est devenu le modèle de l’aristocrate polonais. Je connais des fils de cuisinier devenus des nobles tout ce qu’il y a de plus typique pour avoir prospéré sur la Podolie, sur sa merveilleuse grasse terre noire, sur la soumission de leurs sujets paysans ruthènes. Tous tutoyaient leurs voisins, chassaient avec des lévriers, jouaient aux cartes, faisaient commerce de chevaux et — ce qui, en toute sincérité, ne manquait pas de m’étonner — croyaient sincèrement aux blasons qu’ils s’étaient appropriés, tellement sincèrement qu’ils mettaient dans l’embarras les authentiques détenteurs de ces blasons. » Socialiste qui considérait les Podolak comme « les descendants de Targowica[3] » et comme un poste avancé du nationalisme polonais naissant et du Parti national-démocrate abhorré, la ND, Daszyński se montre peut-être exalté et volontiers cancanier dans ses polémiques, mais sa vision était certainement juste sur un point. Lévriers, cartes, chevaux, blasons, c’est là-dessus que s’édifiaient le prestige et le statut qui distinguait le noble du paysan, car la noblesse, c’est ce que l’on fait et non pas qui l’on est. Comme il l’écrit, « en Podolie galicienne, cette “noblesse” se fabrique toute seule, à travers le riche tchernoziom, à travers la soumission du paysan, à travers les titres donnés par les laquais et les youpins des bourgades de Podolie. On en arrive à ce que sur leurs tombes, ils brisent ces faux blasons avec tout un sérieux triste et tragique ! » La mention « sur leurs tombes » est ici particulièrement importante ; l’un des endroits où l’on peut inscrire son prestige dans la pierre, c’est le tombeau de famille. Préoccupé par le souffle des idées nouvelles, peut-être résigné à leur fatalité, Michał avait décidé de veiller à ce que les mieux nés soient aussi les mieux enterrés. Comme l’indiquent les piques de Daszyński, en Galicie circulaient des commérages sur l’origine obscure des Garapich, et c’est sans doute la raison pour laquelle Michał avait des choses à prouver, à lui-même et à ses contemporains.
Comme il est apparu par la suite, la décision de construire la chapelle fut le point de départ d’un voyage des restes des Garapich qui se poursuit jusqu’aujourd’hui. Évidemment, en 1903, Michał ne pouvait pas imaginer les événements qu’allait apporter le xxe siècle ni que la chapelle funéraire en serait, toutes proportions gardées, victime. Comment aurait-il pu savoir que cette exhumation menée en cachette sous le couvert de la nuit allait marquer le début d’une série d’événements et d’une succession de situations, rencontres et sentiments en relation avec elle, dont l’axe serait la proximité entre les Garapich et leurs cousins paysans, ce tissu d’interactions personnelles qui fut déchiré symboliquement cette nuit-là ? Comment donc aurait-il pu savoir qu’en transgressant le tabou de la mort, il allait à son insu provoquer une odyssée dont le dernier chapitre, cent douze ans après, serait la construction d’un autre tombeau de famille, beaucoup plus modeste, bien sûr, de retour dans le cimetière de Cebrów, ainsi que ce jour d’août 2015 où des Garapich se sont de nouveau trouvés contraints de tergiverser entre leur sentiment de proximité avec les Cebroviens, l’Ukraine et la Podolie, et la rupture de leur lien avec eux, et où, à cause de ce qui fut ce jour-là à la fois un bonheur et une catastrophe, ont choisi les deux ? Tout cela, mon arrière-arrière-grand-père ne pouvait pas le savoir, mais les événements de la nuit évoquée et ceux du lendemain montrèrent que la rupture de la communauté des défunts, alors commencée, allait donner le ton à la distance ultérieure, de plus en plus radicale, qui s’est créée entre le monde des descendants de Michał et celui des Cebroviens.
C’est ainsi qu’ils sont partis pour le cimetière en cette nuit de juin.
Vers les deux heures du matin d’une belle nuit tiède de juin, écrit l’oncle Paweł, nous nous rendîmes au cimetière accompagnés de quelques domestiques de confiance. On dégagea l’entrée du caveau pour en sortir les cercueils. De l’eau s’était à l’évidence infiltrée dans le cercueil de grand-père, ce qui le rendait très lourd, et nous avions du mal à le porter même à six. Le cercueil de l’oncle Stanisław, lui, était tout à fait léger ; pendant son transport, on entendait les os s’entrechoquer en glissant d’un bout à l’autre du cercueil.
