Numéro hors-série, décembre 2020 70 ans de la Convention européenne des droits de l’homme : L’Europe et les droits de la personne Sous la direction de Jean-Paul Costa, Olivier Delas, Peter Leuprecht, Mulry Mondélice et Kristine Plouffe-Malette
Sommaire (38 articles)
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Avant-propos. 70 ans de la Convention européenne des droits de l’homme : L’Europe et droits de la personne
Jean-Paul Costa, Olivier Delas, Peter Leuprecht, Mulry Mondélice et Kristine Plouffe-Malette
p. 1–3
Introduction
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L’universalité nécessaire et inéluctable des droits inhérents à la personne humaine / The Necessary and Ineluctable Universality of the Rights Inherent to the Human Person
Antônio Augusto Cançado Trindade
p. 5–19
RésuméFR :
Ceci est une bonne occasion pour évaluer le développement historique du droit international des droits de l’homme vers l’universalité des droits inhérents à la personne humaine dans le cadre de l’humanisation graduelle du droit international public lui-même. Une contribution importante à cet égard est celle des deux Conférences mondiales des droits de l’homme (Téhéran, 1968; Vienne, 1993), qui ont ouvert la voie à des avancées substantielles et procédurales dans le travail de protection des êtres humains en toutes circonstances. Face aux défis contemporains, la protection internationale des droits de l’homme présente des caractéristiques qui lui sont propres, visant à encourager l’interaction entre les juridictions internationales et nationales et l’applicabilité directe du corpus juris de protection de la personne humaine. La protection internationale des droits de l’homme est dotée de bases solides lui permettant de faire face et de s’opposer aux tentatives de déconstruction en cours, et elle continue à développer sa jurisprudence importante dans les affaires révélant de graves violations des droits des personnes vulnérables. Cette évolution importante donne expression à l’élargissement de la juridiction, de la responsabilité, de la personnalité internationale et de la capacité internationale, centrées sur les victimes.
EN :
This is a good opportunity to assess the historical development of the international law of human rights towards the universality of the rights inherent to the human person in the framework of the gradual humanization of public international law itself. Important contributions to it were rendered by the two World Conferences of Human Rights (Teheran, 1968; and Vienna, 1993), which paved the way for substantive and procedural advances in the work of protection of human beings in all circumstances. In facing contemporary challenges, the international protection of human rights presents characteristics of its own, such as fostering the interaction between international and national jurisdictions, and the direct applicability of the corpus juris of protection to the human person. International human rights protection is endowed with solid foundations in facing and opposing current endeavors of deconstruction and has been developing its relevant case law in cases disclosing grave violations of rights of vulnerable people. This important development gives expression to the expansion of international jurisdiction, responsibility, personality and capacity, centered on the victims.
ES :
Esta es una buena oportunidad para evaluar el desarrollo histórico del derecho internacional de los derechos humanos hacia la universalidad de estos derechos en el marco de la humanización gradual del derecho internacional público. Una contribución importante en esta dirección fue la de las dos Conferencias Mundiales de Derechos Humanos (Teherán, 1968; Viena, 1993) que abrieron el camino para avances sustanciales y de procedimiento en la labor de protección de los seres humanos en todas las circunstancias. Frente a los desafíos contemporáneos, la protección internacional de los derechos humanos presenta características propias, encaminadas a fomentar la interacción entre tribunales internacionales y nacionales, así como la aplicabilidad directa del corpus juris para la protección de la persona humana. La protección internacional de los derechos humanos tiene una base sólida que le permite enfrentar y oponerse a los intentos de deconstrucción contemporáneos, y continúa desarrollando su importante jurisprudencia en los casos que revelan graves violaciones a los derechos de personas vulnerables. Este importante desarrollo da expresión a la expansión de la jurisdicción centrada en las víctimas, la responsabilidad, la personalidad internacional y la capacidad internacional.
I – La CEDH 70 ans et demain
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La Cour européenne des droits de l’homme
Jean-Paul Costa
p. 21–29
RésuméFR :
Cette contribution est centrée sur la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), pierre angulaire de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (la Convention). La Convention a créé la CEDH. Elle avait aussi institué la Commission européenne des droits de l’homme. Ce n’est pas diminuer les mérites de cette dernière, qui a joué un rôle important de 1954 à 1999, année de sa suppression, que d’affirmer celui, prééminent, de la CEDH. La contribution insiste sur les relations entre la Convention et la CEDH, « sa Cour ». Elle examine en premier lieu la place de la CEDH dans la Convention, puisque la CEDH, organe juridictionnel, est le rouage qui permet d’assurer le respect par les États parties des obligations découlant de la Convention et de ses Protocole. La Convention détaille la compétence de la CEDH, et par la même son indépendance et sa souveraineté. Elle définit l’autorité des décisions de la Cour, leur caractère exécutoire ; même si les organes étatiques et notamment les tribunaux nationaux appliquent et interprètent la Convention, c’est la CEDH qui est l’ultime recours : par sa jurisprudence elle a le dernier mot, et assure l’effectivité de la Convention. En second lieu est analysée la place éminente (mais non exclusive) de la Convention dans la jurisprudence de la Cour. La Convention doit être interprétée par la CEDH pour que celle-ci puisse jouer son rôle juridictionnel (et accessoirement consultatif). Cette interprétation depuis les débuts dans les années 1950 a été largement créatrice. La jurisprudence a développé des concepts autonomes, indépendants des droits nationaux. Elle a regardé la Convention comme un instrument vivant, à comprendre à la lumière des conditions de vie qui changent dans le temps. L’interprétation de la CEDH se veut réaliste et non théorique. Elle est libérale (les exceptions à la liberté sont entendues de façon étroite). Elle a assoupli les règles habituelles de preuve dans un sens favorable aux requérants et non aux États défendeurs. La jurisprudence a affirmé que ceux-ci, au-delà de la non-violation des droits de la Convention, sont tenus à des obligations positives. En revanche, elle a admis une marge nationale d’appréciation, évitant une lecture trop uniforme des libertés conventionnelles et de la façon de les garantir. La Convention n’est pas la seule source du droit dégagé par les décisions de la CEDH, qui applique le droit international général, tel qu’il résulte de nombreux traités importants, et aussi de la soft law (textes non obligatoires de différents organes européens ou mondiaux). Elle enrichit ainsi le sens de la Convention, qui ne se situe nullement dans un vide juridique ou dans un monde à part. La conclusion est un hommage rendu à la CEDH. Elle a respecté et respecte le grand texte qu’est la Convention, mais sans la sacraliser et en s’efforçant de la revisiter sans cesse. Puisse-t-elle durer longtemps !
EN :
This contribution is centred around the European Court of Human Rights (ECHR), cornerstone of the Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms (the Convention). The Convention created the ECHR. It also established the European Commission of Human Rights. To affirm the preeminent role of the ECHR is not to diminish the merits of the latter, which played an important role from 1954 to 1999, year of its suppression. The contribution insists on the relations between the Convention and the ECHR, “its Court”. It examines, first of all, the place of the ECHR in the Convention, since the ECHR, a judicial body, is the mechanism which ensures the Member States’ compliance with the obligations deriving from the Convention and its Protocols. The Convention details the jurisdiction of the ECHR, and in doing so, its independence and sovereignty. It defines the authority of the Court’s decisions, their enforceable nature. Even if the state bodies including the national courts enforce and interpret the Convention, the ECHR is the last resort: because of its jurisprudence, it has the final say and safeguards the effectiveness of the Convention. Second, the prominent (yet not exclusive) place of the Convention in jurisprudence of the Court is analyzed. The Convention must be interpreted by the ECHR in order for the latter to play a judicial role (and incidentally advisory). This interpretation since the beginning of the 50s has been largely creator of the Court’s future. Its jurisprudence developed autonomous concepts, independent from national rights. It viewed the Convention as a living instrument, which must be understood in light of the living conditions that change with time. The interpretation of the ECHR is meant to be realistic and not theoretical. It is liberal (the exceptions to freedom are meant to be interpreted narrowly). It relaxed the traditional rules of evidence in a favorable way to the applicant and not to the respondent State. The jurisprudence has stated that the latter, beyond the non-infringement of rights of the Convention, were held accountable for positive obligations. However, it admitted a national margin of appreciation, avoiding an inflexible interpretation of conventional freedoms and of the way to guarantee them. The Convention isn’t the only source of law that applies general international law, as ensues from many important treaties, as well as soft law (non-binding texts from different European or international bodies). It thus supplements the Convention, which is clearly not in a legal vacuum or in a different world. The conclusion is a tribute to the ECHR. It has respected and continues to respect the great text that is the Convention, but without making it sacred and by continuously endeavoring to revisit it. May it last a long time!
ES :
Esta contribución se centra sobre la Corte europea de derechos humanos (CEDH), fundamento del Convenio europeo para la protección de los derechos humanos y de las libertades fundamentales (la Convención). La Convención creo la CEDH. También instituyo la Comisión europea de los derechos humanos. No es para disminuir los merites de la Comisión, que tuvo un papel importante de 1954 a 1999, año en el que fue suprimida, pero afirmamos el mérito preeminente de la CEDH. La contribución insiste sobre las relaciones entre la Convención y la CEDH, “su corte”. Examina en primer lugar el puesto atribuido a la CEDH en la Convención, porque la CEDH, cuerpo judicial, es el vehículo que permite asegurar el respeto de las obligaciones que emanan de la Convención y de sus protocolos por los Estados parte. La Convención da los detalles sobre la competencia de la CEDH y también sobre su independencia y su soberanía. Define la autoridad de las decisiones de la Corte, su exigibilidad; aunque las instituciones del Estado y los tribunales nacionales aplican y interpretan la Convención, la CEDH es el último recurso; con su jurisprudencia, tiene la última palabra y permite la efectividad de la Convención. Analiza, en segundo lugar, el puesto eminente (pero no exclusivo) de la Convención en la jurisprudencia de la Corte. La Convención tiene que ser interpretada por la CEDH para poder tener un papel jurisdiccional (y de paso consultativo). Desde el principio de los años 1950, esa interpretación fue extensamente creativa. La jurisprudencia desarrollo conceptos autónomos, independientes del derecho nacional. Vio la Convención como un instrumento vivo, que debe entenderse de manera diferente a través del tiempo, según las condiciones de vida. La interpretación de la CEDH aspira a ser realista y no teórica. Es liberal (las excepciones a las libertades son entendidas de manera estrecha). Suavizo las reglas habituales de evidencia en un sentido favorable para los solicitantes y no para los Estados acusados. La jurisprudencia afirmo que los Estados, además de no tener que violar los derechos de la Convención, están sujetos a obligaciones positivas. Sin embargo, admite una margen de apreciación nacional, para impedir una lectura muy uniforme sobre las libertades convencionales y sobre la manera de garantizarlas. La Convención no es la única fuente de derecho establecida por las decisiones de la CEDH, que también aplica el derecho internacional general, tal como resulta de mucho tratados importantes, y la soft law (textos de diferentes organismos europeos o mundiales que no son obligatorios). De esa manera, enriquece el sentido de la Convención, que no está en un vacío jurídico o en otro mundo. La conclusión es un tributo a la CEDH. Esta ha respetado y sigue respetando el gran texto que es la Convención, pero sin santificarla y esforzándose de revisitarla sin cesar. ¡Que dure mucho tiempo!
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La Convention européenne des droits de l’homme au 21e siècle : en quête d’équilibre
Christos Giakoumopoulos
p. 31–51
RésuméFR :
Le système original mis en place par la Convention européenne des droits de l’homme repose sur un équilibre délicat. Dans un premier temps, cet équilibre s’était opéré par la mise en place d’un mécanisme ménageant les susceptibilités nationales face aux objectifs ambitieux affichés par le projet européen. Le succès du système a conduit à la réforme portée par le Protocole n° 11, renforçant le caractère juridictionnel de celui-ci. Cependant, ayant coïncidé avec la chute du mur de Berlin et l’élargissement du Conseil de l’Europe, le système a dû faire face à des nouveaux défis : le nombre de requérants potentiels a dépassé 800 millions et l’adhésion de nouveaux États avec des systèmes politiques et juridiques en transition et des systèmes judiciaires en chantier a fait exploser le contentieux devant la Cour. Le processus lancé à Interlaken, il y a dix ans, a consolidé les capacités du système, d’autant que la Cour a su en profiter, d’une part en mettant en place des mesures et procédures innovantes et efficaces et, d’autre part, en engageant un dialogue avec les juridictions nationales. À l’issue du processus d’Interlaken et de la mise en vigueur des Protocoles n° 14, n° 15 et n° 16, la question se pose de savoir si les outils que ces instruments ont créés, si essentiels pour l’efficacité du système aujourd’hui, seront suffisants pour ménager les tensions à l’avenir. Le chantier sur l’avenir du système devra se pencher sur les synergies entre la Cour, le Comité des Ministres et les États parties, visant à donner au système de la Convention toutes les dimensions d’engagement dont celui-ci a besoin : la dimension juridictionnelle, avant tout, mais aussi celle de dialogue, de consultation, de coopération et de prévention. Ceci nécessitera une mobilisation coordonnée de l’ensemble des institutions du Conseil de l’Europe.
EN :
The original system established by the European Convention on Human Rights is based on a delicate balance. Initially, this balance was achieved through the establishment of a mechanism sparing national susceptibilities in the face of the ambitious objectives displayed by the European project. The success of the system has led to the reform brought about by Protocol n° 11, strengthening its jurisdictional character. However, having coincided with the fall of the Berlin Wall and the enlargement of the Council of Europe, the system had to face new challenges: the number of potential applicants exceeded 800 million and the accession of new States with political and legal systems in transition and judicial systems under construction have caused litigation before the Court to explode. The process launched in Interlaken ten years ago has consolidated the capacities of the system, especially as the Court has been able to take advantage of it, on the one hand by putting in place innovative and effective measures and procedures and, on the other hand, by engaging in dialogue with national courts. Following the Interlaken process and the entry into force of Protocols n° 14, n° 15 and n° 16, the question arises as to whether the tools that these instruments have created, so essential for the effectiveness of the system today, will be sufficient to avoid tensions in the future. The groundwork for the future of the system will have to look at the synergies between the Court, the Committee of Ministers and the States Parties, aimed at giving the Convention system all the dimensions of engagement it needs: the jurisdictional dimension, above all, but also that of dialogue, consultation, cooperation and prevention. This will require a coordinated mobilization of all Council of Europe institutions.
ES :
El sistema original establecido por la Convención Europea de Derechos Humanos se basa en un delicado equilibrio. Inicialmente, este equilibrio se logró mediante el establecimiento de un mecanismo que evita las susceptibilidades nacionales frente a los ambiciosos objetivos declarados por el proyecto europeo. El éxito del sistema ha traído la reforma propiciada por el Protocolo n° 11, fortaleciendo su carácter jurisdiccional. Sin embargo, habiendo coincidido con la caída del Muro de Berlín y la ampliación del Consejo de Europa, el sistema tuvo que afrontar nuevos retos: el número de potenciales solicitantes superó los 800 millones y la adhesión de nuevos Estados con sistemas políticos y legales en transición y sistemas judiciales en construcción han provocado el estallido de los litigios ante la Corte. El proceso iniciado en Interlaken hace diez años ha consolidado las capacidades del sistema, especialmente porque la Corte ha sabido aprovecharlo, por un lado, poniendo en marcha medidas y procedimientos innovadores y eficaces y, por otro lado, entablando un diálogo con los tribunales nacionales. Tras el proceso de Interlaken y la entrada en vigor de los Protocolos n° 14, n° 15 y n° 16, surge la pregunta de si las herramientas que han creado estos instrumentos, tan esenciales para la efectividad del sistema en la actualidad, serán suficientes para evitar tensiones en el futuro. El escenario sobre el futuro del sistema tendrá que considerar las sinergias entre la Corte, el Comité de Ministros y los Estados Parte, con el fin de darle al sistema de la Convención todas las dimensiones de participación que necesita: la dimensión jurisdiccional, sobre todo, pero también de diálogo, consulta, cooperación y prevención. Esto requerirá una movilización coordinada de todas las instituciones del Consejo de Europa.
