Volume 47, numéro 1, printemps 2022 Santé mentale et justice Sous la direction de Anne G. Crocker et Valérie Moulin Avec la collaboration de Marc Corbière et Nadine Larivière
Sommaire (17 articles)
Éditorial
Présentation thématique
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Traumatismes complexes et services psycholégaux : vers des pratiques sensibles au trauma
Laurence Roy, Nancy Keays, Ashley Lemieux, Marianne Nicole et Anne G. Crocker
p. 19–36
RésuméFR :
Objectifs L’exposition à des événements traumatiques répétés pendant l’enfance et l’adolescence est associée à une prévalence accrue de troubles mentaux, de dépendances, de problèmes de santé physique et de difficultés psychosociales (Felitti et coll., 2019). La conséquence la plus fréquente de l’exposition à des événements traumatiques est la violence envers soi et les autres (Hugues et coll., 2017). La prévalence particulièrement élevée du traumatisme complexe chez les personnes utilisant les services psycholégaux entraîne la nécessité de revoir les pratiques, la formation du personnel, les politiques organisationnelles et l’offre de services. L’objectif du présent essai est de contribuer à une telle transformation des services en clarifiant les impacts du traumatisme complexe sur les trajectoires et les expériences de soins des personnes utilisatrices de services psycholégaux, ainsi que les pratiques développées en réponse à ce phénomène.
Méthode Nous avons mené une recension de la littérature scientifique et grise sur le traumatisme complexe et les pratiques sensibles au trauma auprès des personnes susceptibles d’utiliser les services psycholégaux. Une fois synthétisés, les résultats ont été mis en dialogue avec nos expériences de cliniciens et chercheurs par la conception d’une vignette clinique illustrant les principaux thèmes des écrits scientifiques.
Résultats Nous abordons d’abord le rôle du traumatisme complexe et de la victimisation dans le développement de comportements violents. Nous nous attardons en particulier aux expériences négatives des soins et services vécues par les personnes, en l’absence de reconnaissance et de compréhension du phénomène du traumatisme complexe et de ses conséquences. Nous décrivons les principes fondamentaux d’une approche de soins sensible au trauma (confiance et transparence ; sécurité ; soutien par les pairs ; collaboration et mutualité ; prise de pouvoir et choix ; sensibilité aux différences de genres, cultures et historiques), ainsi que les interventions cliniques et organisationnelles s’inscrivant dans une telle approche. Enfin, nous présentons les efforts réalisés à l’échelle internationale pour instaurer des politiques et pratiques sensibles au trauma dans les milieux psycholégaux, ainsi que les possibilités et les défis liés à la mise en oeuvre de telles approches au Québec.
Conclusion À ce jour, peu de travaux de recherche ont porté spécifiquement sur la mise en oeuvre et l’évaluation des approches sensibles au trauma en milieu psycholégal. L’état actuel des connaissances indique qu’une compréhension fine des traumatismes complexes vécus par les personnes utilisant les services psycholégaux est incontournable, et doit se retrouver à l’avant-plan des recherches, politiques et pratiques psycholégales contemporaines.
EN :
Objectives Exposure to repeated traumatic events during childhood and adolescence is associated with high prevalences of mental illness, addictions, physical health conditions, and psychosocial difficulties (Felitti et al., 2019). The most common consequence of exposure to trauma is violence towards self and others (Hughes et al., 2017). The very high prevalence of complex trauma among forensic mental health service users challenges these settings to modify their practices, training approaches, policies, and service delivery approaches. The objective of this article is to contribute to such a transformation of forensic mental health services by clarifying the impacts of complex trauma on the trajectories and experiences of forensic mental health services users, as well as practices responding to complex trauma.
Methods We reviewed the published and grey literature on complex trauma among forensic mental health service users. After synthesizing the findings, they were contrasted with our experiences as clinicians and researchers in the field of forensic mental health care through the development of a case vignette.
Results We first identify the role of complex trauma and victimization in the development and maintenance of violent behaviours. We describe the negative experiences of services and care settings reported by individuals with complex trauma in the absence of recognition and understanding of traumatic experiences and their impacts. We highlight the fundamental principles of trauma-informed care (trust and transparency; safety; peer support; collaboration and reciprocity; empowerment and choice; sensitivity to gender, cultural and historical differences), as well as the clinical and organizational approaches emerging from those principles. Next, we describe the approaches developed internationally to apply and implement trauma-informed care in forensic mental health setting, and the opportunities and challenges associated with their implementation in the Québec context.
Conclusion To date, few studies have documented and evaluated the implementation of trauma-informed care in forensic mental health settings. The literature reviewed in this paper indicates that an in-depth understanding of complex trauma among forensic mental health service users should be at the core of contemporary forensic research, policies and practices.
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Au-delà du logement : l’effet hétérogène de Logement d’abord sur l’implication criminelle de personnes vivant avec un trouble mental
Marichelle Leclair, Éric Latimer, Ashley Lemieux, Laurence Roy, Tonia Nicholls et Anne G. Crocker
p. 37–61
RésuméFR :
Objectifs Le programme Logement d’abord – un programme offrant un logement permanent sans condition préalable aux personnes en situation d’itinérance et vivant avec un problème de santé mentale – est de plus en plus mis de l’avant à titre de composante essentielle d’un plan pragmatique pour mettre fin à l’itinérance. La littérature scientifique révèle toutefois qu’en moyenne, l’intervention Logement d’abord n’a pas d’effet sur l’implication criminelle de ses participants. Cette étude vise à explorer la possibilité que cette absence d’impact soit due à l’effet hétérogène de l’intervention. Plus spécifiquement, nous voulons vérifier si le profil d’antécédents criminels des participants, identifiés grâce à une analyse de classes latentes dans un précédent manuscrit, module l’effet de Logement d’abord sur les mises en accusation.
Méthodes Cette analyse repose sur les données des sites de Montréal, Toronto et Vancouver de l’essai randomisé contrôlé Chez Soi, fusionnées aux données administratives de justice (N = 1321). Des modèles de régression binomiale négative avec des termes d’interaction ont permis de mesurer l’impact de Logement d’abord, en comparaison au traitement habituel, sur les nouvelles accusations criminelles pour infractions violentes, infractions acquisitives (p. ex. vol, fraude, travail du sexe) et infractions liées à l’administration de la justice pour chaque profil d’antécédents criminels.
Résultats Les participants dont les antécédents criminels étaient associés à un historique d’itinérance chronique ou à un usage criminalisé de drogues ont connu une réduction des nouvelles mises en accusation pour infractions violentes grâce à Logement d’abord. Logement d’abord n’a pas eu d’impact sur les infractions acquisitives ou liées à l’administration de la justice, et ce, pour tous les profils d’antécédents.
Conclusions Les résultats soulignent que les services communautaires comme Logement d’abord offrent un contexte potentiel pour instaurer des stratégies visant à réduire la judiciarisation. Une piste de solution prometteuse est de former les équipes multidisciplinaires aux approches fondées sur les données probantes en santé mentale forensique afin que tous les aspects du rétablissement des utilisateurs de services, incluant les potentiels besoins criminogènes, soient pris en compte. Des études portant sur la faisabilité et l’efficacité de ces interventions d’appoint seraient nécessaires.
