Les connaissances sur les troubles de personnalité limite (TPL) ont connu des avancées importantes depuis les 30 dernières années. En effet, dès les années 1990, on a assisté à l’élaboration et l’expérimentation de modèles de traitements utiles et efficaces pour les personnes avec un TPL. La thérapie comportementale dialectique, puis le traitement fondé sur la mentalisation ont été élaborés sur des bases théoriques différentes, mais se sont avérés tous les deux efficaces selon les critères rigoureux de la recherche. Ces deux approches ont permis d’ébranler les conceptions négatives sur le trouble de personnalité limite et de susciter l’espoir de rétablissement. D’autres thérapies « manualisées » et validées par la recherche ont par la suite été menées et ont contribué à diversifier les offres de services. Cependant, bien que respectant plusieurs balises associées à la prestation de services, à la formation et la supervision des thérapeutes, la mise en place de ces différentes approches d’interventions s’est avérée le plus souvent coûteuse ou complexe. Aussi, bien que quelques guides de pratique aient été développés dans certains pays, la mise en place d’une organisation de services respectant ces balises et les critères des meilleures pratiques reste très difficile. Le Québec ne fait pas exception puisque les services proposés, quoique nombreux, tendent à être disparates et souvent précaires. Plusieurs initiatives cliniques dans diverses régions de la francophonie européenne se heurtent aussi aux mêmes enjeux. Malgré les défis rencontrés pour offrir des services adaptés aux personnes avec un trouble de personnalité limite, le champ d’études sur cette population est tout de même devenu incontournable. Des recherches québécoises ont permis, entre autres, de mieux documenter les enjeux de santé publique, incluant les problématiques de comorbidités psychiatriques et physiques, ainsi que la surmortalité associée à ce diagnostic. Dans un registre plus positif, on a bien documenté que plusieurs personnes présentent au fil des années une diminution significative de leur symptomatologie et que certaines d’entre elles peuvent perdre le diagnostic - c’est-à-dire présenter une diminution du nombre de critères diagnostics du TPL (selon le DSM5), amenant à ne plus recevoir formellement ce diagnostic. Cependant, on a observé que cette évolution favorable est souvent associée à des comportements d’évitement et que la reprise d’un bon fonctionnement social est un enjeu majeur assez peu documenté jusqu’à récemment et mal intégré aux modèles de traitement. Outre les défis dans le fonctionnement de la vie quotidienne, la violence, la suicidalité, l’abus, la maltraitance et les enjeux reliés à la jeunesse ne sont que quelques-uns des thèmes majeurs maintenant étudiés par plusieurs de nos collègues chercheurs dans la francophonie. Le Québec est, depuis les années 1990, un lieu où de nombreuses initiatives, recherches et regroupements sur le sujet ont été mis en oeuvre. Des pionniers chercheurs ou cliniciens montréalais comme le Dr Joel Paris de l’Hôpital général juif et la Dre Christiane Bertelli de l’Hôpital du Sacré-Coeur ont notamment été des précurseurs dans l’élaboration de modèles de pratiques dédiés aux personnes avec un TPL. Enseignants engagés, ils ont aussi contribué à former et à mobiliser un grand nombre de cliniciens et de chercheurs sur le sujet. Au Québec, des départements cliniques en milieu universitaire à Montréal et à Québec, mais aussi à Sherbrooke et dans différentes régions ont, les uns après les autres, élaborés des services cliniques adaptés s’inspirant des meilleures pratiques. En Europe, mentionnons aussi les initiatives soutenues en Suisse romande pour mettre en place des services cliniques fondés sur les données probantes. Des chercheurs et des praticiens de champs multidisciplinaires en psychiatrie, en psychologie, en ergothérapie et en service social sont maintenant mobilisés au sein d’une communauté dynamique s’intéressant au développement …
Réalités actuelles québécoises et dans la francophonie sur les troubles de personnalité limite[Notice]
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Pierre David
M.D., psychiatreNadine Larivière
erg., Ph. D.