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Quelques réflexions à propos du 70ème anniversaire de la Convention européenne des droits de l’homme
Catherine Lalumière
p. 53–68
RésuméFR :
À l’occasion de ce soixante-dixième anniversaire, l’auteure propose quelques réflexions sur l’influence de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) alors que la construction européenne semble menacée. Constituant le socle de cette construction, la CEDH pourrait voir l’importance de son rôle s’accroitre encore, si tant est qu’elle soit capable de faire face aux contestations dont elle est l’objet. Cet article retrace l’histoire, l’impact juridique, la philosophie, mais aussi les tenants politiques du texte européen. Rappelant son ascendance lointaine autant que son esprit humaniste et démocratique construits en réaction aux totalitarismes de l’entre-deux Guerres, l’auteure met en lumière la mutation politique et économique de l’Après-Guerre qui participe à l’affaiblissement de son socle. À l’heure d’une construction politique et économique européenne ébranlée par les volontés souverainistes de certains États, l’auteure invoque les fondements philosophiques de l’idéal européen au secours d’un texte en porte-à-faux, adoubé par les juristes et les humanistes praticiens, méconnu des peuples et craint des gouvernants nationaux. Incarnation de l’Humanisme européen, la CEDH se voit soupçonnée des plus viles turpitudes, elle qui pourtant nous dit tant de la raison d’être de la construction européenne et parait la plus apte à en assurer la survivance et le rayonnement.
EN :
At the occasion of the seventieth anniversary, the author suggests a few reflections on the influence of the European Convention on Human Rights (ECHR) while the European construction appears threatened. Constituting the basis of this construction, the ECHR could see its role expand if it is able to face the complaints aimed at it. This article outlines the history, legal impact, philosophy, but also the political aspects of the European text. Reminding its deep ancestry as well as its humanistic and democratic spirit constructed in reaction to the totalitarian regimes of the interwar period, the author sheds light upon the political and economic mutation of the post-war period which contributes to the weakening of its basis. At a time of a political and economic European construction undermined by the sovereign will of some states, the author asserts the philosophical foundations of the European ideal to the aid of a cantilevered text, dubbed by jurists and humanist practitioners, unrecognized by peoples and feared by national governments. Embodiment of European Humanism, the ECHR is suspected of the most vile acts of turpitude, even though it speaks volumes about the purpose of to the European construction and appears to be the most qualified to ensure its survival and outreach.
ES :
En la ocasión del septuagésimo año, la autora propone algunas reflexiones sobre la influencia de la Convención europea de derecho humanos (CEDH), al mismo tiempo en el que la convención parece ser amenazada. La CEDH, que constituye la base de esta construcción, podría ver su importancia crecer todavía mas, si puede hacer frente a las contestaciones en su contra. El presente artículo sirve para recordar la historia, el impacto jurídico, la filosofía, pero también los tenientes políticos del texto europeo. Recordando su ascensión distante además de su espíritu humanista y democrático construido para reaccionaren contra de los totalitarismos aparecidos entre las dos guerras, la autora pone adelante la mutación política y económica que participan a debilitar su base después de la guerra. Al tiempo de una construcción política y economía europea sacudida por las voluntades soberanistas de algunos estados, la autora invoca los fundamentos filosóficos del ideal europeo que socorre un texto en desequilibrio, armado por los juristas y los practicantes humanistas, desconocido de los pueblos y temido por los gobiernos nacionales. Encarnación del Humanismo europeo, la CEDH se ve sospechada de las depravaciones más viles, ella que sin embargo tiene tanto que decir sobre la razón de ser de la construcción europea y que parece ser la más adecuada para asegurarse de su supervivencia y de su radiación.
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La Convention européenne des droits de l’homme face à la contestation de ses valeurs fondamentales
Peter Leuprecht
p. 69–77
RésuméFR :
Au cours de ses 70 ans d’existence, la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) a connu un élargissement et un développement spectaculaires. Aujourd’hui, tous les 47 États membres du Conseil de l’Europe sont Parties à la CEDH. Le Conseil de l’Europe, la CEDH et la Cour européenne des droits de l’homme sont fondés sur des valeurs et ont été conçus comme instruments de défense de ces valeurs : démocratie pluraliste, État de droit et droits de l’homme. Ils ont apporté une contribution essentielle à la consolidation et au développement de ces valeurs. Cependant, il ne faut pas fermer les yeux devant certaines faiblesses du système. Ces valeurs fondamentales et fondatrices sont aujourd’hui contestées par des mouvements et leaders nationalistes/populistes qui rejettent le pluralisme politique et culturel. L’État de droit est remis en question. Les normes et principes des droits de l’homme sont attaqués. Dans des pays européens comme dans d’autres parties du monde, on constate un glissement vers des régimes autoritaires, voire totalitaires. L’arbre planté il y a 70 ans, la CEDH, aura-t-il la force de résister à ces tendances ?
EN :
In the 70 years of its existence, the European Convention on Human Rights (ECHR) has experienced a remarkable enlargement and development. All 47 member States of the Council of Europe are now Parties to the ECHR. The Council of Europe, the ECHR and the European Court of Human Rights are based on values and have been conceived as instruments of defence of these values: pluralist democracy, rule of law and human rights. They have made an essential contribution to the consolidation and development of these values. However, one should not overlook certain weaknesses of the system. Today, these fundamental and foundational values are questioned by nationalist/populist movements and leaders who reject political and cultural pluralism. The rule of law is challenged. The norms and principles of human rights are attacked. European countries, as well as countries in other parts of the world, are a sliding towards authoritarian and even totalitarian regimes. Will the tree planted 70 years ago, the ECHR, be strong enough to resist these tendencies?
ES :
Durante sus 70 años de existencia, el Convenio Europeo de Derechos Humanos (CEDH) ha experimentado una expansión y un desarrollo espectaculares. Hoy, los 47 estados miembros del Consejo de Europa son Partes del CEDH. El Consejo de Europa, el CEDH y el Tribunal Europeo de Derechos Humanos se basan en ciertos valores y fueron concebidos con el objetivo de defenderlos: la democracia pluralista, el Estado de derecho y los derechos humanos. Estas instituciones han hecho una contribución fundamental a la consolidación y desarrollo de estos valores. Sin embargo, no debemos cerrar los ojos ante ciertas debilidades del sistema. Estos valores fundamentales y fundacionales son hoy cuestionados por movimientos y líderes nacionalistas/populistas que rechazan el pluralismo político y cultural. Se cuestiona el estado de derecho. Las normas y principios de los derechos humanos están siendo atacados. En los países europeos, como en otras partes del mundo, podemos observar un giro hacia regímenes autoritarios, incluso totalitarios. El árbol plantado hace 70 años, el CEDH, ¿tendrá la fuerza para resistir estas tendencias?
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The Council of Europe Commissioner for Human Rights and the European Court of Human Rights: An ever-closer relationship
Dunja Mijatović et Anne Weber
p. 79–97
RésuméEN :
The relationship between the Commissioner for Human Rights and the European Court of Human Rights has varied considerably over time, from a clear separation of functions to increasing interactions. Resolution (99)50 on the Council of Europe Commissioner for Human Rights, adopted on 7 May 1999, reflects a clear willingness to separate the two institutions. This separation, however, did not mean isolation from each other in practice and did not prevent cross-references between the Commissioner and the Court from increasing over the years. In the course of his/her country or thematic work, the Commissioner relies on international and European conventions, and in the first place the Convention and the case law of the Court, when making recommendations to member states. Conversely, the Court has from the outset made references to the work of the Commissioner in its judgments. While the different roles of the two institutions might explain the sometimes diverging approaches, cross-references between the Commissioner and the Court have undoubtedly enriched each other’s work. With the entry into force of Protocol nº14 to the Convention in 2010, the Commissioner’s functions have been formally extended, providing formal recognition to the institution of the Commissioner, which is expressly introduced in the text of the Convention and into the control mechanism established by the Convention. The Commissioner may now on his/her own initiative exercise the right to intervene as a third-party before the Court, by submitting written comments and taking part in hearings. This possibility represents an additional tool at the Commissioner’s disposal to help promote and protect human rights. The Commissioner’s role in the process of execution of the Court’s judgments has also increased over the years. With the amendment introduced in 2017 to the Rules of the Committee of Ministers for the supervision of the execution of judgments (Rule 9), which allows the Commissioner to submit written comments on the execution of judgments directly to the Committee of Ministers, the contribution by the Commissioner to the execution of judgments is expected to have a greater impact.
FR :
La relation entre le/la Commissaire aux droits de l’homme et la Cour européenne des droits de l’homme a considérablement évolué au fil du temps, allant d’une séparation claire des fonctions à des interactions croissantes. La Résolution (99) 50 sur le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, adoptée le 7 mai 1999, reflète une volonté claire de séparer les deux institutions. Cette séparation ne s’est cependant pas traduite par un isolement l’un de l’autre dans la pratique et n’a pas empêché les références croisées entre le/la Commissaire et la Cour de se multiplier au cours des années. Dans le cadre de son travail par pays ou thématique, le/la Commissaire s’appuie sur les conventions internationales et européennes, et en premier lieu sur la Convention et la jurisprudence de la Cour, lorsqu’il/elle formule des recommandations aux États membres. Réciproquement, la Cour a d’emblée fait référence aux travaux du/de la Commissaire dans ses arrêts. Si les rôles différents des deux institutions peuvent expliquer des approches parfois divergentes, les références croisées entre le/la Commissaire et la Cour ont sans aucun doute enrichi leur travail respectif. Avec l’entrée en vigueur du Protocole nº14 à la Convention en 2010, les fonctions du/de la Commissaire ont été formellement étendues, donnant une reconnaissance formelle à l’institution, qui est expressément introduite dans le texte de la Convention et dans le mécanisme de contrôle établi par la Convention. Le/la Commissaire peut à présent, de sa propre initiative, intervenir en tant que tierce partie devant la Cour en soumettant des observations écrites et en prenant part aux audiences. Cette possibilité représente un outil supplémentaire à la disposition du/de la Commissaire afin de promouvoir et protéger les droits de l’homme. Le rôle du/de la Commissaire dans le processus d’exécution des arrêts de la Cour s’est également accru au fil des ans. Avec l’amendement introduit en 2017 aux Règles du Comité des Ministres pour la surveillance de l’exécution des arrêts (Règle 9), qui permet au/à la Commissaire de soumettre des commentaires écrits sur l’exécution des arrêts directement au Comité des Ministres, la contribution du/de la Commissaire à l’exécution des arrêts devrait avoir un impact plus important.
ES :
La relación entre el/la Comisario/Comisaria de derechos humanos y la Corte europea de derechos humanos ha cambiado bastante a lo largo del tiempo, yendo de una separación clara de las funciones a interacciones cada vez mayores. La Resolución (99)50 sobre el Comisario de derechos humanos del Consejo de Europa, adoptada el 7 de mayo 1999 demuestra una voluntad clara de separar las dos instituciones. Esa separación no tuvo como resultado el aislamiento del uno o del otro en la práctica y no impidió que las referencias cruzadas entre el/la Comisario/Comisaria y la Corte se multiplicaran a través de los años. En el marco de su trabajo por país o temáticas, el/la Comisario/Comisaria se apoya sobre las convenciones internacionales, y en primer lugar sobre la Convención y la jurisprudencia de la Corte, para formula recomendaciones a los Estados miembros. Mutualmente, la Corte hizo referencia, desde su comienzo, a los trabajos del/de la Comisario/Comisaria en sus sentencias. Si los papeles diferentes de las dos instituciones pueden explicar enfoques diferentes, las referencias cruzadas entre el/la Comisario/Comisaria enriquecieron sin duda sus trabajos respectivos. Con la entrada en vigor del Protocolo nº14 de la Convención en 2010, las funciones del/de la Comisario/Comisaria fueron formalmente extendidas, dándole un reconocimiento formal a la institución, que fue expresamente introducida en el texto de la Convención y en el mecanismo de control establecido por la Convención. El/la Comisario/Comisaria puede ahora, de su propra iniciativa, intervenir como tercero frente a la Corte, enviando observaciones escritas y tomando lugar en las audiencias. Esta posibilidad representa una herramienta suplementaria a la disposición del/de la Comisario/Comisaria para promover y proteger los derechos humanos. El papel del/de la Comisario/Comisaria en el proceso de ejecución de las sentencias de la Corte también creció a través de los años. Con la enmienda de las Reglas del Comité de Ministro para la vigilancia de la ejecución de las sentencias (Regla 9), introducida en 2017, que permite al/a la Comisario/Comisaria de someter comentarios escritos sobre la ejecución de las sentencias directamente al Comité de Ministros, la contribución del/de la Comisario/Comisaria a la ejecución de las sentencias debería tener un impacto más importante.
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La Convention européenne des droits de l’homme a 70 ans. C’est l’heure d’une retraite honorable ou d’une nouvelle jeunesse?
Guido Raimondi
p. 99–106
RésuméFR :
L’auteur essaie de montrer la nécessité que la Convention européenne des droits de l’homme, avec la Cour qu’elle a créée, après avoir accompagné la vie du continent européen de 1950 à nos jours, tout en jouant un rôle non négligeable dans son histoire et son développement, continue à le faire dans les années à venir. Après avoir passé en revue les étapes fondamentales de l’évolution de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg et de son impact important sur les réformes réalisées dans les Etats contractants de la Convention, y compris au niveau constitutionnel, on met l’accent sur la vitalité du dialogue actuel entre le juge européen et le juge national dans l’accomplissement de leur mission commune pour la protection des droits fondamentaux de chacun ainsi que sur l’exigence de le préserver et de le développer ultérieurement. Finalement, à la lumière des évènements récents en Europe, qui ont conduit à une préoccupante augmentation des cas de violation de l’article 18 de la Convention, témoin de tensions dans le bon fonctionnement de la démocratie, qui présuppose la Convention, et qui la constitue en gardienne d’elle-même, on constate l’indispensabilité du système européen de protection des droits de l’homme en tant que rempart contre la tyrannie, police d’assurance de la démocratie. La conclusion est que la Convention européenne des droits de l’homme ne doit pas prendre sa retraite, et doit au contraire nous accompagner dans les années à venir.
EN :
The author seeks to demonstrate the necessity for the European Convention on Human Rights to continue, with the Court it created, having accompanied the life of the European continent from 1950 onwards, to play a non-negligeable role in its history and its future development. After reviewing the fundamental steps in the evolution of the Strasbourg Court’s case law and its important impact on the reforms implemented in the State Parties to the Convention, including at the constitutional level, the emphasis is put on the vitality of the current dialogue between the European judge and the national judge for the achievement of their common mission as concerns the protection of every individual’s fundamental rights, as well as the importance of preserving it and later developing it. Finally, in light of the recent events in Europe, that led to a preoccupying increase in cases of violations of the Convention’s article 18, witnessing tensions in the proper functioning of democracy, which presupposes the Convention and that constitutes it as a guardian for itself, we conclude to the indispensable nature of the European human rights protection system as a safeguard against tyranny, an insurance policy for democracy. The conclusion is that the European Convention on Human Rights must not retire, but rather must accompany us for the years to come.
