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Introduction

Chaque année, le Canada accueille environ 252 000 immigrants, diversifiant de jour en jour sa mosaïque culturelle. Toutes ses régions, sans exception, comptent, parmi leurs habitants, de plus en plus de personnes d’origines diverses. Plus précisément, selon le recensement de 2006, près d’un canadien sur cinq (19,57 %) déclare ne pas être né au Canada (Statistique Canada, 2006).

Cette réalité implique que les professionnelles du réseau de la santé en général et les infirmières[1] en particulier, font quotidiennement face au défi de dispenser des soins congruents avec la culture des personnes soignées. Comprendre comment la culture influence le vécu des personnes en regard de la santé et de la maladie devient ainsi incontournable. Quelques études démontrent les conséquences d’une insensibilité culturelle sur la qualité des soins de la part des professionnelles de la santé (Anderson, Scrimshaw, Fullilove, Fielding et Normand, 2003; French, 2003; Leininger, 1991). D’ailleurs, l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (2004) souligne que les infirmières ont la responsabilité d’acquérir, maintenir et améliorer continuellement leurs compétences culturelles, afin d’offrir des soins qui répondent plus adéquatement aux besoins des différentes clientèles.

Problématique

La responsabilité de préparer des infirmières aptes à dispenser des soins appropriés dans un contexte de diversité culturelle, revient aux établissements de formation (Association des infirmières et infirmiers du Canada, 2006; Andrews, 1995; Duffy, 2001; Gerrish et Papadopoulos, 1999; Lazure et Vallée, 2003; Leininger, 1995a; Momeni, Jirwe et Emami, 2008; Purnell et Paulanka, 2008; Ryan, Carlton et Ali, 2000; Serrant-Green, 2001). En effet, en amont des pratiques, les établissements, dont la mission est de former les infirmières, détiennent une position avantageuse pour contribuer au développement de la sensibilité culturelle des étudiantes et ainsi, ultimement, changer les pratiques (Andrews, 1992; Arias-Galicia, Fantini et Guay, 2001; Baldonado, Beymer, Barnes, Starsiak, Nemivant et Anosnas-Ternate, 1998; Ryan et Twibell, 2002). Plusieurs infirmières chercheures se sont penchées sur les méthodes pédagogiques visant à développer la compétence culturelle chez les étudiantes en sciences infirmières (Campinha-Bacote, 1995, 2002, 2006; Duffy, 2001; Lazure et Vallée, 2003; Ryan, Twibell, Brigham et Benett, 2000). Certains auteurs soulignent qu’un stage d’immersion culturelle, inséré dans un programme formel, peut constituer un moyen privilégié d’atteindre des objectifs d’ouverture sur le monde, de sensibiliser les différentes cultures, de développer des pratiques de soins congruentes culturellement et ainsi, éviter l’imposition culturelle (Andrews, 1995; Leininger, 1991; McFarland et Leininger, 2002; Ryan et Twibell, 2002; Sutherland, 2002). Dans de nombreuses universités en général et dans deux universités québécoises en particulier, c’est dans cette perspective, que de plus en plus d’universités rendent accessibles aux étudiantes du baccalauréat en sciences infirmières des stages en immersion culturelle. Il est reconnu que les stages pour les futures infirmières, dans un contexte d’immersion culturelle, laissent, en général, des traces indélébiles et ont un impact positif sur la croissance personnelle et professionnelle des étudiantes (DeDee et Stewart, 2003; Haloburdo et Thomson, 1998; Kollar et Ailinger, 2002; Lee, 2004; Parker, 1999; St. Clair et McKenry, 1999; Thompson, Boore et Deeny, 2000; Ryan et Twibell, 2002; Walsh, 2003; Walsh et DeJoseph, 2003; Wood et Atkins, 2006). Malheureusement, peu d’études ont mis en lumière le vécu des stagiaires lors d’une expérience d’immersion dans une autre culture en terme d’appropriation culturelle (Farman, 2007; Finn et Lee, 1996; Smith, 1997).

