Résumés
Résumé
Comme on peut s'en rendre compte en étudiant la période pré-confédérative de l'histoire du Canada, il existe une grande lacune dans notre connaissance du rôle joué par la terre dans le développement économique et politique des territoires qui forment maintenant les provinces de Québec et d'Ontario. Il est vrai que certains travaux ont été faits sur le système seigneurial, sur les grandes compagnies terriennes et sur les problèmes des réserves de la Couronne et du clergé, particulièrement dans le Haut-Canada. Quelle que soit leur qualité, ces travaux n'en demeurent pas moins fragmentaires. En nous attachant à reconstituer, dans un tableau d'ensemble, l'évolution de la politique des terres au cours du demi-siècle qui a suivi la conquête, nous avons voulu contribuer d'une modeste façon à combler cette lacune.
Le but du présent article est de tracer les grandes lignes des travaux de recherche que l'auteur vient de terminer sur la politique de concession et de distribution des terres dans les cantons de l'Est du Bas-Canada, de 1763 à 1809.
Dans l'exécution de ces travaux de recherche nous avons visé un double objectif. Premièrement, nous avons voulu découvrir et, tenant compte de l'histoire traditionnelle, expliquer les relations chronologiques et organiques entre les divers documents et les témoignages relatifs à l'administration et à la distribution des terres en franc et commun socage dans les cantons de l'Est de 1763 à 1809. De la période qui s'étend de 1763 à 1791 nous n'avons retenu que les caractères généraux, tandis que nous avons fait une étude plus détaillée de la période qui va de 1791 à 1809. Nous avons accordé une attention particulière au mode de concession le plus général au cours de cette période : la concession de terres à des chefs de canton sur présentation de listes d'associés. En deuxième lieu, et d'une façon subordonnée, nous avons essayé de tirer des documents ainsi classifiés et analysés quelques conclusions se rapportant aux relations entre la tenure des terres (et les règles et décrets s'y rapportant) et le développement de certains aspects de l'organisation interne des sociétés commerciales au cours de cette période.
Nos recherches nous ont permis de mettre en évidence l'existence d'une relation très étroite entre l'incertitude des règles et des décrets concernant la tenure des terres et le développement du Bas-Canada, entre les années 1792 et 1809, période où apparaît la corporation comme forme d'organisation économique.
D'une manière plus générale, nous pensons que le conflit qui s'est manifesté dans le Bas-Canada, après 1791, au sujet de la politique des terres, n'était que l'expression d'un conflit plus général entre les tendances centralisatrices de l'administration coloniale anglaise et les efforts — apparents surtout dans les colonies de la Nouvelle-Angleterre — visant à renforcer l'autonomie locale en matières fiscales et politiques. Le pouvoir de formuler une politique des terres, de diviser et de distribuer les terres, fut un aspect important de cette autonomie locale. La présence de cette tradition d'autonomie parmi les immigrants du Québec qui, pour la plupart, venaient des États de la Nouvelle-Angleterre, amena les colons à adopter une forme d'entreprise incorporée. Les circonstances favorisaient d'ailleurs cette forme d'entreprise : déjà, dans les cantons de l'Est, existait la pratique non officielle d'une forme de colonisation semblable à celle qu'avaient connue les immigrants des colonies de la Nouvelle-Angleterre. Ce type de colonisation engendrait l'incertitude chez les colons, à cause de l'imprécision des lois relatives à la distribution des terres.
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