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Si l’école nourrit […] l’élève de culture, c’est pour lui permettre de s’adapter et de s’insérer plus rapidement dans ce monde,monde d’une extrême complexité où il lui faut vivre. Mais c’est aussi pour qu’il assimile cette culture, pour qu’il construise par elle une identité intellectuelle et personnelle afin qu’à partir de cette base il soit à son tour innovateur et même créateur.
Rapport Corbo, 1994, p. 15
L’éducation est une voie privilégiée de transmission et d’épanouissement de la culture d’un peuple comme d’un individu, et l’école demeure la première institution sociale dont la mission est l’éducation. L’éducation, en favorisant notamment le dialogue entre quête de sens et construction des savoirs, se doit de procurer à l’élève des outils et des langages pour comprendre le monde et se comprendre dans le monde (Simard, 2002a, p. 72). C’est cette perspective culturelle qui anime l’actuelle réforme en éducation au Québec. Réaffirmer l’école dans sa finalité culturelle (en plus de ses finalités utilitaire et cognitive), comme l’affirmait le Rapport Inchauspé (1997), à la suite des États généraux sur l’éducation de 1996, est devenu une priorité en cette époque où déferlent sur notre monde la pensée unique et la généralisation de la culture MacDo ou MacWorld à la vitesse de la mondialisation du système de marché (Aktouf, 1999). S’appuyant sur ce rapport, le ministère de l’Éducation du Québec, dans son document L’école tout un programme : énoncé de politique éducative (ministère de l’Éducation du Québec – MÉQ, 1997), statuait sur l’extrême urgence de rehausser la dimension culturelle des programmes de formation, principalement dans les disciplines, et de favoriser une approche culturelle pour enseigner ces disciplines. Les orientations du Programme de formation de l’école québécoise, tant à l’ordre du primaire que du secondaire (MÉQ, 2001a et 2003), préconisent l’ancrage culturel dans les apprentissages réalisés par l’élève afin d’élargir sa vision du monde, de structurer son identité et de développer son pouvoir d’action.
La volonté ministérielle de renforcer les liens entre éducation et culture, de réhabiliter le rôle des savoirs, voire des diverses disciplines dans une perspective culturelle, est tout à fait pertinente. L’élève, dans son parcours de formation, sera convié aux grands univers de la connaissance et de la culture ; ces savoirs essentiels que sont les langues, le champ de la technologie, de la science et des mathématiques, l’univers social, les arts et le développement personnel, constituent un ensemble de connaissances et de pratiques, formant le noyau de la culture. Rappelons-le, la perspective culturelle conçoit la formation d’abord, comme l’appropriation, par les nouvelles générations, des savoirs de la culture, qui constituent le propre de l’être humain et qui sont l’essence du monde où il faut vivre, monde qui n’est plus naturel mais culturel (Rapport Inchauspé, 1997, p. 25). Cela semble primordial dans une société où la jeunesse, privée de son passé et en mal d’avenir a tendance, comme dans la plupart des sociétés occidentales, à vivre au présent.
À la lumière de plusieurs auteurs (Bruner, 1991, 1996 ; Dumont, 1968 ; Simard, 2002a), avoir une approche culturelle de l’enseignement signifierait se préoccuper d’une appropriation personnelle et significative des savoirs par l’élève, situer les savoirs dans le contexte historique, social et culturel de leur élaboration tout en instaurant des liens avec la culture première de l’élève – avec la diversité, voire la disparité qu’on connaît, tant du point de vue du profil culturel des jeunes que de la profusion des lieux de savoir et de la puissance des technologies de communication –, provoquer chez l’élève une prise de conscience de sa propre culture tout en prenant du recul pour mieux la comprendre et s’ouvrir à soi, aux autres et au monde. Il en résultera une évolution de ses propres représentations et de ses savoirs, ferments d’une culture en devenir.
Un des mandats de l’éducation se dessine donc ainsi : mettre en oeuvre des conditions qui permettent aux élèves de s’approprier, d’intégrer et d’organiser les connaissances en un tout cohérent, original et personnel, de se situer au sein des problèmes et des réalités complexes de son temps, dans son identité humaine et dans l’histoire (Simard, 2002a, p. 77).
