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« Great mobility, deadly markmanship, skilful use of surprise and forest cover, high morale and […] a tradition of victory, gave the colonial regulars their superiority » (p. xvii). Voilà comment William J. Eccles (1917-1998), le grand spécialiste canadien de l’histoire sociale et militaire de la Nouvelle-France, clôturait son évaluation des Troupes franches de la Marine dans le Dictionnaire de biographie canadienne paru en 1974 (III: p. xvii). Quelques années plus tard, ce fut un étudiant d’Eccles, Jay Cassel (jadis Ian Casselman), qui en 1987 soutint à l’Université de Toronto une thèse de doctorat intitulée Troupes de la Marine in Canada, 1683-1760 : Men and Material (624 p.). Les résultats de cette thèse, qui ne fut jamais publiée, furent résumés dans l’article « Men in Arms. The French Colonies », qui parut en 1993 dans la Encyclopedia of the North American Colonies, dirigée, entre autres, par W.J. Eccles, sous la direction générale de Jacob E. Cooke (II: p. 499-507).
Une génération plus tard, les échos de l’intuition d’Eccles et de la recherche de Cassel sont à la base de cette nouvelle synthèse sur les troupes de la Marine, dirigée par l’historien et généalogiste québécois Marcel Fournier à partir de données biographiques et statistiques maintenant disponibles grâce au projet de recherche sur les officiers des troupes de la Marine au Canada, 1683-1760. Fournier, un spécialiste des migrations européennes et françaises en Nouvelle-France pendant la période de l’Ancien Régime jusqu’à 1804, s’est penché depuis 2009 surtout sur le personnel militaire. Dans son dernier ouvrage, il dirige une équipe d’historiens, archivistes et généalogistes du Québec (René Chartrand, Louis Lalancette, Rénald Lessard, Denis Racine) et de France (Bertrand Fonck, Boris Lesueur, Laurent Veyssière), épaulés par des recherchistes québécois (Guy Desjardins, Marie Gagné, Denise Gravel). Il s’agit d’un groupe de travail qui, surtout sous l’égide des Éditions du Septentrion de Québec, a pendant la dernière décennie collaboré à plusieurs initiatives et publications sur la dernière période de l’histoire de la Nouvelle-France au Québec ainsi qu’en France. Le projet de recherche sur les troupes de la Marine a tiré profit d'une maîtrise tout récemment déposée par Louis Lalancette (Les capitaines des Troupes de la Marine de 1683 à 1739 : la carrière militaire en Nouvelle-France, Université de Montréal, 2016).
Sous la direction de M. Fournier, le Projet de recherche sur les officiers des Troupes de la Marine a démontré que les 650 officiers identifiés par Cassel en 1987 furent en réalité 895, et a confirmé que ces effectifs provenaient de plus en plus de familles canadiennes. La première partie du collectif, dénommée « Partie historique » (p. 21-270), renseigne le lecteur sur la genèse française des troupes de la Marine, sur les transformations canadiennes, sur leur emploi au Canada, dans l’Ouest et aux Antilles, ainsi que sur les rôles des officiers (capitaine, lieutenant, enseigne, cadet, etc.). La deuxième partie, « Partie biographique » (p. 271-515), présente, dans un « Répertoire des officiers » qui couvre la période de 1683 à 1760 (p. 274-496), les notices biographiques très détaillées des 895 officiers repérés. Ce répertoire représente sans doute la partie la plus utile et efficace de ce livre imposant, qui, placé sur les rayons tout près de ceux de René Jetté (1944-2003) (Dictionnaire généalogique des familles du Québec, 1983), de Marthe Faribault-Beauregard (1913-1996) (La population des forts Français d’Amérique (XVIIIe siècle), 1982-2016) et de Louis Pelletier (Le clergé en Nouvelle-France. Étude démographique et répertoire biographique, 1993) ne cessera d’être compulsé pendant plusieurs années par les historiens et les généalogistes. Nous avons relevé seulement deux erreurs dans les notes en bas de page, « Hubert Watete » pour « Hubert Watelet » (p. 61, note 72), et « Stanley Pargelis » pour « Stanley McCrory Pargellis » (p. 109, note 26). Avec un instrument de recherche de ce type, il est évident que seul l’usage régulier montrera, le cas échéant, la nécessité d’apporter des révisions aux notices biographiques. Pour l’instant, on ne peut que féliciter le directeur, les auteurs et les recherchistes qui ont contribué à cet ouvrage.