Avant-propos[Notice]

  • Catherine Léger,
  • Matthieu LeBlanc,
  • Laurence Arrighi et
  • Isabelle Violette

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  • Catherine Léger
    Université de Victoria

  • Matthieu LeBlanc
    Université de Moncton

  • Laurence Arrighi
    Université de Moncton

  • Isabelle Violette
    Université de Moncton

Dans les communautés francophones du Canada, la langue fait l’objet d’une attention particulière et se trouve fréquemment débattue sur la place publique. Souvent considérée comme assurant une existence propre à ces communautés, la langue française est investie d’une forte valeur identitaire à laquelle se voient liées la vitalité et la pérennité de la francophonie canadienne. Si un tel constat semble aux premiers abords faire consensus, des tensions sociales surgissent toutefois quant à la façon de se vivre et de se dire francophone : quelles formes d’usages du français cela suppose-t-il? Quels choix de langues en milieu bilingue ou en milieu plurilingue cette situation impose-t-elle? Quelles mesures officielles sont à adopter pour protéger la langue minoritaire dans l’espace public? S’insérant dans les travaux théoriques et appliqués sur le contact des langues et le bilinguisme, l’étude du français en contexte minoritaire donne ainsi à s’interroger sur les transformations du rapport entre langue et identité, notamment sur les discours que les locuteurs tiennent à l’égard des autres francophones, et permet également de se pencher sur les idéologies qui circulent au sujet des pratiques de la langue elle-même, qui concourent à produire une image du répertoire linguistique du locuteur minoritaire. La francophonie canadienne, dans ses réalités multiples et changeantes, nourrit sans aucun doute un champ de recherche interdisciplinaire; en effet, l’étude de la langue constitue un point de ralliement fécond pour l’ensemble des sciences humaines et sociales. C’est justement dans le but de susciter réflexions et échanges entre chercheurs de différentes disciplines sur la problématique du français en milieu minoritaire que nous avons séparément organisé deux ateliers au Congrès des sciences humaines de la Fédération canadienne des sciences humaines (FCSH), tenu à Victoria (en Colombie-Britannique) en juin 2013. Constatant des recoupements dans les thématiques des ateliers, l’un intitulé « Discours et actions des/sur les jeunes dans la francophonie canadienne » (organisé par Laurence Arrighi, Isabelle LeBlanc, Matthieu LeBlanc et Isabelle Violette), l’autre « Les français minoritaires : caractéristiques, identités, enjeux » (organisé par Catherine Léger), nous avons vu l’occasion de diriger un numéro thématique à même de rassembler de façon cohérente les différentes contributions des participants. L’appel à contributions qui a suivi a permis de réunir dans un même projet de publication des textes de chercheurs de différentes disciplines (la sociolinguistique, l’aménagement linguistique, la littérature, en particulier le théâtre, et la sociologie de l’éducation) qui mettent à profit des approches théoriques et méthodologiques aussi riches que diversifiées. Ratissant la francophonie canadienne d’un océan à l’autre, les terrains de recherche des contributions couvrent l’Acadie, le Québec, l’Ontario et les provinces de l’Ouest canadien. Si cette portée large constitue très certainement une des forces du présent numéro, c’est son caractère sociolinguistique qui le distingue des autres ouvrages sur la francophonie canadienne. En effet, l’optique de ce numéro n’est ni strictement linguistique au sens où il entendrait décrire uniquement les usages du français, ni strictement sociologique au sens où il tiendrait la langue comme élément de définition et de vitalité des communautés, ni strictement politique au sens où il se pencherait sur la francophonie canadienne en termes de capacité de gouvernance. Les auteurs adoptent tous, quoique de façon très différente, une perspective selon laquelle la langue est considérée comme pratique sociale et ils tâchent de prendre en compte les rapports sociaux qui y sont inscrits. Le présent numéro est composé de sept textes, soit de six articles et d’une synthèse de recherches. Bien que les sujets abordés et les approches adoptées soient très variés, certains textes présentent des affinités et gagnent en ce sens à être mis en parallèle. Nous les présentons de manière à privilégier leur …