L’approche culturelle de l’enseignement touche certes les élèves, mais aussi, de manière complexe et profonde, les enseignants, qui doivent s’inscrire dans un rapport vivant à la culture et un réinvestissement historique, social et culturel des savoirs scolaires. Par le fait même, la formation initiale et continue des enseignants s’en trouve influencée dans ses programmes et ses activités (Sorin et Lafortune, 2006). C’est pourquoi le Gouvernement du Québec a publié tour à tour son document La formation à l’enseignement. Les orientations. Les compétences professionnelles (MÉQ, 2001b), en vigueur depuis dans les universités québécoises, et celui à l’intention du personnel enseignant, signé conjointement avec le ministère de la Culture et des Communications, L’intégration de la dimension culturelle à l’école (MÉQ et MCC, 2003).
Dans cette perspective, l’enseignante ou l’enseignant devient un passeur culturel, selon l’expression maintenant consacrée de Zakhartchouk (1999, p. 20), passeur dans le sens où il va accompagner l’élève dans ce voyage de sa culture première vers une « culture » qui « vaut la peine », une culture dans laquelle il se doit d’être plongé, bien que le voyage soit une occasion d’aller plus loin. Passeur « cultivé » s’il veut être « culturel », et « cultivé » en particulier dans son domaine spécifique, celui de la pédagogie, sans laquelle il ne peut y avoir de « passage » pour tous. Pour que ce passage culturel à l’école ait véritablement lieu, les conditions à réunir pour une formation adéquate relèveraient de trois grands axes (Zakhartchouk, 1999, p. 112) :
un travail sur le rapport personnel à la culture de chaque enseignant ou futur enseignant, point d’appui et passage obligé pour une formation culturelle des élèves ;
une intégration de la réflexion sur la culture dans toute formation, notamment disciplinaire ;
la mise en place d’une articulation entre apprentissage de techniques pédagogiques et formation culturelle.
Dans ce contexte de réforme et de discours officiel sur l’enrichissement culturel prôné à l’école, cette question de la culture, que ce soit au sujet de sa définition, de son acquisition par les élèves, des approches pédagogiques, de la formation à l’enseignement, etc., alimente la réflexion des chercheurs (Simard, 2001, 2002b). On en veut également pour preuve l’ouvrage collectif dirigé par Simard et Mellouki (2005) ou un numéro thématique de la Revue des sciences de l’éducation « Enseignement et cultures », dirigé par Tardif et Mujawamariya (2002) où Gohier, notamment, appréhende l’enseignant à la fois comme passeur, médiateur et lieu, et où Saint-Jacques, Chené, Lessard et Riopel ont investigué les représentations qu’ont les enseignants du primaire de la dimension culturelle du curriculum. En 2001, dans le n° 118, la revue Vie pédagogique présentait un dossier sur la question : « Enseigner et apprendre selon une perspective culturelle » et des chercheurs, tel Simard (2005), se sont penchés sur le rôle de l’école envers la formation culturelle des élèves.
Toutefois, si chaque discipline est porteuse de culture autant par son histoire que par les questionnements qu’elle suscite, c’est le français, qui attire notre attention ici, à la fois comme culture de la langue (Chartrand, 2005) et comme culture littéraire, sans exclure bien sûr le fait que la classe de français est également un lieu de convergence d’autres disciplines, les arts, l’histoire et la géographie, pour ne nommer que celles-ci. Par ailleurs, depuis quelques années, l’approche culturelle en enseignement du français est devenue elle-même objet d’études (Simard, 2004 ; Simard et Côté, 2005) et on commence à publier des ouvrages au service de la pratique enseignante tel ce Guide du passeur culturel dirigé par Boucher et Pilote (2006).
