En privilégiant strictement des sources juridiques, Georges Azzaria analyse les politiques culturelles québécoises en se demandant si artistes et public se rejoignent au sein d’une même politique et d’un corpus de lois. C’est un essai sur la « filière juridique » des politiques culturelles qui relève le conflit de valeurs inhérentes à ces politiques. Par le biais du droit, il apporte un « éclairage complémentaire aux recherches déjà publiées dans ce champ d’analyse, recherches qui, le plus souvent ne prennent pas en compte l’apport du droit comme élément régulateur et source de normes » (p. 15). La question qui sous-tend la recherche est la suivante : « Comment un ministère chargé de la culture met-il en oeuvre les deux principales motivations qui le poussent à agir ? » Y a-t-il équilibre entre la protection des intérêts des créateurs et le principe de démocratisation de la culture ? Pour y répondre, il aborde dans un premier temps les grands principes sous-jacents aux politiques publiques dans ce domaine. Dans un deuxième temps, il présente les données factuelles qui aident à comprendre la stratégie de « cogestion » qu’il suggère. L’analogie imparfaite au Janus à deux têtes contribue à saisir l’hypothèse fondamentale de la recherche : « les principaux motifs d’agir du ministère de la Culture et des Communications – la démocratisation de la culture et le soutien aux auteurs et aux interprètes – se dressent dos à dos, existent indépendamment » (p. 9). Or, artistes et public ne s’interpellent-ils pas constamment dans le développement de la vie culturelle ? À partir de quel levier d’action peut-on contourner l’aporie ? Face à ce défi, Azzaria propose le renforcement de la cogestion dans lequel « les intervenants du milieu culturel négocient eux-mêmes les modalités d’apaisement de cette tension » (p. 9). L’État se voit dans un rôle de facilitateur assurant une procédure à partir de laquelle les principaux intéressés – auteurs, interprètes, producteurs ou diffuseurs – identifient eux-mêmes les solutions et précisent le dosage du support à la création et à la démocratisation de la culture. L’État se voit ainsi dans une fonction de médiation et n’intervient pas sur le contenu. Il ne « joue pas le rôle d’arbitre des droits de chacun mais... met plutôt en place une structure pour favoriser les ententes. Il appert que le droit est alors négocié, au lieu d’être imposé » (p. 12). De cette proposition d’action, une convergence au niveau des lois et des acteurs impliqués pourrait s’établir. L’accessibilité et le droit d’auteur pourraient se rejoindre afin que les artistes (créateurs et interprètes) et les producteurs/diffuseurs fixent eux-mêmes les conditions de l’échange. En dégageant de la lecture des corpus de lois disponibles une synthèse de leur contenu et en les évaluant du point de vue de leur convergence possible, on arriverait à les faire travailler en interface. Cet effort d’approximation faciliterait la cohabitation souhaitée au niveau légal. La façon la mieux appropriée pour arriver à cette cohabitation des lois semblerait être la cogestion entre l’État et les associations d’artistes dans une anticipation accrue de manière à renforcer la promotion de la cohabitation. La contribution originale de l’auteur est de proposer une éventuelle cohabitation en faisant converger le corpus des lois concernant la protection des oeuvres tout autant que leur accessibilité. Le fait que les lois soient encore dos à dos les rend inefficaces. Il ne faut pas que le soutien à la création soit captif de la démocratisation de la culture (p. 87). D’où l’interpellation de Georges Azzaria pour une cohabitation ! La thèse que supporte l’auteur découle d’une synthèse des politiques culturelles du gouvernement québécois. Elle …
Georges Azzaria,La filière juridique des politiques culturelles, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2006, 214 p.[Notice]
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Lise Boily
Département de Communication,
Université d’Ottawa.
lboily@uottawa.caChristine Bastien
Département de Communication,
Université d’Ottawa.