Le plan d’ouvrir le caveau nuitamment sans attirer l’attention de quiconque fut néanmoins voué à l’échec. En effet, « tandis que le cortège funèbre passait le long du village de Cebrów, un voisin vint à sortir dans la cour de sa chaumière et là fut frappé de terreur à la vue des deux cercueils et du cortège d’accompagnement. » L’affaire fut donc révélée aussitôt. Ici apparaît l’une des énigmes clés de cette histoire. Dès le lendemain, était célébrée une messe pour les âmes des défunts « à laquelle furent conviés quelques dizaines de métayers importants de Cebrów », soit approximativement — si l’on admet que chacun d’eux s’y est rendu avec sa famille — la moitié au moins du village. La transformation du transfert clandestin des cercueils en un rituel de funérailles public organisé au plus vite avec la participation des paysans « importants » est frappante. Michał avait certainement compris qu’il devait tirer profit du conseil du staroste du district de Tarnopol de « prévenir toute dénonciation malveillante » et rendre l’affaire publique en lui conférant une dimension religieuse. Il a voulu, par ce moyen, effacer la mauvaise impression que la transgression du tabou de la mort par un propriétaire noble pouvait faire auprès des Cebroviens. Qui plus est, les cérémonies revêtent un caractère exceptionnel puisque Michał invite ensuite ces « métayers importants » à un banquet organisé au manoir selon le rituel d’inversion des rôles — si l’on en juge d’après le récit de l’oncle Paweł —, où le monde est mis temporairement sens dessus dessous, où l’on assiste à une inversion provisoire de la hiérarchie du pouvoir. Voici comment Paweł le raconte : « Tel fut le genre de souvenirs dont les parents dotèrent plusieurs dizaines de fermiers. L’office fut suivi d’un repas au manoir. Les parents et les villageois invités prirent place autour d’une table dressée en fer à cheval. Nous, les jeunes, n’étions pas à table, nous aidions au service des plats, veillant à ce que chacun des fermiers ait bien tout ce dont il avait besoin. » Témoigne du fait qu’on peut parler d’un tel rituel la réaction de ceux que cette inversion des rôles n’englobait pas, même pendant un moment, mais qui étaient proches des paysans du point de vue de leur statut, autrement dit la domesticité du manoir et, plus concrètement, le majordome. Ainsi que l’écrit Paweł :
Notre intervention était apparue fort souhaitable en raison des diverses maladresses commises par le majordome Jan qu’il nous fallait masquer. Il se sentait blessé au plus profond de sa dignité qu’on lui ait ordonné de servir des rustres, à lui qui se prenait pour quelqu’un de bien mieux qu’un paysan. Il manifestait sa mauvaise humeur en posant les assiettes avec brusquerie, au risque de les casser, et, de plus, n’arrêtait pas de faire des remarques désobligeantes à ceux de nos hôtes qui faisaient mauvais usage, qui de son couteau, qui de sa fourchette, ou ne savaient pas à quoi sert une serviette. Il leur faisait la leçon en leur rappelant aigrement que c’étaient des choses à connaître si on voulait manger au manoir. Nous nous efforcions de compenser ces grimaces du vieux Jan en redoublant d’amabilité envers nos invités, nous leur présentions les plats, remplissions leurs verres.
Le banquet de ce mois de juin a été un événement exceptionnel. Il n’est fait mention nulle part ailleurs dans les mémoires de Paweł de quelque autre occasion où les Garapich auraient invité « les métayers » de Cebrów à partager leur table d’égal à égal, tout simplement parce que la chose était inconcevable, d’où le côté exceptionnel de ce repas, son caractère rituel. L’ordre du monde et la hiérarchie de ce village de Podolie sont pendant un moment suspendus. Mais c’est se leurrer que de penser que ce rituel abolit le pouvoir, que c’est un moment de célébration de la grande communauté des égaux. Sa fonction est de réactiver les limites. En instaurant brièvement le chaos tellement intolérable aux yeux du majordome, Michał a rappelé aux participants au banquet la nécessité de l’ordre et le caractère naturel des inégalités sociales. Une fois passé ce moment de chamboulement de la hiérarchie du pouvoir, les anciennes limites ont été reconstituées et par là consolidées.
