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L’ouvrage Statistiques sociales, pauvreté et exclusion sociale. Perspectives québécoises, canadiennes et internationales met en évidence la valeur ajoutée que les statistiques sociales apportent à notre compréhension des phénomènes de pauvreté et d’exclusion. Il donne la mesure des analyses comparatives basées sur des indicateurs de seuils (Gelot, Raïq et al., Wolff et Montaigne, Plante et Van den Berg, Proulx et al., Raïq et al., Lechaume et Savard), des indicateurs de distribution de revenu (Curtis, Zhu et Batisse), ou des modèles multidimensionnels (Fortin et Gauthier, Hyman et al., Reimer, McEwen, Serbin et al, Cousineau et Merizi, Heisz et Langevin).
La gageure des éditeurs de ce livre de montrer qu’il est possible de rendre compte des expériences de pauvreté et d’exclusion sociale autrement que par le qualitatif, semble gagnée. Les textes réunis ont non seulement prouvé la faisabilité d’instruments de mesure et de suivi de ces réalités ; ils ont aussi mis en relief l’utilité pragmatique des résultats obtenus à l’aide de ces instruments, d’abord en ce qu’ils améliorent notre capacité de diagnostiquer le problème, d’en saisir les déterminants et les conséquences, d’identifier les populations nécessiteuses ; ensuite en ce qu’ils permettent de mesurer l’impact des interventions des pouvoirs publics et des transferts sociaux.
Ces travaux soulèvent néanmoins un certain nombre de difficultés dont nous n’en soulignerons que trois. La première concerne le choix de l’objet de la mesure à comparer. S’agit-il du pouvoir d’achat, du niveau de consommation, ou encore d’un ensemble de désavantages ? S’agit-il de la pauvreté monétaire, de la privation matérielle, ou du lien à l’emploi ? Une deuxième difficulté est liée à la nature dynamique de cet objet, à sa nécessaire inscription dans un contexte social, à sa transmission intergénérationnelle et à la complexité de son opérationnalisation. Enfin, la dernière difficulté se rapporte à la disponibilité et à la qualité des données harmonisées et comparables.
Dans ce travail qui s’inscrirait mieux dans le catalogue des numéros thématiques d’une revue scientifique que dans le registre des ouvrages spécialisés, on ne peut que regretter qu’aucun auteur n’ait pu prendre en considération les effets normatifs de leurs prouesses analytiques. Comment mesurer sans qualifier et qualifier sans disqualifier ? On aurait également aimé trouver dans les analyses comparées de ce recueil une plus grande sensibilité aux contextes sociaux. Car les notions de pauvreté et d’exclusion sociale ne semblent pas renvoyer à des réalités identiques hier et aujourd’hui, dans un contexte d’exception et une situation généralisée. Elles ne semblent pas évoquer des expériences et des représentations interchangeables dans des régions rurales, isolées, urbaines et rurbaines.
On pourrait multiplier ces genres d’observation, mais on perdrait de vue les mérites de ce livre d’avoir poussé le savoir des sciences sociales à la frontière de la décision politique, et d’avoir complété au Québec notre boîte à outils sur ces questions constituée, entre autres, d’un Inventaire des indicateurs de pauvreté et d’exclusion sociale (Maurasse, 2005), et d’un Recueil statistique sur la pauvreté et les inégalités socioéconomiques au Québec (Morin, 2006).