Cadre de référence

Leininger (Leininger, 1988, 1995b; Leininger et McFarland, 2002, 2006) propose la théorie de la diversité et de l’universalité du soin culturel ('the theory of culture care diversity and universality') pour explorer les valeurs et le mode de vie de différentes cultures, ce qui guidera les infirmières et infirmiers dans la dispensation des soins congruents avec les croyances culturelles. La théorie propose de tenir compte des éléments tels la vision du monde, les composantes ethnohistoriques et socio-culturelles, la langue, les modes de communication, ainsi que les pratiques reliées au soin générique (soins traditionnels, transmis de génération en génération) et au soin professionnel (s’acquiert par une formation officielle et reconnue par le système d’éducation d’un pays). De plus, la théorie énonce sept catégories de facteurs sociaux clés qui influencent la santé et les soins; ce sont les facteurs (A) technologiques; (B) religieux, spirituels et philosophiques; (C) politiques et légaux; (D) économiques et éducatifs; (E) des liens familiaux et sociaux; (F) du mode de vie ainsi que (G) des valeurs et des croyances culturelles. Ces facteurs sont maintenant brièvement présentés.

En bref, on peut dire que les facteurs technologiques permettent de constater jusqu’à quel point les personnes d’autres cultures utilisent dans leur vie quotidienne la technologie et jusqu’à quel point ces personnes croient que la technologie est essentielle pour les maintenir en santé.

Quand les personnes sont malades ou anticipent un problème de santé, elles peuvent se tourner vers la prière ou avoir recours à leurs croyances religieuses ou spirituelles. Les croyances religieuses ou spirituelles sont interpellées quand les personnes prennent soin d’elles-mêmes ou de leurs proches, soit pour se garder en santé soit pour la recouvrer. Ainsi, selon Leininger et McFarland (2002), une pratique infirmière culturellement compétente doit tenir compte de quelle façon la personne se réfère à sa religion ou à ses croyances spirituelles pour l’aider à guérir, à faire face aux crises ou à affronter la mort. Les facteurs religieux, spirituels et philosophiques liés à une culture influence la santé des personnes et les soins infirmiers.

Les liens familiaux ('kinship') et sociaux peuvent jouer un rôle dans les saines habitudes de vie. De plus, ces réseaux sociaux peuvent constituer des filets de sécurité dans les situations de vulnérabilité liées à la maladie. On peut se demander si les membres de la famille (ou du groupe d’amis) sont empreints de sollicitude les uns envers les autres, si les personnes recevront ou non de l’aide pour se maintenir en santé ou des soins lorsque requis.

Le monde est rempli d’idées au sujet de la politique et de l’action politique qui peuvent influencer la santé. Tenir compte du facteur politique, c’est tenter de comprendre comment les gens perçoivent le lien entre les décisions politiques et la santé des personnes, des familles et des collectivités. Il convient dans la perspective des facteurs politiques et légaux de tenter de saisir le mieux possible si les enjeux politiques et légaux peuvent soit influencer le bien-être, soit empêcher l’adoption des modes de vie sains.

Les croyances des personnes, d’un milieu donné, sur le lien qui peut exister entre la richesse et la santé ou leur accès aux soins ou aux services des professionnels de la santé, entrent dans la catégorie des facteurs économiques. En examinant cet aspect, l’infirmière ou l’infirmier tentera également de comprendre, au sein de la famille, qui est le principal soutien en matière de revenus, et si ces revenus sont suffisants pour maintenir tous les membres de la famille en bonne santé.

Les facteurs éducatifs constituent le lien que les personnes font entre le niveau d’éducation et la capacité à se garder en santé ou à prévenir la maladie. Le regard porté sur le niveau d’éducation est nécessaire aux personnes qui soignent, et les infirmières et infirmiers, en particulier, entrent dans cette catégorie. Selon la théorie, on considère sous cet aspect la valeur accordée à l’éducation, et ce de façon générale.

Les valeurs et les croyances culturelles et le mode de vie font référence aux façons de penser en regard de la santé ainsi que les moyens dont on se dote pour la conserver ou la retrouver. Ce que les personnes d’une culture donnée qualifient de bons soins entre dans cette catégorie.

But de la recherche

Selon Leininger et McFarland (2002), leur théorie constitue aussi un guide pour découvrir de nouvelles connaissances ou pour les confirmer. La présente recherche a comme objectif de confirmer l’appropriation des sept facteurs sociaux par des étudiantes ayant participé à un stage d’un mois en immersion culturelle.