EN :
Background Housing First does not, on average, reduce criminal justice involvement. This analysis aims to test whether the overall absence of an impact is due to intervention effect heterogeneity as a function of the pattern of lifetime criminal justice involvement, identified through latent class analysis conducted through earlier work.
Methods This analysis relied on data from the Montréal, Toronto and Vancouver sites of the Canadian At Home/Chez Soi randomized controlled trial, merged with administrative records of lifetime criminal charges (N = 1,321). Negative binomial models with interaction terms were used to estimate the impact of Housing First, in comparison to treatment as usual, on violent charges, acquisitive charges (e.g., theft, sex work), and administration of justice charges (e.g., breach of probation), for each pre-identified profile.
Results Participants with past criminal justice involvement associated with a chronic history of homelessness or with criminalized substance use experienced a decrease in violent charges as a result of Housing First, whereas those with no or little past criminal justice involvement experienced a marginal increase. Housing First did not affect acquisitive or administration of justice charges, regardless of profile.
Conclusions Findings suggest that integrating criminological or forensic mental health tools, knowledge and approaches into the multidisciplinary teams that support Housing First service users may be an effective solution, so that all aspects of their recovery, including potential criminogenic needs, are addressed. Future research should focus on the feasibility and effectiveness of such adjunct interventions.
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Les méthodes et enjeux relatifs à l’évaluation du risque de la violence hétérodirigée
Jean-Pierre Guay, Joao Da Silva Guerreiro et Anne G. Crocker
p. 63–85
RésuméFR :
Objectifs Cet article propose un survol des méthodes et outils d’évaluation du risque de violence hétérodirigée et aborde la question de la formulation du risque de violence. Il se termine par un survol des différents enjeux relatifs au développement et à l’implantation de ces outils.
Méthode Une analyse critique de la littérature relative aux différentes méthodes et enjeux récents liés à l’évaluation du risque de violence hétérodirigée de clientèles judiciarisées est proposée.
Résultats L’évaluation du risque est au coeur des décisions relatives à la prise en charge des auteurs d’infractions qui ont des problèmes de santé mentale. Elle déterminera le niveau de surveillance et d’encadrement, le plan d’intervention, de même que l’accès aux mesures d’élargissement de la peine ou des conditions de détention en milieu hospitalier. Les méthodes et outils utilisés pour renseigner les professionnels de la santé et de la sécurité publiques sont nombreux. Ces outils ont beaucoup évolué, tant en ce qui concerne les thèmes considérés, que les méthodes d’évaluation, les stratégies combinatoires ayant une plus grande sensibilité aux enjeux liés aux victimes de violence et les moyens permettant une meilleure communication du risque de violence. Outre une meilleure compréhension de l’interface entre les facteurs de risque et de protection, des efforts devront être maintenant déployés afin de bonifier les connaissances à propos de l’exercice de formulation du risque. Cette étape invitera de plus en plus le professionnel à aller au-delà de la description de ce qui est déjà connu de l’individu et à dégager des énoncés concis sur la nature et l’étiologie de la violence. La formulation de risque devrait permettre d’améliorer la compréhension de la dynamique délictuelle de l’individu en permettant d’intégrer à la fois des facteurs de risque et facteurs de protection et planifier des scénarios de violence future qui faciliteraient, à leur tour, l’identification de stratégies de gestion du risque plus efficaces.
Conclusion Si l’évaluation structurée du risque et des besoins des auteurs d’infractions qui ont des problèmes de santé mentale est de plus en plus pratique courante chez les professionnels, plusieurs enjeux d’ordre méthodologique et d’implantation dans différents milieux de pratique demeurent. Malgré le fait que ces enjeux méritent une discussion plus approfondie basée sur plus des données empiriques, leur contribution au plan de la réduction du risque de violence et du travail menant à une réintégration sociale réussie des personnes évaluées est indéniable.
EN :
Objectives This article provides an overview of the approaches and instruments used to assess the risk of other-directed violence, with particular focus on risk formulation. Issues pertaining to the development and implementation of these instruments are briefly reviewed.
Method A critical analysis of the literature pertaining to the methods and current issues related to risk assessment of other-directed violence is proposed.
Results Violence risk assessment instruments are used to manage offenders struggling with mental health issues. They help inform decisions regarding monitoring, supervision, treatment and sentencing in correctional and forensic mental health settings. There are different approaches to violence risk assessment and numerous instruments offered to professionals working in these settings. Considering the structured professional judgement (SPJ) tools, they have considerably evolved in the last years with regard to the types of violence and the methods used to assess and manage risk. Examples of these innovations include taking into consideration victim safety planning and strategies to facilitate risk communication such as scenario planning based on an explanatory framework informed by risk formulation. Risk formulation is a relatively new step in the administration SPJ tools, and invites users to go beyond documenting the presence and relevance of specific risk factors by allowing them to consider the nature and the etiology of violence in an individualized manner. Risk formulation integrates both relevant risk and protective factors that facilitate the process of scenario planning and the identification of successful risk management strategies.
Conclusion Although structured approaches to violence risk assessment of offenders struggling with mental health issues have become more and more frequent in many settings, some methodological and implementation issues still have to be tackled. In spite that these issues warrant further discussion based on new empirical data, their contribution to risk reduction and to the success of social rehabilitation of the individuals at the centre of these assessments is undeniable.
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Le nouveau défi des services destinés aux personnes présentant un premier épisode de psychose : intégrer des interventions pour prévenir et réduire les agressions physiques
Sheilagh Hodgins et Valérie Moulin
p. 87–109
RésuméFR :
Objectif Les services de santé mentale destinés aux personnes présentant un Premier Épisode de Psychose (PEP) proposent des interventions spécialisées qui ont démontré leur efficacité sur l’évolution psychopathologique des personnes suivies, mais ils n’intègrent pas encore dans leurs programmes de traitement des interventions pour prévenir les Agressions Physiques (AP). Cet article présente les résultats d’études afin d’inciter ces services à évaluer le risque d’AP et à intervenir rapidement pour prévenir ces comportements, à côté du traitement des troubles psychotiques.
Méthode Cet article présente une recension narrative des écrits scientifiques. Il est basé sur des publications en français et anglais, rapportant des études, revues et méta-analyses portant sur les antécédents, corrélats et traitements efficaces des AP et de la criminalité chez les personnes présentant un trouble mental grave, une schizophrénie, ou un premier épisode de psychose.
