Résumés
Résumé
En octobre 2015, l’Union européenne (UE) a inauguré sa stratégie de libre-échange, Le commerce pour tous, qui spécifiait que la Commission européenne inclurait dorénavant dans ses accords commerciaux modernisés un « système juridictionnel public des investissements », composé d’un Tribunal de première instance et d’un Tribunal d’appel, qui opèrerait à la manière des cours traditionnelles. Un système juridictionnel des investissements (SJI) a depuis été intégré dans l’Accord économique et commercial global entre l’UE et le Canada, dans l’Accord de libre-échange entre l’UE et le Vietnam, dans l’Accord de libre-échange entre l’UE et Singapour et dans l’Accord global UE-Mexique. Est-ce que le SJI est réellement une cour, comme le soutiennent les parties signataires ? En se fondant sur des arguments de théorie juridique et politique, il appert que le SJI représente un hybride entre l’arbitrage consensuel et les cours nationales et internationales. Plus précisément, il constitue une forme davantage institutionnalisée d’arbitrage d’investissement. Le SJI est basé sur le consentement bilatéral et limité des parties, il adopte l’idée d’avoir un représentant neutre sur le banc (bien que plus éloigné des parties au différend spécifique) et il est constitué de manière à rendre justice principalement pour les parties en cause plutôt que pour assurer le développement cohérent du droit dans l’arbitrage d’investissement plus largement. Il s’écarte des arbitrages traditionnels en incorporant des règles de procédure et des garanties éthiques plus robustes et détaillées, mais il ne constitue pas une cour à part entière.
Abstract
In October 2015, the European Union (EU) launched its Trade for All strategy, which specified that the European Commission would from then on include in its modernized trade agreements a “public investment court system” consisting of a Tribunal of First Instance and an Appeals Tribunal that would operate like traditional courts. An Investment Court System (ICS) has since been integrated into the EU-Canada Comprehensive Economic and Trade Agreement, the EU-Vietnam Free Trade Agreement, the EU-Singapore Free Trade Agreement and the EU-Mexico Global Agreement. Is the ICS really a court, as the signatory parties contend? Based on legal and political theory arguments, it appears that the ICS represents a hybrid between arbitration and judicial settlement in international law. More precisely, it represents a further-institutionalized form of investment arbitration. The ICS is based on the bilateral and narrow consent of the disputing parties, adopts the idea of having a neutral representative on the bench (albeit one more distant from the parties in the specific dispute at hand), and is constituted in a way primarily to do justice as between the parties rather than to ensure the consistent development of investment law broadly. It departs from typical arbitral proceedings by incorporating more robust and detailed procedural rules and ethical safeguards for decision-makers, but it falls short of being a full-fledged court.
Resumen
En octubre de 2015, la Unión Europea (UE) inauguró su estrategia El comercio para todos, que especificaba que la Comisión Europea incluiría de ahí en adelante en sus acuerdos comerciales modernizados un “sistema jurisdiccional público de inversiones”, compuesto por un Tribunal de Primera Instancia y un Tribunal de Apelaciones, que operaría a la manera de los tribunales tradicionales. Desde entonces, un sistema de inversión jurisdiccional (SJI) se ha integrado en el Acuerdo Económico y Comercial Global entre la UE y Canadá, en el Acuerdo de Libre Comercio entre la UE y Vietnam, en el Acuerdo de Libre Comercio entre la UE y Singapur y el Acuerdo Global México-UE. ¿Es el SJI realmente un tribunal, como argumentan las partes firmantes? Sobre la base de argumentos de teoría legal y política, parece que el SJI representa un híbrido entre el arbitraje consensual y los tribunales nacionales e internacionales. De hecho, es una forma más institucionalizada de arbitraje de inversiones. El SJI se basa en el consentimiento bilateral limitado de las partes, adopta la idea de tener un representante neutral en la banca (aunque más distante de las partes en la disputa específica) y se constituye de una manera que proporciona justicia principalmente a las partes en lugar de garantizar el desarrollo consistente de la ley en el arbitraje de inversiones de manera más amplia. Se aparta de los arbitrajes tradicionales al incorporar reglas de procedimiento más sólidas y detalladas y garantías éticas, pero no consiste en un tribunal pleno.
