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De façon intéressante, Diane-Gabrielle Tremblay et Nadia Lazzari Dodeler, interpellent directement les pères afin de mieux apprécier leurs réalités lors de l’utilisation d’un congé parental ou de paternité d’au minimum quatre semaines avec l’enfant. Le volume de 128 pages auxquelles s’ajoute une bibliographie présente les résultats d’une étude qualitative menée sous la forme d’entrevues auprès de 33 pères ayant bénéficié de ces congés, pris pour la majorité (n=26) seuls avec leur enfant alors que les mères avaient repris le travail.
Les auteures campent bien leur étude dans la documentation récente portant sur l’engagement paternel ainsi que dans celle relative aux politiques publiques visant à une meilleure conciliation travail famille. Ces éléments de contexte se retrouvent dans le premier chapitre du volume. Les paramètres méthodologiques de l’étude, abordés dans le deuxième, sont dans l’ensemble décrits avec clarté. On aurait toutefois souhaité avoir davantage de précisions sur la stratégie de recrutement des participants afin de mieux juger l’interprétation des résultats. Ces derniers occupent une portion importante du volume (p. 23 à 108) et sont répartis en 22 thèmes correspondant aux différents angles d’analyse des congés parentaux ou de paternité (par exemple, type de congé, raisons, partage des tâches entre les conjoints, difficultés rencontrées, meilleurs moments, impacts, perception de l’entourage, etc.).
L’un des atouts de ce volume réside dans les nombreux extraits d’entrevues qui témoignent de la richesse du matériel colligé ainsi que de l’expérience vécue par ces pères. En contrepartie, il peut sembler plus difficile au lecteur d’extraire une ligne directrice dans la présentation des résultats et on note, dans certains cas, une redondance de contenus. Parmi les multiples éléments qui ressortent de l’expérience de ces pères, trois ont surtout retenu mon attention. Premièrement, l’ouverture des pères québécois à l’égalité entre femmes et hommes et la vision de l’engagement paternel comme un des leviers pour l’atteinte de cette égalité. Cette perspective apparaît comme plutôt nouvelle et peu présente dans les discours sociaux et les politiques actuelles. Le deuxième élément concerne le plaisir des pères à être près des enfants et à partager leur quotidien. La sous-section relative aux émotions et aux sentiments est éloquente à cet égard. L’impact de cet engagement précoce sur la carrière professionnelle, sur le rôle de père ainsi que sur l’homme en tant qu’individu n’est pas banal et incite à mieux soutenir et valoriser cet engagement. Le dernier élément porte sur les enjeux relatifs à la prise du congé avec la mère ou seul avec les enfants. Plusieurs extraits des entrevues avec des pères démontrent qu’il s’agit de contextes distincts dont les impacts, les avantages et les désavantages sont différents. Ces données ouvrent des pistes de réflexion particulièrement intéressantes à considérer en vue de mesures ultérieures de conciliation travail-famille.
Une brève discussion des principaux résultats à la fin du volume (p. 109 à 124) fournit une synthèse de ce qu’il est important de retenir. Considérant les nombreux résultats décrits, cette section est très bienvenue. Un retour sur les écrits recensés relatifs aux déterminants de l’engagement paternel (Turcotte et Gaudet) et aux différentes typologies d’engagement paternel identifiées par Quéniart et Wall termine l’ouvrage. Il aurait été préférable que les auteures précisent les limites et les forces de leur étude (concernant par exemple les caractéristiques de leur échantillon, qui entraînent certains biais), ce qui les aurait rendues peut-être plus prudentes dans l’interprétation des données. L’identification de pistes de recherche ultérieures aurait également été souhaitable, comme celle relative aux pères qui n’utilisent pas les congés parentaux et dont les réalités sont fort probablement très différentes de celles décrites dans la présente étude. La conclusion du volume établit des enjeux clés soulevés par les résultats obtenus, soit la reconnaissance accrue de l’engagement paternel dans les politiques publiques, et l’adaptation des services de manière à mieux intégrer les réalités paternelles. Dans une situation de partage de la sphère familiale, un dernier défi m’apparaît pertinent à souligner, celui de la coparentalité qui amène les parents à travailler en équipe pour le mieux-être de leurs enfants, à se soutenir mutuellement et reconnaître leurs compétences respectives.