Résultats La recension des écrits scientifiques confirme que les personnes développant ou présentant une schizophrénie montrent un risque élevé d’APs de criminalité, particulièrement d’homicide, comparativement à la population générale. Approximativement un tiers des patients présente des APs avant un PEP. Un premier sous-groupe de personnes, qui présente le plus haut taux d’APs et de criminalité, a des antécédents de troubles des conduites dans l’enfance. Un deuxième sous-groupe de personnes débute les APs avant le PEP, au fur et à mesure que l’anxiété et les symptômes positifs augmentent. L’association entre symptômes psychotiques positifs et AP varie selon la phase de la maladie et l’âge de début des APs. De plus, d’autres facteurs tels que l’abus de substances (notamment la consommation de cannabis), les difficultés à reconnaître les émotions sur le visage d’autrui, l’impulsivité et la victimisation physique sont associés aux APs. À côté des interventions qui ont montré leur efficacité pour la prise en charge des troubles psychotiques et des habiletés sociales, des programmes de traitement conçus pour prévenir les APs, les comportements antisociaux et les facteurs associés apparaissent nécessaires, ainsi que des interventions visant à réduire les victimisationsqui favorisent les APs.
Conclusion Les travaux de recherche ont montré l’existence de différents profils de patients et des facteurs liés aux APs qui pourraient être identifiés lors d’un PEP. Ainsi, les services qui accompagnent les personnes présentant un PEP pourraient jouer un rôle important en prévenant les APs. Pour ce faire, il conviendrait d’intervenir simultanément sur les troubles psychotiques et les APs. Différents défis à l’implantation de ces interventions doivent être relevés : le premier est de convaincre les équipes de l’intérêt de ces pratiques pour prévenir les agressions, et le second est d’amener les patients qui ont le plus besoin de ces interventions à y participer. Travailler la motivation et l’adhésion des patients aux interventions demeure un défi important.
EN :
Objective Mental health services for persons presenting a first episode of psychosis include specialized interventions that are effective in treating psychosis, but they do not include treatments that prevent aggressive behaviour (AB). This article presents the results of studies in an effort to incite these services to evaluate the risk of AB and to intervene rapidly to prevent these behaviours as well as treating the psychotic disorder.
Method This article presents a narrative review of the scientific studies. We have reviewed publications in French and English reporting studies, reviews, and meta-analyses focused on the antecedents, correlates, and effective treatments for AB and criminality of persons described as presenting severe mental disorder, schizophrenia, or a first episode of psychosis.
Results The review of scientific studies confirms that persons developing or presenting schizophrenia are at increased risk to engage in AB, crime, and homicide relative to the general population. Before a first episode of psychosis approximately one third of patients display AB. One subgroup of these persons, those who present the highest risk of AB and criminality, have a history of conduct disorder since childhood. Another subgroup who also begin engaging in AB before a first episode of psychosis display AB as anxiety and positive symptoms increase. The association between positive psychotic symptoms and AB varies according to the phase of illness and the age of onset of AB. Further, other factors such as substance misuse (especially cannabis use), difficulty in recognizing emotions in the faces of others, impulsivity, and physical victimization are related to AB. In addition to effective treatments for psychosis and social skill training, treatment programs aimed at preventing AB and antisocial behaviours, and the associated factors are needed, as well as interventions that aim to reduce victimization.
Conclusion The extant literature identifies different profiles of patients and factors associated with AB that can be identified at a first episode of psychosis. Consequently, first episode services could play an important role in preventing AB. To do this, they would need to simultaneously treat the psychosis and the AB. The implementation of such treatments would involve challenges such as convincing treatment teams of the benefits of such an approach and convincing patients needing these treatments to comply. Increasing patients’ motivation and compliance remains an important challenge.
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Surveiller, contrôler et traiter : le consentement aux soins à la Commission québécoise d’examen
Emmanuelle Bernheim, Guillaume Ouellet, Pierre Pariseau-Legault et Nicolas Sallée
p. 111–128
RésuméFR :
Objectif Le droit au refus de soins des accusés déclarés criminellement non responsables pour cause de troubles mentaux ou inaptes à subir leur procès est reconnu et strictement encadré par les mécanismes légaux du droit civil québécois et le droit criminel canadien ne permet pas de les traiter contre leur volonté. Les commissions d’examen, qui sont chargées de statuer et de réévaluer périodiquement leur situation, ne peuvent prescrire de traitement, mais ont l’autorité, avec le consentement des accusés, d’imposer une condition relative à un traitement. Cette étude ethnographique vise à documenter le discours et les pratiques de la Commission québécoise d’examen en la matière.
Méthode Une analyse thématique de contenu a été réalisée. Le matériel de recherche est composé d’observations d’audiences de la Commission d’examen (n = 70), de fiches d’information sur les dossiers judiciaires remplies par des avocats de la défense (n = 191), d’entrevues avec des psychiatres (n = 7) et des avocats de la défense (n = 7) et de l’étude de 100 décisions judiciaires de 2018, sélectionnées au hasard.
Résultats Notre étude démontre que les pratiques de la Commission québécoise d’examen permettent, directement ou indirectement, via l’ambiguïté des conditions ou des pressions exercées par certaines équipes traitantes, de passer outre les refus de soins des accusés et d’imposer des traitements. Les implications de ces constats pour l’évolution des savoirs et des pratiques en psychiatrie légale sont discutées.
Conclusion Alors que les commissions sont censées gérer le risque pour la sécurité du public, elles se trouvent dans les faits, en contexte de désengagement de l’État en matière sociale, à exercer une surveillance et un contrôle notamment via les conditions concernant les traitements.
EN :
Objectives The right to refuse care for accused persons found criminally not responsible on account of mental disorder or unfit to stand trial is recognized and strictly regulated by the legal mechanisms of Quebec civil law, and Canadian criminal law does not allow them to be treated against their will. Review Boards, which are responsible for ruling on and periodically re-evaluating their situation, cannot prescribe treatment, but have the authority, with the consent of the accused, to impose a condition relating to treatment. The purpose of this ethnographic study is to document the discourse and practices of the Quebec Review Board in this area.
Method The research material consists of observations from the hearings of the Quebec Review Board (n = 70), file observation grids completed by defense lawyers (n = 191), interviews with psychiatrists (n = 7) and defense lawyers (n = 7) and the study of one hundred court decisions from 2018, randomly selected.
Results Our study shows that the practices of the Quebec Review Board make it possible, directly or indirectly, through the ambiguity of conditions or the pressure exerted by certain treatment teams, to override the accused’s refusal of care and to impose treatment. The implications of these findings for the evolution of knowledge and practices in forensic psychiatry are discussed.
Conclusion While the Review Boards are supposed to manage the risk to public safety, they are in fact, in the context of the State’s disengagement in social matters, exercising surveillance and control, in particular via the conditions relating to treatment.
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Les mesures thérapeutiques en droit pénal suisse : un peu de soin, un contrôle de longue durée et une forte obsession sécuritaire
Nicolas Queloz
p. 129–149
RésuméFR :
Objectifs En droit suisse, les sanctions pénales comprennent les peines et les mesures. Parmi ces dernières, il faut distinguer les mesures thérapeutiques, destinées en principe au traitement de la personne condamnée, des mesures sécuritaires qui visent prioritairement à protéger la sécurité publique. Les objectifs de cet article sont de porter un regard critique sur l’évolution du prononcé des mesures d’enfermement « thérapeutique » en Suisse et sur le rôle ambigu que la justice pénale fait jouer à la psychiatrie légale dans ses prises de décision.