Corps de l’article
« L’évènement de juger fait partie de la justice au même titre que le droit : il en est la fondation. […] Le premier geste de la justice n’est ni intellectuel ni moral, mais architectural et symbolique : délimiter un espace sensible […], dégager un temps pour cela, arrêter une règle du jeu, convenir d’un objectif et instituer des acteurs. Le procès est l’enracinement premier du droit dans la vie, il est l’expérience esthétique de la justice, ce moment essentiel où le juste n’est pas encore séparé du vivant et où le texte du droit est encore plus proche de la poésie que de la compilation juridique. »
– Antoine Garapon, Essai sur le rituel judiciaire (1997)[1]
En octobre 2015, l’Union européenne (ci-après UE) a inauguré sa stratégie de libre-échange, Le commerce pour tous, qui spécifiait que la Commission européenne (ci-après Commission) inclurait dorénavant dans ses accords commerciaux modernisés un « système juridictionnel public des investissements », composé d’un Tribunal de première instance et d’un Tribunal d’appel qui opèrerait à la manière des cours traditionnelles[2]. La Commission s’est également engagée à établir éventuellement avec ses partenaires une cour permanente multilatérale des investissements[3]. Entre temps, un système juridictionnel des investissements (ci-après SJI) a été intégré à la fois dans l’Accord économique et commercial global[4] entre l’UE et le Canada, dans l’Accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Vietnam[5], dans l’Accord de libre-échange entre l’Union européenne et Singapour[6] et dans l’Accord global UE-Mexique[7].
Malgré ces développements, la mise en application du SJI demeure incertaine pour plusieurs raisons politiques et juridiques. Bien que la Cour de Justice de l’Union européenne (ci-après CJUE) se soit récemment prononcée sur la compatibilité du SJI dans l’AECG avec le droit de l’UE[8], cet avis, ainsi les procédures nationales de ratification du SJI et les négociations d’autres SJI en cours[9], soulèvent une question fondamentale : est-ce que le SJI relève de l’arbitrage ou du règlement judiciaire en droit international ?
Cette question est d’intérêt non seulement pour les spécialistes de l’arbitrage international, mais aussi pour les praticiens et universitaires du droit international général, particulièrement au Canada et au Québec. De prime abord, le gouvernement fédéral pourrait être appelé à agir comme défendeur en vertu de l’AECG dans des différends concernant des secteurs politiquement sensibles, tels que la santé, le travail et l’environnement et soumis à une méthode de règlement de différends potentiellement innovatrice, mais aussi jamais testée en pratique. De surcroît, cette question fondamentale et plusieurs autres sont également débattues dans le cadre du Groupe de travail III (Réforme du règlement des différends entre investisseurs et États) de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (ci-après CNUDCI), où le Canada joue un rôle de premier plan à l’heure actuelle[10].
On pourrait mettre en doute l’importance de la nomenclature en cause[11]. Après tout, tel que l’a écrit le poète anglais William Shakespeare, « Qu’y a-t-il dans un nom ? Ce que nous appelons une rose embaumerait autant sous un autre nom[12] ». Pourtant, cette nomenclature a une importance aux fins de la reconnaissance et de l’exécution des sentences du SJI. Ces sentences sont présagées être exécutoires en vertu de la Convention pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères (ci-après Convention de New York)[13] et de la Convention pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d’autres États (ci-après Convention CIRDI)[14]. La forme et la désignation de cette méthode de règlement de différends soulèvent toutefois des questions quant à la compatibilité du SJI avec ces accords internationaux[15].
D’autre part, cette nomenclature est apparemment de grande valeur pour les principaux acteurs en cause, l’UE et le Canada, qui font elles-mêmes référence au SJI comme étant une « cour » et cherche à exploiter la légitimité qui accompagne cette désignation[16]. Ce fait est significatif puisque, ainsi que l’a noté Jean de La Fontaine, un auteur qui occupe une place similaire à celle de Shakespeare mais dans la littérature française, d’un juge « [c]’est la robe qu’on salue[17] ». En effet, le règlement des différends entre les investisseurs et les États (ci-après RDIE ou arbitrage d’investissement) dépend de sa perception de légitimité, car il repose sur le consentement des États qui peuvent s’en retirer[18]. À l’exception d’arbitrages basés sur la Convention CIRDI, le système nécessite aussi la coopération efficace des cours nationales, n’ayant pas la force institutionnelle du pouvoir d’État ainsi que son propre système d’exécution[19]. Plus important encore, comment instituer une réforme du RDIE traditionnel sans réellement comprendre les caractéristiques distinctives de l’arbitrage et celles du règlement judiciaire ?