ES :
El autor trata de mostrar que el Convenio Europeo de Derechos Humanos, con el Tribunal que creó, después de haber seguido la evolución del continente europeo desde 1950 hasta la actualidad, seguirá desempeñando un papel importante en los próximos años. Tras examinar las etapas fundamentales de la evolución de la jurisprudencia del Tribunal de Estrasburgo y su impacto significativo en las reformas de los Estados contratantes del Convenio, incluso a nivel constitucional, se hace hincapié en la vitalidad del diálogo actual entre el juez europeo y el juez nacional en el cumplimiento de su misión común de proteger los derechos fundamentales de todos, así como el requisito de preservarlo y desarrollarlo posteriormente. Finalmente, a la luz de los recientes acontecimientos en Europa, que han provocado un preocupante aumento de los casos de violación del artículo 18 de la Convención y evidenciado tensiones en el buen funcionamiento de la democracia, de la cual la Convención es el guardián, se observa el carácter indispensable del sistema europeo de protección de los derechos humanos como baluarte contra la tiranía, póliza de seguro para la democracia. La conclusión es que el Convenio Europeo de Derechos Humanos no debe retirarse. Al contrario, debe acompañarnos en los próximos años.
II – La jurisprudence de la CEDH, entre constance et défis contemporains
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Données personnelles et surveillance massive : quelle protection face aux ingérences des autorités publiques?
Roberto Angrisani
p. 107–134
RésuméFR :
Les données à caractère personnel représentent aujourd’hui l’un de bien le plus important faisant l’objet d’échanges tant dans le secteur privé et commercial que dans le secteur public, entre services répressifs ou de renseignement. Le Conseil de l’Europe s’est très rapidement préoccupé des risques et des enjeux liés au respect des droits de l’homme lors du traitement de données à caractère personnel, appuyé grandement par l’activité interprétative de la Cour européenne des droits de l’homme qui a su élargir la portée de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), au point d’y inclure la protection de toute donnée à caractère personnel. Les autorités publiques font une utilisation grandissante des données personnelles de citoyens et ressortissants de pays tiers et les révélations en matière de surveillance massive en sont une preuve éloquente. Cet article, mettant en exergue le fait que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme a - au fil des décennies - permis de mitiger les violations des droits fondamentaux des personnes dans ce domaine, vise à souligner qu’il est aujourd’hui plus que jamais légitime de s’interroger sur le fait de savoir si la protection offerte par la CEDH est encore adaptée aux défis contemporains liés à la protection des données à caractère personnelles.
EN :
Personal data are today one of the most important commodities exchanged both in the private and in the public sector, between law enforcement or intelligence services. The Council of Europe has very quickly become concerned about the risks and vulnerabilities related to the respect of human rights when processing personal data, greatly supported by the interpretative activity of the European Court of Human Rights, which has been able to broaden the scope of Article 8 European Convention on Human Rights (ECHR) to include the protection of all personal data. Public authorities are making increasing use of personal data of citizens and third-country nationals and the revelations in the field of mass surveillance are eloquent proofs of this. This article, highlighting the fact that the case-law of the European Court of Human Rights has - over the decades - mitigated violations of fundamental rights of individuals in this area, aims to underline that it is now more legitimate than ever to question whether the protection offered by the ECHR is still adequate to the contemporary challenges of personal data protection.
ES :
Los datos personales representan hoy en día uno de los bienes más importantes que se intercambian tanto en el sector privado y comercial como en el sector público, entre los servicios de represión o de inteligencia. El Consejo de Europa se ha preocupado muy rápidamente por los riesgos y desafíos relacionados con el respeto de los derechos humanos en el tratamiento de los datos personales, apoyado en gran medida por la actividad interpretativa del Tribunal Europeo de Derechos Humanos, que ha podido ampliar el alcance del artículo 8 del Convenio Europeo de Derechos Humanos para incluir la protección de todos los datos personales. Las autoridades públicas utilizan cada vez más los datos personales de los ciudadanos y de los nacionales de terceros países y las revelaciones en el ámbito de la vigilancia de masas son una prueba elocuente de ello. Este artículo, en el que se destaca el hecho de que la jurisprudencia del Tribunal ha atenuado -a lo largo de los decenios- las violaciones de los derechos fundamentales de las personas en esta esfera, tiene por objeto subrayar que ahora es más legítimo que nunca cuestionar si la protección que ofrece el Convenio sigue siendo adecuada a los desafíos contemporáneos de la protección de los datos personales
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La Convention européenne des droits de l’homme et les enjeux bioéthiques
Xavier Bioy
p. 135–153
RésuméFR :
La Convention européenne des droits de l’homme et son interprète authentique n’étaient pas préparés à répondre aux questions sociétales posées par le domaine, en mutation rapide et constante, de la biomédecine. La Convention n’en a pas moins saisi ces questions au prisme des droits subjectifs, de manière souvent tout à fait différente des États eux-mêmes, qui y voyaient plutôt des enjeux de santé publique et d’ordre public, protégeant des valeurs collectives ou laissant au marché le soin de réguler les comportements. La Cour a donc, comme ailleurs, mais avec plus d’audace encore, ouvert son prétoire et élargi le champ des articles 2, 3, 8 et 14 à l’assistance à la reproduction, au prélèvement et usage des éléments corporels, à la recherche biomédicale et à l’accès aux soins innovants. Les techniques biomédicales sont devenues des droits. Ce faisant, la Cour a ressenti la gêne et connu les débats qu’une telle approche suscite entre choix de société, pluralisme et retenue. Il n’est pas anodin de transformer des choix axiologiques nationaux en conflits de droits subjectifs ou de mener à des exceptions via un contrôle concret que les juges nationaux n’utilisent guère. L’usage indécis de la marge d’appréciation en témoigne.
EN :
The European Convention on Human Rights and its authentic interpreter weren’t prepared to answer the societal issues brought up by the rapidly and constantly expanding field of biomedicine. The Convention nonetheless addressed these questions under the prism of subjective rights, in a way often completely different from the states themselves, who rather saw issues of health care and public order, protecting collective values or letting the market regulate behaviors. The Court thus, as elsewhere, but even more boldly, opened its courtroom and expanded the scope of articles 2,3,8 and 14 to reproductive assistance, to the removal and use of bodily elements, to biomedical research and to access to innovative care. Biomedical techniques have become rights. In doing so, the Court felt the embarrassment and became familiar with the debates that such an approach stirs up between societal choice, pluralism and restraint. It is not trivial to transform axiological national choices into conflicts of subjective rights or to lead to exceptions via a concrete review that the national judges do not use. The indecisive use of the margin of appreciation is a testament to this.
ES :
La Convención Europea de Derechos Humanos y su intérprete auténtico no estaban preparados para responder a las preguntas sociales que surgen en el campo de la biomedicina de manera constante y cambiante. No obstante, la Convención tomo la decisión de abordar estas cuestiones como derechos subjetivos, distintamente a los Estados que, a menudo, las perciben como cuestiones de salud pública y orden público, protegiendo valores colectivos o dejando que el mercado regule su comportamiento. Por lo tanto, la Corte, como en otras instancias, pero con más audacia aún, amplió el alcance de los artículos 2, 3, 8 y 14 a la asistencia a la reproducción, la extracción y uso de elementos corporales, la investigación biomédica y el acceso a cuidados innovadores. Así, las técnicas biomédicas se convirtieron en derechos, pero al hacerlo la Corte se vio expuesta à los debates que suscita tal enfoque al respecto de decisiones de sociedad, pluralismo y moderación. No es trivial transformar las decisiones axiológicas nacionales en conflictos sobre derechos subjetivos o permitir excepciones mediante un control concreto que los jueces nacionales apenas utilizan. El uso indeciso del margen de apreciación lo confirma.
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Liberté d’expression des juges de la Cour européenne des droits de l’homme versus secret des délibérations
Katia Lucas Geoffroy (Dublanche) et Philip Gaffet
p. 155–165
RésuméFR :
Indissociable des fonctions juridictionnelles, le principe du secret des délibérations est absolu. S’il constitue pour le justiciable une garantie de l’indépendance des juges et de leur autonomie, il en va de même de leur liberté d’expression. L’exercice de cette liberté est même encouragé dans l’antre du délibéré, par ce secret exclusif que tout magistrat s’engage à préserver avant sa prise de fonction. Tout en prêtant serment en ce sens, les juges de la Cour européenne des droits de l’homme jouissent d’une liberté d’expression singulière. À la différence de certains de leurs pairs officiant au sein d’autres juridictions, ils disposent du droit d’exprimer officiellement une opinion séparée. Cet attribut de leur liberté d’expression ne génère pas pour autant de tensions vis-à-vis du secret des délibérations auxquels ils sont astreints. Il en révèle d’autres tout en préservant ce sacro-saint secret. Envisager autrement les rapports qui se jouent entre la liberté d’expression des juges de la Cour européenne des droits de l’homme et le secret des délibérations, telle est l’approche privilégiée par les auteurs de la présente étude. Et à cet égard, il appert que quelle que soit l’étendue de leur liberté d’expression, l’exercice de cette liberté et le secret des délibérations ont en partage une même fonction. Ce principe et cette liberté jouent une fonction communément et réciproquement protectrice, le droit d’exprimer une opinion séparée levant le voile sur d’autres secrets.
EN :
Inseparable from the judicial role, the principle of the secrecy of deliberations is absolute. Constituting a guarantee of the independence and autonomy of judges for the individual, this is also the case for their freedom of expression. The exercise of this freedom is even encouraged in the space of deliberation, through this exclusive secrecy that all judges commit to preserving before entering this role. At the same time as taking this oath, judges in the European Court of Human Rights also gain the right to benefit from a singular freedom of expression. Unlike some of their peers in other jurisdictions, they hold the right to officially express a separate opinion. This component of their freedom of expression does not, however, generate tensions towards the secrecy of deliberations to which they are bound. It reveals others, while preserving this sacrosanct secrecy. This study seeks to consider otherwise than has previously been done the relations between freedom of expression and the secrecy of deliberations for judges of the European Court of Human Rights. It appears that notwithstanding the extent of their freedom of expression, the exercise of this freedom and the secrecy of deliberations share a similar role. This principle and this freedom play a role that is mutually and reciprocally protective, the right to express a separate opinion revealing other secrets.
ES :
Inseparable de las funciones jurisdiccionales, el principio del secreto de las deliberaciones es absoluto. Si bien constituye para el litigante una garantía de independencia y autonomía de los jueces, lo mismo se aplica a su libertad de expresión. El ejercicio de esta libertad se alienta incluso en el proceso deliberativo, por este secreto exclusivo que todo magistrado se compromete a preservar antes de asumir el cargo. Al prestar juramento a tal efecto, los jueces del Tribunal Europeo de Derechos Humanos gozan de una libertad de expresión única. A diferencia de algunos de sus pares en otras jurisdicciones, tienen derecho a expresar formalmente una opinión separada. No obstante, este atributo de su libertad de expresión no genera tensiones en cuanto al secreto de las deliberaciones a las que están obligados. Revela a otros mientras preserva este secreto sacrosanto. En este estudio, los autores repiensan la relación entre la libertad de expresión de los jueces del Tribunal Europeo de Derechos Humanos y el secreto de las deliberaciones. A este respecto, parece que, cualquiera que sea el alcance de su libertad de expresión, el ejercicio de dicha libertad y el secreto de las deliberaciones comparten una función común y recíprocamente protectora: el derecho a expresar una opinión separada levantado el velo sobre otros secretos.
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L’apport de la Convention européenne des droits de l’homme à l’encadrement de la justice militaire sur le fondement des exigences de l’État de droit : entre humanisation et civilisation
Mulry Mondélice
p. 167–187
RésuméFR :
La présente contribution montre que si la Convention européenne des droits de l’homme a contribué à l’encadrement de l’administration de la justice militaire sous l’influence de la promotion de l’État de droit en droit international, il reste du chemin à parcourir dans ce domaine. En effet, l’article 6 de la Convention permet à la Cour d’assurer le respect du droit au juge qui cherche un équilibre entre la souveraineté de l’État d’une part, et la protection des droits et libertés des justiciables, d’autre part. Trouvant un écho dans l’action d’autres organes du Conseil de l’Europe et au-delà, la jurisprudence de la Cour montre une double dynamique d’humanisation et de civilisation de la justice militaire devant offrir des garanties d’indépendance et d’impartialité. Toutefois, dans certains cas, la Cour risque de balancer du côté de l’État lorsque surgit un conflit de normes internationales. Dès lors, sa contribution à l’encadrement de la justice militaire trouve ses limites notamment lorsqu’il s’agit d’établir la responsabilité d’États parties à la Convention pour des violations des droits dans le cadre d’opérations militaires à l’étranger sous le mandat d’organisations internationales. Dans ce cas, une interprétation misant sur le déni de justice pourrait permettre à la Cour d’aller plus loin dans l’encadrement de la justice militaire.
EN :
This paper argues that while the European Convention on Human Rights (ECHR) has contributed to framing the administration of military justice under the influence of the promotion of the rule of law in international law, military justice remains concerning. Indeed, Article 6 of the Convention allows the Court to ensure respect for the right to a judge who seeks a balance between the sovereignty of the state, on the one hand, and the protection of rights and freedoms on the other. Echoing the work of other organs of the Council of Europe and beyond, the Court's jurisprudence shows a twofold dynamic of humanization and civilization of military justice required to be independent and impartial. However, in some instances, the Court is likely to protect the State when a conflict of norms arises under international law. Consequently, the Court’s contribution in monitoring military justice comes to count its limits, particularly when it comes to responsibility of states parties for human rights violations in the context of military operations abroad in cooperation with international organizations. Therefore, an interpretation based on the denial of justice could allow the Court to go further in framing military justice.
ES :
La presente contribución muestra que, si bien el Convenio Europeo de Derechos Humanos ha contribuido a la regulación de la administración de la justicia militar bajo la influencia de la promoción del Estado de derecho en derecho internacional, aún queda camino por recorrer en este ámbito. En efecto, el artículo 6 del Convenio le permite al Tribunal garantizar el respeto del derecho del juez que busca un equilibrio entre la soberanía del Estado, por una parte, y la protección de los derechos y libertades de los justiciables, por otra. Inspirándose en la acción de otros órganos del Consejo Europeo y más allá, la jurisprudencia del Tribunal muestra una doble dinámica de humanización y de civilización de la justicia militar que debe ofrecer garantías de independencia e imparcialidad. Sin embargo, en algunos casos, el Tribunal podría inclinarse hacia el lado del Estado cuando surge un conflicto de normas internacionales. Por consiguiente, su contribución a la supervisión de la justicia militar encuentra sus límites, en particular cuando se trata de establecer la responsabilidad de los Estados parte del Convenio por violaciones de derechos en el contexto de operaciones militares en el extranjero bajo el mandato de las organizaciones internacionales. En este caso, una interpretación basada en la denegación de la justicia podría permitirle al Tribunal ir más allá en la supervisión de la justicia militar.
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Si la compétence l’emportait sur le territoire? Réflexions sur l’obsolescence de l’approche territoriale de la notion de juridiction
Sébastien Touzé
p. 189–200
RésuméFR :
La notion de juridiction est complexe, indéfinie et variable. La jurisprudence de la Cour le confirme et a toujours maintenu un certain flou sur sa portée. Pourtant essentielle dans le cadre de l’examen par la Cour de sa compétence, la juridiction de l’État est appréhendée par principe comme territoriale avec quelques exceptions dont la prévisibilité laisse ouverte de nombreuses questions. Cet article propose de réfléchir sur le lien entretenu entre la notion et les compétences de l’État en droit international seul à même de pouvoir dépasser l’approche jurisprudentielle classique au profit d’une interprétation novatrice confirmant la portée extraterritoriale des obligations conventionnelles.
EN :
The notion of jurisdiction is complex, undefined and variable. It is confirmed throughout the Court's case law, which has always maintained its vague scope. Although essential for the Court's examination of its own jurisdiction, State jurisdiction is in principle understood as territorial, with few unpredictable exceptions leading to open questions. This article reviews the link between the concept of State itself and its jurisdiction in international law, which can enable to go beyond the traditional jurisprudential approach in favour of an innovative interpretation confirming the extraterritorial scope of treaty obligations.