Méthode L’auteur procède d’abord à un bref rappel historique des mesures pénales de traitement en Suisse et de leur place dans le système des sanctions pénales. Puis, par une étude du cadre légal et des conditions du prononcé des mesures pénales, il mène une analyse critique des mesures thérapeutiques institutionnelles ordonnées à l’égard de délinquants considérés comme souffrant d’un « grave trouble mental », en se fondant sur des décisions judiciaires, leur appui sur les expertises psychiatriques, l’évolution des données statistiques et l’examen de la littérature.
Résultats L’évolution des mesures pénales en Suisse au cours des 20 dernières années se caractérise par 2 tendances fortes : une nette diminution du total des mesures pénales prononcées, mais une forte augmentation de la mesure d’enfermement « thérapeutique » de durée indéfinie (art. 59 CPS). Cette dernière a contribué à l’augmentation de la population des prisons dans la durée, en particulier des personnes détenues âgées de plus de 50 ans.
Conclusion Ces tendances s’inscrivent dans la continuité d’une politique pénale sécuritaire, toujours plus axée sur la gestion des risques et marquée par l’obsession de contrôle des « délinquants à risque ». Dans cette logique, le but de soin des mesures thérapeutiques est supplanté par le but de protection de la sécurité publique. Ceci est problématique puisque les mesures thérapeutiques institutionnelles sont prononcées pour une durée indéterminée et peuvent être régulièrement prolongées. Cet esprit sécuritaire affecte également les interactions entre le monde judiciaire et le monde psychiatrique, dont l’expertise est nécessaire pour le prononcé et pour la prolongation d’une mesure pénale. Ce système fait l’objet de critiques aussi bien d’un point de vue psychiatrique que d’un point de vue juridique, et certains de ses aspects ont été condamnés récemment par la Cour européenne des droits de l’homme.
EN :
Objectives This article aims at a critical study of the evolution of therapeutic measures in Swiss criminal law and of the ambiguous role that criminal justice let play to legal psychiatry in its decisions. Swiss law defines as criminal sanctions both sentences (punishment) and measures. Among the latter, a distinction must be drawn between therapeutic measures, aiming in principle at the treatment of the convicted person, and security measures, designed essentially to protect public security.
Method To this end, after a brief presentation of the history of penal treatment measures in Switzerland, the status of measures in the criminal sanctions system is examined, presenting the range of different criminal measures and their evolution in time. Then, the relationship between mental health and justice, in particular the question of institutional treatment of mental disordered delinquents is analyzed, including the criticisms that it raises.
Results The development of criminal measures over the last twenty years is characterized by two general trends: a strong decrease in the total number of criminal measures which have been ordered, and a sharp increase in the number of institutional therapeutic measures (Art. 59 CPS) to which offenders with serious mental disorders have been convicted. This latter increase is in line with a Swiss criminal security policy that is becoming more and more oriented towards risk management and marked by an obsession with the control of “high-risk offenders.” In this logic, the primary aim of treatment for these offenders is supplanted by the aim of the protection of public security. This assumption is particularly tangible since therapeutic measures are not subject to a specific time limit and can be — and in practice are — regularly extended. This obsession with security is also crystallized in the difficult interaction between the judicial and the psychiatric worlds, since expertise is required for the pronouncement and the extension of a criminal measure. The system is criticized as well under a psychiatric as under a juridical point of view, and certain aspects have been recently condemned by the European Court of Human Rights.
Conclusion We can observe that the use of the institutional therapeutic measure has increased, yet departing from its initial purpose, and obeying the movement towards more public security, even though the pronouncement of this measure is open to criticism. It rarely achieves its therapeutic objective, it is regularly submitted to prolongation, and it can lead to a measure of internment or a custodial sentence pronounced jointly, which run counter to the concrete needs of a person with mental health problems.
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Le Modèle de prévention de l’utilisation des mesures de contrôle en santé mentale : une revue intégrative
Marie-Hélène Goulet et Clara Lessard-Deschênes
p. 151–180
RésuméFR :
Contexte Les mesures de contrôle en santé mentale, telles que l’isolement et la contention, sont encore utilisées fréquemment malgré les effets néfastes qui leur sont associés et qui sont bien documentés. Dans ce contexte, la réduction du recours à ces mesures est un objectif partagé au niveau international, suscitant de nombreuses études à cet égard. Bien que plusieurs interventions préventives se montrent efficaces, il semble que la réduction de l’utilisation des mesures de contrôle dépende d’un ensemble de facteurs. Certains modèles conceptuels ont été développés en lien avec les mesures de contrôle, mais aucun n’a porté précisément sur leur prévention.
Objectif Le but de cet article est de proposer le Modèle de prévention de l’utilisation des mesures de contrôle en santé mentale à partir d’une revue intégrative sur le sujet.
Méthode Une revue intégrative a été réalisée à partir de l’approche de Whittemore et Knafl (2005). La recherche documentaire a été réalisée sur Pubmed, PsycINFO, EMBASE, CINAHL à partir des termes seclusion, restraint, psychiatr*, mental health reduction and mental health prevent* en incluant les articles entre 2010 et 2020, en français ou en anglais. De cette recherche, 138 articles ont été inclus et ont fait l’examen d’une analyse thématique. Les interventions identifiées ont été catégorisées selon le modèle écologique de Bronfenbrenner (1979).
Résultats Le Modèle de prévention de l’utilisation des mesures de contrôle en santé mentale est présenté. Chaque système ayant une influence sur l’utilisation des mesures de contrôle est discuté en regard des études incluses : la personne à risque, l’intervenant et le milieu de soins, la culture de soins, l’organisation, les politiques gouvernementales et l’évolution des discours. Ce modèle systémique permet de mieux comprendre la responsabilité partagée par tous les systèmes impliqués dans la prévention du recours aux mesures de contrôle en examinant les interventions propres à chaque système, mais aussi leurs interactions.
Conclusion Une approche écologique et systémique de la prévention de l’utilisation des mesures de contrôle en santé mentale invite les agents de changement potentiels de chaque système à mettre en oeuvre les activités qui leur sont spécifiques.
EN :
Background Seclusion and restraint are still being used frequently in psychiatric and mental health care despite their known harmful effects. Many countries have the goal of reducing their use, leading to a number of research on prevention interventions. While many of these interventions have been shown to be effective, reducing restrictive practices depends on several factors. Conceptual models have been developed in relation to seclusion and restraint, but none have addressed their prevention specifically.
Aim This article aims to propose The Model of prevention of seclusion and restraint use in mental health by carrying an integrative review on the subject.
Methods An integrative review was conducted using Whittemore et Knafl’s (2005) approach. Four databases (Pubmed, PsycINFO, EMBASE, CINAHL) were searched for publications between 2010 and 2020, in French or English. Search terms included seclusion, restraint, psychiatr*, mental health reduction and mental health prevent*. The search resulted in the inclusion of 138 articles. Data was analyzed using thematic analysis (Miles et coll., 2014) and categorized with Bronfenbrenner’s (1979) ecological model.