Si la dimension culturelle est au coeur de la réforme scolaire actuelle au Québec, avec cette idée porteuse que la culture n’est pas le seul fief de la littérature et des arts, mais qu’elle est aussi scientifique, mathématique, informatique et autres, elle représente également une préoccupation majeure en France, comme le prouve le récent Décret relatif au socle commun de compétences et de connaissances (ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, 2006). Ce décret fixe les repères culturels et civiques qui constituent le contenu de l’enseignement obligatoire, ce socle commun devenant la référence obligée pour la rédaction des programmes d’enseignement de l’école et du collège (ordres du primaire et du secondaire). Outre les compétences liées à la culture scientifique et technologique, à la culture numérique, etc., une des sept compétences y cible expressément le développement d’une culture humaniste fondée notamment sur la fréquentation des oeuvres littéraires, les apports de l’éducation artistique et culturelle, et l’acquisition de repères géographiques et historiques communs. Déjà, au plan institutionnel, l’inscription explicite de la littérature au programme dès l’école élémentaire, en 2002, et l’encouragement à la même époque des projets artistiques et culturels sous le ministère de Jack Lang, manifestaient la volonté d’un partage généralisé des biens culturels disponibles et de leurs bénéfices tant individuels que collectifs tout au long du cursus scolaire.
Par ailleurs, du point de vue de la recherche, tant au Québec qu’en France (et plus largement en Europe francophone), l’évolution des références théoriques dominantes, autrement dit le déplacement de l’attention portée au texte vers le sujet lecteur (l’approche formaliste versus l’esthétique de la réception sur les traces d’Iser, Jauss, Eco) a ouvert tout un nouvel horizon de recherches en didactique du français qui se focalise principalement sur la lecture littéraire (Dufays, Gemenne et Ledur, 2005 ; Falardeau, 2003 ; Lebrun, 2006 ; Poslaniec, 2002 ; Sorin, 2003, 2004 ; Tauveron, 2001, 2004 ; Tauveron et Reuter, 1996). La lecture littéraire désigne aujourd’hui un mode de lecture particulier engendré par un va-et-vient dialectique entre une lecture participative privilégiant la construction référentielle et l’implication psychoaffective et émotionnelle du lecteur, et une posture plus distanciée par rapport au texte, ouvrant au symbolisme, aux liens intertextuels, aux jeux des implicites et favorisant la pluralité des lectures. La transposition de la lecture littéraire dans le cadre de l’enseignement devrait notamment aboutir à la prise en compte de la culture privée de l’élève quand il s’agit de la lecture des textes littéraires proposés par l’école, et plus précisément à la prise en compte des manières individuelles de lire, parfois éloignées de celles visées par l’école. Un ouvrage comme celui qu’ont coordonné Demougin et Massol (1999) fait apparaître à la fois la nécessité et l’application limitée de cette prise en compte dans l’ordinaire des classes. L’ouvrage dirigé par Rouxel et Langlade (2004), axé sur le sujet lecteur, est significatif du désir des chercheurs/formateurs de promouvoir ce basculement de perspective au sein de l’école, pour servir l’intérêt des élèves.
Du côté de la sociologie, les travaux de Lahire (2004), qui répondent à ceux de Pierre Bourdieu, et la notion qu’il développe de dissonance, montre la diversité des pratiques culturelles de tout individu (tant en ce qui concerne les objets retenus que les usages qu’il en fait) et questionnent un clivage parfois convenu et un peu forcé entre les pratiques des nantis, d’un côté, et celles des classes dominées, de l’autre. Cette perspective autorise en tout cas à relativiser l’opposition entre la réception qu’ont les uns et les autres des objets culturels disponibles : il n’y a pas, de façon tranchée, les avertis d’un côté et les naïfs de l’autre en matière de consommation/appropriation culturelles, même si la distinction entre production culturelle de masse et production culturelle savante ou légitime perdure.
L’école est donc bien le lieu où mettre au jour ces conflits culturels qui se jouent chez tout individu, et auxquels elle contribue largement. Dans le domaine spécifique de la lecture littéraire, elle doit amener les élèves à la conscientisation de la diversité des postures, et expliciter clairement celles qu’elle préconise et valorise, tout en continuant de s’interroger sur le bien fondé de ces attentes institutionnelles.
