Résumés
Résumé
Certaines catégories de personnes, dont le statut des problèmes qu’elles posent aux autres et à elles-mêmes est difficile à définir interpellent les figures traditionnelles de la conflictualité et de la vulnérabilité sociales. Elles ne s’inscrivent pas de manière nette dans le registre d’intervention du système de santé (physique et mentale), de protection sociale (pauvreté, chômage, employabilité, etc.) ou de sécurité (police, tribunaux, service correctionnel). Elles dessinent ainsi les nouvelles lignes de faille de la socialité contemporaine, qu’on pourrait définir comme ce psychosocial en danger, dangereux et dérangeant qui pose problème.
Après les effets successifs, complexes et contradictoires de nombreuses transformations institutionnelles en matière d’intervention psychosociale (désinstitutionalisation, sectorisation, rotation, communautarisation, déjudiciarisation, virage ambulatoire, nouvelle législation d’internement civil, etc.), on se trouve aujourd’hui dans un contexte de post-déjudiciarisation. Il se caractérise par la reconnaissance d’une certaine conflictualité et vulnérabilité psychosociales chroniques et difficilement codifiables. Les zones grises, les chevauchements et les redoublements entre conflit social, pauvreté extrême, marginalité, criminalité et maladie mentale sont à la fois élargis et recodés en termes de vulnérabilité psychosociale, de détresse psychosociale, de conflictualité psychosociale, de dérangement urbain et de dangerosité mentale. Lorsqu’il est question d’intervenir sur le psychosocial problématique, il est moins question de répression ou de thérapeutique que de gestion des aspects les plus dérangeants et dangereux de la conflictualité et de la vulnérabilité psychosociales. Nous nous penchons dans cet article sur la montée des interventions psychosociales à Montréal.
Abstract
Certain groups of people, whose problems they pose to others and to themselves is a status hard to define, challenge the traditional figures of social conflict and vulnerability. They do not fit clearly into the intervention patterns of the health system (physical and mental), social protection (poverty, unemployment, employability, etc.) or security (police, courts, correctional service). Thus, they trace new fault lines in contemporary society that could be defined as this threatened, threatening and troubling psychosocial element which causes problems.
After the successive, complex and contradictory effects of many institutional changes as regards psychosocial intervention (deinstitutionalization, sectorization, rotation, community involvement, judicial deregulation, shift to ambulatory care, new civil internment legislation, etc.), we find ourselves to-day in a post-judicial deregulation context. This is characterized by the acknowledgement of a certain level of chronic conflict and vulnerability that is hard to codify. The grey areas, the overlapping and duplication between social conflict, extreme poverty, marginality, criminality and mental sickness are both widened and recoded in terms of psycho social vulnerability, psychosocial distress, psychosocial conflict, urban upset and mental threat. When it comes to intervening on the psychosocial problem, it is less a question of repression or therapy than of management of the most troubling and dangerous aspects of psychosocial conflict and vulnerability. In this paper we focus on the development of psychosocial interventions in Montréal.
Resumen
Algunas categorías de personas, cuyo estatuto es difícil de definir por los problemas que plantean a los otros y a ellas mismas desafían las figuras tradicionales de la conflictividad y de las vulnerabilidades sociales. No se inscriben de manera clara en el registro de intervención del sistema de salud (físico y mental), de protección social (pobreza, desempleo, capacidad de empleo, etc.) o de seguridad (policía, tribunales, servicio correccional). Dibujan así las nuevas líneas de falla de la sociabilidad contemporánea, que se podría definir como lo psicosocial en peligro, riesgoso y amenazante que plantea problema.
Después los efectos sucesivos, complejos y contradictorios de numerosas transformaciones institucionales en cuanto a la intervención psicosocial (desinstitucionalización, sectorización, rotación, comunitarización, dejudiciarización, viraje ambulatorio, nueva legislación de internación civil, etc.), se encuentra hoy en un contexto post-dejudiciarización. Se caracteriza por el reconocimiento de una cierta conflictividad y vulnerabilidad psicosociales crónicas y difícilmente codificables. Las zonas grises, las coincidencias y los redoblamientos entre conflicto social, pobreza extrema, marginalidad, criminalidad y enfermedad mental se amplían a la vez que se recodifican en términos de vulnerabilidad psicosocial, desamparo y conflictividad psicosocial, perturbación urbana y peligrosidad mental. Cuando hay que intervenir sobre la problemática psicosocial, se habla menos de represión o de terapéutica que de gestión de los aspectos que más molestan y de los más peligrosos de la conflictividad y de la vulnerabilidad psicosociales. Nos inclinamos en este artículo sobre el aumento de las intervenciones psicosociales en Montreal.
Parties annexes
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