ES :
La noción de jurisdicción es compleja, indefinida y variable. La jurisprudencia de la Corte lo confirma y siempre ha mantenido una cierta vaguedad en cuanto a su alcance. A pesar de ser esencial para el examen de la competencia de la Corte, la jurisdicción del Estado se entiende en principio como territorial, con algunas excepciones cuya previsibilidad deja muchas cuestiones abiertas. Este artículo se propone reflexionar sobre el vínculo entre la noción y la jurisdicción del Estado en el derecho internacional, lo que permite superar el enfoque tradicional de la jurisprudencia en favor de una interpretación innovadora que confirme el alcance extraterritorial de las obligaciones de los tratados.
III – La CEDH et ses États parties
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Russia and the European Convention (or Court) of Human Rights: The End?
Bill Bowring
p. 201–218
RésuméEN :
Russia has been a member of the Council of Europe (CoE) for 25 years, and of the European Convention on Human Rights (ECHR) for 22 years, which is in itself a remarkable achievement on both sides. This article asks the questions: how has this been this possible? And is the close and mostly positive relationship between Russia and the Council of Europe and the European Court of Human Rights (ECtHR) about to come to an end? In order to answer these questions, I first provide an overview of the USSR’s late acknowledgment of the need for compliance in its internal affairs with UN standards, and especially the contribution of Mikhail Gorbachev. I follow this with an account of Russia’s accession to the CoE and ratification of the ECHR under Boris Yeltsin, and a snapshot of the popularity for Russians of complaining to Strasbourg. Second, I turn to the very controversial rulings by the Constitutional Court of the Russian Federation (CCRF) and new legislation on the question of the CCRF ruling on the “impossibility” for Russia of implementing judgments of the ECtHR. Third, I analyse the controversial Yukos case. This was in fact the second and last until now such ruling on impossibility. Fourth, the Parliamentary Assembly of the Council of Europe imposed sanctions on Russia following the illegal annexation by Russian of Crimea. Russia seemed poised to leave or be expelled from the CoE. But in 2019 a controversial deal was done. Fifth, I ask whether President Putin’s 2020 amendments to the 1993 Constitution really pose a threat to Russia’s continuing relationship with the CoE and the ECHR.
FR :
La Russie est membre du Conseil de l’Europe (CE) depuis 25 ans et de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) depuis 22 ans, ce qui est en soi une réalisation remarquable des deux côtés. Cet article pose les questions : comment cela a-t-il été possible? La relation étroite et surtout positive entre la Russie et le Conseil de l’Europe et la Cour européenne des droits de l’homme (Cour EDH) est-elle sur le point de prendre fin ? Afin de répondre à ces questions, je donne d’abord un aperçu de la reconnaissance tardive par l’URSS de la nécessité de se conformer dans ses affaires internes aux normes de l’ONU, et en particulier de la contribution de Mikhail Gorbatchev. Je poursuis avec un compte rendu de l’adhésion de la Russie au CE et de la ratification de la CEDH sous Boris Eltsine, ainsi qu’un aperçu de la popularité des Russes à se plaindre à Strasbourg. Deuxièmement, j’en viens aux décisions particulièrement controversées de la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie (CCFR) et à la nouvelle législation sur la question de la décision du CCFR sur « l’impossibilité », pour la Russie, de mettre en oeuvre les arrêts de la Cour EDH. Troisièmement, j’analyse le cas controversé de Yukos. Il s’agissait en fait de la deuxième et dernière décision de ce genre à ce jour sur l’impossibilité. Quatrièmement, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a imposé des sanctions à la Russie à la suite de l’annexion illégale par la Russie de la Crimée. La Russie semblait sur le point de quitter ou d’être expulsée du CE mais, en 2019, un accord controversé a été conclu. Cinquièmement, je demande si les amendements 2020 du président Poutine à la Constitution de 1993 constituent vraiment une menace pour la relation continue de la Russie avec le CE et la CEDH.
ES :
Rusia ha sido miembro del Consejo de Europa (CE) por 25 años y de la Convención Europea de Derechos Humanos (CEDH) por 22 años, lo que en sí mismo es un logro notable de ambas partes. Este artículo hace las preguntas: ¿cómo fue esto posible? ¿Está a punto de terminar la estrecha y sobre todo positiva relación entre Rusia y el Consejo de Europa y la Corte Europea de Derechos Humanos (Corte EDH)? Para responder a estas preguntas, en primer lugar ofrezco una descripción general del reconocimiento tardío por parte de la URSS de la necesidad de ajustarse en sus asuntos internos a las normas de las Naciones Unidas y, en particular, a la contribución de Mijaíl Gorbachov. Continúo con un relato de la adhesión de Rusia al CE y la ratificación de la CEDH bajo Boris Yeltsin, así como un resumen de la popularidad de los rusos quejándose en Estrasburgo. En segundo lugar, llego a las decisiones muy controvertidas de la Corte Constitucional de la Federación de Rusia (CCFR) y la nueva legislación sobre el tema del fallo del CCFR sobre “la imposibilidad” de que Rusia ejecute las sentencias de la Corte EDH. En tercer lugar, analizo el controvertido caso Yukos. De hecho, fue la segunda y última sentencia de este tipo hasta la fecha sobre la imposibilidad. En cuarto lugar, la Asamblea Parlamentaria del Consejo de Europa ha impuesto sanciones a Rusia tras la anexión ilegal de Crimea por parte de Rusia. Rusia parecía estar a punto de salir o ser expulsada del CE, pero se llegó a un controvertido acuerdo en 2019. En quinto lugar, pregunto si las enmiendas de 2020 del presidente Putin a la Constitución de 1993 realmente representan una amenaza para la relación continua de Rusia con el Consejo de Europa y la CEDH.
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Le Protocole n° 16, entre théories et réalités du dialogue judiciaire
Laurence Burgorgue-Larsen
p. 219–254
RésuméFR :
Cet article a pour ambition de mettre en lumière les différences entre, d’un côté, le texte du Protocole n° 16 – qui présente de nombreuses spécificités théoriques – et, de l’autre, les réalités du dialogue judiciaire qui s’est manifesté à travers les deux saisines de la Cour de cassation française et de la Cour constitutionnelle arménienne. En dépit des intentions louables des auteurs du Protocole n° 16, il n’est pas sûr que ce dernier arrive à engendrer une dynamique dialogique d’envergure, au regard de son caractère facultatif et de l’absence de force obligatoire des avis.
EN :
The aim of this article is to highlight the differences between, on the one hand, the text of Protocol n° 16 – which has many theoretical specificities – and, on the other hand, the realities of the judicial dialogue that has manifested itself through the two referrals to the French Court of Cassation and the Armenian Constitutional Court. Despite the laudable intentions of the authors of Protocol n° 16, it is not certain that the latter will succeed in generating a wide-ranging dialogue dynamic, given its optional nature and the absence of binding force of opinions.
ES :
El objetivo de este artículo es poner de relieve las diferencias entre, por una parte, el texto del Protocolo n° 16 – que tiene muchas especificidades teóricas – y, por otra, las realidades del diálogo judicial que se ha manifestado a través de las dos solicitudes presentadas ante el Tribunal de Casación francés y el Tribunal Constitucional armenio. A pesar de las loables intenciones de los autores del Protocolo n°16 no es seguro que este último logre generar una amplia dinámica de diálogo, dado su carácter facultativo y la ausencia de fuerza vinculante de los dictámenes.
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La France et la Convention européenne des droits de l’homme : un peu, beaucoup, passionnément…
Emmanuel Decaux
p. 255–270
RésuméFR :
La France est le dernier État fondateur du Conseil de l’Europe à avoir ratifié la Convention européenne des droits de l’homme en 1974 et à avoir accepté le recours individuel en 1981. Depuis l’arrêt Bozano c. France de 1986, le débat est passé du plan politique au terrain juridique : l’application directe de la Convention, reconnue formellement par les juridictions internes a pris une dimension substantielle, à la lumière d’une jurisprudence très diversifiée de la Cour de Strasbourg. La « dialogue des juges » avec les juridictions suprêmes, Conseil d’État et Cour de cassation, a montré toute sa fécondité dans la durée. On ne saurait oublier que c’est un dialogue dans les deux sens, l’influence des juges français – de René Cassin à Jean-Paul Costa, tous deux présidents de la Cour - devant être soulignée. Bien plus, la France s’est fait le fer de lance du Protocole n°16 donnant toute sa dimension à ce dialogue juridictionnel, qui traduit le principe de subsidiarité, au moment même où de nouvelles contestations politiques se font jour à l’encontre des « juges étrangers ». Pour autant le lien étroit entre l’État de droit et l’idée européenne consacré par les pères fondateurs dès 1950 est plus nécessaire que jamais pour défendre les droits de l’homme sur tout le continent.
EN :
France is the last founding state of the Council of Europe to have ratified the European Convention of Human Rights in 1947 and to have accepted the individual petition mechanism in 1981. Since the Bozano v. France case in 1986, the debate has gone from the political field to the legal field: the direct application of the Convention, formally recognized by internal jurisdictions has taken a substantial dimension, in light of the diverse jurisprudence of the Strasbourg Court. The “judges’ dialogue” with the Supreme Courts, Council of State and Cour de Cassation, demonstrated all of its fruitfulness in the long term. We should not forget that it is a dialogue that goes both ways: the influence of the French judges – from René Cassin to Jean-Paul Costa, both presidents of the Court – must be highlighted. Furthermore, France was at the forefront of the Protocol n°16, giving this judicial dialogue all of its dimension, which translates the principle of subsidiarity, at the very moment when new political objections arise concerning “foreign judges”. Nevertheless, the close connection between the rule of law and the European idea established by the founding fathers as early as 1950 is more necessary than ever to defend human rights across the continent.
ES :
Francia es el último estado fundador del Consejo de Europa en haber ratificado la Convención Europea de derechos humanos en 1971 y en haber aceptado el recurso individual en 1981. Desde el caso Bozano c. Francia de 1989, el debate paso del plan político al terreno jurídico : la aplicación directa de la Convención, formalmente reconocida por las jurisdicciones internas tomo una dirección substancial, a la luz de una jurisprudencia muy diversificada de la Corte de Estrasburgo. El « diálogo de jueces » con las jurisdicciones supremas, Consejo de Estado y Corte de Casación, demostró con el tiempo toda su fecundidad. No podemos olvidar que es un diálogo de doble sentido. La influencia de los jueces franceses – de René Cassin à Jean-Paul Costa, dos presidentes de la Corte – tiene que ser mencionada. Además, Francia se hizo la punta de lanza del Protocolo n°16, dándole toda su dimensión a este diálogo jurisdiccional que traduce el principio de subsidiariedad, en el momento en que aparecen nuevas contestaciones políticas contra los « jueces extranjeros ». Sin embargo, el enlace entre el estado de derecho y la idea europea consagrada por los padres fundadores desde 1950 es mas necesaria hoy que nunca para defender los derechos humanos sobre todo el continente.
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L’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme
Michel de Salvia
p. 271–286
RésuméFR :
Un arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme, élaboré au terme d’une procédure judiciaire supranationale, ne met pas un terme au contentieux, car la phase de l’exécution est du ressort du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe. Les aspects suivants doivent dès lors être explorés : contexte structurel et normatif relatif au cadre institutionnel envisagé par la Convention européenne des droits de l’homme; procédures prévues pour le Comité en matière de « surveillance » des arrêts; défis auxquels le Comité est confronté dans l’exercice de cette tâche. La solution envisagée par la Convention en cas de violation est celle d’une réparation intégrale du préjudice subi du fait d’actions ou omissions imputables à l’État défendeur. Quant aux mesures à adopter par l’État, ce dernier reste libre en principe, sous le contrôle du Comité des Ministres, de choisir les moyens de s’acquitter des obligations qui lui incombent au titre de l’article 46 (1) de la Convention, pour autant que ces moyens soient compatibles avec les conclusions contenues dans l’arrêt de la Cour. Dans certaines situations particulières, il est arrivé que la Cour ait estimé utile d’indiquer à un État le type de mesures à prendre pour mettre un terme à la situation – souvent structurelle – qui avait donné lieu à un constat de violation. En conclusion, le système de protection européen des droits de l’homme revêt pour l’essentiel un caractère bicéphale : judiciaire, dans la mesure où l’intervention de la Cour tend à délimiter l’objet du contentieux et à fixer le cadre juridique approprié; quasi-judiciaire aux contours nettement politiques, lorsque le Comité précise le périmètre de l’obligation internationale pesant sur l’État défendeur au stade de l’exécution de l’arrêt. En fait, ce faisant, le Comité se transforme en un véritable « juge » de l’exécution des arrêts.
EN :
A judgment delivered by the European Court of Human Rights, drawn up after supranational judicial proceedings, does not put an end to the litigation because the execution phase is the responsibility of the Committee of Ministers of the Council of Europe. The following aspects must therefore be explored: the structural and normative context of the institutional framework envisaged by the European Convention on Human Rights; the procedures foreseen for the Committee in terms of « supervision » of judgments; the challenges facing the Committee in carrying out this task. The solution envisaged by the Convention in the event of a violation is that of full reparation for the damage suffered as a result of actions or omissions attributable to the respondent State. As to the measures to be adopted by the State, the latter remains free in principle, under the supervision of the Committee of Ministers, to choose the means of discharging its obligations under Article 46§1 of the Convention, provided that these means are compatible with the findings contained in the Court's judgment. In certain specific situations, the Court has sometimes found it useful to indicate to a State the type of measures to be taken to put an end to the – often structural – situation which had given rise to a finding of violation. In conclusion, the European human rights protection system is essentially bicephalous : judicial, in that the Court's intervention tends to delimit the subject matter of the dispute and to establish the appropriate legal framework; quasi-judicial, with clearly political contours, when the Committee specifies the scope of the international obligation incumbent on the respondent State at the stage of execution of the judgment. In fact, in so doing, the Committee turns into a real « judge » of the execution of judgments.
ES :
Una sentencia de la Corte europea de derechos humanos, elaborada al final de un proceso judicial supranacional, no termina al litigio ya que la fase de ejecución es la responsabilidad del Comité de ministros del Consejo de Europa. Los aspectos siguientes tienen que ser explorados: contexto estructural y normativo que tienen relación con el marco institucional contemplado por la Convención europea de derechos humanos; procedimientos previstos para el Comité en lo que concierna la “vigilancia” de los casos; desafíos a los cuales el Comité es confrontado en el ejercicio de esta tarea. La solución prevista por la Convención en caso de violación es la reparación integral del prejudicio sufrido como resultado de las acciones o de las omisiones atribuibles al Estado acusado. En cuanto a las medidas que tiene que adoptar el Estado, este último es, en principio, libre, bajo el control del Comité de ministros, de escoger los medios por los cuales cumplirá sus obligaciones conforme al articulo 46 § 1 de la Convención, siempre y cuando estos medios sean compatibles con las conclusiones contenidas en la decisión de la Corte. En algunas situaciones particulares, sucedió que la Corte encontró útil indicar el tipo de medidas que debería tomar un Estado para poner fin a una situación – a menudo estructural – donde se había constatado une violación. En conclusión, el sistema de protección europeo de derechos humanos tiene en esencial un carácter bicéfalo: judicial, en la medida en que la intervención de la Corte tiende a delimitar el objeto del litigio y a determinar el marco institucional apropiado; casi-judicial con contornos claramente políticos, cuando el Comité precisa el perímetro de la obligación internacional que pesa sobre el Estado acusado en la etapa de ejecución del caso. De hecho, haciéndolo, el Comité se transforma en verdadero “juez” de la ejecución de los casos.