Results The six categories represented in the ecological model are described in terms of systems mutually involved in the prevention of seclusion and restraint use: the person (individual), the professionals and the physical environment (microsystem), the ward culture (mesosystem), organizational initiatives (exosystem), national policies and international organizations (macrosystem) and evolution of the discourse or resistance to change (chronosystem). Specific interventions are presented for each system, as well as their interactions.
Conclusion The prevention of seclusion and restraint use in mental health is a shared responsibility between the systems involved, who must act as leaders and agents of change by implementing their specific activities. Preventing restrictive practices in mental health will be achieved by developing a shared responsibility and a shift towards a culture of partnership.
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Survol de l’organisation des services de santé mentale forensique à travers le monde : vers un modèle hiérarchisé-équilibré
Anne G. Crocker, Marichelle Leclair, Félix Albert Bélanger et Jamie Livingston
p. 181–217
RésuméFR :
Objectif L’objectif du présent article est de fournir un survol de l’organisation des services de santé mentale forensique dans le monde. En particulier, nous avons tenté de répondre à la question suivante : « Quelles caractéristiques systémiques doivent être considérées dans la structure et l’organisation des services de santé mentale forensique ? »
Méthodes Pour ce faire, nous avons synthétisé l’information publiquement accessible qui décrit l’organisation des systèmes de psychiatrie légale dans le monde, identifiée à travers Academic Search Complete (EBSCO), ProQuest Central, Scopus, PsycInfo, Google Scholar et Google. Nous identifions les principes directeurs de l’organisation des services de psychiatrie légale et les indices potentiel de mesure de qualité des services.
Résultats Cette recension sert de tremplin à l’élaboration de meilleures pratiques d’organisation des services de psychiatrie légale. Selon ces lignes directrices, un système de santé mentale forensique efficace inclurait les éléments suivants : un continuum complet de services hiérarchisés, l’intégration de services dans le système, l’adéquation des services aux besoins des personnes, l’adhésion aux principes de droits de la personne, la réponse à la diversité de la population et l’utilisation des meilleures données disponibles pour effectuer des changements systémiques.
Conclusion Bien que tous ces principes soient importants, nous détaillons comment les trois premiers (continuum, intégration et adéquation des services) peuvent s’appliquer à l’organisation des services de santé mentale forensique et proposons un continuum de services de santé mentale forensique hiérarchisés et intégrés.
EN :
Objective The objective of this paper is to provide an overview of the provision and organization of forensic mental health services around the world. In particular, we attempt to address the following question: What system-level characteristics are important to consider in relation to the organization and structure of forensic mental health services?
Methods To do so, we synthesize publicly accessible information, identified through Academic Search Complete (EBSCO), ProQuest Central, Scopus, PsycInfo, Google Scholar and Google, to describe how forensic systems are organized throughout the world. We examine the fundamental principles in the organization of services and examine potential quality indicators.
Results This review is a steppingstone for the identification of best practices. Based on these fundamental principles, an efficient forensic mental health system would include the following elements: providing a comprehensive and balanced continuum of services; integrating services within and between systems; matching services to individual need; adhering to human rights; responding to population diversity; and using the best available evidence to make system-wide improvements.
Conclusion Though all of these system-level principles are important, we focus on how the first three (service continuum, system integration, and service matching) may be applied to the organization of forensic mental health services.
Mosaïque
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Présentation
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Les enjeux liés à la victimisation dans le traitement de la dépendance aux substances : qu’en disent les cliniciens en dépendance ?
Francine Ferland, Nadine Blanchette-Martin, Chantal Plourde, Catherine Rossi, Annie-Claude Savard, Maggie-Audrey Bernier, Gabrielle Ehouarne, Mélanie Blais et Rosalie Genois
p. 221–240
RésuméFR :
La littérature semble établir une relation bidirectionnelle entre la présence de consommation de substances psychoactives (SPA) et la présence de victimisation. En effet, d’une part la consommation de SPA peut être utilisée par une victime pour pallier les différents impacts qu’elle vit en raison des actes criminels dont elle a été victime. Quant à elle, la consommation peut augmenter les risques qu’une personne soit victime d’un acte criminel. Il n’est donc pas étonnant qu’une proportion importante des gens qui consultent pour un problème de consommation/dépendance aux SPA aient déjà été victimes d’actes criminels. Comme le profil clinique de ces personnes est parfois lourd et complexe, il apparaît important que les cliniciens travaillant auprès de celles-ci soient attentifs à la présence de victimisation au cours de leur vie afin de bien les aider. L’objectif de ce projet est de documenter les difficultés et les défis rencontrés par les cliniciens en dépendance dans le cadre de leurs interventions auprès des personnes ayant déjà été victimes d’actes criminels et de présenter des pistes de solution pour mieux intervenir avec celles-ci et favoriser leur rétablissement. Trente-deux cliniciens en dépendance (N = 9 hommes) ont pris part à des rencontres individuelles d’environ 60 minutes. Une fois transcrites sous forme de verbatim, les entrevues ont été analysées selon la méthode de thématisation en continu en suivant les étapes mises de l’avant par Braun et Clarke (2006). Les résultats de l’analyse qualitative mettent en lumière les 4 aspects suivants : 1) Perception des cliniciens quant au portrait des personnes consultant dans un centre public d’intervention spécialisée en dépendance ; 2) Perception des cliniciens en dépendance concernant les interactions possibles entre la consommation de SPA et la victimisation ; 3) Enjeux de l’intervention en dépendance auprès de la clientèle ayant été victime d’actes criminels tels que perçus par les cliniciens en dépendance ; 4) Pistes d’amélioration des services spécialisés en dépendance pour les personnes présentant un problème de consommation/dépendance et ayant été victimes d’actes criminels. Les résultats mettent en évidence la complexité de l’intervention auprès de personnes ayant un problème de consommation/dépendance aux SPA et ayant été victimes d’actes criminels, de même que le besoin de formation des cliniciens en dépendance en matière de victimisation.
EN :
Literature seems to establish a two-way relationship between psychoactive substance use and the presence of victimization. Indeed, substance can be used by a victim to overcome the different impacts lived because of the criminal acts experienced. On the other side, psychoactive substance use may increase the risks of a person being victim of criminal acts. It is therefore no wonder that an important proportion of people who consult for a problem of consumption/addiction to psychoactive substances have already been victims of criminal acts. Since the clinical profiles of these individuals is severe and complex, it appears important that the clinicians working with this person be aware of the presence of victimization in their life in order to help them. The objective of this project is to document the difficulties and the challenges encountered by the addiction clinicians in their interventions with people having already been victims of criminal acts and to present possible solutions to help improve interventions and promote their recovery. Thirty-two addiction clinicians (N = 9 Men) have taken part in individual meetings of about 60 minutes. Once transcribed in verbatim form, the interviews have been analyzed under a continuous theming method following the steps put forward by Braun & Clarke (2006). The results of the qualitative analysis highlighted the four following aspects: (1) Perception of clinicians regarding the portrait of people consulting in a public intervention center specializing in addiction; (2) Perception of addiction clinicians regarding the possible interactions between substance use and victimization; (3) The stakes of substance abuse intervention with the victims of a criminal act and (4) Suggestions to improve services for people with substance addiction and being criminal act victims. The results put forward the complexity of intervention with people with a problem of consumption/addiction and who were victims of criminal act victims. The results highlight the complexity of the intervention with people with a problem of consumption/addiction and who were victims of criminal acts, as well as the need for training addiction clinicians about victimization.