Méthode

La source des données est le journal de bord fourni par six étudiantes finissantes au baccalauréat en sciences infirmières ayant dûment signé un formulaire de consentement pour participer à cette recherche qualitative. En effet, pendant toute la durée de leur séjour, les étudiantes sont tenues de compléter individuellement, sur une base quotidienne, un journal de bord. Dans ce journal, chacune décrit, le plus explicitement possible, ses expériences au niveau personnel et émotionnel en mettant un accent particulier sur les apprentissages significatifs, à chaque jour, pendant tout le mois que dure le stage. De façon générale, le journal constitue un outil d’apprentissage où, par le moyen d’une écriture personnelle et informelle, les étudiantes ont l’opportunité de faire des prises de conscience. De plus, le journal constitue une source de données très utile et fournit un commentaire descriptif et intime sur la vie quotidienne d’un individu, en l’occurrence ici les étudiantes en immersion culturelle (Ibarreta et McLeod, 2004; Morse et Field, 1996; Ritchie, 2003). St-Clair et McKenry (1999) ont rapporté que dans un contexte de stage en immersion culturelle, la rédaction d’un journal de bord suscite le développement de la compétence culturelle pendant le stage, car il permet de faire des prises de consciences importantes. Le contenu du journal de bord de six personnes, qui ont effectué le stage en immersion culturelle et signé le formulaire de consentement requis, sert ainsi de matériel principal permettant de dégager le degré d’appropriation des sept facteurs d’influence du soin culturel.

Analyse des données

Afin de pouvoir respecter au maximum l’anonymat, les participantes ont soumis le manuscrit de leurs journaux de bord sans indication d’identité. Les textes remis sous forme manuscrite ont été retranscrits en format électronique par une étudiante de deuxième année de baccalauréat, qui ne connaissait pas les stagiaires. La codification des extraits de journaux selon les sept facteurs sociaux de Leininger (Leininger et McFarland, 2002) a été effectuée par l’auteure principale à l’aide du logiciel NVivo.

Résultats

Comme l’indique le tableau 1, les éléments liés au facteur social « valeurs et les croyances culturelles et mode de vie » abondent dans l’ensemble des journaux. À l’opposé, le facteur social se rapportant aux éléments politiques et légaux d’une société deviennent ceux dont les participantes se sont le moins imprégnées; à tel point que quatre participantes sur six n’y réfèrent jamais. Les facteurs économiques occupent la seconde place dans les fréquences relatives. Finalement, dans un ordre décroissant, on retrouve des évocations des facteurs des liens familiaux et sociaux, religieux, éducatifs et technologiques.

Tableau 1

Pourcentage relatif de la récurrence des facteurs par rapport au nombre de passages totaux codés pour chacune des participantes

Pourcentage relatif de la récurrence des facteurs par rapport au nombre de passages totaux codés pour chacune des participantes

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Bien que les étudiantes aient vécu le même stage, d’une durée identique, dans un même pays, ce qui en est relaté dans les journaux de bord et s’en dégage démontre bien l’unicité de l’expérience humaine. Fabiola (des pseudonymes sont utilisés afin de préserver l’anonymat) semble avoir été beaucoup plus imprégnée que les autres des valeurs et des croyances culturelles et du mode de vie. Cependant, ses propos laissent croire que les facteurs familiaux ont eu peu d’emprises sur elle, puisqu’elle les évoque beaucoup moins. Pour Bianca et Emma la dimension technologique était à peine mentionnée ou même absente. Emma se démarque par le fait qu’elle relate souvent les facteurs éducatifs, mais il s’agit aussi de la seule personne qui n’a jamais fait référence aux facteurs technologiques et se réfère sensiblement moins que les autres aux facteurs économiques.

Comme la longueur des journaux comporte des variations considérables, pour fins de comparaison, le nombre d’extraits relatifs à un facteur est mis en proportion avec le nombre d’extraits totaux codés.

Voici des extraits qui illustrent l’appropriation pour chacune des catégories de facteurs;

Facteurs technologiques :

« Aucun gant n’est porté lors des consultations ».

« C’était propre mais toujours avec du matériel et équipements très vieux ».

« Le matériel utilisé est très désuet. La plupart des spéculums et des pinces sont rouillés et les techniques d’asepsie sont fréquemment négligées ».

Facteurs religieux, spirituels et philosophiques :

« Nous y avons visité la mosquée et j’ai appris que le lieu de prière était défendu aux touristes…. Cinq fois par jour, on entend l’appel à la prière qui provient des haut-parleurs de la mosquée. C’est mon plus grand dépaysement depuis mon arrivée ».

« Dans le fond l’aspect qui peut causer des problèmes ou en éliminer c’est leur religion, leur culture. Et c’est ça qui est presque impossible à changer que c’est une valeur ancrée dans leur vie et l’éliminer ne pourrait fonctionner ce serait comme enlever une partie de leur Être ».

Facteurs politiques et légaux :

« Les gens ici aiment le président m’a-t-elle dit parce qu’il accorde beaucoup de droits aux femmes ».

