Résumés
Résumé
Depuis la publication en 1973 par Michel Foucault des mémoires d’un parricide du xixe siècle, l’historiographie française est marquée par un usage récurrent des écrits personnels de criminels. L’archive de soi, d’abord valorisée pour écrire une histoire des dominés, est ensuite devenue objet historique à investiguer ; aujourd’hui, son utilisation tend à se banaliser. Tantôt sources pour une histoire des institutions, tantôt documents pour une histoire des représentations, ces usages des archives du moi exceptionnel ont aussi fait l’objet de nombreuses critiques, au point de les voir dernièrement souvent écartées des recherches. À partir du cas d’un jeune assassin mineur (1905) et de ses cahiers qu’il rédigea en prison, sont examinés les critiques et les obstacles de ce type d’archives autobiographiques de cas limites. L’article s’achève sur la proposition d’une autre perspective d’analyse, qui constitue ces écrits en corpus pour une histoire sociale de l’écriture ordinaire.
Abstract
Since the publication by Michel Foucault in 1973 of the memoirs of a nineteenth century parricide, French historiography has been marked by a recurrent usage of personal documents written by criminals. Self archives were firstly valorized as revealing the history of the dominated, then became a historic object to be investigated ; today their usage tends to be commonplace. Sometimes a source for the history of institutions, sometimes documents used for a history of representations, these usages of exceptional self archives have also often been criticized, even strongly enough to have them set aside from study. Using the case of a young minor murderer (1905) and the notebooks he wrote in prison, the critical points and the obstacles inherent to this type of autobiographical archive of extreme cases have been studied. The article concludes with the proposal of a different analysis perspective of the corpus these documents make up, as a social history of ordinary writings.
Resumen
Desde la publicación en 1973 por Michel Foucault de las memorias de un parricidio del Siglo xix, la historiografía francesa se caracteriza por un uso recurrente de los escritos personales de criminales. El archivo en sí, en primer lugar valorizado para escribir una historia de los dominados, se convirtió a continuación en objeto histórico a investigar ; en la actualidad, su utilización tiende a trivializarse. A veces fuentes para una historia de las instituciones, a veces documentos para una historia de las representaciones, estos usos de los archivos de un yo excepcional también fueron objeto de numerosas críticas, hasta el punto de verlos últimamente a menudo apartadas de las investigaciones. A partir del caso de un joven menor asesino (1905) y de sus cuadernos que redactó en prisión, se examinan las críticas y los obstáculos de este tipo de archivos autobiográficos de casos límite. El artículo se acaba sobre la propuesta de otra perspectiva de análisis, que constituye estos escritos en corpus para una historia social de la escritura ordinaria.
Parties annexes
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