En fin de compte, la désignation utilisée par les parties signataires de l’AECG ne reflète pas entièrement la réalité. En se fondant sur des arguments de théorie juridique et politique, il ressort de l’analyse que le SJI représente un hybride entre l’arbitrage consensuel et les cours nationales et internationales. En précisant cette affirmation, il devrait être considéré comme une forme plus institutionnalisée d’arbitrage d’investissement. Le SJI est basé sur le consentement bilatéral et limité des parties, il adopte l’idée d’avoir un représentant neutre sur le banc[20] (bien que plus éloigné des parties au différend spécifique) et il est constitué de manière à rendre justice principalement pour les parties en cause plutôt que pour assurer le développement cohérent du droit dans l’arbitrage d’investissement plus largement. Il est vrai qu’il s’écarte de l’arbitrage international ad hoc et des procédures simples dont beaucoup reposent entre les mains des parties au différend, mais il n’abandonne toutefois pas certaines caractéristiques distinctives de l’arbitrage international.
Pour soutenir ces revendications, cet article s’articule en trois parties. Premièrement, les innovations clés du SJI, telles que proposées dans l’AECG et les autres projets d’accords rendus publics, et l’intention déclarée des parties signataires seront mises de l’avant. Deuxièmement, les concepts d’arbitrage et de règlement judiciaire seront définis selon une perspective théorique[21]. Pour remédier au silence des sources formelles du droit international à ce sujet, ces définitions s’articuleront à partir de la doctrine et de la pratique des cours et tribunaux internationaux. D’un point de vue conceptuel, trois caractéristiques principales différencient les tribunaux arbitraux et juridictionnels : le consentement au règlement du différend, la sélection des décideurs, ainsi que le critère de permanence. Troisièmement, il sera évalué si le SJI constitue réellement une cour internationale et, brièvement, s’il répond aux critiques du RDIE traditionnel. En appliquant au SJI ces caractéristiques distinctives, il appert que cette méthode de règlement des différends s’inscrit dans la lignée des réformes successives d’institutionnalisation et de judiciarisation de l’arbitrage international qui ont eu lieu au cours des trois dernières décennies. Le SJI répond efficacement à certaines préoccupations, mais risque toutefois d’en créer de nouvelles.
I. Les innovations clés du SJI : un nouveau rôle ? Ou une nouvelle robe ?
Des innovations clés ont été introduites dans la proposition de l’AECG visant à créer un Tribunal de première instance (ci-après Tribunal) et un Tribunal d’appel (ci-après Tribunal d’appel). Celles-ci concernent principalement le rôle de décideurs qui est traditionnellement dévolu aux arbitres dans l’arbitrage d’investissement[22]. (A) En premier lieu sera examinée la proposition de mettre sur pied un système à deux niveaux, mieux connu sous son appellation anglaise de « two-tier system ». (B) En deuxième lieu, l’intention déclarée des parties signataires sera présentée.
A. Un système à deux niveaux : le Tribunal de première instance et le Tribunal d’appel
Dans la présente, la proposition de règlement de différends sous l’AECG est traitée en premier plan étant donné qu’elle est l’une des plus finales. Elle est le résultat de négociations entre les parties signataires et a subi une révision juridique (« legal scrubbing »), bien qu’elle ne soit pas entrée en vigueur provisoirement comme le reste de l’accord. Toutefois, les innovations du SJI varient sensiblement dans les différentes propositions d’accord de l’UE. Ces divergences seront soulignées lorsque significatives. Cette entreprise comporte cependant quelques difficultés. Par exemple, la proposition du Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (ci-après PTCI), encore unilatérale, incarne l’expression la plus pure de la pensée de l’UE, mais les négociations ont été suspendues jusqu’à nouvel ordre à la fin de 2016[23]. De l’autre côté, des « cours » d’investissement similaires à celle de l’AECG, mais non identiques, ont été formellement incluses dans l’ALE UE-Vietnam, l’ALE UE-Singapour et l’Accord global UE-Mexique[24]. Ces propositions ne devraient toutefois pas modifier considérablement le projet actuel. Dans l’ensemble, les innovations du SJI peuvent être divisées en trois aspects aux fins de l’analyse. Elles concernent : le Tribunal, le Tribunal d’appel, ainsi que les deux instances.