La description de l’atmosphère du banquet présentée par Paweł laisse transparaître çà et là ces limites : « Les fermiers se comportaient très convenablement, ils discutaient avec animation. Il y avait parmi eux quelques anciens qui avaient connu le servage et, d’après ce qu’ils racontaient, ils en gardaient plutôt un bon souvenir, loin de la haine à laquelle on pouvait s’attendre. » C’est le seul endroit où Paweł, dans ses mémoires de plusieurs centaines de pages, mentionne le servage. Dans cette scène du rituel d’inversion des rôles se rejouent, en effet, les récits et les mythes fondateurs de la communauté, comme celui d’un âge d’or, d’un temps où tout était ordonné, où la Révolution française, les rêves d’égalité, les libéraux n’existaient pas ; où le lion et l’agneau étaient couchés côte à côte — le premier dévora peut-être quelque agneau de temps en temps, mais, d’une manière générale, la structure du monde du village de Cebrów était demeurée inchangée depuis l’époque où les premiers cultivateurs à avoir compris la valeur de cette terre noire avaient commencé à l’ensemencer et la labourer. Le rappel du servage ne signale pas seulement que le temps rural inaccompli s’écoule en suivant un cours ralenti, à l’écart, et que l’Histoire est marquée par les événements cycliques ayant trait à la terre et à ses récoltes et non pas par les spasmes de dates et de catastrophes touchant les hommes, qui se produisent d’une façon linéaire. C’est aussi une indication sur le fait que Paweł était l’héritier des idées de son père, que c’était un ultraconservateur et un patriarche qui, quand il citait l’époque du servage, notait que les serfs voyaient quand même de bons côtés à leur condition. Certes, les temps n’étaient plus les mêmes, le souffle du nouveau arrivait à Cebrów, et lévriers et cartes allaient très bientôt être emportés. Mais chez Paweł, derrière la nostalgie de sa Podolie perdue est dissimulée, non sans maladresse, une évidente nostalgie de la position sociale perdue du souverain dont dépendent la vie et la mort en ce bas monde et qui décide qui est un noble, qui est un paysan et, plus important encore, comme j’allais le découvrir, qui est un frère, une soeur, un fils et une fille.
Ainsi, les paysans de Cebrów se trouvaient attablés à la table du manoir dressée en fer à cheval et les héritiers Garapich et les majordomes les servaient, leur versaient de la vodka et leur présentaient les plats de viande pendant qu’ils évoquaient l’époque du servage comme le bon vieux temps. Ce qui avait donné à Michał l’idée de clore sous pareille forme la délicate affaire de cette exhumation sauvage est clair. Il ne s’agissait pas uniquement de s’assurer que personne n’irait le dénoncer. La rupture, par la transgression du tabou de la mort, du lien entre les Garapich non vivants et leurs voisins de cimetière paysans également non vivants n’exigeait pas seulement la couverture religieuse d’une messe pour les âmes des défunts, elle exigeait aussi le renouvellement des liens entre les vivants. Elle exigeait le rappel simultané de la relation symbiotique et parasitaire entre l’aristocratie terrienne et la paysannerie, il fallait montrer qui était le maître. La mort, la tombe symbolisent l’égalité ultime de toutes les créatures, égalité à laquelle les cultivateurs étaient sensibles parce qu’il n’y a rien de plus symbolique que partager la même terre dans laquelle sont absorbés les tissus humains et dont la nature marneuse et argileuse suggère l’idée inquiétante que les corps sans vie prolifèrent peut-être dans le sol en transmettant l’omniprésence de la mort même au vert intense des tilleuls et à la rousseur de la queue des renards. Cependant, au début du xxe siècle, au temps des grondements des révolutions, cette égalité devant la tombe pouvait se rapprocher dangereusement de l’égalité des vivants. Aussi l’atteinte portée à l’égalité devant la mort exigeait-elle une action parallèle qui l’efface de la vie. Telle était la fonction du rituel organisé par Michał.