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Portrait de la santé mentale des femmes qui ont recours aux organismes communautaires d’une région québécoise
Emmanuelle Bédard, Nicole Ouellet, Cécile Cormier, Marylène Dugas, Caroline Sirois et Hélène Sylvain
p. 241–262
RésuméFR :
Au Québec, on estime qu’une personne sur 3 est à risque d’être affectée par un problème de santé mentale au cours de sa vie. Les problèmes de santé mentale modérés ou courants comme la dépression et l’anxiété touchent presque 2 fois plus de femmes que d’hommes. Parmi les facteurs de risque chez les femmes, on dénonce la pauvreté, les violences et sévices sexuels, la difficulté à accéder à un logement convenable et abordable, et les conditions de travail souvent précaires.
Objectifs Cette étude a été réalisée à la demande du Réseau des groupes de femmes d’une région québécoise et avait pour objectif de décrire le portrait de santé mentale des femmes fréquentant un organisme communautaire.
Méthode Un devis quantitatif descriptif a été utilisé pour recueillir les données en se guidant sur le modèle de Desjardins et coll. (2008). Les données ont été recueillies à l’aide d’un questionnaire autoadministré auprès de 171 participantes, provenant de 16 organismes communautaires de la région participante.
Résultats L’analyse des données fait ressortir les éléments qui contribuent à leur santé mentale comme l’estime de soi et le soutien social, et les éléments qui nuisent comme le faible revenu et les situations stressantes qui surviennent dans leur vie. Elle révèle que si une majorité de femmes jouissent d’une bonne santé mentale, certaines d’entre elles vivent avec une santé mentale plus fragile, associée à plusieurs facteurs d’influence, dont la violence et la pauvreté.
Conclusion Ces résultats devraient guider les intervenants dans le développement d’interventions ciblant les besoins spécifiques de ces femmes. Cette étude souligne également l’importance des organismes communautaires dans le soutien aux personnes qui vivent avec un problème de santé mentale.
EN :
In Québec, one in three people is at risk of being affected by a mental health problem during his lifetime. Women are twice as likely as men to suffer from mild mental health issues such as depression and anxiety. Poverty, violence and sexual abuse, difficulty to have access to adequate and affordable housing and poor working conditions are among the risk for women of being affected by a mental health problem.
Objectives This study was conducted upon the request of a Réseau des groupes de femmes and provides a portrait of women’s mental health who attend community organizations in a Quebec region.
Method A quantitative descriptive research design was used to collect data guided by the theoretical model of Desjardins et al. (2008). A total of 171 volunteers from 16 different community organizations completed a self-administered questionnaire.
Results The analysis of the data highlights the protective factors of mental health such as self-esteem and social support and risk factors such as low income and stressful life. It reveals that while the majority of the women have good mental health, some of them live with poorer mental health associated with several other factors, especially violence and poverty.
Conclusion Results could lead to the development of actions meeting the specific needs of women living with poor mental health. This study also highlights the contribution of the community organizations for supporting the people living with mental health issues.
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Portrait des symptômes d’anxiété généralisée chez les élèves du secondaire : l’importance de la prévention, du dépistage et de l’intervention
Danyka Therriault, Andrée-Anne Houle, Julie Lane, Jonathan Smith, Patrick Gosselin, Pasquale Roberge et Audrey Dupuis
p. 263–287
RésuméFR :
Les troubles anxieux sont parmi les psychopathologies les plus prévalentes chez les enfants et les adolescents, et ce, d’un bout à l’autre du globe. Ils affectent leur fonctionnement sur les plans personnel, familial, scolaire et social. Bien que les symptômes du trouble d’anxiété généralisée (TAG) comptent parmi les symptômes les plus souvent observés à l’adolescence, on connaît relativement peu de choses à propos des principaux facteurs de risque associés.
Objectifs La présente étude vise donc : 1) à documenter la prévalence de la caractéristique centrale du TAG, soit la tendance excessive à s’inquiéter, chez les élèves du secondaire âgés entre 12 et 17 ans, en identifiant le pourcentage d’élèves qui rapportent des symptômes de niveaux faible, moyen et élevé ; 2) à identifier les principales caractéristiques sociodémographiques associées à un niveau de symptômes élevé ; 3) à identifier les principaux facteurs de risque individuels et familiaux associés à un niveau de symptômes élevé et estimer leur contribution relative.
Méthode Un total de 8 689 élèves (55,9 % de filles) québécois du secondaire ont participé à l’étude. Ces élèves étaient âgés en moyenne de 14,34 ans (é.-t. = 1,52). Une analyse de cluster de nuées dynamiques a été menée de manière à créer 3 catégories sur la base des symptômes d’anxiété généralisée présentés par les participants (faibles, moyens, élevés). Des analyses de régressions logistiques multinomiales ont été ensuite réalisées afin d’identifier les variables permettant le mieux de prédire l’appartenance à ces différentes catégories.
Résultats Les résultats ont permis de montrer que 35,1 % des élèves rapportent un faible niveau de symptômes, 40,2 % rapportent un niveau moyen de symptômes alors que 24,7 % rapportent un niveau élevé de symptômes. Les filles et les adolescents et adolescentes des niveaux scolaires supérieurs sont plus nombreux à présenter des symptômes de niveau élevé. Plusieurs facteurs ont aussi été identifiés comme des facteurs augmentant le risque d’appartenir à la catégorie « symptômes d’anxiété généralisée élevés » en comparaison avec les catégories « symptômes d’anxiété généralisée moyens » et « symptômes d’anxiété généralisée faibles ». C’est notamment le cas de la peur du jugement des autres, du perfectionnisme, des sentiments dépressifs, de l’attitude négative face aux problèmes et de l’évitement cognitif.
Conclusion Cette étude appuie donc le constat des études antérieures selon lequel les filles sont plus à risque de développer un trouble d’anxiété généralisée. Elle permet également de mettre en lumière l’aspect multidimensionnel de la problématique, en identifiant les facteurs de risque les plus importants. Ultimement, cette meilleure compréhension des facteurs impliqués permet de mieux identifier les cibles à prioriser en matière de prévention des troubles d’anxiété généralisée à l’adolescence.
EN :
Anxiety disorders are among the most prevalent psychopathologies in children and adolescents around the world. They affect their personal, family, school and social functioning. Although symptoms of generalized anxiety disorder (GAD) are among the most commonly observed symptoms in adolescence, relatively little is known about the most important risk factors.
Objectives The purpose of the present study was therefore 1) to document the prevalence of the central feature of GAD, excessive worrying, in high school students aged 12 to 17 years, by identifying the percentage of students reporting low, medium, and high levels of symptoms, 2) to identify key sociodemographic characteristics associated with high symptom level, and 3) to identify individual and family risk factors associated with high symptom level and estimate their relative contribution.