D’abord, la proposition de l’UE instaure de nouveaux aspects concernant la structure et la composition du Tribunal de première instance. Elle conçoit un Tribunal composé de 15 membres : cinq d’entre eux proviendront de l’UE ; cinq autres seront citoyens de l’autre partie de l’accord (ici, le Canada) ; et les cinq membres restants seront de la nationalité d’un État tiers[25]. Par ailleurs, les termes « cour » et « juges », qui figuraient dans la proposition du PTCI, ont disparu dans les accords subséquents. Ils ont été remplacés par les expressions moins sensibles et plus neutres de « règlement des différends relatifs aux investissements », de « Tribunal » et de « membres du Tribunal[26] ». Le texte de l’AECG ne fait pas référence à l’arbitrage, sauf dans le cas où la décision rendue par le Tribunal est appelée « sentence arbitrale » et lorsque les règles et documents typiquement utilisés dans l’arbitrage international sont mentionnés[27].
La proposition indique aussi que les membres du Tribunal auront droit à une rétribution mensuelle (le montant proposé dans le PTCI est de deux mille euros par mois)[28] et devront être disponibles en tout temps sur un court préavis. S’ils devaient être nommés dans un panel, ils seraient alors payés au taux horaire du CIRDI[29].
La proposition s’écarte également du processus de nomination des décideurs dans le RDIE traditionnel[30]. Les membres devront être au service du Tribunal pour une période de cinq ans, période renouvelable une fois seulement[31]. Les membres seront sélectionnés par l’UE et l’État partie correspondant au traité (ici, le Canada), vraisemblablement selon les procédures nationales. L’intervention des investisseurs ne serait possible, si tant est qu’elle existe, qu’au travers du processus initial de nomination. Dans tous les cas, il y aura une sélection aléatoire et imprévisible par le président du Tribunal des membres de chaque catégorie (ressortissant de l’UE, du Canada et d’un pays tiers) pour juger un cas particulier[32].
Le Tribunal d’appel est aussi le sujet d’innovations clés proposées. Il est remarquable que l’arbitrage d’investissement traditionnel ne permette pas la possibilité de faire appel des décisions[33]. En revanche, la proposition du PTCI stipule que le Tribunal d’appel sera formé de six membres : deux de l’UE, deux de l’autre l’État partie au traité et deux d’États tiers[34], alors que la proposition de l’AECG prévoit que les membres seront choisis ultérieurement par le Comité mixte et que trois de ces membres seront sélectionnés au hasard pour instruire chaque appel[35]. Selon le PTCI, ils auraient aussi droit à une rétribution mensuelle de sept mille euros par mois[36]. Les membres devront être disponibles sur un court préavis, mais la possibilité d’être employé à temps plein demeure une éventualité, en fonction de la charge de travail des cas. Ils seront sélectionnés pour une période initiale, renouvelable une seule fois[37].
La proposition, finalement, soumet les décideurs à des obligations éthiques robustes contenues à même le traité et joint à celui-ci[38]. Pour répondre aux préoccupations soulevées à l’égard de l’indépendance et de l’impartialité des décideurs[39], la proposition indique que les membres ne pourront pas agir comme avocats et comme experts une fois sélectionnés pour faire partie de la liste de membres. Cette contrainte pourrait même s’appliquer avant leur nomination, car le texte suggère que les membres devront se distancier de conflits d’intérêts possibles s’ils veulent être considérés admissibles pour la liste de membres du Tribunal[40]. Il n’est pas clair si les membres pourront accepter concurremment des nominations pour siéger comme arbitres dans le RDIE traditionnel[41]. Le président de la Cour internationale de justice (ci-après CIJ) sera chargé d’évaluer les conflits d’intérêts dans l’AECG[42], alors que c’est président du Tribunal, tiré au hasard parmi les membres sélectionnés[43], qui remplira cette tâche selon les autres propositions[44].