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L’application de la Convention européenne des droits de l’homme dans les outre-mer de l’espace Caraïbe-Amériques : entre intériorité et extériorité
Karine Galy
p. 287–312
RésuméFR :
En vertu de l’article 56 (ex-article 63) de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), certains États parties possédant des territoires ultramarins, peuvent par déclaration expresse, y étendre de manière transitoire, temporaire ou permanente les effets juridiques de ce texte. L’extension du champ d’application de la Convention peut donner lieu à un aménagement, au regard des droits garantis d’une part, et des procédures de saisine des organes de contrôle de la Convention d’autre part, l’introduction du Protocole n° 11 instaurant une cour unique, n’ayant pas modifié cette possibilité. Dans l’espace Caraïbe-Amériques, la France, le Royaume-Uni et les Pays-Bas ont pu faire un usage de cette clause territoriale, plaçant ainsi leurs dépendances dans une situation variable, au gré de leurs diverses déclarations. Oscillant entre intériorité et extériorité vis-à-vis du droit de la CEDH, les territoires ultramarins de l’espace Caraïbe-Amériques se retrouvent en conséquence, dans le cadre d’un régime juridique différencié justifié par l’existence de « nécessités locales », mais dont la signification et la portée restent encore à préciser. L’analyse du champ d’application territoriale de la Convention à l’égard des territoires ultramarins de l’espace Caraïbe-Amériques, met donc en évidence toute l’ambiguïté de ce texte dont la Cour assure certes, une interprétation dynamique, mais néanmoins assujettie au formalisme de l’article 56.
EN :
By virtue of Article 56 (ex-Article 63) of the European Convention on Human Rights (ECHR), some States Parties possessing overseas territories may, by express declaration, extend there in a transitional, temporary or permanent manner, the legal effects of this text. The extension of the scope of application of the Convention, may give rise to an adjustment, with regard to the rights guaranteed, on the one hand, and to the procedures for referral to the control bodies of the Convention, on the other hand, the introduction of Protocol n° 11 establishing a single court, not having modified this possibility. In the Caribbean-Americas area, France, the United Kingdom and the Netherlands were able to make use of this territorial clause, thus placing their dependencies in a variable situation, according to their various declarations. Oscillating between interiority and exteriority vis-à-vis the law of the ECHR, the overseas territories of the Caribbean-Americas area find themselves consequently, within the framework of a differentiated legal regime justified by the existence of "local necessities", but whose meaning and scope have yet to be clarified. The analysis of the territorial scope of application of the Convention with regard to the overseas territories of the Caribbean-Americas space therefore highlights all the ambiguity of this text, of which the Court certainly provides a dynamic interpretation, but nevertheless subject to the formalism of Article 56.
ES :
En virtud del artículo 56 (antes artículo 63) de la Convención Europea de Derechos Humanos (CEDH), algunos Estados parte que tienen territorios ultramarinos pueden, por declaración expresa, extender a esos territorios los efectos jurídicos del texto, de manera transitoria, temporaria o permanente. La extensión del campo de aplicación de la Convención puede producir una ordenación, en lo que concierne, de una parte, los derechos garantizados y, de la otra, la presentación de demandas frente a los cuerpos de control de la Convención, ya que la introducción del Protocolo n° 11 que establece una corte única, no modifica esta posibilidad. En el área Caribe-América, Francia, el Reino Unido y los Países Bajos pudieron usar esta cláusula territorial, sometiendo sus dependencias a estas declaraciones, en una situación cambiante. Oscilando entre inferioridad y exterioridad frente al derecho de la CEDH, los territorios ultramarinos del área Caribe-América se encuentran entonces en un marco jurídico diferente, el cual que se puede justificar por la existencia de “necesidades locales” pero al cual es necesario precisar su significación y su alcance. El análisis del campo de aplicación territorial de la Convención con respeto a los territorios ultramarinos en el área Caribe-América pone adelante las ambigüedades del texto, del cual la Corte asegura, sin dudas, una interpretación dinámica, pero que sigue sin embargo sujeto al formalismo del artículo 56.
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L’impact de l’élargissement du Conseil de l’Europe sur le système de la Convention européenne des droits de l’homme
Catherine Gauthier
p. 313–327
RésuméFR :
Si l’élargissement du Conseil de l’Europe est un processus qui s’est achevé depuis quelques années maintenant, ses conséquences et les inflexions qu’il a pu avoir sur le système de la Convention européenne des droits de l’homme sont encore sensiblement perceptibles. Sans attribuer à l’élargissement l’essentiel des évolutions que le système a connues ces dernières années, les changements liés à cet évènement majeur sont nombreux. Ils ont pesé non seulement sur les mécanismes de contrôle de la Cour européenne des droits de l’homme, mais également sur le contentieux porté devant elle.
EN :
Although the expansion of the European Council ended several years ago, its consequences on the systems of the European Convention on Human Rights are still noticeable to this day. Without crediting most of the latest developments undergone by the system to this expansion, the latter has certainly caused numerous changes. Not only have they influenced the control mechanisms of the European Court of Human Rights, they have equally affected the dispute it has to resolve.
ES :
Si la expansión del Consejo de Europa fue llevada a cabo hace varios años, sus consecuencias e inflexiones sobre el sistema de la Convención europea de los derechos humanos pueden ser percibidas hasta el día de hoy. Sin atribuir a esta expansión la mayor parte de las transformaciones que ha experimentado el sistema en los últimos años, los cambios relacionados con este evento son numerosos ya que impactaron los mecanismos de control de la Corte Europea de los derechos humanos y también los litigios llevados ante ella.
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La « responsabilité partagée » des États pour des violations de la Convention européenne des droits de l’homme
Vladyslav Lanovoy
p. 329–349
RésuméFR :
Les États parties à la Convention européenne des droits de l’homme participent parfois avec un autre État, une organisation internationale, ou un acteur non étatique, à la violation de celle-ci. Dans ce contexte, cet article se penche sur l’approche de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’application et l’interprétation des règles pertinentes de la responsabilité des États et des organisations internationales codifiées par la Commission du droit international. Cet article examine en particulier la jurisprudence de la Cour en matière de l’attribution de la conduite et de la responsabilité à raison du fait internationalement illicite commis par un État tiers ou une organisation internationale. L’empreinte de cette jurisprudence ne se limite pas à la confirmation, parfois mécanique, des règles en question, mais assez souvent s’écarte de ces règles et contribue à leur développement. Cela nous ramène à une question complexe, qui reste toujours ouverte à l’heure actuelle, soit celle de savoir si nous sommes en l’espèce face à une interprétation du droit général de la responsabilité par la Cour, ou face à un régime spécial de la responsabilité dans le cadre de la Convention européenne des droits de l’homme, ou bien s’il s’agit plutôt d’une interprétation large, par la Cour, de certaines normes primaires consacrées en cette dernière.
EN :
States parties to the European Convention of Human Rights sometimes participate with another State, international organisation or non-State actor in a violation of the Convention. In this context, this article analyses the way in which the European Court of Human Rights has applied and interpreted the relevant rules on the responsibility of States and international organisations as codified by the International Law Commission. In particular, this article examines the case law of the Court in relation to the attribution of conduct and the responsibility of a State in connection with an internationally wrongful act of another State or international organisation. The footprint of this case law is not limited to a confirmation, sometimes mechanical, of the rules in question, but quite often departs from these rules and contributes to their development. This brings us to a complex question, which remains open for the time being, namely whether we are before an interpretation of general law of international responsibility by the Court, a special regime of responsibility in the context of the European Convention of Human Rights, or yet an extensive interpretation of certain primary rules contained therein.
ES :
Los Estados parte en el Convenio Europeo de Derechos Humanos a veces participan con otro Estado, una organización internacional o un agente no estatal en una violación del Convenio. En este contexto, en el presente artículo examina la forma en que el Tribunal Europeo de Derechos Humanos ha aplicado e interpretado las normas pertinentes de responsabilidad de los Estados y las organizaciones internacionales codificadas por la Comisión de Derecho Internacional. En particular, el artículo examina la jurisprudencia de la Corte sobre la atribución del comportamiento y la responsabilidad en relación con el hecho internacionalmente ilícito de otro Estado u organización internacional. La huella de esta jurisprudencia no se limita a confirmar, a veces mecánicamente, las normas en cuestión, sino que muy a menudo se aparta de ellas y contribuye a su desarrollo. Esto nos lleva a una cuestión compleja, que sigue abierta en la actualidad, a saber, si se trata de una interpretación del derecho general de la responsabilidad por parte de la Corte, de un régimen especial de responsabilidad en virtud del Convenio Europeo de Derechos Humanos o bien de una interpretación amplia de ciertas normas primarias consagradas en ese convenio.
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Monaco et la Convention européenne des droits de l’homme
Yannick Lécuyer
p. 351–367
RésuméFR :
Bien des progrès ont été enregistrés en matière de droits humains depuis la ratification de la Convention européenne des droits de l’homme par Monaco. Il reste pourtant de nombreux angles morts soigneusement entretenus par la Principauté grâce au jeu cumulé, de la marge d’appréciation concédée aux États, des réserves et de la non-ratification d’un certain nombre de protocoles additionnels, particulièrement le premier en date du mars 1952. À bien des égards, le Rocher Monégasque représente une étrangeté, un caillou dans la chaussure du Conseil de l’Europe.
EN :
Many improvements have been registered in the field of human rights since the ratification of the European Convention of Human Rights by Monaco. However, there still remains numerous blind spots maintained by the principality thanks to the cumulative game, the margin of appreciation granted to states, reservations and the non-ratification of a certain number of additional protocols, particularly the first dated March 1952. In many ways, the Monegasque Rock represents an oddity, a pebble in the Council of Europe’s shoe.
ES :
Se han hecho muchos progresos en la esfera de los derechos humanos desde que Mónaco ratificó el Convenio Europeo de Derechos Humanos. Sin embargo, todavía hay muchos puntos ciegos que el Principado mantiene cuidadosamente gracias al efecto acumulativo del margen de apreciación concedido a los Estados, las reservas y la no ratificación de varios protocolos adicionales, especialmente el primero de marzo de 1952. En muchos sentidos, la Roca de Mónaco representa una extrañeza, una piedra en el zapato del Consejo de Europa.
IV – La CEDH et les étrangers
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L’Agence Frontex : la police européenne aux frontières au défi du respect des droits humains des migrants
Idil Atak et Ndeye Dieynaba Ndiaye
p. 369–393
RésuméFR :
Cet article porte sur l’expansion du mandat de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex) depuis sa création en 2005. Il analyse l’impact des pouvoirs grandissants de l’Agence sur les droits humains des migrants. Comme le montre le Nouveau Pacte sur la Migration et l’Asile de 2020, l’Agence bénéficie d’un soutien politique sans faille dans la gestion intégrée des frontières extérieures des États membres de l’Union européenne. Elle peut notamment procéder à des opérations conjointes maritimes, terrestres et aériennes de contrôle des mouvements migratoires et de renvois forcés, en plus de pouvoir déployer des agents dans les pays tiers. En 2021, un contingent permanent du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes doté de pouvoirs d’exécution verra le jour. Nous soutenons que cette expansion considérable reflète la préférence de l’UE et de ses États membres de répondre à la pression migratoire essentiellement par des mesures de sécurisation de leurs frontières afin de dissuader et réprimer des migrants indésirés. Cette approche est non seulement contre-productive mais aussi elle engendre de graves atteintes aux droits des migrants visés, y compris des demandeurs d’asile. Malgré certaines améliorations apportées au mandat de l’Agence pour un meilleur respect des droits humains, ce but est loin d’être atteint. L’absence de règles claires d’imputation de responsabilité et d’un recours effectif en cas d’atteintes aux droits est particulièrement problématique.
EN :
This article examines the expansion of the mandate of the European Border and Coast Guard Agency (Frontex) since its creation in 2005. It analyzes the impact of the Agency's growing powers on the human rights of migrants. As shown by the 2020 New Pact on Migration and Asylum, the Agency enjoys strong political support for its integrated management of the external borders of the EU Member States. In particular, Frontex can carry out joint maritime, land and air operations and forced removals, in addition to deploying agents in third countries. In 2021, a permanent contingent of the European Border and Coast Guard with enforcement powers will be established. We argue that this unprecedented reinforcement of Frontex’s powers reflects the preference of the EU and its Member States to respond to migratory pressure primarily by securitizing their borders in order to deter unwanted migrants. This approach is not only counterproductive but also leads to serious violations of the rights of migrants, including asylum seekers. Despite some changes in the Agency's mandate to improve the rights' protection framework the lack of clear rules for the determination of Frontex's responsibility in joint operations and the absence of an effective remedy for rights violations remain particularly problematic.
ES :
Este artículo examina la ampliación del mandato de la Agencia Europea de la Guardia de Fronteras y Costas (Frontex) desde su creación en 2005. Analiza el impacto de los crecientes poderes de la Agencia en los derechos humanos de los migrantes. Como indica el Nuevo Pacto sobre Migración y Asilo de 2020, la Agencia goza de un apoyo político inquebrantable en la gestión integrada de las fronteras exteriores de los Estados miembros de la Unión Europea. En particular, puede realizar operaciones conjuntas marítimas, terrestres y aéreas para controlar los movimientos migratorios y los retornos forzosos, además de poder desplegar agentes en terceros países. En 2021, se establecerá un contingente permanente de la Guardia de Fronteras y Costas de Europa con poderes de ejecución. Sostenemos que esta considerable expansión refleja la preferencia de la UE y sus Estados miembros de responder a la presión migratoria principalmente con medidas que aseguran sus fronteras a fin de disuadir y reprimir a los migrantes no deseados. Este enfoque no sólo es contraproducente, sino que también da lugar a graves violaciones de los derechos de ciertos migrantes, incluidos los solicitantes de asilo. A pesar de algunas mejoras en el mandato de la Agencia para asegurar un mayor respeto de los derechos humanos, dicho objetivo está lejos de alcanzarse. La ausencia de normas claras de atribución de responsabilidad y de un recurso efectivo para las violaciones de los derechos son particularmente problemáticos.
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La création du principe de non-refoulement en droit international des droits de la personne par la Cour européenne des droits de l’homme : un chef-d’oeuvre à protéger
Olivier Delas
p. 395–416
RésuméFR :
Dès les premières années suivant leur création, les organes de contrôle de la Convention européennes des droits de l’homme vont être saisis d’affaires ayant trait à des mesures d’éloignement du territoire. Bien que les premiers constats de violation n’interviennent que bien plus tard, le raisonnement est posé très tôt : lors de la mise en oeuvre de telles mesures, les États se doivent de ne pas contrevenir à certaines dispositions de la Convention, notamment son article 3. Par cette construction jurisprudentielle originale, la Commission et la Cour européennes vont créer un véritable principe de non-refoulement en droit européen des droits de la personne, qui non seulement sera repris par les autres juridictions et quasi-juridictions internationales, mais sera également consacré conventionnellement par les États. Bien plus protecteur que son prédécesseur en droit international des réfugiés, ce principe n’en est pas moins soumis, en raison de sa construction même, aux préoccupations souveraines des États. Les enjeux sécuritaires contemporains, en matière de lutte contre le terrorisme ou d’immigration irrégulière, font qu’il doit recevoir une attention toute particulière, notamment de la part de la Cour européenne des droits l’homme elle-même.
EN :
From the first years after their creation, the supervisory bodies of the European Convention on Human Rights will be seized of cases relating to measures to remove them from the territory. Although the first findings of violation do not appear until much later, the reasoning is posed very early: when implementing such measures, States must not contravene certain provisions of the Convention, in particular its article 3. Through this original case law construction, the European Commission and Court will create a real principle of non-refoulement in European human rights law, which will not only be taken up by other international courts and quasi-courts but will also be conventionally consecrated by the States. Much more protective than its predecessor in international refugee law, this principle is no less subject, by virtue of its very construction, to the sovereign concerns of States. Contemporary security issues, in the fight against terrorism or irregular immigration, require it to receive special attention, in particular from the European Court of Human Rights itself.
