Présentation : marges de la biosémiotiquePresentation: Biosemiotic Margins[Notice]

  • Jonathan Hope

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  • Jonathan Hope
    Université du Québec à Montréal

Bien que ses racines s’ancrent jusque dans la Grèce ancienne, la biosémiotique est une entreprise somme toute récente. D’un mot discret forgé dans les années soixante, la biosémiotique est devenue une discipline solidement établie avec un programme de recherche en pleine expansion. Une étape décisive dans son implantation fut son institutionnalisation, avec des rassemblements, des revues et des livres dédiés, et son inscription progressive dans les programmes universitaires. Cela ne signifie pas pour autant que les qualités et caractéristiques identitaires de la biosémiotique soient arrêtées. Bien au contraire. Dans “The Evolutionary history of Biosemiotics”, Don Favareau organise les différents moments de la recherche biosémiotique en une histoire convaincante et termine son article ainsi : Ce numéro thématique sur les marges de la biosémiotique se veut une de ses contributions aux développements contemporains de la recherche sur les relations de signes dans et avec des systèmes vivants. Je suis heureux et reconnaissant qu’il paraisse dans les pages de la revue canadienne RSSI. À l’hiver 2017, j’ai donné un séminaire au programme de sémiotique de l’Université du Québec à Montréal intitulé Signes vivants. La biosémiotique et ses marges. Toutes les personnes inscrites étaient bien avancées dans leur parcours, mais pour des raisons variées (principalement linguistiques et culturelles), la plupart en étaient à leur première rencontre avec la biosémiotique. Puisque l’objectif principal du séminaire consistait à expliciter des relations de signes dans des systèmes vivants, nous avons évidemment lu des textes de biosémiotique fondamentaux et contemporains. Mais compte tenu de l’identité du programme doctoral (traditionnellement plus proche des humanités et des arts) et de l’orientation que j’ai voulu donner à ce séminaire de recherche, j’ai cru bon de mettre à l’étude des textes et des enjeux extérieurs à la biosémiotique, mais résolument engagés avec des questions touchant au signe, au sens, à l’interprétation, et au vivant – ce que j’appelle les marges de la biosémiotique. Cette activité d’enseignement a informé ce numéro thématique. En rédigeant l’appel de textes de ce numéro thématique, j’ai explicitement lancé un défi aux biosémioticiens et aux biosémioticiennes : celui de jeter leurs lignes dans des eaux peu familières, mais prometteuses, Défi que j’ai réitéré aux individus ayant un accès limité à la biosémiotique mais qui se sentent interpellés par ce qu’elle peut offrir. L’idée était de troubler la disciplinarité : de troubler les autres avec la biosémiotique, et de troubler la biosémiotique elle-même avec des rencontres inattendues. La nature de cet exercice suppose que j’aurais envisagé, avec plaisir, un plus grand nombre de contributions, couvrant une encore plus grande diversité de questions. Mais la nature de cet exercice, bis, exigeait aussi que je sélectionne un nombre représentatif, raisonnable et définitif de manuscrits. En quelques mots, voici l’essentiel des quinze propositions choisies. Prisca Augustyn interroge la marginalité de la biosémiotique et de la biolinguistique dans les sciences linguistiques et cognitives contemporaines. Dans son article, elle rappelle aux lecteurs et aux lectrices que le langage n’est pas uniquement un phénomène culturel, un instrument de communication entre individus d’un héritage commun, mais bien un système de modélisation propre à l’espèce humaine, un outil cognitif, et qu’il doit être étudié comme tel. Augustyn attire notre attention sur des courants émergents dans la linguistique et les sciences cognitives qui intègrent des concepts biosémiotiques, parfois timidement et parfois de manière implicite. Une véritable rencontre entre la biosémiotique et ces autres disciplines déplacerait la recherche linguistique au-delà de la taxonomie et de la catégorisation, dans la chair des locuteurs et locutrices. Les linguistes devront par ailleurs sérieusement considérer la diversité de la biosémiose, au sein des populations humaines …