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L’ouvrage de Jacques Queudet a pour objectif de rendre compte des différentes trajectoires professionnelles des éducateurs spécialisés. Pour ce faire, cet auteur a mené une enquête auprès de 740 éducateurs spécialisés diplômés en France entre 1985 et 1995. Les conclusions font ressortir la présence d’un décalage entre les espérances professionnelles initiales des éducateurs spécialisés et la réalité du marché du travail. Elles soutiennent également les aspects linéaire et hermétique des trajectoires professionnelles de cette pratique. Ainsi, bien que les possibilités professionnelles se soient multipliées au cours des dernières années par l’ouverture à de nouvelles clientèles, l’étanchéité et l’hétérogénéité des différents secteurs de pratique (handicap, inadaptation, santé), la concurrence des autres professions sociales et les obligations personnelles et familiales des éducateurs spécialisés ont grandement limité la polyvalence et la mobilité de ces professionnels.
Pour en rendre compte et mettre en contexte les résultats de cette enquête, cette publication se divise en deux parties complémentaires. La première partie définit le métier d’éducateur spécialisé et la structuration de l’espace professionnel. La seconde partie expose les résultats issus de l’enquête, le choix professionnel, l’entrée dans la profession, la mobilité des éducateurs spécialisés, leur parcours professionnel et la sortie du métier.
L’intérêt de cet ouvrage tient d’abord à la somme des informations transmises. Cette suite d’une thèse soutenue en 2005 se démarque effectivement par la qualité et la pertinence de sa documentation. De plus, l’enquête réalisée par l’auteur ajoute grandement à la valeur de la publication. En effet, l’utilisation d’une méthode mixte, questionnaire et entrevue, permet de rendre davantage compte d’une réalité complexe et assurément subjective. En ce sens, les verbatim illustrent très bien et enrichissent les propos de l’auteur. L’ouvrage est bien évidemment centré sur la réalité française ; cela dit, celle-ci permet aisément certains parallèles avec la réalité des éducateurs spécialisés québécois.
On doit déplorer, toutefois, que le texte soit de temps à autre ardu à suivre, trop souvent ponctué d’abréviations liées aux milieux de pratique. Cet aspect est d’autant limitatif si l’ouvrage se veut universel et qu’il cible comme lectorat de futurs étudiants en éducation spécialisée.
En somme, cette publication permet une réflexion élargie et plus qu’intéressante sur l’état actuel de la profession qu’est l’éducation spécialisée. Si elle représente potentiellement un outil de référence pour les futurs professionnels, elle oblige également à un questionnement quant aux valeurs sociales actuelles, et quant à la reconnaissance qu’accordent les dirigeants et la société aux professions éducatives et d’entraide.