ES :
Desde los primeros años después de su creación, los órganos de control de la Convención Europea de Derechos Humanos conocerán los casos relacionados con las medidas para expulsarlos del territorio. Si bien las primeras conclusiones de violación no aparecen hasta mucho después, el razonamiento se plantea muy temprano: al implementar tales medidas, los Estados no deben contravenir determinadas disposiciones de la Convención, en particular su artículo 3. A través de esta construcción jurisprudencial original, la Comisión y la Corte Europeas crearán un principio real de no devolución en el derecho europeo de los derechos humanos, que no solo será asumido por otros tribunales y cuasi-tribunales internacionales, sino que también será convencionalmente consagrado por los Estados. Mucho más protector que su predecesor en el derecho internacional de los refugiados, este principio no está menos sujeto, en virtud de su propia construcción, a las preocupaciones soberanas de los Estados. Las cuestiones de seguridad contemporáneas, en la lucha contra el terrorismo o la inmigración irregular, requieren que reciba una atención especial, en particular de la propia Corte Europea de Derechos Humanos.
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Quinze ans de jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme sur la traite des êtres humains : de l’affaire Siliadin c. France à l’arrêt de Grande Chambre S.M. c. Croatie
Kristine Plouffe-Malette
p. 417–438
RésuméFR :
La Cour européenne des droits de l’homme a interprété l’article 4 de la Convention européenne des droits de l’homme et reconnu une violation de celui-ci depuis une quinzaine d’années. Elle a notamment élargi le champ matériel de cette disposition pour y inclure la traite des êtres humains. Or, elle n’a pas proposé une lecture claire des différentes situations incluses à ce libellé, soit l’esclavage, la servitude, le travail forcé, ainsi que la traite des êtres humains. L’arrêt de Grande Chambre prononcé le 25 juin 2020 a certes offert plusieurs précisions, mais n’a pas totalement dissipé la confusion qui règne entre les problématiques énoncées. Cette contribution offre un bilan de la jurisprudence relative à la violation de l’article 4 et un premier regard sur les conclusions récentes de la Grande Chambre.
EN :
The European Court of Human Rights has interpreted Article 4 of the European Convention on Human Rights and recognized a violation of it for some 15 years. In particular, it has extended the material scope of this provision to include trafficking in human beings. However, it has not, however, offered a clear reading of the different situations included in this wording, namely slavery, servitude, forced labour and trafficking in human beings. The Grand Chamber judgment delivered on 25 June 2020 has certainly offered several clarifications but has not completely dispelled the confusion that reigns among the issues mentioned. This contribution provides an overview of the case law on the violation of Article 4 and a first look at the recent findings of the Grand Chamber.
ES :
El Tribunal Europeo de Derechos Humanos ha interpretado el artículo 4 del Convenio Europeo de Derechos Humanos y ha reconocido una violación de este en los últimos quince años. En particular, amplió el ámbito material de esta disposición para incluir la trata de seres humanos. Sin embargo, no ofrecía una lectura clara de las diferentes situaciones incluidas en esta redacción, a saber, la esclavitud, la servidumbre, el trabajo forzoso y la trata de seres humanos. La sentencia de la Gran Sala dictada el 23 de junio de 2020 ofreció ciertamente varias aclaraciones, pero no disipó completamente la confusión que reina entre las problemáticas enunciadas. Este artículo ofrece una visión general de la jurisprudencia sobre la violación del artículo 4 y un primer vistazo a las recientes conclusiones de la Gran Sala.
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De Strasbourg à Luxembourg, quels droits pour les familles migrantes?
Sylvie Saroléa
p. 439–464
RésuméFR :
Les deux cours régionales européennes, la Cour de justice de l’Union européenne et la Cour européenne des droits de l’homme ont des approches distinctes, mais complémentaires du droit au regroupement familial. La première interprète le droit de l’Union, en soulignant qu’il garantit un droit subjectif au ressortissant de pays tiers d’être rejoint par les membres de sa famille proche moyennant le respect de conditions tenant à la composition de celle-ci et à sa situation socio-économique. La seconde souligne que la Convention européenne des droits de l’homme ne confère pas aux familles migrantes le droit de choisir le lieu où elles pourront être réunies, tout en admettant qu’il existe des hypothèses où l’absence d’alternative ou l’intérêt supérieur de l’enfant conduisent à estimer que la vie familiale ne peut être garantie que dans l’État membre du Conseil de l’Europe. Au-delà de cette divergence, des convergences intéressantes sont relevées quant au fil rouge que constitue l’intérêt supérieur de l’enfant ou quant à l’équilibre à rechercher au travers de l’analyse de proportionnalité. Enfin, les références croisées témoignent d’un dialogue fécond entre les juges européens.
EN :
The two European regional courts, the Court of Justice of the European Union and the European Court of Human Rights, adopt distinct, yet complementary approaches concerning the right to family reunification. The first interprets the law of the Union by emphasizing that it guarantees a subjective right to nationals from foreign countries to be joined by members of their immediate family provided they respect the conditions related to its composition and socio-economic situation. The second emphasizes that the European Convention of Human Rights does not grant migrant families the right to choose the location where they will be able to meet, all the while admitting that there exist theories where the absence of an alternative or the best interest of the child lead to believe that the family life can only be guaranteed in the Member State of the Council of Europe. Beyond this discrepancy, interesting similarities are identified in regards to the common theme of the best interest of the child or concerning the balance to be sought through the analysis of proportionality. Finally, the cross-references bear witness to a fruitful dialogue between the European judges.
ES :
Las dos cortes regionales europeas, la Corte de justicia de la Unión europea y la corte europea de derechos humanos tienen enfoques distintos pero complementarios en relación con el derecho a la reunificación familiar. La primera interpreta el derecho de la Unión, enfatizando que esta garantizado el derecho subjetivo de reunir los miembros de la familia inmediata a un nacional de un tercer país, sujeto al cumplimiento de condiciones relativas a su composición y su situación económica. La segunda menciona que la Convención europea de derechos humanos no confiere a las familias migrantes el derecho de escoger donde serán reunidas, mientras admite que existen algunas hipótesis donde la absencia de alternativa o el interés superior del niño lleven a estimar que la vida familiar no puede ser garantizada en otro lugar que en el Estado miembro del Consejo de Europa. Además de esta divergencia, se observan convergencias interesantes en lo que concierne la linea roja que constituye el interés superior del niño o en cuanto al equilibrio que se busca a través del análisis de proporcionalidad. Finalmente, las referencias cruzadas demuestran un dialogo fecundo entre los juez europeos.
V – La CEDH et l’Union européenne
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Aspects récents de la protection des droits fondamentaux dans l’Union européenne
Jean-Claude Bonichot
p. 465–478
RésuméFR :
La protection des droits fondamentaux est depuis longtemps ancrée dans la jurisprudence de la Cour de justice européenne. La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, entrée en vigueur en 2000, est d’ailleurs profondément imprégnée des notions dégagées par la Cour dans l’arrêt Hauer, rendu en 1979. Bien que la Charte existe et que la Cour de justice l’applique, cette dernière n’est pas pour autant devenue une Cour des droits de l’homme. L’existence de la Charte a toutefois une incidence sur les rapports du droit de l’Union européenne avec les droits nationaux, de même que sur ceux de la Cour de justice avec les hautes juridictions nationales. La Cour est désormais confrontée à de nouvelles problématiques, dont les effets extra territoriaux de la protection européenne des droits fondamentaux. La jurisprudence de la Cour de justice en matière de droits fondamentaux est par ailleurs confrontée au développement galopant des techniques dans tous les domaines et, en particulier, dans les nouvelles technologies de l’information.
EN :
The protection of fundamental rights has long been anchored in the case law of the European Court of Justice. The Charter of Fundamental Rights, which entered into force in 2000, is moreover deeply imbued with the concepts identified by the Court in the Hauer judgment, rendered in 1979. Although the Charter exists and the Court of Justice applies it, the latter did not become a Court of Human Rights for all that. The existence of the Charter, however, has an impact on the relationship of European Union law with national law, as well as on that of the Court of Justice with national high courts. The Court is now confronted with new issues, including the extra-territorial effects of the European protection of fundamental rights. The case law of the Court of Justice in the field of fundamental rights is also confronted with the galloping development of techniques in all fields and, in particular, in new information technologies.
ES :
La protección de los derechos fundamentales ha estado anclada durante mucho tiempo en la jurisprudencia del Tribunal de Justicia de las Comunidades Europeas. La Carta de los Derechos Fundamentales, que entró en vigor en 2000, está además profundamente imbuida de los conceptos identificados por el Tribunal en la sentencia Hauer, dictada en 1979. Aunque la Carta existe y el Tribunal de Justicia la aplica, esta última no se convirtió en un Tribunal de Derechos Humanos para todo eso. La existencia de la Carta, sin embargo, tiene un impacto en la relación del Derecho de la Unión Europea con el Derecho nacional, así como en la del Tribunal de Justicia con los tribunales superiores nacionales. El Tribunal se enfrenta ahora a nuevos problemas, incluidos los efectos extraterritoriales de la protección europea de los derechos fundamentales. La jurisprudencia del Tribunal de Justicia en el ámbito de los derechos fundamentales también se enfrenta al desarrollo galopante de técnicas en todos los campos y, en particular, en las nuevas tecnologías de la información.
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Tableau général du processus de mise en oeuvre de la protection des droits fondamentaux de la personne en droit de l’Union européenne
Loïc Grard
p. 479–500
RésuméFR :
La protection des droits fondamentaux de la personne n’était pas inscrite dans l’ADN de l’Union européenne. Les rédacteurs des textes originaires en 1957 n’ont envisagé à aucun moment le risque liberticide. Ce dernier est pourtant mis en évidence dès les années 1960 avec l’énoncé de l’idée que le législateur européen n’est pas forcément plus vertueux que le législateur national au regard du respect des libertés individuelles. Depuis s’est mis en place un processus de fabrication ininterrompu des droits fondamentaux de la personne, découvert par le juge, conforté par le constituant et parachevé par le législateur. Tel est le tableau général de la question...
EN :
The protection of fundamental human rights wasn’t written in the European Union’s DNA. The text’s original authors in 1957 never considered the risk of there being a threat to freedom. The latter is however highlighted as early as the 60s with the statement of the idea that the European legislator isn’t necessarily more virtuous than the national legislator regarding the respect of individual freedoms. Since then, a process of uninterrupted invention of fundamental human rights has been put in place, discovered by the judge, supported by the constituent and completed by the legislator. Such is the overall picture of the issue...
ES :
La protección de los derechos humanos fundamentales no estaba prevista en el ADN de la Unión Europea. Los redactores de los textos originarios de 1957 no consideraron en ningún momento el riesgo liberticida. Lo ultimo fue puesto en manifestó desde los años 60 con la enunciación de la idea que él legislador europeo no es mas virtuoso que el legislador nacional en lo que concierne el respecto de las libertades individuales. Desde entonces, aparece un proceso de fabricación ininterrumpido de derechos humanos fundamentales descubierto por el juez, reforzado por el constituyente y terminado por el legislador. Así es el cuadro general de la pregunta…
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May the Other Side Also be Heard? Some Remarks Regarding the Chances for a Response to Opinion 2/13 From the ECtHR on the Awakening of the EU Accession to the ECHR Process
Władysław Jóźwicki
p. 501–516
RésuméEN :
This paper takes up a question whether there exists a possibility for the European Court of Human Rights (ECtHR) to take a stand on the (in)famous Opinion 2/13 by the Court of Justice of the European Union (CJEU), and to address contained in it argumentation from the perspective of the Strasbourg system's conditions for accession. Particularly, it will focus on the question whether the Convention system provides for an appropriate procedure. The paper will not engage into a discussion on how the contentious issues should be addressed by the ECtHR, but will focus on answering whether it at all may have a chance to address them in the current legal setting through advisory procedures with which the European Convention on Human Rights (ECHR) system is equipped. The text will argue that even if both the Articles 47-49 of the Convention advisory procedure as well as the Protocol 16 to the Convention advisory procedure for the sake of their function and scope could not be applied to directly, holistically and systematically tackle Opinion 2/13, then at least the latter could provide a forum to do that in a limited scope and in an indirect way. While the mechanism has been designed with a completely different purpose, some of the features of the Protocol 16 advisory procedure may even seem to incite such a use, especially in the context of the increasingly turbulent relations between the CJEU and the European Union (EU) Member States’ highest courts and tribunals in the field of fundamental rights.
FR :
Cet article vise à s’interroger sur la possibilité pour la Cour européenne des droits de l’homme de prendre position sur l’Avis 2/13 de la Cour de justice de l’Union européenne et d’ainsi contenir son argumentaire dans le contexte requis par la perspective des conditions à l’adhésion du système de Strasbourg. Plus particulièrement, il se penchera sur la question de savoir si le système de la Convention prévoit une procédure appropriée. L’article n’entamera pas une discussion sur la façon dont les questions litigieuses devraient être adressées par la Cour, mais tâchera plutôt de déterminer s’il existe une chance de les aborder dans le contexte juridique actuel par les procédures consultatives en place au sein du système. Le texte avance l’argument que, même si les articles 47-49 de la procédure consultative de la Convention ainsi que le Protocole n° 16 de la Convention, dans l’intérêt de leur fonction et de leur portée, ne pouvaient s’appliquer pour directement, holistiquement et systématiquement aborder l’Avis 2/13, ce dernier pourrait minimalement constituer un forum pour ce faire dans une portée limitée et de façon indirecte. Tandis que le mécanisme a été pensé avec un but complètement différent, certaines caractéristiques de la procédure consultative du Protocole n° 16 semblent inciter un tel usage, notamment dans le contexte des relations de plus en plus turbulentes entre la CJUE et les plus hautes cours et tribunaux des États membres de l’Union européenne dans le domaine des droits fondamentaux.
ES :
Este artículo se plantea la cuestión de si existe la posibilidad de que la Corte europea de derechos humanos (CEDH) se pronuncie sobre el infame Dictamen 2/13 de la Corte de justicia de la Unión europea que contiene un argumento en el contexto requerido desde la perspectiva de las condiciones de adhesión del sistema de Estraburgo. En particular, examinará si el sistema del Convenio prevé un procedimiento adecuado. El artículo no entrará en un debate sobre la forma en que la CEDH debe abordar las cuestiones polémicas, sino que se centrará en si tiene alguna posibilidad de abordarlas en el marco jurídico actual, a través de los procedimientos consultivos con los que está dotado el sistema de la CEDH. El artículo argumentará que, aunque los artículos 47 y 49 del procedimiento consultivo del Convenio, así como el Protocolo n° 16 del procedimiento consultivo del Convenio, en aras de su función y alcance, no puedan aplicarse para abordar directa, holística y sistemáticamente el Dictamen 2/13, por lo menos este último podría servir de foro para hacerlo con un alcance limitado y de forma indirecta. Si bien el mecanismo fue concebido con una finalidad completamente diferente, ciertas características del procedimiento consultivo del Protocolo n° 16 parecen alentar su uso, especialmente en el contexto de las relaciones cada vez más turbulentas entre el CJEU y los más altos tribunales de los Estados miembros de la UE en el ámbito de los derechos fundamentales.
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L’appréhension des valeurs dans la jurisprudence récente du juge de l’Union. Une approche spécifique, au coeur de l’Europe du droit
Simon Labayle
p. 517–532
RésuméFR :
Les valeurs sont aujourd’hui au coeur des deux grands ordres juridiques interétatiques qui cohabitent sur le territoire européen, le Conseil de l’Europe et l’Union européenne. Leur place comme leur rôle y sont tout aussi fondamentaux, mais les juges et la jurisprudence respectifs de chacun de ces deux ordres les traduisent selon une méthodologie et des modalités différentes. Il s’agira, par la présente contribution, de souligner les spécificités qui caractérisent l’appréhension juridictionnelle des valeurs au sein de l’Union européenne. La première d’entre elles, qui est sans doute la plus importante, tient à l’originalité de leur consécration par le constituant communautaire. En empruntant la voie d’une juridicisation à dimension constitutionnelle, qui s’est définitivement matérialisée avec l’entrée en vigueur des traités de Lisbonne, il a permis à son juge de se saisir de questions qui ne se posaient auparavant à lui que par la voie détournée des principes généraux du droit. Depuis lors, la référence aux valeurs s’intensifie dans la jurisprudence de l’Union. Il sera donc intéressant de souligner ici l’actualité comme la réalité de cette tendance, tout en identifiant les champs qui lui restent à ce jour plus difficile d’accès.