Dicté par le désir de rehausser le prestige de la famille, le déplacement des ancêtres Garapich ne pouvait manquer de susciter chez les Cebroviens des sentiments mêlés. Les uns le comprenaient, car un propriétaire noble doit en fait posséder les attributs de son état — blason, nom, chevaux, lévriers, caveau de famille —, mais le propriétaire noble est aussi un cultivateur, le sel de cette terre, un concitoyen, et tous sont égaux devant Dieu, c’est ce qui est dit du haut de la chaire, sans parler du souffle de la démocratie, de la voix du peuple qui, dans ces régions, se faisait de plus en plus entendre, surtout en ukrainien et en yiddish. Dans le contexte de ce qu’il advint plus tard des dépouilles et de la chapelle, il est certain que plus d’un, à Cebrów, dut marmonner en hochant la tête que tout ça pourrait bien causer quelque malheur, et des années plus tard, déjà après les deux guerres mondiales, a pu s’interroger sur le sens de ce transfert et se demander si ce n’était pas le prix à payer pour avoir troublé la paix des morts : tout ce qui s’était produit par la suite ne remontait-il pas à la sépulture initiale, où un Garapich reposait à côté de ses voisins paysans sans se montrer spécialement supérieur ? Le banquet commun et le rituel d’inversion des rôles avaient reproduit cette égalité, mais seulement l’espace d’un instant, d’un moment, car les temps où les nobles se penchaient avec bienveillance sur le sort des paysans — cela n’était pas dicté par les nouveautés occidentales, mais par la volonté de leur rappeler où était leur place — commençaient à s’éloigner lentement du monde de l’ordre naturel des choses pour entrer dans la sphère historique de la loterie du destin. À la fin de sa narration, Paweł exprime un espoir ô combien révélateur, trompeur : « L’exhumation des dépouilles appartenait désormais au passé et n’a pas eu d’autre suite. » L’oncle Paweł me semble conjurer ici la réalité pour dissimuler son embarras et sa peur. Car au moment où il écrit ces mots, il sait que tout ce décorum associé à la position des propriétaires nobles, ces chapelles et ces gants protecteurs contre le hâle, couraient alors à leur fin. Peut-être refoule-t-il l’idée, sombre à ses yeux, qu’il existe un quelconque lien teinté de justice historique entre la gratitude feinte des anciens serfs et son sort de retraité qui, au milieu des années cinquante du xxe siècle, tire le diable par la queue à Puławy, dans une petite pièce en sous-location, sans avoir même de quoi s’acheter du tabac.
Un peu plus de dix ans après l’exhumation, le monde ne ressemblait plus guère à celui qu’il était à l’été 1903. L’orage qui s’était déclenché dans les contrées d’origine des Garapich, les Balkans, ne tarda pas à arriver à Cebrów. La proximité des voies ferrées se révéla une malédiction — le front traversa le village à plusieurs reprises, des trains blindés circulaient dans les deux sens, le manoir et la chapelle furent bombardés, c’était un défilé permanent de troupes, autrichiennes, allemandes et russes, qui parlaient toutes les langues ; stationnèrent des détachements de Chinois, de Cosaques, de montagnards du Caucase, de bolcheviks, de légionnaires polonais, qui, dans le vieux parc entourant le manoir, creusaient des kilomètres de tranchées et de fosses de tir, abattaient des arbres et ensevelissaient les morts n’importe où : au milieu des rosiers de grand-mère Laura, dans le bosquet de sapins ou juste devant la fenêtre du grand salon, l’endroit où avait été probablement dressée la table du banquet. Avec les briques de la chapelle à moitié détruite, des soldats autrichiens construisirent des latrines ; d’autres en sortirent les cercueils et, à la recherche de bijoux, sondèrent les restes des Garapich. En 1917, Michał mourut à Cracovie sans avoir vu la fin de la guerre et celle du régime des Habsbourg, auquel les Garapich étaient fidèles depuis cinq cents ans — « Il se pencha pour renouer son lacet et s’écroula. Il était mort ! », comme le note laconiquement dans ses mémoires sa petite-fille Eleonora, qu’on appelle dans la famille tante Ella. Après la Première Guerre, Kazimierz, le fils aîné de Michał, fit reconstruire en partie la chapelle de Cebrów, mû par le projet d’y transférer son père provisoirement enterré au cimetière Rakowicki de Cracovie. Il est possible qu’il se soit demandé s’il ne devait pas attribuer à une quelconque malédiction le fait d’être un nouveau Garapich à avoir à s’occuper de l’exhumation de son propre père. Ce projet fut toutefois abandonné pour des raisons qu’on ignore.