Method A total of 8689 Quebec high school students (55.9% girls) participated in the study. The average age of these students was 14.34 years (SD=1.52). A k-means cluster analysis was first performed to create three categories based on the symptoms of generalized anxiety presented by the participants (low, medium, high). Multinomial logistic regression analyzes were then performed to identify the variables that best predict membership in these different categories.
Results The results showed that 35.1% of the students reported a low level of symptoms, 40.2% reported an average level of symptoms, while 24.7% reported a high level of symptoms. Girls and adolescents in higher grades were more likely to report high levels of symptoms. Several factors were also identified as increasing the risk of being in the high generalized anxiety symptoms category compared to the average generalized anxiety symptoms and low generalized anxiety symptoms categories. These include fear of negative evaluation by others, perfectionism, depressed feelings, negative problem orientation and cognitive avoidance.
Conclusion This study supports previous research showing that girls are at greater risk of developing generalized anxiety disorder. It also highlights the multidimensional aspect of the problem, by identifying the most important risk factors. Ultimately, this better understanding of the factors involved will allow us to better identify the targets to prioritize in the prevention of generalized anxiety disorders in adolescence.
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Évaluation des propriétés psychométriques de l’échelle abrégée de Kessler (K6) parmi les adolescents québécois
Jessica Turgeon, Stéphanie Turgeon et Jacques Marleau
p. 289–308
RésuméFR :
Objectif Cette étude vise à examiner la structure unidimensionnelle et les qualités psychométriques de la version courte de l’échelle de détresse psychologique de Kessler (K6) auprès d’adolescents résidant au Québec.
Méthode Les données analysées proviennent de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes de 2013-2014 et portent sur 1 618 adolescents. La structure interne du K6 et l’invariance selon le sexe et l’âge ont été testées à l’aide d’analyses factorielles confirmatoires. La validité convergente et divergente ainsi que la consistance interne du K6 ont aussi été évaluées. Enfin, des analyses ont été effectuées à l’aide de Courbes Receiver Operating Characteristic (ROC) pour déterminer dans quelle mesure le K6 permet de prédire la présence d’un épisode dépressif majeur.
Résultats Les analyses suggèrent la présence d’une structure unidimensionnelle dans l’échantillon d’adolescents québécois, ainsi que chez les sous-groupes étudiés. L’invariance de la mesure est observée pour les sous-groupes d’âge, mais ne peut être statuée avec certitude pour les analyses selon le sexe. Les résultats appuient la validité convergente et divergente du K6 auprès des adolescents, alors que les valeurs alpha et omega du K6 indiquent que la consistance interne varie de questionnable à acceptable pour l’ensemble des répondants et des sous-groupes. Les résultats des courbes ROC révèlent que le point de coupure 4/5 est celui qui permet de prédire le mieux l’épisode dépressif majeur chez l’ensemble des participants et les sous-groupes.
Conclusion Bien que le K6 présente plusieurs avantages, les résultats de la consistance interne et de l’invariance selon le sexe obligent une certaine prudence quant à son utilisation pour identifier le niveau de détresse psychologique des adolescents et des adolescentes québécois.
EN :
Objectives The purpose of this study was to examine the unidimensional structure and psychometric qualities of the short version of the Kessler Psychological Distress Scale (K6) in adolescents living in Quebec.
Method Data analyzed were obtained from the 2013-2014 Canadian Community Health Survey and included data from 1618 adolescents. The internal structure of the K6 and invariance by gender and age were tested using confirmatory factor analyses. Convergent and divergent validity of the K6 were also assessed. Finally, Receiver Operating Characteristic (ROC) analyses were performed to determine the predictive power of the K6 in predicting the presence of a major depressive episode.
Results The analyses suggest the presence of a unidimensional structure in the Quebec adolescent sample, as well as in the studied subgroups. The invariance of the measure is observed for the age subgroups but cannot be established with certainty for the gender analyses. The results support the convergent and divergent validity of the K6 with adolescents, whereas the alpha and omega values of the K6 indicate that its internal consistency ranges from questionable to acceptable for all respondents and subgroups. The results of the ROC curves reveal that the 4/5 cut-off point best predicts the presence of a major depressive episode among all participants and subgroups.
Conclusion Although the K6 has several advantages, the internal consistency and invariance by gender results warrant caution regarding its use to identify the level of psychological distress of Quebec adolescents.
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Influence de la comorbidité dans le traitement cognitif-comportemental des troubles anxieux et de l’humeur
Jessica Philippe, Martin D. Provencher, Geneviève Belleville et Guillaume Foldes Busque
p. 309–331
RésuméFR :
Objectifs Les troubles anxieux et les troubles de l’humeur sont les troubles de santé mentale les plus souvent observés dans les services de santé et la présence de comorbidité est davantage la règle que l’exception pour ces troubles. Bien que la thérapie cognitive-comportementale (TCC) ait largement été démontrée comme étant efficace pour les troubles anxieux et de l’humeur, les études qui portent sur l’efficacité de la TCC en présence de comorbidité(s) sont peu nombreuses et les résultats contradictoires. Pour répondre à ces questions, cette étude vise à mieux comprendre l’influence de la comorbidité dans le traitement des troubles anxieux, de l’humeur et apparentés à l’aide de la TCC dans une clinique universitaire. Les principaux objectifs sont de comparer les personnes qui ont des troubles anxieux et de l’humeur comorbides aux personnes qui n’en ont pas sur l’efficacité d’une TCC pour traiter le trouble principal et de vérifier si cette dernière permet de traiter les troubles comorbides par le fait même.
Méthode L’échantillon est constitué de 293 personnes qui ont suivi une TCC adaptée en fonction de leurs besoins au Service de consultation de l’École de psychologie (SCEP) de l’Université Laval entre 2007 et 2018 en raison de difficultés liées à l’anxiété ou l’humeur. Les clients étaient exclus s’ils présentaient des symptômes psychotiques ou maniaques non contrôlés ou un trouble lié à l’utilisation d’une substance au premier plan. L’efficacité repose sur une comparaison de plusieurs mesures avant et après le suivi thérapeutique, dont la sévérité des diagnostics (mesurée par une entrevue structurée), les symptômes anxieux et dépressifs ainsi que la qualité de vie tels qu’évalués par des questionnaires au prétraitement et au post-traitement. Des tests t et des ANOVAS à mesures répétées ont été utilisés.
Résultats Avant la thérapie, les résultats révèlent des symptômes significativement plus sévères parmi le groupe de personnes ayant au moins un diagnostic comorbide comparé au groupe de celles qui n’en ont pas. Après la thérapie, les deux groupes ont obtenu une diminution significative de la sévérité du diagnostic principal et ont atteint un changement cliniquement significatif dans une proportion équivalente. Chez les personnes ayant au moins un diagnostic comorbide, le nombre et la sévérité des diagnostics comorbides ont diminué significativement au post-test.
