Dans Québec Wallonie : dynamiques des espaces et expériences francophones, Brigitte Caulier (Centre universitaire d’études québécoises, Université Laval) et Luc Courtois (Département d’histoire, Université catholique de Louvain) présentent 22 contributions issues des échanges entre leurs unités de rattachement. Plus spécifiquement, le projet de recherche dont résulte ce collectif s’est structuré autour de deux colloques portant sur les « francophonies périphériques » que sont le Québec et la Wallonie. Lors de ces rencontres, l’une à Louvain-la-Neuve (2003), l’autre à Québec (2004), 55 communications ont été présentées. Grâce à la sélection rigoureuse des éditeurs, le recueil présente un ensemble d’exposés dont la diversité vaut la complexité de la thématique abordée. L’ouvrage s’organise autour de quatre parties qui traitent respectivement de l’espace physique (« construction et représentations »), la société (« pratiques sociales et mémoires »), les croyances (« gestes et institutions ») et l’identité (« images de soi, images de l’autre »). Ainsi, le lecteur est invité à explorer les dynamiques objective « réelle, telle qu’elle est », subjective « telle qu’elle est vécue et ressentie » et symbolique « construite à un moment donné puis transmise aux successeurs » des espaces à l’étude. Il importe de remarquer que le passage du territoire géographique au territoire imaginaire (dans le sens andersonien du terme) se passe en Wallonie de façon beaucoup moins univoque qu’au Québec. Alors que l’identité québécoise est fortement liée au fait français, présent dès la fondation de la Nouvelle-France, la majorité des Wallons n’ont abandonné leurs parlers régionaux au profit de la langue française qu’au début du XXe siècle. Il va de soi que le concept de « francophonie périphérique » y prend donc un sens tout autre qu’au Québec. Le recoupement qui existe entre l’identité wallonne et l’identité francophone s’observe nettement à travers la lecture de l’ouvrage. D’une part, dans son étude sur la représentation de l’espace wallon dans la bande dessinée (p. 77-110), Courtois remarque que les langages exotiques dans la série de Tintin s’enracinent souvent dans les dialectes wallons (« Czesztot wzryzkar nietz on waghabontz », ce n’était manifestement pas un vagabond, p. 86). De Groote, d’autre part, consacre son article « Les clichés de l’affaire de Louvain » (p. 359-372) à une analyse photographique de la lutte des étudiants flamands pour le transfert de la section francophone de l’Université de Louvain en Wallonie, menée sous la devise « Wallons dehors ». Bref, comme le remarque Watelet dans ses « Réflexions sur les projets de société du Québec et de la Wallonie » (p. 373-394) : « Si le fait de jouir de la langue et de la culture françaises était et reste une richesse pour les Wallons, cela se traduisit donc par un coût sur le plan identitaire. […] on comprend alors que la vigueur identitaire des Flamands doive plutôt se comparer à celle des Québécois qu’avec celle des Wallons » (p. 394). Pour cette raison, l’ouvrage aurait pu bénéficier d’un commentaire plus élaboré sur cette divergence importante, qui prédétermine l’objectif principal des auteurs, qui est de répondre à la question : « [e]n quoi ces points communs [entre le Québec et la Wallonie] ont-ils conduit à des évolutions convergentes » ? Cet objectif est par ailleurs pleinement atteint dans les études de nature comparative telles que l’article de Courville sur la colonisation de l’Amérique du Nord et la présence belge au Québec (p. 43-60), et avec la contribution de Zelis (p. 149-166), qui traite de « la formation au travail social en Belgique et en Amérique du Nord », ou encore celle de Caulier qui se concentre sur les « …
Brigitte Caulier et Luc Courtois, Québec Wallonie : dynamiques des espaces et expériences francophones, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2006, 407 p.[Notice]
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Andy Van Drom
Candidat au doctorat,
Département de langues, linguistique et traduction,
Université Laval.