« Et ce fut une bonne chose puisque encore aujourd’hui, ses cendres reposent en paix à l’endroit où elles avaient été déposées », commente tante Ella. Le destin ultérieur de la chapelle a démontré que notre tante avait raison sur toute la ligne. Dans les années 1930, la chapelle, partiellement reconstruite, commença à se remplir de nouveaux cercueils et, chose qui a son importance, en 1935, la femme de Michał, la mère de Kazimierz et de Paweł, ladite grand-mère Laura, fut enterrée dans la crypte. Eu égard à son statut de « mère de Cebrów », son enterrement attira des foules des villages environnants, et bien que je me sois lancé tardivement dans ma quête de mémoire, j’ai pu encore m’entretenir avec des personnes qui avaient assisté à cette cérémonie, sûrement le dernier grand rituel où nobles et paysans disaient adieu sur un pied d’égalité à une personne estimée par tous et toutes. La chapelle, pendant la Deuxième Guerre, connut le même sort, sinon pire, que pendant la Première. Le front traversa le village deux fois, le coin fut bombardé, la population évacuée et, vers la fin de la guerre, le manoir brûla. Tante Ella narre la suite du voyage des restes des Garapich : « En 1940, des paysans ukrainiens des villages des environs (pas de Cebrów) brisèrent tour à tour sarcophages et cercueils afin d’en extraire les dépouilles, à la recherche de bijoux et de dents en or. C’est un officier soviétique qui chassa ces hyènes de cimetière. Il donna l’ordre de fabriquer une grande caisse en bois, de mettre dedans ces restes humains et d’aller ensuite les enterrer dans le cimetière local. » Tante Ella n’est pas toujours cohérente dans ses souvenirs, ils sont par endroits chaotiques. Il lui arrive de raconter un même événement plusieurs fois, chaque fois sous un autre angle et même en lui donnant une signification différente. Pour prendre un exemple, elle rapporte cette scène ailleurs de la façon suivante :
Un certain jour, après l’arrivée du pouvoir soviétique, alors que mes parents étaient déjà partis de Cebrów, on vit surgir des pelleteuses et des camions, tout le terrain fut rasé, ils brisèrent tous les cercueils, les dépouilles de nos ancêtres vêtus d’habits en lambeaux furent chargées dans un camion et emportées au cimetière du village. Dans la partie la plus ancienne du cimetière, on creusa une grande fosse dans laquelle fut déversé tout le chargement du camion. […] L’opération terminée, le sous-officier russe qui la commandait dit : « Comme ça, plus trace des pomiestchiki[4] polonais, et c’est principalement ça qu’on voulait. »
Tante Ella attribue donc à ce soldat de l’Armée rouge anonyme des intentions opposées. Dans le premier récit, le militaire était censé vouloir empêcher le pillage ; dans le second, il s’agit déjà pour lui d’effacer la mémoire des propriétaires fonciers polonais. Dans le premier transparaît le respect du tabou de la mort ; dans le second, l’oubli délibéré de la vie. La chose n’aurait guère d’importance sans la suite de l’histoire qui, en vérité, n’est autre que l’histoire de la rivalité entre l’oubli et la mémoire, comme si ses héros ne parvenaient pas à décider s’ils appartenaient au monde de la mort ou à celui de la vie, ou encore flottaient quelque part entre les deux.
Avait suivi toute cette opération Lachman, marié avec Kazia Suchecka, mon ancienne élève de l’école ménagère de Kałusz, écrit tante Ella. Leur maison était située dans le voisinage immédiat de la chapelle, aussi ces informations proviennent-elles de témoins dignes de foi. L’endroit où se dressait la chapelle fut rasé, labouré. […] Quelques jours après, ce Lachman se rendit au cimetière, trouva une grande pierre et grava dessus, quoique de travers, « GARAPICHY », après quoi il la posa sur la tombe.