Facteurs économiques :

« Pour les pauvres, c’est gratuit, pour ceux de la sécurité sociale, c’est 1.500 dt et pour eux qui ont de l’argent, c’est 7 dt. ».

« Pour continuer, M.X nous a parlé un peu de la santé. Le budget tunisien pour la santé est égal au budget d’un C.H parisien, mais que le budget d’un C.H tunisien équivaut le budget du Burkina Faso ».

« Les antibiotiques étant trop chers, le médecin va d’abord traiter les symptômes. Il prescrit surtout des antitussifs, anti-inflammatoires et antipyrétiques ».

« Les infirmières nous ont dit que les gens de classe sociale plus élevée vont généralement dans des cliniques privées ».

Facteurs éducatifs :

« J’ai appris aussi que leur moyenne générale était calculée sur 20. La plus haute note était de 16/20. Ils ont (les premières années) toujours un examen de contrôle les lundis ».

« Des étudiantes de 2ième année étaient là, elles faisaient plutôt de l’observation et pas de pratique ».

Facteurs des liens familiaux et sociaux :

« Les filles m’ont dit qu’elles ne boivent jamais d’alcool, même quand elles sortent dans les discothèques ».

« …elles respectent la notion de chasteté avant le mariage ».

« Les gens se touchent beaucoup entre eux autant chez les femmes que chez les hommes ce qui est très différent de chez nous. Lorsque l’on voit deux personnes du même sexe se tenir par la main, on pense tout de suite à l’homosexualité. C’est tout le contraire dans les pays de culture arabo-musulmane puisque les gens utilisent beaucoup leurs mains pour communiquer ».

Valeurs et croyances culturelles et modes de vie :

« Ici ils sont tellement intéressés par l’âme qu’il disent qu’il faut sauver le corps humain (le soigner) pour garder l’âme de l’humain. Je crois, si j’ai bien compris, que les soins infirmiers étaient aussi reliés à cette philosophie ».

« Alors que nous parlions des accidents, j’ai demandé au médecin si le taux d’accidents d’auto était élevé en Tunisie et il m’a répondu que son pays se classait en deuxième position au monde, après la France ! ».

« Avant la discussion avec notre guide les 3 habitants de Tunisie nous ont fait un souper de type tunisien. L’entrée était une brigue : oeuf + crêpe avec pain chou, carotte, concombre et le plat principal est du couscous avec du poisson rouge + bleuté ».

En résumé, l’appropriation des facteurs s’exprime ainsi : d’abord, les valeurs et le mode de vie sont nettement en avance. Viennent ensuite les facteurs économiques suivis des facteurs familiaux, religieux, éducatifs et technologiques. Pour clore la séquence, les facteurs politiques et légaux ne sont pas perçus dans les propos relatés par quatre participantes sur six.

Discussion

La théorie de diversité et d’universalité des soins culturels de Leininger (Leininger, 1995b; Leininger et McFarland, 2002) met en lumière les dimensions culturelles majeures reliées entre elles, qu’une infirmière doit connaître et approfondir afin de démontrer l’habileté à dispenser des soins culturellement congruents ou significatifs culturellement. Parmi ces facteurs, on retrouve la vision du monde, l’ethnohistoire, la langue et les modes de communication, les croyances et les pratiques en soins génériques et professionnels et les facteurs généraux et spécifiques aux soins infirmiers proprement dit. À cela s’ajoute sept facteurs sociaux clés, qui influencent la santé et les soins : (technologiques, religieux, spirituels et philosophiques, les liens familiaux et sociaux, les facteurs politiques et légaux, les facteurs économiques, les facteurs éducatifs et les valeurs et les croyances culturelles et le mode de vie). Dans l’analyse des journaux de bord, l’attention s’est portée sur les sept types de facteurs sociaux. L’examen des journaux de bord de six étudiantes, qui ont effectué un stage d’un mois en immersion culturelle en Tunisie, permet de voir que les facteurs politiques ne sont pas du tout relatés dans les écrits de la majorité des participantes.

Il est intéressant de remarquer que les facteurs des valeurs et du mode de vie seraient ceux qui ont le plus frappé l’imaginaire des participantes. La confrontation de leurs valeurs semble avoir été le point marquant pour ces participantes à un stage en immersion culturelle en Tunisie.

Mais pourquoi les étudiantes en question semblent avoir passé à côté de plus d’éléments marquants de la vie des tunisiens et des tunisiennes, qui ont une influence sur la santé et sur les soins? Le modèle de Campinha-Bacote (2006) illustre le processus de développement de la compétence culturelle et offre une piste d’explications. En effet, au départ pour développer la compétence culturelle, selon cette auteure, il faut le désir culturel.