Ce numéro thématique explore diverses perspectives didactiques, tant au Québec qu’en France, prenant en compte une approche culturelle en enseignement du français. On a affaire à une diversité d’approches : certaines problématisent clairement la question de l’altérité culturelle à laquelle l’école confronte les élèves ; d’autres s’appuient davantage sur des observations précises qui permettent de soulever divers problèmes liés à la mise en oeuvre d’un véritable dialogue, d’une véritable intercompréhension entre pairs mais aussi entre l’enseignant et les élèves, chacun parlant à partir d’entours qui lui sont propres ; d’autres enfin avancent des propositions concrètes éprouvées dans des classes. Si les programmes scolaires et les orientations didactiques et pédagogiques fixés par les gouvernements diffèrent d’un pays à l’autre, si l’importance accordée à la culture se distingue pour des raisons à la fois historiques, politiques et économiques, on ne peut que tirer profit d’une approche comparée en matière d’enseignement du français, langue nationale, de modèles pédagogiques et de contenus de formation.
Ce numéro thématique tente de créer un espace transactionnel entre les diverses problématiques en didactique du français touchant la mise en oeuvre de l’approche culturelle de l’enseignement, dix ans après la tenue des États généraux sur l’éducation de 1996, non pas pour en faire un bilan, mais bien pour en dégager de nouvelles perspectives. Ce numéro explore deux grandes problématiques constituant les deux grandes parties de l’ouvrage. Dans la première partie, ont été regroupées les problématiques liées à l’approche culturelle en formation à l’enseignement : signification d’une approche culturelle de l’enseignement ; conscience de l’enseignant et de son rôle dans l’appropriation de la culture par ses élèves ; conceptualisation de la culture ; signification(s) d’une approche culturelle appliquée à la discipline français, etc.
Denis Simard, Érick Falardeau, Judith Émery-Bruneau et Héloïse Côté ont tenté de saisir le rapport que les enseignants entretiennent avec le savoir et la culture, rapport qu’ils considèrent préalable à une approche culturelle de l’enseignement. S’inspirant des travaux de Charlot (1997) sur le rapport au savoir et des résultats d’une recherche menée auprès de 35 étudiants de deuxième année en formation à l’enseignement du français, ils ont mis à jour quatre profils de ce rapport à la culture susceptibles d’inspirer de nouvelles avenues en formation des enseignants à l’égard de l’approche culturelle de l’enseignement.
Dans le cadre d’un projet d’innovation pédagogique, Sylvain Manseau et Olivier Dezutter justifient l’instauration d’une nouvelle activité, Enseigner dans une perspec-tive culturelle, désormais inscrite au programme de baccalauréat en enseignement au secondaire de l’Université de Sherbrooke. Cette nouvelle activité vise notamment l’intégration des savoirs et la concrétisation de ce que pourrait être une approche culturelle de l’enseignement.
Si Saint-Jacques, Chené, Lessard et Riopel (2002) se sont attardés aux représentations que se font les enseignants du primaire de la dimension culturelle du curriculum, Liliane Portelance rend plutôt compte des savoirs partagés par l’enseignante associée et la stagiaire au sujet de la culture et de l’approche culturelle. Si les significations diffèrent, il y a toutefois consensus sur l’évidence de la dimension culturelle de l’école et sur l’importance de privilégier une approche culturelle dans les apprentissages comme soutien essentiel à la construction des savoirs et au développement des compétences, notamment disciplinaires.
Sans être située en formation à l’enseignement, la recherche de R’Kia Laroui sur les représentations que se font les enseignants de l’approche culturelle ainsi que sur l’impact de ces représentations sur leurs pratiques conduit à des constats riches d’enseignements qui pourraient alimenter la réflexion sur la formation tant initiale que continue des enseignants afin qu’ils deviennent véritablement des passeurs culturels.
Partant du principe que les enseignants seront pour les élèves à la fois des modèles linguistiques et des médiateurs culturels, Martine Mottet et Flore Gervais interrogent les représentations et les réactions affectives de futurs enseignants du baccalauréat en éducation préscolaire et enseignement primaire à l’égard du français québécois oral standard, de la culture et de la didactique de l’oral. De la comparaison des résultats avec le profil de l’enseignant cultivé en français oral qu’elles ont tracé, les deux chercheures ont tiré quelques conclusions pertinentes à la formation à l’enseignement, notamment en regard de la langue parlée, ses particularités par rapport à l’écrit, ses registres, son histoire, sa didactique. Elles souscrivent en cela à la culture de la langue.