Le Tribunal et le Tribunal d’appel seront supervisés par un secrétariat[45] qui sera soit le CIRDI[46], soit la Cour permanente d’arbitrage (ci-après CPA)[47]. L’AECG et l’ALE UE-Singapour ont sélectionné le CIRDI[48], tandis que le PTCI et l’ALE UE-Vietnam se réfèrent aux deux institutions et suggèrent que le choix final se fera ultérieurement[49]. D’ailleurs, les règles de procédure choisies sont celles appliquées par l’une ou l’autre des institutions arbitrales visées ou alors par les règles d’arbitrage ad hoc de la CNUDCI[50].
B. L’intention déclarée des parties signataires
Dans un contexte politique européen marqué par une montée du nationalisme[51], et à la suite des ferventes critiques publiques adressées dans le contexte du PTCI[52], la négociation d’Accords de libre-échange (ci-après ALEs) s’est complexifiée pour l’UE. En 2015, le Parlement européen a adopté une résolution visant à éclairer la Commission sur sa conception du tribunal à concevoir dans le cadre de ses négociations du PTCI. Ces recommandations avaient pour but de promouvoir la création
[of] a new system for resolving disputes between investors and states which is subject to democratic principles and scrutiny, where potential cases are treated in a transparent manner by publicly appointed, independent professional judges in public hearings and which includes an appellate mechanism, where consistency of judicial decisions is ensured, the jurisdiction of courts of the EU and of the Member States is respected, and where private interests cannot undermine public policy objectives[53].
Le Parlement européen invitait de la sorte la Commission à transformer l’ancien système de RDIE en un nouveau modèle s’apparentant à une cour publique[54]. Dans le cahier des charges des négociateurs figuraient l’exigence de créer un système de résolution des différends « efficace, juste et transparent[55] ». La Commission présente aussi dans plusieurs rapports les qualités qu’elle souhaite attribuer au SJI : permanence, indépendance, prédictibilité, cohérence et efficacité[56]. De plus, elle décrit les intentions transversales la surplombant, incluant le respect de l’État de droit, la défense de la coopération et gouvernance mondiale ainsi que la simplification du droit international[57].
Par suite des changements apportés à sa politique concernant l’arbitrage d’investissement, plusieurs des communications de l’UE se sont, sans surprise, concentrées sur le SJI. Notamment, la Commissaire européenne au commerce, Cecilia Malström, inscrivait ce système parmi les grandes avancées démocratiques de l’AECG. Pour elle, sa ressemblance aux cours nationales et internationales permettrait aux citoyens de croire en sa capacité à rendre des jugements justes et objectifs et, en cela, le SJI répondait aux objectifs que les États membres et le Parlement européen s’étaient fixés[58]. La ministre des Affaires étrangères du Canada, Chrystia Freeland, a aussi énoncé que la résolution des disputes dans l’AECG adopte une approche « nouvelle », « importante » et « progressiste[59] ». Du reste, les parties ont couramment utilisé la désignation de système juridictionnel d’investissement (en anglais, « Investment Court System[60] »), bien qu’elle n’ait pas été retenue dans la dernière version de l’accord.
Quelle est la nature juridique du SJI à la lumière des notions fondamentales du droit international ? Est-ce que le SJI est vraiment une « cour », tel que l’avancent publiquement les parties signataires ? Pour répondre à cette question, il faut préalablement exposer les perspectives théoriques de l’arbitrage et du règlement judiciaire.
II. L’arbitrage et le règlement judiciaire en droit international : perspectives théoriques
Le nombre sans cesse croissant de disputes transnationales décidées par des tribunaux d’arbitrage international ainsi que par des cours internationales depuis la Seconde Guerre mondiale[61] laisserait présager une littérature riche portant sur la distinction entre ces deux méthodes de règlement de différends. Si la doctrine s’est couramment référée à cette distinction[62], étonnement, elle ne l’a débattu qu’au passage et relativement superficiellement[63]. Même lorsqu’examinées, les opinions divergent à savoir s’ils sont des instances juridiques similaires.