La transgression du tabou de la mort peut attirer un châtiment mérité, et Lachman a simplement fait ce qui était censé garantir aux corps une paix troublée déjà par trois fois au cours des quarante années précédentes. Tel fut le châtiment qui s’était abattu sur un certain Cebrovien du nom de Łotocki. Après la destruction de la chapelle, le Łotocki en question avait volé les cercueils tapissés d’étain pour les vendre à la ferraille. Quelque temps plus tard, il perdit l’esprit et commença à se promener nu dans le village en tenant des propos délirants, avant de finir par se pendre dans une grange des alentours. Les suicidés, à Cebrów, se pendaient toujours, on ne sait pas pourquoi, dans des granges, comme si au dernier moment, par pudeur, ils désiraient cacher leur péché aux regards de la communauté. « C’est ces Garapich qui l’avaient envoûté », concluait-on cette histoire qui m’a été plusieurs fois racontée à Cebrów. Il en existe également une version moins radicale qui, si elle n’est pas liée à une rupture intentionnelle du tabou, est elle aussi porteuse d’une mise en garde moralisatrice. Un jour, un agriculteur qui habitait à peu de distance du cimetière trouva des plaques en pierre dans la terre et ensuite décida de paver sa cour avec. Des cauchemars, des fantômes se mirent dès lors à le hanter, il était à deux doigts de la folie. Il fit donc ce qu’il convenait de faire, il alla voir une guérisseuse. Celle-ci lui commanda d’examiner les plaques, qui se révélèrent être des vestiges du tombeau des Garapich. Sur son conseil, le paysan alla les enterrer dans le cimetière et, comme on pouvait s’y attendre, ses cauchemars cessèrent.
Les derniers Garapich de Pologne à avoir vu la pierre gravée par Lachman furent mes parents, Marek et Dorota — ils avaient visité Cebrów durant quelques heures en 1971. Quarante-trois ans après leur visite, je m’y rendis à mon tour. C’est ainsi que je me trouvai dans le cimetière de Cebrów par une matinée tiède de mai 2014, muni d’une pelle et d’un pied-de-biche, scrutant le sol autour de moi. Un peu amusé, peut-être étonné, l’oncle Olek me lorgnait du coin de l’oeil, mais il essayait aussi d’écarter les broussailles, tâtant le terrain du bout de sa botte comme si un détecteur d’os humains y était incorporé. Ces plaques étaient encore ici il n’y a pas si longtemps, disait-il, mais elles ont disparu, quelqu’un les a prises pour s’en servir de fondation, c’est bête, mais après tout, pendant près de cinquante ans, personne ne s’y était intéressé, à ces plaques, alors il n’y a rien à redire. J’avais le sentiment que l’oncle Olek n’avait toujours pas vraiment compris ce que ce Garapich apparu subitement était venu chercher dans son village et qu’il participait aux recherches dans le cimetière par courtoisie, par égard pour moi, avec des sentiments mitigés envers toute cette idée de fouiller le sol du cimetière, car son instinct de Cebrovien lui soufflait que cela ne pouvait qu’attirer des ennuis parce qu’avec ces exhumations, il fallait faire attention. La tombe faite par Lachman ? Il ne s’en souvenait pas du tout. J’étais donc là ma bêche à la main, avec devant moi les quelques ares d’un vieux cimetière envahi d’orties et de ronces. Il y avait du soleil. À une fenêtre de la maison voisine un rideau frémit, une tête couverte d’un fichu bigarré fit une apparition furtive. J’étais là ma pauvre pelle à la main, m’apprêtant à creuser, luttant aussi contre un mal de tête normal à cette heure, dont était en grande partie responsable la gnôle de l’oncle bue la veille ou peut-être même ce jour-là. Bien que l’affaire semblât plutôt désespérée puisque je ne sais pas creuser — hormis dans la mémoire —, je m’amusais à imaginer ce que je ferais si je trouvais la tombe. Continuerais-je à creuser la terre, à chercher des vestiges de vêtements, de crânes, d’ossements ? Tout objet trouvé oblige à se reposer la question du bien-fondé de ses recherches et à se demander si on n’en a pas déjà fait assez, si l’heure n’est pas venue de s’arrêter. Je ne savais pas si je devais m’en tenir à la plaque ou poursuivre en effectuant en quelque sorte une nouvelle exhumation, creuser au risque de tomber, en cherchant à satisfaire ma curiosité, sur des obstacles qui en seraient la dramatisation physique, comme la fois où, à Paris, j’avais pris en cachette l’urne contenant les cendres de ma grand-mère Krystyna Breza, dont sa fille, tante Marta, ne voulait pas se séparer et qui encore, à la date d’aujourd’hui, se dresse chez elle sur une étagère entre des livres et la couche de ses chats. L’ayant ouverte, j’avais découvert avec soulagement une seconde urne à l’intérieur, scellée et plombée pour la protéger des gens comme moi à la recherche de traces tangibles de la mort. L’ombre aperçue à la fenêtre de la maison de Cebrów me fit voir la scène qui s’était déroulée en ce même endroit cent onze ans plus tôt, où mon aïeul aux mêmes prénom et nom que moi déterrait avec ses fils les cercueils de son père et de son frère. Je repensai alors à leur équipée nocturne, au fait que, malgré leur volonté d’éviter les témoins, tout le village avait appris que Michał avait brisé le tabou de la paix des défunts, ce qui l’avait amené à essayer de réparer la chose d’une manière plus ou moins inconsciente en commandant une messe en même temps qu’il rappelait qui était ici le maître au moyen du rituel d’inversion des rôles, par lequel il prophétisa en réalité la fin de son monde. Je jetai un coup d’oeil à la maison d’où m’observait une petite vieille, qui devait bien se demander ce que ce type qui n’avait vraiment pas l’allure d’un fossoyeur faisait dans le cimetière avec une pelle à la main puisqu’il n’y avait pas d’enterrement.
