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Cet ouvrage collectif cherche à dresser un portrait de l’évolution de la formation des maitres au Québec depuis le Régime français jusqu’à aujourd’hui, en mettant l’accent sur des enjeux et des débats qui sont, encore aujourd’hui, bien vivants. Le premier chapitre traite de la formation des maitres sous le Régime français. Le deuxième chapitre se penche sur l’une des trois premières écoles normales mises sur pieds en 1856 au Québec, celle de Jacques-Cartier. Le troisième concerne la formation donnée par les enseignantes des communautés religieuses et l’importance qu’a pu avoir la Congrégation de Notre-Dame sur la formation des enseignantes, religieuses comme laïques. Le quatrième chapitre se consacre aux pratiques pédagogiques introduites par les Frères des écoles chrétiennes, qui eurent une grande influence sur les méthodes d’enseignement et la formation des enseignants jusqu’à la Révolution tranquille. Finalement, le dernier chapitre expose les changements et continuités découlant du remplacement des écoles normales par les universités concernant la formation des enseignants québécois, en mettant l’accent sur le rôle particulier joué par l’Université du Québec.
Les chapitres sont plutôt indépendants les uns des autres et pourraient être lus dans le désordre, certains dressant un portrait très précis d’un lieu d’établissement, comme le deuxième chapitre, alors que d’autres cherchent à donner une vue d’ensemble de l’évolution de la formation des maitres sur une vaste période de temps, comme le premier chapitre. Ce choix éditorial peut amener une certaine confusion chez le lecteur et fait naitre quelques problèmes qui affectent la fluidité de l’ouvrage. Certains personnages historiques qui sont souvent nommés dans certains chapitres ne sont présentés véritablement que dans des chapitres subséquents. Il y a beaucoup de sauts dans le temps : les chapitres passent du Régime français à la Révolution tranquille pour revenir de façon soudaine au 19e siècle avant de retourner une nouvelle fois à la Révolution tranquille. On privilégie parfois l’anecdotique tout en omettant d’expliquer certains évènements pourtant significatifs pour celui qui voudrait bien comprendre le contexte historique des débats en jeu, comme la guerre des éteignoirs qui est seulement nommée sans être expliquée au lecteur. Certains chapitres sont très descriptifs, alors que d’autres relèvent davantage de l’hommage, en particulier le troisième chapitre qui revendique cette prise de position de façon explicite.
Malgré la drôle de construction proposée pour cette histoire de la formation des maitres au Québec et son caractère parfois panégyrique, elle demeure une lecture incontournable et fascinante pour celui ou celle qui s’intéresse aux enjeux actuels en éducation. L’ouvrage, en particulier son deuxième chapitre, nous fait réaliser que les enjeux et les débats actuels ne datent pas d’hier. En effet, déjà au 19e siècle on critiquait le laxisme dans la formation des maitres et dans l’octroi des brevets d’enseignement, débattait à savoir si l’enseignement relevait davantage de l’art ou de la science, ou argumentait sur la trop petite ou trop grande importance accordée à la pédagogie et aux nouvelles méthodes d’enseignement dans la formation des enseignants québécois.