EN :
Values are today at the heart of the two major interstate legal orders that coexist on European territory, the Council of Europe and the European Union. Their place and role are as fundamental in each order, but the respective judges and case law reflect them in different ways and according to different methodologies. The purpose of this article is therefore to highlight the specific features characterizing the judicial understanding of values within the European Union. The first, and undoubtedly the most important, is the originality of their legal consecration. By taking the path of legalization with a constitutional dimension, through the entry into force of the Lisbon Treaties, it has enabled its judge to deal with questions that previously only arose through the peripheral way of general principles of law. Since then, the reference to values has intensified in the Union's case law. It will therefore be interesting to highlight here both the topicality and the reality of this trend, while, at the same time, identifying the fields that stay more difficult to access.
ES :
Los valores están hoy en día en el centro de los dos principales ordenamientos jurídicos interestatales que coexisten en el territorio europeo, el Consejo de Europa y la Unión Europea. Su lugar y su función son igualmente fundamentales, pero los respectivos jueces y la jurisprudencia de cada uno de estos dos órdenes los reflejan de diferentes maneras y según diferentes metodologías. El objetivo de este artículo es, por lo tanto, destacar los rasgos específicos que caracterizan la comprensión judicial de los valores dentro de la Unión Europea. El primero, y sin duda el más importante, es la originalidad de su consagración por el poder constituyente comunitario. Al tomar el camino de la legalización con una dimensión constitucional, que finalmente se materializó con la entrada en vigor de los Tratados de Lisboa, permitió a su juez abordar las cuestiones que antes sólo le habían surgido por la vía indirecta de los principios generales del derecho. Desde entonces, la referencia a los valores se ha intensificado en la jurisprudencia de la UE. Por lo tanto, será interesante destacar aquí tanto la actualidad como la realidad de esta tendencia, al tiempo que se identifican los campos que siguen siendo más difíciles de acceder.
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CJUE et Cour EDH : la dialectique du maître et de l’esclave?
Sébastien Platon
p. 533–548
RésuméFR :
La dialectique du Maître et de l’Esclave, développée par Hegel dans La Phénoménologie de l’Esprit, est un exemple typique du fonctionnement de la dialectique dans l’approche hégélienne. L’esclave est initialement soumis aux ordres du maître (thèse). Cependant, il acquiert son autonomie grâce au produit de son travail et gagne en indépendance alors que le maître continue de dépendre de la reconnaissance de celui-ci pour garder son statut. Ainsi, le maître devient progressivement esclave et l’esclave maître. Le deuxième moment de la dialectique (antithèse) est alors accompli. La dépendance maître-esclave est niée. La dernière étape de la dialectique, la synthèse, est marquée par l’annulation de la situation de maître et d’esclave, chacun ayant obtenu sa reconnaissance. Mutatis mutandis, cette parabole philosophique n’est pas sans intérêt pour analyser les rapports entre les deux cours européennes, la Cour européenne des droits de l’homme (Cour EDH) et la Cour de justice de l’Union européenne (Cour de justice), au regard de la protection des droits fondamentaux – même si, bien évidemment, c’est une exagération évidente que de décrire les relations entre les deux cours comme une relation maître-esclave. Il n’en reste pas moins qu’aux origines, la Cour de justice, en l’absence de texte communautaire protégeant les droits fondamentaux, s’est assez rapidement « soumise » au système de la Convention européenne des droits de l’homme, y compris à la jurisprudence de la Cour EDH. L’évènement marquant la transition vers la seconde phase de la dialectique est l’adoption de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (Charte), qui permit à la Cour de justice de développer un système plus autonome. Cette autonomisation concourt à la mise en place d’une relation plus égalitaire entre les deux cours, marquée par exemple par le fait que la Cour EDH emprunte elle aussi, quoique plus rarement, au droit de l’Union européenne.
EN :
The dialectic of Master and Slave, developed by Hegel in The Phenomenology of the Spirit, is a typical example of how dialectic works in the Hegelian approach. The slave is initially subject to the orders of the master (thesis). However, he acquires his autonomy through the product of his work and gains independence while the master continues to depend on his recognition to maintain his status. Thus, the master gradually becomes a slave and the slave becomes the master. The second moment of the dialectic (antithesis) is then accomplished. Master-slave dependence is denied. The last stage of the dialectic, the synthesis, is marked by the cancellation of the master and slave situation, each having obtained their recognition. Mutatis mutandis, this philosophical parable is not without interest when analysing the relationship between the two European courts, the European Court of Human Rights (ECtHR) and the Court of Justice of the European Union (Court of Justice), with regard to the protection of fundamental rights – although it is obviously an obvious exaggeration to describe the relationship between the two courts as a master-slave relationship. Nevertheless, the fact remains that, in the absence of a Community text protecting fundamental rights, the Court of Justice, in the early days, "submitted" itself fairly quickly to the European Convention on Human Rights (ECHR) system, including the case-law of the ECtHR. The event marking the transition to the second phase of the dialectic was the adoption of the Charter of Fundamental Rights of the European Union (Charter), which allowed the Court of Justice to develop a more autonomous system. This autonomy contributes to the establishment of a more egalitarian relationship between the two courts, marked, for example, by the fact that the ECtHR also borrows, albeit more rarely, from European Union law.
ES :
La dialéctica de Amo y Esclavo, desarrollada por Hegel en La Fenomenología de la Mente, es un ejemplo típico de cómo funciona la dialéctica en el enfoque hegeliano. El esclavo está inicialmente sujeto a las órdenes del amo (tesis). Sin embargo, adquiere su autonomía gracias al producto de su trabajo y gana independencia mientras que el maestro sigue dependiendo del reconocimiento del mismo para mantener su estatus. Así, el amo se convierte gradualmente en un esclavo y el esclavo se convierte en el amo. El segundo momento de la dialéctica (antítesis) se cumple entonces. Se niega la dependencia del amo-esclavo. La última etapa de la dialéctica, la síntesis, está marcada por la cancelación de la condición de amo y esclavo, habiendo obtenido cada uno su reconocimiento. Mutatis mutandis, esta parábola filosófica no carece de interés para analizar la relación entre los dos tribunales europeos, el Tribunal Europeo de Derechos Humanos (TEDH) y el Tribunal de Justicia de la Unión Europea (Tribunal de Justicia), en lo que respecta a la protección de los derechos fundamentales, aunque obviamente es una exageración evidente describir la relación entre los dos tribunales como una relación amo-esclavo. No obstante, el hecho es que, a falta de un texto comunitario que proteja los derechos fundamentales, el Tribunal de Justicia, en un primer momento, se "sometió" con bastante rapidez al sistema del Convenio Europeo de Derechos Humanos (CEDH), incluida la jurisprudencia del TEDH. El acontecimiento que marcó la transición a la segunda fase de la dialéctica fue la adopción de la Carta de Derechos Fundamentales de la Unión Europea (Carta), que permitió al Tribunal de Justicia desarrollar un sistema más autónomo. Esta autonomía contribuye al establecimiento de una relación más igualitaria entre los dos tribunales, marcada, por ejemplo, por el hecho de que el TEDH también toma prestado, aunque más raramente, del derecho de la Unión Europea.
VI – L’influence internationale de la CEDH
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La Convention européenne et la Charte africaine : étude comparée
Rafaâ Ben Achour
p. 549–572
RésuméFR :
La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (1981) est la benjamine des instruments régionaux de protection des droits de l’homme. Inspirée par ses devancières européenne et américaine, la Charte africaine présente des similitudes, mais également des différences avec la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Une étude comparative de ces deux instruments est élaborée dans cet article notamment au niveau des droits et libertés garantis et des mécanismes de garantie.
EN :
The African Charter on Human and Peoples' Rights (1981) is the youngest of the regional instruments for the protection of human rights. Inspired by its European and American predecessors, the African Charter has similarities, but also differences with the European Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms. A comparative study of these two instruments is developed in this article, in particular at the level of guaranteed rights and freedoms and guarantee mechanisms.
ES :
La Carta Africana de Derechos Humanos y de los Pueblos (1981) es el más reciente instrumento regional para la protección de los derechos humanos. Inspirada en sus predecesoras europeas y americanas, la Carta Africana tiene similitudes, pero también diferencias con la Convención Europea para la Protección de los Derechos Humanos y las Libertades Fundamentales. Este artículo elabora un estudio comparativo de estos dos instrumentos con un énfasis particular en los derechos y libertades garantizados y en sus mecanismos de garantía.
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La Cour européenne des droits de l’homme et le dialogue des juges
Silviana Cocan
p. 573–592
RésuméFR :
Le présent article a pour objet d’envisager l’interprétation de la Convention européenne à travers le prisme du dialogue des juges qui, en tant que phénomène spontané, est laissé à la libre appréciation de la Cour européenne des droits de l’homme. Ainsi, si la jurisprudence de cette dernière est souvent citée comme une référence incontournable dans la pratique jurisprudentielle des autres organes internationaux de protection des droits de l’Homme, le degré d’ouverture de la Cour aux sources externes est variable. En effet, sa pratique du dialogue juridictionnel, à travers l’incorporation d’éléments extrasystémiques dans l’interprétation de la Convention européenne, demeure limitée et à géométrie variable, bien qu’elle tende à s’accentuer au fur et à mesure du développement de sa jurisprudence en conformité avec les autres instruments et décisions qui relèvent de l’ordre juridique international et de la protection des droits de la personne.
EN :
The present article aims to consider the interpretation of European Convention through the prism of the judge’s dialogue which, as a spontaneous phenomenon, is left to the discretion of European Court of Human Rights. Thus, while the latter’s jurisprudence is often cited as a vital reference in the jurisprudential practice of the other international bodies of protection of human rights, the degree to which the Court is open to external sources varies. Indeed, the practice of judicial dialogue through the incorporation of extra systemic elements in the interpretation of the European Convention, remains limited and geometrically variable, although it tends to be accentuated progressively with the development of its jurisprudence in conformity with the other instruments and decisions that fall within the international legal system and the protection of human rights.
ES :
El presente artículo tiene como objetivo de considerar la interpretación de la Convención Europea a través del prisma del dialogo de los jueces, el que, como fenómeno espontaneo, es dejado a la libre apreciación de la Corte europea de derechos humanos. Entonces, si, de manera seguida, la jurisprudencia de la corte es citada como una referencia esencial en la practica jurisprudencial de los otros organismos internacionales de protección de derechos humanos, el grado de su apertura hacia las fuentes externas puede ser variable. En realidad, su práctica del dialogo jurisdiccional a través de elementos extra sistémicos en la interpretación de la Convención europea sigue limitada y con geometría variable, aunque tiende a acentuarse a medidas que se desarrolla su jurisprudencia en conformidad con los otros instrumentos y decisiones que dependen del orden internacional jurídico y de la protección de los derechos humanos.
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L’influence de la jurisprudence européenne sur le système africain de protection des droits de l’homme
Abdou-Khadre Diop
p. 593–610
RésuméFR :
Cet article vise à analyser le rayonnement de la jurisprudence européenne de l’autre côté de la méditerranée. En effet, le système africain de protection des droits de l’homme présente aujourd’hui un degré de maturation rendant légitime toute étude visant à le confronter aux autres systèmes régionaux de protection des droits de l’homme, notamment le plus vieux d’entre eux. A cet égard, force est de reconnaitre que les solutions dégagées par le juge de Strasbourg servent assez souvent de repère aux juges africains dans leur oeuvre interprétative. Cet article vise donc à analyser la nature ainsi que la profondeur de l’influence européenne dans le système africain de protection des droits de l’homme, notamment à travers la jurisprudence de la Cour et de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.
EN :
This article aims to analyze the influence of European jurisprudence on the other side of the Mediterranean. Indeed, the African system of human rights protection today presents a degree of maturation that legitimizes any study aimed at confronting it with other regional systems of human rights protection, especially the oldest among them. In this regard, it must be recognized that the solutions identified by the Strasbourg judge often serve as a reference point for African judges in their interpretative work. This article therefore seeks to analyze the nature and depth of European influence in the African human rights protection system, particularly through the case law of the African Court and Commission on Human and Peoples' Rights.
ES :
Este artículo tiene por objeto analizar el prestigio de la jurisprudencia europea del otro lado del Mediterráneo. En efecto, el sistema africano de protección de los derechos humanos presenta hoy un grado de maduración que le da legitimidad a cualquier estudio destinado a compararlo con otros sistemas regionales de protección de los derechos humanos, en particular el más antiguo de ellos. En este sentido, cabe reconocer que las soluciones identificadas por el juez de Estrasburgo sirven frecuentemente como referencia para los jueces africanos en su labor interpretativa. Por lo tanto, este artículo trata de analizar la naturaleza y la profundidad de la influencia europea en el sistema africano de protección de los derechos humanos, especialmente a través de la jurisprudencia de la Corte y de la Comisión Africana de Derechos Humanos y de los Pueblos.
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Le droit européen des droits de la personne et la Cour suprême du Canada : une perspective canadienne
Louis-Philippe Lampron et Louis LeBel
p. 611–626
RésuméFR :
Comme plusieurs textes inspirés de la Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée par les Nations Unies en 1948, la Charte canadienne des droits et libertés (1982) et la Convention européenne des droits de l’Homme (1950) permettent, tant par leur structure que par le catalogue des droits qu’ils consacrent, une certaine forme de collaboration (ou de partage) entre les institutions judiciaires chargées d’en assurer la mise en oeuvre. Cette inter-influence entre institutions judiciaires étrangères est particulièrement riche de promesses pour l’atteinte éventuelle d’un véritable universalisme des droits de la personne : un universalisme de fond, plutôt qu’un simple universalisme de libellé. Dans cette optique, le présent texte a pour but de présenter, brièvement et selon une perspective canadienne, quelques aspects des échanges ayant eu lieu entre la Cour suprême du Canada et la Cour européenne des droits de l’homme au cours des trente dernières années sur la thématique des droits et libertés de la personne.
EN :
As per many texts inspired by the Universal Declaration of Human Rights, adopted by the United Nations in 1948, the Canadian Charter of Rights and Freedoms (1982) and the European Convention on Human Rights (1950) foster a certain form of collaboration (or sharing) among judicial institutions responsible for their implementation, both through their structure and the catalogue of rights they enshrine. This inter-influence between foreign judicial institutions is especially promising towards eventually reaching a true human rights universalism: a substantive universalism, rather than a universalism by name only. With this in mind, this article seeks to outline, in a brief manner and from a Canadian perspective, some aspects of the exchanges that occurred between the Supreme Court of Canada and the European Court of Human Rights in the past thirty years on the theme of the rights and freedoms of individuals.
ES :
Como varios textos inspirados en la Declaración Universal de Derechos Humanos, adoptada por las Naciones Unidas en 1948, la Carta Canadiense de Derechos y Libertades (1982) y el Convenio Europeo de Derechos Humanos (1950) permiten, tanto en su estructura como en el catálogo de derechos que consagran, una cierta forma de colaboración (o de reparto) entre las instituciones judiciales encargadas de su aplicación. Esta interinfluencia entre las instituciones judiciales extranjeras es particularmente prometedora para el eventual logro de un verdadero universalismo de los derechos humanos: un universalismo de fondo, más que una noción vacía de contenido. En este sentido, este artículo presenta, brevemente y desde una perspectiva canadiense, algunos aspectos de los intercambios que han tenido lugar entre la Corte Suprema de Canadá y el Tribunal Europeo de Derechos Humanos en los últimos treinta años sobre el tema de los derechos humanos y las libertades.