En discutant de la proposition du PTCI, V.V. Veeder note que l’arbitrage consensuel et le règlement judiciaire sont « two very different creatures[64] ». Il met également en doute la possibilité de combiner de manière réussie à l’intérieur d’une même instance juridique certaines caractéristiques de ces deux méthodes de règlement de différends[65]. À l’inverse, David D. Caron a avancé qu’une cour internationale et un arbitrage interétatique ad hoc « can be said to involve the same process[66] ». (A) Pour résoudre ce dilemme, les sources formelles et le portrait sociologique de l’arbitrage et du règlement judiciaire seront mis de l’avant. (B) Puis, les trois caractéristiques distinguant ces deux méthodes seront exposées.
En plus de colliger les intuitions relativement éparses dans la doctrine sur le sujet, cette partie s’attèle à refléter les développements récents dans la pratique du droit international. Elle examine particulièrement la manière dont l’arbitrage et le règlement judiciaire s’inscrivent sur un spectre fluide – plutôt que dans des catégories étanches – dont il est tout de même primordial d’identifier les pôles opposés[67].
A. Les sources formelles et le portrait sociologique de l’arbitrage et du règlement judiciaire
La distinction entre l’arbitrage et le règlement judiciaire de différends internationaux a été établie par bon nombre d’accords et de constitutions d’organisations internationales[68]. Notamment, l’article 33, premier paragraphe, de la Charte des Nations Unies (ci-après Charte) traite des méthodes pacifiques de règlement de différends internationaux et distingue l’arbitrage du règlement judiciaire[69]. L’article 36, au paragraphe 2, de la Charte note même que le règlement judiciaire constitue la méthode privilégiée pour régler les différends d’ordre juridique entre les États[70], ce que reflète la philosophie générale instaurée par le système des Nations unies[71].
Cependant, aucun de ces documents internationaux ne définit ces termes[72]. Les sources formelles du droit international ne font allusion que de manière imprécise aux éléments essentiels et aux caractéristiques distinctives de l’arbitrage et du règlement judiciaire. La Convention de New York décrit ce qu’est une « sentence arbitrale » et présente indirectement les exigences minimales quant au processus d’arbitrage en abordant la reconnaissance et l’exécution de ces sentences[73]. La Convention ne fournit toutefois pas une véritable définition de l’arbitrage international.
Les sources du droit international traitant du règlement judiciaire, quant à elles, sont davantage concernées par les définitions en droit interne. Plusieurs accords internationaux font référence aux cours et à leurs composantes en s’appuyant sur le postulat qu’il s’agit de concepts évidents. Par exemple, l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ci-après PIDCP) stipule que « [t]ous sont égaux devant les tribunaux et les cours de justice », ce qui revient à dire, en termes génériques, que « [t]oute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial établi par la loi[74] ». Le PIDCP n’offre pourtant pas de détail à savoir ce que sont exactement « les tribunaux et les cours de justice ».
La Convention de Vienne sur le droit des traités confirme tout de même que, par sa présence, il faut interpréter cette distinction de manière à donner effet à ces termes[75]. L’évolution du droit international confirme aussi que les États accordent une signification à cette distinction et aux caractéristiques inhérentes de ces instances juridiques, incluant dans des accords internationaux tels que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (ci-après CNUDM)[76].
Dans ce contexte, le portrait sociologique est plus éclairant. Résumant la position de plusieurs cours et auteurs, Gary Born définit l’arbitrage international commercial comme « un processus par lequel les parties soumettent consciemment un différend à un décideur non gouvernemental, choisi par ou pour elles, pour rendre un règlement contraignant de ce différend conformément à un processus juridique offrant aux parties la possibilité d’être entendues[77] ». Selon le Black’s Law Dictionary, une cour internationale est « une instance avec autorité jurisprudentielle créée par un traité ou par une organisation internationale qui entend et pose un jugement selon le droit international[78] ».