Conclusion Les résultats suggèrent que la comorbidité aggrave le portrait clinique, mais que cela ne nuit pas à l’efficacité de la TCC pour traiter le trouble principal. De plus, la sévérité des troubles comorbides diminue avec la thérapie, même si ces troubles ne sont pas directement ciblés par le traitement. En concordance avec la littérature actuelle, il est donc recommandé de continuer à cibler le trouble principal dans un premier temps, qu’il y ait présence de comorbidité ou non.
EN :
Objectives Anxiety and depression are the most prevalent disorders observed in health care services and are frequently comorbid with other disorders. Although Cognitive-Behavioral Therapy (CBT) has widely been shown efficacious to treat anxiety and mood disorders, studies that have focused on its effectiveness in the presence of comorbidity have been few and show conflicting results. Thus, the implications of the presence of comorbid disorders for treatment are still unknown. In an attempt to answer these questions, this study explores the impact of comorbidity on CBT for anxiety and mood disorders in a university-based clinic.
Methods A total of 293 clients consulting for anxiety and/or mood disorders at the Service de Consultation de l’École de Psychologie de l’Université Laval (SCEP) between 2007 and 2018 took part in the study. Clients were excluded if they presented uncontrolled psychotic, manic or substance abuse symptoms as their principal complaint. Clients without comorbid disorders where compared to clients who had comorbid disorders on different measures before and after receiving therapy to examine if comorbidity had an impact on CBT effectiveness to treat the principal disorder. The impact of treatment on comorbid disorders was also investigated. Effectiveness was assessed on several measures before and after treatment including the severity of diagnoses (measured with a structured interview), anxiety and mood symptoms as well as quality of life. Repeated measures ANOVAs and t-tests were used.
Results Before initiating therapy, clients with comorbid disorders had significantly more severe symptoms than clients without comorbid disorders. However, following therapy, both groups had significantly less severe principal disorders and reached a clinically significant change in equivalent proportions. Furthermore, the number and severity of comorbid disorders significantly decreased following therapy.
Conclusion These findings suggest that although the presence of comorbid disorders leads to more severe symptoms, it does not affect the effectiveness of CBT for the principal disorder. Furthermore, comorbid disorders improved even though they were not specifically targeted by treatment. In concordance with the literature, it is thus suggested to keep focusing treatment on the principal disorder, whether comorbid disorders are present or not.
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Processus d’élaboration de la nouvelle Stratégie québécoise numérique en prévention du suicide : Suicide.ca
Julie Lane, Louis-Philippe Côté, Jérôme Gaudreault, Luc Massicotte, Luiza Maria Manceau, Réal Labelle, Cécile Bardon, Jeanne Bazinet, Jessica Rassy et Mélanie Rembert
p. 333–356
RésuméFR :
Au Québec, près de 3 personnes s’enlèvent la vie chaque jour, et ce, même si l’on observe une baisse depuis les années 2000. Plusieurs acteurs institutionnels et communautaires sont engagés dans la prévention du suicide et plusieurs initiatives ont permis de contribuer à la réduction des taux de suicide. Malgré le travail intense, des efforts supplémentaires sont nécessaires afin d’intensifier l’offre de services et l’accès aux ressources et mieux rejoindre les personnes vulnérables au suicide non rejointes par les services actuels. Depuis de nombreuses années, plusieurs pays ont mis en place des technologies numériques pour mieux atteindre ces personnes. Au Québec, un certain retard dans l’utilisation des technologies numériques en prévention du suicide était observé. C’est dans ce contexte que le ministère de la Santé et des Services sociaux a mandaté l’Association québécoise de prévention du suicide (AQPS) pour développer une Stratégie numérique en prévention du suicide (SNPS). Dès le début des travaux, l’AQPS a souhaité ancrer le développement de la SNPS dans un processus de prise de décisions fondée sur des preuves scientifiques, contextuelles et expérientielles. Un processus, issu de la science de l’implantation, a ainsi été mis en place afin d’actualiser cette intention. La science de l’implantation est définie comme la science favorisant la mise en oeuvre de programmes en contexte réel. Elle est reconnue comme contribuant au succès de l’implantation de nouveaux programmes tout en favorisant une évaluation rigoureuse de leurs impacts et retombées.
Objectifs Cet article vise à : 1) présenter le processus qui a été mis en place pour faciliter l’élaboration, l’implantation et l’évaluation de la SNPS ; 2) décrire le modèle d’action ainsi que la SNPS.
Méthodologie Le cadre de référence Knowledge to action (KTA) est au coeur de la conception, de l’implantation et de l’évaluation de la SNPS. Ce cadre propose un processus cyclique en 7 phases itératives qui comportent chacune des aspects méthodologiques et des collectes de données.
Résultats La section résultats illustre les actions concrètes réalisées pour chacune des phases du processus KTA et les faits saillants qui se dégagent de l’analyse des données collectées. Cette section présente également la SNPS.
Conclusion Les conditions optimales pour favoriser l’implantation de la SNPS, son utilisation et sa pérennisation ont été mises en place. L’implantation en cours et l’évaluation d’implantation et des retombées de cette dernière permettront d’apprécier la capacité de la SNPS à atteindre ses principales finalités : informer à propos du suicide, repérer les personnes suicidaires, augmenter la visibilité de certaines ressources et offrir de l’aide aux personnes suicidaires qui répondent moins bien aux ressources traditionnelles.
EN :
In Quebec, nearly 3 persons still take their own lives every day, even though this number has been declining since 2000. Several institutional and community actors are involved in suicide prevention and several initiatives have contributed to the reduction of suicide rates. Despite this hard work, additional efforts are needed to intensify service offers and resource access to better reach people at risk of suicide not reached by actual services. For many years, several countries have been implementing digital technologies to reach them. In Quebec, there were delays in adoption of digital technologies for suicide prevention. In this context, the Health and Social services Ministry mandated Association québécoise de prévention du suicide (AQPS) to develop a Digital Strategy for Suicide Prevention (DSPS). From the beginning, AQPS wanted to anchor DSPS’s development in a decision-making process based on scientific, contextual and experiential evidence. A process, derived from implementation science, was therefore put in place to actualize this intent. Implementation science is defined as the science of implementing programs in real-world settings. It is recognized as contributing to the successful implementation of new programs while promoting a rigorous evaluation of their impacts and outcomes.
Objectives This article aims to: 1) present the process that was put in place to facilitate DSPS design, implementation, and evaluation; and 2) describe the DSPS action model and the DSPS.
Method The Knowledge to Action (KTA) framework is central to the design, implementation, and evaluation of DSPS. This framework proposes a cyclical process in 7 iterative phases, each with its own methodological aspects and data collections
Results The results section illustrates the concrete actions taken at each phase of the KTA process and the highlights that emerge from the analysis of the data collected. This section also presents the DSPS.
Conclusion Optimal conditions to promote the implementation of DSPS, its use and its sustainability have been put in place. The current implementation and evaluation of this implementation and its impacts will allow to assess the capacity of DSPS to achieve its main objectives: to provide information about suicide, to identify suicidal individuals, to increase the visibility of resources, and to offer help to suicidal individuals who respond less to traditional resources.