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  • Geneviève Paicheler

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  • Geneviève Paicheler
    CERMES (Unité mixte CNRS-INSERM-EHESS), 7, rue Guy-Môquet, 94801 Villejuif Cedex, France
    paichele@vjf.cnrs.fr

La problématique relative aux risques sanitaires est actuellement sur le devant de la scène des recherches en sciences sociales. Alors que l’état de santé des populations occidentales s’est considérablement amélioré au cours du dernier siècle, la crainte des risques de maladie semble s’exacerber dans le public. Angoisse et risque sont indissociables, et, ainsi que le soulignent Douglas et Wildavsky (1982), l’angoisse devient envahissante : nous craignons la nourriture que nous mangeons, l’air que nous respirons, l’eau que nous buvons, les énergies que nous utilisons. La confiance dans le monde physique, la foi dans le progrès ont fait place à un doute vertigineux. Et, paradoxalement, alors que les dangers sont de mieux en mieux contrôlés, les risques sont omniprésents sur la scène publique. Tout se passe comme si notre capacité à produire les risques, voire à les évaluer, était largement supérieure à notre aptitude à les maîtriser, d’où les pressions sur la maîtrise des risques, tant sur le plan individuel que social et politique. Les études sur les risques se situent à la croisée de plusieurs problématiques de sciences sociales. Il est certainement nécessaire de se référer à différents courants pour aborder un objet aussi complexe, caractérisé par des procédures, des acteurs et des institutions qui se multiplient. Le concept de société du risque a été forgé pour exprimer l’attention exacerbée au risque, notamment aux risques omniprésents produits par l’activité technologique humaine (Beck, 1982), ce qui marquerait une rupture par rapport aux acceptions antérieures du danger. Avec Beck, ainsi qu’avec Giddens (1992), nous sommes confrontés à une vision catastrophiste de l’évolution des sociétés, qui courent à leur perte du fait d’une activité humaine allant contre la nature, débridée, sans contrôle, machines infernales sans pilotes. Cette vision n’est pas sans analogie avec les représentations profanes des maladies telles que Herzlich (1969) les recueillait à la fin des années 1960, qui définissaient la maladie — mais non le risque — comme une offense faite à la bonne nature. De fait, le risque a remplacé la maladie et il véhicule un même imaginaire proche à propos de la technicité et de la vulnérabilité qu’elle engendre, vulnérabilité exacerbée par le caractère imprédictible et sans précédent de nombre de risques. Dans une contribution étayée sur une analyse fine des théories développées à propos du risque, Raymond Massé nous invite au dépassement d’une sociologie du soupçon, rendu possible notamment par le recours à des études empiriques qui permettent de confronter le discours des théoriciens du risque aux pratiques des individus et des groupes. Il s’agit de développer une phénoménologie du risque dans la quotidienneté, d’accéder à une compréhension du risque du point de vue de l’individu, et du travail sur le sens qu’il opère. La nouvelle position préconisée participe aussi d’une attention aux retombées positives de la société du risque afin de contrer une position qui procède d’une dénonciation généralisée et d’un pessimisme fondamental. Massé redonne espoir dans la capacité des individus à faire face aux dangers et dans la capacité des sociétés à les administrer. Dans des sociétés individualistes comme le sont les sociétés occidentales, la gestion des risques sanitaires par les personnes est un impératif. Elles sont en effet responsabilisées et le blâme est porté sur elles si elles sont réticentes à abandonner leurs conduites à risque pour adopter des comportements de santé dont la rationalité apparaît évidente, à partir du moment où les individus disposent des informations sur les menaces concernant leur santé. Ainsi apparaissent de nouvelles formes de contrôle et de moralisation. Et toute une panoplie de moyens est développée afin d’induire des comportements de santé raisonnables, dans une société ou une culture …

Parties annexes