D’une conception substantialiste de la justice[79], l’arbitrage et le règlement judiciaire sont donc d’une identification quasi parfaite. Arbitres et juges exercent une même fonction, celle de trancher les différends sur la base de règles de droit[80]. La doctrine note plusieurs éléments essentiels partagés par l’arbitrage consensuel et les cours internationales :
i) a body composed of independent and impartial members, ii) is called to take a decision binding upon the parties to the dispute, iii) after an adversarial procedure during which the parties benefit from an equality of rights, and, iv) […] the decision—usually an award in the case of arbitration, a judgment when given by a permanent body—will generally be based on exclusively legal consideration but might be founded on pure equity (ex aequo et bono) if the parties so agree[81].
Dans le cas à la fois de ces deux méthodes, c’est précisément la nature contraignante des décisions qui implique – et requiert – l’indépendance des décideurs, une procédure équitable et le respect de la règle de droit (« rule of law [82] »). Bien évidemment, la question à savoir si cette décision sera éventuellement appliquée ou respectée est un enjeu distinct en droit international[83]. Cependant, les décisions prises sont, dans les deux cas, contraignantes pour les parties impliquées[84]. L’avocat général Melchior Wathelet, par ailleurs, est d’avis que le RDIE traditionnel corresponde aux facteurs établis dans la jurisprudence européenne pour constituer une « cour ou un tribunal » au sens de l’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après TFUE)[85].
De manière générale, plusieurs raisons font en sorte qu’il est difficile d’établir une distinction franche entre les tribunaux arbitraux et juridictionnels[86]. En analysant les nombreuses méthodes pour régler les différends en droit international, le juge James Crawford explique que la principale cause de ce chevauchement est historique :
the permanent institutions developed historically from arbitral experience. It is now common to see the development of integrated systems of dispute resolution which include international “courts” of relatively formal jurisdiction and process, whilst reserving certain sui generis questions for arbitral tribunals convened under the procedures of the same system, for example, in the procedures of UN Convention on the Law of the Sea (UNCLOS) and the WTO. But independent systems exist as expressed through the actions of many ad hoc arbitral tribunals, mixed commissions and semi-permanent specialized tribunals[87].
Puisque ces cours internationales se sont développées par l’institutionnalisation de formes d’arbitrage, ces deux méthodes partagent certaines caractéristiques, telles que la capacité des parties prenant part aux procédures à influencer – du moins en partie – la composition du banc et un contrôle dans l’établissement des procédures[88].
Certains auteurs avancent donc que la nomenclature binaire est dépassée avec l’apparition d’un « régime mixte[89] », et d’autres que l’arbitrage interétatique dans la période post-1945 ne peut au mieux être défini que comme un locus d’activités plutôt que comme une catégorie d’activité[90]. Ces positions reposent sur une pratique changeante du règlement des différends commerciaux transnationaux, qui peuvent aujourd’hui être résolus dans diverses déclinaisons des instances juridiques suivantes : (i) les cours spécialisées en droit interne [91]; (ii) l’arbitrage commercial international, avec ou sans un État partie ; (iii) le RDIE ou arbitrage d’investissement traditionnel; (iv) l’arbitrage inter-États ; et (v) les cours internationales. En outre, la confusion régnant dans la doctrine et dans les décisions des cours et tribunaux internationaux provient en grande partie du défaut de reconnaître le rôle à la fois d’objet et de sujet de l’État en droit international ainsi que celui de tiers bénéficiaires qu’occupent les investisseurs étrangers en arbitrage d’investissement[92].
Malgré l’absence de distinction franche, il demeure que l’arbitrage et le règlement judiciaire possèdent des caractéristiques qui les distinguent l’un de l’autre. Entre autres, la Cour de Justice des Communautés européennes (ci-après CJE) a, dans plusieurs décisions, refusé d’attribuer à un tribunal arbitral le caractère de « juridictions d’un des États membres » au sens de ce qui est aujourd’hui l’article 267 du TFUE. Dans son arrêt du 17 septembre 1997, la CJE a posé les principales caractéristiques de distinction entre une juridiction et un tribunal arbitral : « l’origine légale de l’organe, sa permanence, le caractère obligatoire de sa juridiction[93] ». Cette grille d’analyse provenant du droit européen a certaines similitudes – mais aussi plusieurs différences – avec celle établie en droit international, tel que démontré ci-dessous.
