Résumés
Résumé
En juillet 1971, le projet de loi 65 sur l'organisation des services de santé et des services sociaux est déposé à l'Assemblée Nationale par le ministre des affaires sociales du Québec. Ce projet de loi est ensuite soumis aux discussions du public et des députés lors des séances de la Commission parlementaire des affaires sociales. À la suite de ces discussions, le ministre propose une nouvelle version du projet de loi qui est discutée cette fois-ci par les parlementaires seulement. Il sera question, dans cet article, des positions prises par les représentants des quatre partis politiques, alors présents à l'Assemblée Nationale, sur les offices régionaux des affaires sociales (ORAS) proposés par la première version du projet de loi, et sur les conseils régionaux de la santé et des services sociaux (CRSSS) proposés par la seconde version. L'enjeu que représente la création ou non d'organismes régionaux sous forme d'offices ou de conseils est important pour nous, dans la mesure où il sert de prétexte aux partis politiques pour opposer leurs vues sur l'organisation des moyens de gouvernement dans le secteur d'activité gouvernementale des affaires sociales.
Nous postulons que pour agir sur la configuration du pouvoir dans la société, un gouvernement dispose de trois moyens : il peut proposer de nouveaux postes et les mettre en relation avec ceux qui existent déjà; il peut modifier ou supprimer des postes existants. Il peut transformer tes pouvoirs entre les postes : les rendre plus délibératifs ou plus impératifs ; il peut aussi créer ou supprimer des pouvoirs. Enfin il peut agir sur les ressources qui circulent entre les postes.
L'action gouvernementale sera d'autant plus forte qu'elle portera d'abord sur les pouvoirs, ensuite sur les postes, enfin sur les ressources. La résultante de ces actions gouvernementales forme la régulation dont l'objet sera de maintenir la société à l'intérieur de certaines normes, à l'intérieur de certaines configurations de pouvoir.
Le modèle cybernétique que nous utilisons distingue deux paliers principaux à l'intérieur d'une société: le gouvernement et la communauté. Le gouvernement est le lieu de la sélection politique, par ses gouvernants, et aussi de la sélection administrative, par ses fonctionnaires. La communauté est constituée des gouvernés ; ils forment le palier de l'affection politique. Les relations de pouvoir qui s'établissent entre les gouvernants, les fonctionnaires et les gouvernés représentent les différentes phases de la régulation. Ces phases sont qualifiées de la façon suivante: 1° transduction ministérielle lorsqu'il s'agit des relations entre les gouvernants et les fonctionnaires ; 2° transduction administrative, entre les fonctionnaires et les gouvernés ; 3° transduction politique, entre les gouvernants et les gouvernés ; 4° transduction délégative, entre gouvernants. Chaque parti politique préconise une façon particulière d'agencer la relation qu'il voudrait voir appliquée entre les gouvernants et les gouvernés, entre le gouvernement et la communauté. C'est « l'agencement » des relations de pouvoir qui constituera la rationalité politique d'un parti par rapport à un enjeu précis.
Pour reconstituer la rationalité des partis politiques selon l'action qu'ils proposent sur la configuration du pouvoir dans le secteur des affaires sociales, nous avons procédé à une analyse détaillée des deux versions du projet de loi. Les interventions du ministre et de quelques parlementaires libéraux à l'Assemblée et en commission complètent les positions du Parti Libéral. Pour les partis d'opposition, nous avons fait un relevé systématique de leurs interventions à partir du dépôt du projet de loi à l'Assemblée jusqu'à la troisième lecture inclusivement, sur tout ce qui concerne les ORAS ou les CRSSS. Les données ont été classées selon le moyen qui était visé: s'agissait-il d'une intervention portant sur les postes de l'organisme régional, sur les pouvoirs qui devaient lui être accordés, ou sur l'impartition des ressources? Nous avons aussi identifié les termes de la relation de pouvoir impliquée dans la transmission du moyen visé, et la phase de régulation dans laquelle s'inscrit cette relation.
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