Résumés
Résumé
Ce texte analyse l’histoire de création du parc national de la Mauricie au Québec dans les années 1970. Il explore notamment le rôle que joue la science de l’écologie dans la mise en place d’une représentation idéalisée de la nature dite « sauvage » des parcs nationaux canadiens sur le territoire mauricien. Selon le discours officiel de l’agence Parcs Canada, ce parc vise en effet à protéger un exemple de la « nature sauvage des grandes forêts du Bouclier canadien ». Or, notre histoire révèle toutefois des forêts profondément marquées par une activité humaine séculaire faite de chasse, de pêche et de foresterie. Dès lors, comment l’agence fédérale Parcs Canada réussit-elle à créer sur ces paysages humanisés une « aire naturelle représentative d’intérêt canadien »? La science de l’écologie permet cette transformation de la territorialité mauricienne. Par l’entremise d’inventaires, de cartes écosystémiques et de plans directeurs qui mettent l’accent sur les composantes naturelles du lieu – mais qui font abstraction de son histoire humaine –, Parcs Canada réussit à concrétiser matériellement et symboliquement sur le territoire de la province l’idéal de nature sauvage des parcs nationaux canadiens. Partant de la thèse de Suzanne Zeller (1988), notre histoire montre ainsi que la science servît à soutenir, toujours en 1970, les entreprises de nation-building de l’État canadien.
Abstract
This paper analyzes the history of creation of the Mauricie National Park in Quebec in the 1970s. It explores in particular the role of the ecological science in the development of an idealized representation of ‘wilderness’ encountered in Canada’s national parks on the territory of Mauricie. According to the official discourse of the Parks Canada Agency, the park is aiming to protect an example of “wilderness of the great forests of the Canadian Shield” (nature sauvage des grandes forêts du Bouclier canadien). Our history however reveals forest scarred by centuries of human activity like hunting, fishing and forestry. Therefore, how the federal agency Parks Canada managed to create out of these humanized landscapes “a representative natural area of Canadian signifiance” (aire naturelle représentative d’intérêt canadien)? The science of ecology allows this transformation of Mauricie territoriality. Through inventories, ecosystemic maps and management plans that focus on natural components of the place––abstracting human history––Parks Canada manages to concretize materially and symbolically on the provincial territory the ideal of ‘wilderness’ of Canadian national parks. Starting from the thesis of Suzanne Zeller (1988), our history shows that science still served in the 1970’s to support the enterprise of nation-building of the Canadian State.