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Cette série de 18 exposés bilingues sur la spatialité des cultures francophones au Canada se divise en quatre parties. Cette spatialité, presque exclusivement celle du Québec et de l’Ontario francophone, est décortiquée d’un point de vue littéraire en utilisant divers textes sur l’histoire, le théâtre, le cinéma et les romans francophones. Ces exposés abordent le sujet de l’espace en examinant son apport à l’élaboration de l’identité parmi les sociétés humaines ; cependant, certains se concentrent plus particulièrement non seulement sur les diverses classes sociales mais aussi sur l’identité socioculturelle.
Le livre commence par une « Présentation » écrite en français et en anglais par Lintvelt et Paré, brossant ainsi un tableau du contenu et donnant un aperçu des grandes lignes de l’ouvrage. Vient ensuite une introduction en anglais intitulée A Luxuriant Drift : Canada’s Francophone Cultures. Ce texte de 12 pages se veut le lien entre les 18 exposés qui constituent l’essentiel du livre. Paré (un Franco-Ontarien) donne son avis sur la situation des cultures francophones au Canada dans les 20 à 25 dernières années ; une situation façonnée par sa contribution personnelle en milieu minoritaire francophone canadien. Par conséquent, ce volume traite essentiellement de frontières, de leurs déplacements et de leurs limites. De plus, « au coeur de la frontière, en son noyau divisé (examiné dans cette introduction) réside l’en-soi de la multiplicité des langues » (p. 18).
La première partie intitulée « L’Espace dans les Siècles Passés » comprend trois sections. Dans la première, Martin Gosman examine le refus de la dissemblance dans L’Histoire de la Nouvelle-France de Marc Lescarbot. Par ailleurs, Michael Cardy analyse la spatialité de deux textes français du XVIIIe siècle écrits post-débâcle par deux soldats francophones à la suite de la capture des villes de Québec en 1759 et Montréal en 1760 par les forces britanno-américaines. Pour conclure, Brian Young étudie la vision bourgeoise de l’espace urbain à Montréal au XIXe siècle en se basant sur l’idéologie et les attitudes culturelles telles que représentées par la famille bien nantie de John Samuel McCord (1801-1866).
La deuxième partie du livre, la plus importante, s’intitule « L’Espace Romanesque » et comprend, elle aussi, trois sections. La première – « L’espace identitaire » – compte trois exposés. Jaap Lintvelt analyse la façon dont la ville de Québec est présentée dans le roman québécois de 1960 à nos jours. Marc Vachon fait un survol critique de la géographie littéraire et des études littéraires sur l’espace romanesque montréalais. En se référant à L’Emmitouflé de Louis Caron, André Maindron explique l’effet de l’abolition des frontières sur diverses générations de Canadiens français, leur permettant à la longue de devenir Franco-Américains. Le quatrième exposé, rédigé par Fernand Roy, disserte sur l’espace et identité dans deux romans : Poussière sur la ville d’André Langevin et Salut Galarneau ! de Jacques Godbout. Ensuite, David Parris examine le bilinguisme et l’identité dans le roman québécois, en particulier la littérature montréalaise après la Deuxième Guerre mondiale. Enfin, Peter Noble traite de la frontière mentale et physique telle que présentée dans l’oeuvre littéraire, Cowboy, de Louis Hamelin. La deuxième section s’intitule « L’espace migrant » et comprend trois exposés. Józef Kwaterko écrit sur l’identité culturelle et l’espace imaginaire qui marque le roman québécois de 1950 à 1980. La deuxième communication, celle de Roseanna Dufault, se concentre sur l’identité lors d’exils vécus à Shanghai et à Montréal. Elle utilise Les lettres chinoises de Ying Chen comme véhicule d’analyse. Le dernier article que signe Daniel Chartier, « Mouvements migratoires et frontières culturelles du Québec », traite essentiellement de l’identité et de l’intégration culturelle et linguistique. « L’espace sexué », troisième section de la deuxième partie, comprend deux communications. Celle d’Antoine Sirois porte sur les espaces intimes et l’androgynie qui se retrouvent dans les romans de Jacques Poulin. Celle de Michel Lord est basée sur Les fous de Bassan d’Anne Hébert où il examine les signes de l’ambivalence répandus à travers ce roman.
Deux essais composent la Troisième partie – « L’espace théâtral ». Stéphanie Nutting fait découvrir le concept de l’errance et de l’enquête si évident dans le théâtre québécois. En se référant à Lavalléville, pièce de théâtre d’André Paiement, Lucie Hotte nous présente un des rares aperçus de l’Ontario francophone de cet ouvrage en explorant le processus de construction d’un territoire franco-ontarien.
La dernière partie, consacrée à l’espace cinématographique, contient deux communications. Ici, John Kristian Sanaker décortique le thème du « Québec à l’écran – espace de rencontres et de conflits linguistiques » en ayant recours à La Sarrasine de Paul Tana. Et pour terminer, Michel Larouche présente un texte sur l’influence de l’imaginaire américain dans le cinéma québécois.
Ces auteurs proviennent d’universités québécoises et ontariennes mais également de diverses universités européennes. Ils nous offrent un incroyable tableau d’opinions et de théories sur la francophonie canadienne en s’appuyant sur certains aspects de son patrimoine littéraire. Cependant, les auteurs francophones de l’Ouest canadien et, ce qui est encore plus surprenant, les auteurs acadiens se font remarquer par leur absence. Pourtant, chacune de ces régions ne manque pas d’écrivains ni de dramaturges. Il semble que ces derniers, qu’ils soient contemporains ou non, ne sont l’objet que de rares analyses de la part des spécialistes littéraires internationaux. Se peut-il que ces analyses ne soient pas suffisamment intéressantes pour susciter le même calibre de réflexions que celles contenues dans ce livre ?