La deuxième partie de ce numéro thématique traite plutôt de la prise en compte de l’approche culturelle en classe de français ou de littérature. Les problématiques abordées sont soit liées à l’élève : culture privée, culture scolaire ; culture de la langue ; contexte d’immigration et multiculturalisme ; le lecteur comme être de culture ; soit liées à l’intervention éducative, l’enseignant devant mettre en contexte cette approche culturelle en interpellant son implication comme passeur culturel et en entrevoyant la classe comme une communauté de lecteurs et d’auteurs ou comme communauté interprétative.
Danielle Dubois Marcoin se préoccupe de la fonction d’acculturation de l’école et de la nécessaire prise en considération, dans le cadre d’une éducation à la littérature, des habitus et des référents culturels des élèves. C’est par des propositions dialogiques entre la culture privée et la culture scolaire par l’entremise d’activités créatives personnelles et impliquées que les élèves s’approprieront cette culture nouvelle que leur propose l’école.
Marlène Lebrun s’intéresse à l’élaboration d’une approche culturelle de la littérature en classe de français au primaire en tablant particulièrement sur le dialogue qui s’installe dans la communauté de lecteurs et d’auteurs que constitue une classe. Elle a notamment investigué les représentations que se font les élèves de l’activité d’écriture, de son apprentissage et des pratiques littéraires qui lui sont associées, telle la lecture littéraire. Dans son contexte de recherche, elle établit que l’évolution d’un rapport positif à l’écriture littéraire d’élèves de 10 ans va de pair avec la construction d’une posture auctoriale et une certaine ouverture à la culture.
Patrick Demougin montre comment l’enseignement de la littérature a basculé d’une perspective linguistique (centrée sur le texte) vers une perspective anthropologique (davantage centrée sur le lecteur comme être de culture). Il assimile la rencontre des élèves avec la littérature à la crise fondatrice liée à l’expérience de l’altérité en matière de langue et de culture qu’ont vécue et décrite Derrida et Khatibi (Derrida, 1996). À partir de deux expériences, l’auteur fait apparaître deux risques en enseignement de la littérature : l’instrumentalisation et le désengagement du lecteur. Amener les élèves à avoir prise sur l’altérité culturelle à laquelle on les confronte, en maintenant la tension entre sensible et conceptuel, exige l’implication individuelle de l’enseignant en matière de choix des textes et engage son inventivité professionnelle.
L’analyse du travail d’enseignants en français, langue de scolarisation, auprès d’élèves nouveaux arrivants en France, du CP (1re année du primaire) au CM2 (fin du primaire), permet à Sylvie Courally de mettre en évidence qu’en l’absence de prescriptions ministérielles, face à l’hétérogénéité de leur public et privés de matériel adapté à ces élèves dans le domaine de l’acquisition de la langue et de la culture de l’écrit, les enseignants trouvent des compromis. Contraints par l’urgence d’amener chacun à une maîtrise première de la langue, ils s’appuient essentiellement sur des textes fonctionnels et communicationnels ou sur la transcription d’un oral surnormé, ce qui les conduit à délaisser largement la dimension culturelle de la langue, voire la littérature.
Après avoir rappelé l’évolution historique du concept d’interprétation et faisant appel à la notion d’entour telle que définie par François (1998), Évelyne Bedoin analyse et compare deux situations de débats interprétatifs dans une même classe de CM2 appliquées respectivement à une question relevant à la fois des sciences de la nature et de la littérature. L’hétérogénéité des entours au sein de la communauté interprétative que constitue la classe amène à des quiproquos qui ne sont pas forcément mis au jour par le maître qui, dans sa reformulation, a tendance à imposer un sentiment de consensus alors que l’intercompréhension ne s’est pas vraiment développée du fait que les cadres de références des différents interlocuteurs n’ont pas eu l’occasion d’être explicitement identifiés.
Pour conclure, les perspectives didactiques présentées contribuent, à leur façon, à faire avancer la réflexion sur l’enseignement du français dans sa dimension culturelle, ouvrant ainsi de nouveaux chantiers de recherche.
Parties annexes
Note
-
[1]
Danielle Dubois Marcoin est également responsable de l’équipe du projet Littérature et enseignement à l’Institut national de Recherche en Pédagogie (INRP) de Lyon.
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