J’interprétai ce regard comme un avertissement. Il cachait la malédiction des élégants caveaux de la noblesse polonaise dans ce pauvre village de Podolie et celle de l’espace entre la vie et la mort, opaque comme une mare. Après un petit moment de réflexion, je me dis finalement que c’était bien que cette tombe soit dans un espace entre ignorance totale et savoir concret. Nous savons approximativement où elle est, mais sans certitude ; nous ne connaissons pas son emplacement exact, mais nous le savons à peu près. Leurs ossements sont ainsi protégés contre un nouveau déménagement et contre l’absurdité des répétitions de l’Histoire, tout en étant préservés de l’oubli total qui résulterait de l’ignorance de leur lieu de sépulture. Cette indétermination existe, mais elle se manifeste dans le cadre d’un même village où, si tant de choses ont changé en même temps que d’autres, comme la terre, l’eau, le printemps, les soirs d’été, le goût de la gnôle et la fatigue causée par le travail, n’ont pas changé du tout ; elles durent éternellement, ce qui est la meilleure garantie que l’on peut désormais laisser leurs restes tranquilles, nul autre ne viendra les tourmenter et ils pourront enfin se dissoudre dans la terre et la fertiliser en lui donnant cette couleur sombre inquiétante.
Le regard d’avertissement se prolongeait. Somme toute, non, je ne suis pas obligé de faire ce qu’a fait l’autre Michał Garapich, c’est-à-dire exhumer de quelconques ossements, me dis-je. Je regardai l’oncle Olek qui, visiblement déchiré entre la mission désespérée que je lui avais imposée de trouver la stèle de Lachman et sa répugnance de Cebrovien à déterminer précisément les affaires de ce monde en les désignant par leur nom, marchait le long de la limite du cimetière tout en fouillant le sol des yeux. Je posai ma bêche.
— Mon oncle, ça ne rime à rien. Laissons tomber ! Ce qui compte, c’est que nous sachions qu’ils sont quelque part ici…
L’oncle Olek me regarda, sourit d’un sourire qui fit ressortir sa fossette au menton et les pattes d’oie autour de ses yeux.
— Bon ! Ils sont ici, c’est sûr ! Où voudrais-tu qu’ils soient ? Les morts ne vagabondent pas…
Parties annexes
Notes
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[1]
Cracovie était alors le centre du mouvement artistique et littéraire moderniste né à la fin du xixe siècle, caractérisé par son idolâtrie du monde paysan.
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[2]
Ignacy Daszyński (1866-1936), homme politique considéré comme le père du socialisme polonais. Il fut premier ministre du gouvernement provisoire de la Pologne indépendante en novembre 1918.
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[3]
Allusion à la Confédération de Targowica, formée en 1792 par des magnats polonais hostiles à la Constitution du 3 mai 1791. Le roi Stanisław August Poniatowski se verra contraint par les Russes de signer l’accord de confédération, ce qui aboutira en 1793 au deuxième partage de la Pologne, cette fois entre la Russie et la Prusse.
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[4]
En russe : pomiestchiki, « grands propriétaires fonciers ».