Comptes rendus

Jean-Marie Fecteau et Janice Harvey (dirs), La régulation sociale entre l’acteur et l’institution. Pour une problématique historique de l’interaction, Sainte-Foy, Presses de l’Université du Québec, 2005, 616 p. (Pratiques et politiques sociales et économiques.)[Notice]

  • Guy Fréchet

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  • Guy Fréchet
    Sociologue,
    Ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Québec.

Cet ouvrage rassemble les textes de plus de 35 collaborateurs ; il s’agit des présentations entendues lors d’une conférence organisée par le Centre d’histoire des régulations sociales, qui s’est tenue à l’Université du Québec à Montréal en 2003, couvrant une quinzaine de thématiques, tant sur les grands paradigmes de la régulation sociale que sur certaines de ses manifestations en divers lieux et à diverses époques. Ces textes, en français et en anglais, permettent des incursions aussi bien théoriques qu’empiriques dans l’univers des régulations sociales et ce, aussi bien au Québec et au Canada que dans d’autres régions du monde. Fecteau et Harvey précisent dans leur texte de présentation que « … l’objectif central était de réunir autour d’une question contentieuse, la dynamique entre acteurs et institutions, un grand nombre de spécialistes de plusieurs pays, aux champs de recherche très divers afin de partager les perspectives analytiques, de confronter les interprétations et d’approfondir notre compréhension des méthodes historiquement privilégiées dans la résolution des problèmes sociaux de nos sociétés ». C’est ainsi qu’on s’est attardé sur des thématiques particulières, telles que la justice et le crime, l’asile et l’aliénation, la délinquance juvénile, l’enfance en danger, la pauvreté extrême. L’intuition des organisateurs de cette conférence consistait au départ à s’interroger sur le lien entre acteurs et institutions, deux pôles le plus souvent considérés distinctement selon l’affiliation disciplinaire, la théorie privilégiée ou l’école d’appartenance, mais qui devraient bien pouvoir faire l’objet d’un rapprochement. Si les sciences sociales enseignent depuis toujours que le social est plus que la somme des initiatives individuelles, la perspective structuraliste risque aussi d’être mise à mal si on la purge des motivations des acteurs. Aux seules intentions et motivations, on oppose le rôle des structures sociales et le dialogue de sourds est ainsi souvent consommé. Avec cette volonté de creuser quelque peu la compréhension de la dynamique des liens qu’on suppose entre ces deux pôles, les auteurs ont misé sur un éventail de cas voués à la résolution de problèmes sociaux, comme s’ils pouvaient tous être révélateurs de cette dynamique propre de la régulation sociale. Vaste programme ! Dans un texte de nature plus théorique, Jacques-Guy Petit oppose les concepts de « contrôle » et de « régulation sociale », le premier ayant été remplacé par le second en tant qu’approche privilégiée ainsi qu’outil de compréhension de la diversité, de l’ambiguïté, de l’indéterminé et des mutations des interactions humaines. Les régulations sociales ne mettent pas seulement en avant le rôle du système mais également celui des acteurs. La perspective historique a permis de privilégier l’observation d’initiatives qui ont contribué à la mise en place de certaines politiques sociales dans les États modernes ainsi que de certaines autres avancées, comme les lois du travail. Plus précisément, l’ouvrage porte notamment sur les questions théoriques, le droit, la dynamique des conflits, du crime et du droit en longue durée, le traitement de la folie entre la famille et les institutions, le temps libre et les loisirs, l’économie sociale et l’action communautaire, le patronat et les travailleurs, la prise en charge des enfants, la délinquance juvénile, la religion, la prise en charge des pauvres, la régulation morale et enfin, l’État. Au hasard des chapitres, le lecteur aura le loisir de s’attarder à quelques contributions originales et bien ficelées. Par exemple, à l’aide de statistiques historiques patiemment reconstruites, Donald Fyson a établi le portrait des tendances à très long terme de la criminalité au Québec (1712-1965), à l’instar de ce que quelques auteurs seulement en France ou en Angleterre s’étaient risqués à faire. L’auteur montre que la progression de ces tendances varie bien sûr …