Pour Campinha-Bacote (1998), il s’agit d’un processus dynamique non linéaire par lequel l’infirmière tend à développer les aptitudes nécessaires pour dispenser des soins dans un contexte interculturel. Le désir culturel; la conscience culturelle; la connaissance culturelle; les habiletés culturelles; ainsi que les rencontres culturelles; constituent les cinq concepts indissociables à la base du processus. Pour mieux le comprendre, voici une brève définition de chacun des concepts : (1) Le désir culturel constitue la base du développement de la compétence culturelle. Ce désir est lié à la motivation de vouloir s’engager dans un processus de développement de sa compétence culturelle. Il s’agit d’un engagement à valoriser la diversité dans toutes les sphères de la vie tant personnelle que professionnelle (Campinha-Bacote, 2002); (2) la conscience culturelle ou la prise de conscience est un processus dans lequel l’étudiante-infirmière devient sensible (dans le sens de percevoir) aux types d’interactions pouvant se manifester compte tenu de sa culture et de celle de la personne en demande d’aide (Campinha-Bacote, 1994); (3) la connaissance culturelle est un processus par lequel l’étudiante-infirmière cherche et obtient des informations sur les dimensions socio-culturelles qui influencent le soin et la santé (Campinha-Bacote, 1994). C’est à ce moment que selon Lazure et Vallée (2003) que divers systèmes théoriques aident à délimiter les aires de connaissances à maîtriser, dont celui de Leininger; (4) les habiletés culturelles sont les capacités de l’étudiante-infirmière d’effectuer une collecte des données qui tienne compte des éléments culturels de la personne, de sa famille et de la communauté d’appartenance en vue de négocier un soin sensible culturellement (Leininger, 1991); (5) Le concept de rencontres culturelles est lié au processus par lequel l’étudiante-infirmière cherche à interagir directement avec des personnes de diverses origines culturelles et ethniques (Campinha-Bacote, 1984). Cette recherche constante des caractéristiques communes permet de relever les valeurs humaines, les croyances et les besoins spécifiques qui transcendent la culture. Lorsqu’au départ les aspects communs sont mis au jour, les différences peuvent être plus facilement replacées dans un cadre culturel, qu’il s’agisse de l’amour familial ou de la protection des enfants.

Conclusion

Un stage professionnel en immersion culturelle d’une durée d’un mois en Tunisie contribue certes à développer une sensibilité culturelle comme en témoigne les conclusions exprimées par les participantes.

« Cette immersion culturelle m’avantagera, j’en suis convaincue, au niveau de ma relation avec les clients, entre autres les étrangers. Je sais maintenant comment ils peuvent se sentir, donc je les comprendrai mieux et ferai en sorte de respecter leur rythme ».

« Je ressors grandie de cette expérience en tant que personne et infirmière également. Je me suis rendue compte que de vivre dans une culture différente de la sienne n’était pas aussi facile que je le croyais et que pour arriver à s’adapter, il faut beaucoup de conditionnement et de tolérance, ce qui reste un point à améliorer chez moi ».

L’étude a décrit le degré d’appropriation, les éléments d’une culture, soit les facteurs sociaux de Leininger, pendant un stage d’immersion d’un mois ce que peu d’études avaient fait (Farman, 2007; Finn et Lee, 1995; Smith, 1997).

Toutefois, il apparaît que pour qu’une véritable compétence culturelle soit développée, la préparation et le suivi en sont des éléments importants. En effet, selon Lazure et Vallée (2003), en préparation à cette expérience de « rencontre culturelle prolongée », les étudiantes devraient démontrer leur engagement par des implications diverses dans la communauté. Idéalement, un cours sur les approches interculturelles en santé serait préalable à cette expérience. Sur le terrain, la rédaction d’un journal de bord est jugée essentielle, puisqu‘elle conduit les étudiantes à des prises de conscience en lien avec les différences culturelles. De plus, nous recommandons que les étudiantes aient la possibilité d’effectuer plusieurs évaluations culturelles à l’aide d’un guide construit spécifiquement pour ce type de stage. Le séjour, par lui-même, n’est pas garant que la compétence culturelle sera développée. En effet, l’élément central à tout développement de la compétence culturelle étant le désir culturel selon Campinha-Bacote (2003), il est primordial qu’il soit véritablement présent afin que la magie puisse s’opérer.