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La Cour européenne des droits de l’homme et le Tribunal des droits de la personne : la réception de la jurisprudence de la Cour par le Tribunal
Manon Montpetit et Emma Tardieu
p. 627–662
RésuméFR :
Le Tribunal des droits de la personne du Québec et la Cour européenne des droits de l’homme ont ceci en commun qu’ils sont appelés, dans l’exercice de leur compétence respective, à disposer de litiges dont les arguments reposent sur des dispositions comprises dans des textes ayant valeur fondamentale, la Charte des droits et libertés de la personne du Québec et la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales des droits de l’homme. Le discours de ces deux instances décisionnelles, qui interprètent et appliquent des dispositions formulées dans des termes larges et abstraits, implique nécessairement, au-delà de la simple application de dispositions législatives ou supra législatives, une véritable production de normes. Outre les similitudes et les différences qui existent entre la Cour européenne et le Tribunal, le présent texte s’intéresse au lien qui unit ces deux instances décisionnelles dans une perspective d’internationalisation du droit. Le dialogue entre diverses instances, sur le plan international ou régional, s’est élargi en tenant compte non plus seulement des obligations contractées, mais des valeurs communes cristallisées par des instruments semblables. C’est dans ce contexte que le Tribunal a développé sa jurisprudence relative à la Charte, s’inspirant parfois des normes européennes et de la jurisprudence de la Cour européenne. S’il est possible pour le Tribunal de renforcer la légitimité de sa décision en intégrant l’interprétation ou la solution retenue par la Cour européenne, il pourra aussi examiner la jurisprudence de la Cour afin de mieux s’en distancier, plus particulièrement dans les cas où la marge nationale d’appréciation fait en sorte de constituer un obstacle au renforcement de la garantie des droits consacrés à la Charte.
EN :
The Human Rights Tribunal of Quebec and the European Court of Human Rights are both called upon, in the practice of their respective jurisdictions, to rule on disputes whose arguments rest upon provisions included in the texts of fundamental value, the Quebec Charter of Human Rights and Freedoms and the Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms. The rhetoric of these two decision-making bodies, who interpret and enforce the provisions articulated in broad and abstract terms, necessarily involves, beyond the simple enforcement of legislative or supra-legislative provisions, a genuine production of norms. Besides the similarities and differences that exist between the European Court and the Tribunal, the present text focuses on the binding relationship between these two decision-making bodies from the perspective of the internationalization of the law. The dialogue between different bodies, on an international or regional scale, has widened by taking into account not only contracted obligations, but also common values crystallized by similar instruments. It is in this context that the Tribunal developed its jurisprudence relative to the Charter, sometimes taking inspiration from European norms and the European Court’s jurisprudence. If it is possible for the Tribunal to strengthen the legitimacy of its decision by integrating the interpretation or solution selected by the European Court, it will also be able to examine the jurisprudence of the Court in order to better distance itself, more specifically in cases where the national margin of appreciation is an obstacle to the strengthening of the guaranteed rights enshrined in the Charter.
ES :
El Tribunal de Derechos Humanos de Quebec y la Corte Europea de Derechos Humanos tienen en común el hecho que están llamados, en el ejercicio de su competencia respectiva, a disponer de litigios cuyos argumentos están basados en disposiciones incluidas en textos que tiene un valor fundamental, la Carta de derechos y libertades humanas en Quebec y la Convención para la protección de los derechos humanos y de las libertades fundamentales. El discurso de estos dos órganos decisionales, que interpretan y aplican disposiciones formuladas en términos amplios y abstractos, implica necesariamente una verdadera producción de normas, además de la simple aplicación de disposiciones legislativas o supra legislativas. Además de las similitudes y de las diferencias que existen entre la Corte europea y el Tribunal, el presente texto se interesa a los lazos que unen las dos instituciones, en una perspectiva de internalización del derecho. El dialogo entre las diferentes instancias, en el plan internacional o regional, ha sido expandido y toma ahora en cuenta no solo las obligaciones contratadas, pero también los valores comunes cristalizados por instrumentos similares. Es en ese contexto que el Tribunal desarrollo su jurisprudencia en relación con la Carta, a veces inspirándose de normas europeas y de la jurisprudencia de la Corte europea. Si es posible para el Tribunal de reforzar la legitimidad de sus decisiones, integrando la interpretación o la solución retenida por la Corte europea, puede también examinar la jurisprudencia de la Corte para alejarse de ella, en particular en los casos donde el margen de apreciación se convierte en un obstáculo al refuerzo de la garantía de los derechos consagrados en la Carta.
VII – La CEDH et autres domaines du droit international public
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La Cour européenne des droits de l’homme et le droit international humanitaire
Julia Grignon et Thomas Roos
p. 663–680
RésuméFR :
75 ans après la fin de l’une des guerres les plus meurtrières et les plus atroces que le continent européen ait connues, 70 ans après la mise en place d’une Convention européenne des droits de l’homme censée symboliser le socle d’une paix durable pour les États européens, de nombreux conflits impliquant ces États, sur et en dehors du territoire de l’Europe, ont ressurgit. À défaut d’une juridiction propre au droit international humanitaire, le corpus juridique conçu spécifiquement pour régir les conflits armés, c’est la Cour européenne des droits de l’homme qui s’est pour partie appropriée la mission de veiller au respect des droits des personnes relevant de sa juridiction affectées par les conflits armés. La présente contribution analyse la façon dont la juridiction strasbourgeoise s’est saisie – ou non – du droit des conflits armés, et tente d’en dégager une logique. Cet article qui s’inscrit dans le cadre d’une subvention accordée par le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada relative à l’application extraterritoriale du droit international des droits humains en contexte d’opérations militaires extérieures sera complété par un autre qui portera sur l’application extraterritoriale de la Convention européenne des droits de l’homme dans le cadre de conflits se déroulant hors du continent européen, mais impliquant des États membres du Conseil de l’Europe.
EN :
75 years after one of the deadliest and most horrific war that the European continent has known, and 70 years after the creation of the European Convention on Human Rights which was supposed to symbolize an era of peace for European states, some of these States have been involved in many other armed conflicts which have emerged inside and outside the European territory. Due to the lack of an international court specific to international humanitarian law, the law of armed conflicts, the European court of human rights seized in part the opportunity to safeguard the rights of people within its jurisdiction affected by armed conflicts. This contribution studies how the judges of Strasbourg use – or do not use – humanitarian rules and tries to identify a paradigm. This article is funded in part by the Social sciences and humanities research council of Canada as part of a research project about the extraterritorial application of international human rights law in cases of external military operations. It will be completed by another article about the extraterritorial application of the European Convention on Human Rights during armed conflicts that occur outside the territory of the concerned Members of the Council of Europe.
ES :
75 años después del final de una de las guerras mas asesinas y atroces que el continente europeo haya conocido, 70 años después del establecimiento de una Convención europea de los derechos humanos que debía simbolizar el establecimiento de una paz duradera para los Estados europeos, resurgieron nuevos conflictos que implican los Estados, afuera y dentro del territorio europeo. Como el derecho internacional humanitario no tiene su propria jurisdicción, un corpus legal concebido especialmente para regular los conflictos armados, es la Corte europea de derechos humanos quien se apropió, por partes, la misión de velar a que los derechos humanos de su jurisdicción afectados por los conflictos armados sean respectados. La presente contribución analiza la manera en la cual la jurisdicción de Estrasburgo se apodero – o no – del derecho de los conflictos armados, tratando de identificar une lógica. Este articulo que se inscribe en el marco de una beca del Consejo de investigaciones en ciencias humanas de Canadá en relación con la aplicación extraterritorial del derecho internacional de derechos humanos en la contextualización de operaciones militares exteriores, será completado por otro trabajo que tratara de la aplicación extraterritorial de la Convención europea de derechos humanos en el marco de conflictos fuera del continente europeo pero que implican los Estados miembros del Consejo de Europa.
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Le droit coutumier, les normes impératives (jus cogens), et la Cour européenne des droits de l’homme
William A. Schabas
p. 681–704
RésuméFR :
La Cour européenne des droits de l’homme fait appel à diverses sources de droit international afin d’interpréter les normes relatives aux droits de la personne énoncées dans la Convention européenne des droits de l’homme. Elle l’a souvent justifiée en se référant à l’article 31 (3) c) de la Convention de Vienne sur le droit des traités, qui invite l’interprète de tenir compte de « toute règle pertinente de droit international applicable dans les relations entre les parties ». Bien que la Cour ne fasse aucune distinction réelle entre les instruments de droit conventionnel qui peuvent être applicables et d’autres sources, telles que les résolutions, directives et principes adoptés au niveau international, elle ne considère presque jamais le droit international coutumier en tant que source de droits fondamentaux. Exceptionnellement, elle se réfère à la coutume internationale en ce qui concerne le principe de légalité, conformément au texte de l’article 7. La Cour a fréquemment examiné le droit international coutumier, mais sur des questions autres que les droits fondamentaux, comme les immunités des États. La Cour a également déclaré que certaines normes relèvent du jus cogens. L’article examine l’utilisation du droit international coutumier et du jus cogens par la Cour européenne des droits de l’homme et propose qu’à l’avenir, elle fasse une utilisation plus importante de ces sources.
EN :
The European Court of Human Rights consults a range of international law sources for purposes of interpreting the human rights norms set out in the European Convention on Human Rights. It has often justified this with reference to article 31(3)c) of the Vienna Convention on the Law of Treaties, which invites consideration of "any relevant rules of international law applicable in the relations between the parties". Although the Court does not make any real distinction between treaty law instruments that may be applicable and other sources, such as resolutions, guidelines and principles adopted at the international level, it almost never considers customary international law as a source of fundamental rights. Exceptionally, it refers to customary international with respect to the principle of legality, in accordance with the text of article 7. The Court has frequently considered customary international law, but on issues other than fundamental rights, such as State immunities. The Court has also declared that certain norms are jus cogens. The article reviews the use of customary international law and jus cogens by the Court, and proposes that in the future it should make greater use of these sources.
ES :
La Corte Europea de Derechos Humanos tiene varias fuentes de derecho internacional para interpretar las normas de derechos humanos enunciados en la Convención europea de derechos humanos. La Corte lo justifico de manera seguida haciéndole referencia al articulo 31 (3) c) de la Convención de Viena sobre el derecho de los tratados, la cual invita el interprete a tener en cuenta de “todo reglamento de derecho internacional importante que puede ser aplicado en las relaciones entre las partes”. Aunque la Corte no hace verdadera distinción entre los instrumentos de derecho convencionales que pueden ser aplicables y otras fuentes, como las resoluciones, las directivas y los principios adoptados al nivel internacional, no considera casi nunca el derecho internacional consuetudinario. Excepcionalmente, se refiere al derecho internacional consuetudinario en lo que concierne el principio de legalidad, en conformidad con el texto del articulo 7. La Corte examino de seguido el derecho internacional consuetudinario, pero en el contexto de otras cuestiones ajenas a los derechos fundamentales, como las inmunidades de los Estados. La Corte también declaro que algunas normas son del ius cogens. El articulo examina la utilización del derecho internacional consuetudinario et del ius cogens por la Corte europea de derecho humanos y propone que, en un futuro, ella haga una utilización más importante de esas fuentes.
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La protection des droits sociaux par la CEDH : quid de sa sororité avec la Charte sociale européenne?
Manon Thouvenot
p. 705–737
RésuméFR :
Lors de la rédaction de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), les droits sociaux, souvent définis par opposition avec les droits civils et politiques, ont fait l’objet d’une controverse quant à la nécessité de les inclure ou non dans le texte. Face à l’impossibilité de les voir formellement pris en compte dans la CEDH, il a fallu qu’un second texte soit adopté : la Charte sociale européenne. Toutefois, l’indivisibilité des droits fondamentaux ne s’accommode que très mal de cette scission idéologique, réalisée formellement par la coexistence de deux textes distincts. En pratique, d’ailleurs, tous ont pu constater que les limites entre les deux catégories de droits n’étaient pas faciles à déterminer. Il en découle une frontière « poreuse » entre les droits civils et politiques d’un côté et sociaux de l’autre, que les rédacteurs de la CEDH n’avaient pas réussi à rendre étanche il y a 70 ans et que la Cour européenne des droits de l’homme (Cour EDH) a continuellement percée depuis l’arrêt Airey en 1979. Dès lors, une comparaison entre les deux instruments de protection n’a cessé d’être faite, tentant de savoir lequel des deux était le plus à même de protéger ces droits sociaux en mal d’amour. Cette contribution cherche à mettre en perspective le travail effectué par chacun des instruments en montrant que la protection des droits sociaux était mieux effectuée par la Cour EDH jusqu’au milieu des années 2000, notamment parce que celle-ci a contribué à leur fondamentalisation et, en conséquence, à leur justiciabilisation, mais que la Charte sociale européenne, qui avait connu des débuts difficiles, a depuis lors pris le relai et s’est imposée en tant qu’instrument de référence pour leur protection au niveau européen.
EN :
During the drafting of the European Convention on Human Rights (ECHR), social rights, often defined in opposition to civil and political rights, were the subject of controversy as to whether or not they should be included in the text. Faced with the impossibility of seeing them taken into account in the text of the ECHR, a second text had to be adopted : the European Social Charter. However, the indivisibility of fundamental rights is only very poorly adapted to this ideological split, formally achieved by the coexistence of two distinct texts. In practice, moreover, everyone could see that the limits between the two categories of rights were not easy to determine. The result is a "porous" border between civil and political rights on the one hand and social rights on the other, which the drafters of the ECHR had not managed to make watertight 70 years ago and which the European Court of Human Rights (HRE Court) has continually pierced since the Airey judgment in 1979. From then on, a comparison between the two instruments of protection has been made over and over again, trying to find out which of the two was best able to protect these social rights in a time of need. This contribution seeks to put into perspective the work carried out by each of the instruments by showing that the protection of social rights was best carried out by the HRE Court until the mid-2000s, notably because it contributed to their fundamentalization and, consequently, to their justiciabilization, but that the European Social Charter, which had had a difficult start, has since taken over and has imposed itself as a reference instrument for their protection at the European level.
ES :
Durante la redacción del Convenio Europeo de Derechos Humanos (CEDH), los derechos sociales, a menudo definidos en oposición a los derechos civiles y políticos, fueron objeto de controversia en cuanto a su inclusión o exclusión en el texto. Ante la imposibilidad de verlos tomados en cuenta en el texto de la CEDH, hubo que adoptar un segundo texto : la Carta Social Europea. Sin embargo, la indivisibilidad de los derechos fundamentales es muy difícil de conciliar con esta división ideológica, que se logra formalmente por la coexistencia de dos textos separados. En la práctica, además, todo el mundo ha visto que los límites entre las dos categorías de derechos no son fáciles de determinar. El resultado es una frontera "porosa" entre los derechos civiles y políticos por una parte y los derechos sociales por otra, que los redactores del CEDH no habían logrado hacer hermética hace 70 años y que el Tribunal Europeo de Derechos Humanos no ha dejado de traspasar desde el fallo del caso Airey en 1979. Desde entonces, se ha hecho una comparación entre los dos instrumentos de protección una y otra vez, tratando de averiguar cuál de los dos era más capaz de proteger estos derechos sociales en un momento de necesidad. Esta contribución trata de poner en perspectiva la labor realizada por cada uno de los instrumentos, mostrando que la protección de los derechos sociales fue mejor llevada a cabo por el Tribunal de Derechos Humanos hasta mediados del decenio de 2000, en particular porque contribuyó a su fundamentalización y, por consiguiente, a su justiciabilidad. Pero que la Carta Social Europea, que tuvo un comienzo difícil, ha tomado desde entonces el relevo y se ha convertido en el instrumento de referencia para su protección a nivel europe.