B. Trois caractéristiques distinguant l’arbitrage et le règlement judiciaire
Trois caractéristiques principales différencient les tribunaux d’arbitrage des cours en droit international : le consentement au règlement du différend, la sélection des décideurs, ainsi que le critère de permanence. Conceptuellement, la solution retenue par une méthode de règlement de différend à la première caractéristique – le consentement – est susceptible d’influencer la seconde, soit la manière dont les décideurs seront choisis. Il en va de même pour la seconde caractéristique envers la troisième, c’est-à-dire que le mode de nomination des décideurs va vraisemblablement déteindre sur le critère de permanence. Cela dit, ces trois caractéristiques sont interreliées et adressent toutes de diverses façons la dichotomie publique contre privée (« public versus private divide ») associée au règlement des différends internationaux[94].
La première caractéristique est celle du consentement préalable des parties au règlement contraignant du différend. Puisque la notion de consentement est évasive et peut être utilisée dans plusieurs contextes[95], elle est définie dans la présente principalement sur la base de deux aspects. Ceux-ci étant relativement abstraits, ils seront ensuite illustrés à l’aide de plusieurs exemples. D’abord, le consentement se distingue selon le nombre de personnes morales ou physiques qui peuvent poursuivre une autre partie : il peut être dirigé envers une personne définie (consentement bilatéral, trilatéral ou plurilatéral) ou envers un vaste groupe de personnes (consentement multilatéral)[96]. Ensuite, le caractère consensuel diffère également selon la portée de la compétence de l’instance juridique : il peut inclure des différends précis (consentement limité) ou alors plusieurs types de différends (consentement étendu)[97]. Les exemples étudiés ci-dessous, et mis en parallèle les uns aux autres, montrent que cette distinction en est plus une de degrés que de nature[98].
En droit interne, la justice étatique est imposée aux personnes (et à l’État administratif) en dépit de leur volonté[99]. Dans les cours internationales, la conception westphalienne de l’État en droit international public requiert toujours son consentement[100], mais ces cours se situent tout de même à un extrême du spectre en termes d’engagement et de contraignabilité[101]. En effet, l’approbation explicite ex ante à la compétence d’une instance est typique du règlement judiciaire en droit international[102]. En ce cas, le consentement est souvent multilatéral et étendu[103]. À titre d’exemple, soixante-treize États ont accepté la juridiction obligatoire de la CIJ, ce qui signifie que tout différend juridique international impliquant ces États peut être soumis à la Cour, à condition que tous les États parties au différend aient accepté sa compétence obligatoire[104]. Enfin, le contrôle des parties sur le processus et les règles de procédure est relativement minimal dans les cours internationales[105].
En revanche, le consentement en arbitrage international commercial est souvent bilatéral et limité. Lorsque les personnes et États décident de se soumettre à ce type d’arbitrage, ils le font de leur propre chef en s’accordant aussi communément sur l’identité des décideurs et sur les règles de procédure applicables dans l’affaire en cause[106]. En ce sens, le recours à l’arbitrage est « volontaire, consensuel et non obligatoire » et se traduit par une soumission à la compétence du tribunal arbitral ainsi qu’à sa méthode de composition ou de sélection[107]. Le consentement est donc, tel que le rapporte Gary Born, un aspect « élémentaire » de l’arbitrage international commercial[108].
Dans le RDIE traditionnel, le consentement asymétrique est aussi bilatéral et limité dans l’ensemble, mais cette proposition reste vraie seulement dans la mesure où ces deux aspects reçoivent une interprétation libérale. Mis à part quelques exceptions notables, la majorité des ALEs sont des traités bilatéraux d’investissement (ci-après TBIs) se limitant à protéger les investissements étrangers aux violations du droit international[109]. Les États hôtes ont choisi d’étendre aux investisseurs étrangers d’un autre État une offre unilatérale de recours à l’arbitrage dans les TBIs (et de plusieurs autres États dans certains ALEs), que ceux-ci acceptent au moyen du processus bien connu d’« arbitration without privity[110] », contribuant par conséquent à faire de la notion de consentement une spécificité de l’arbitrage. Par ailleurs, l’objectif d’émanciper l’arbitrage d’investissement du droit interne et de l’édifier en alternative viable est sans équivoque[111].
En résumé, le consentement joue un rôle de premier plan dans l’arbitrage international[112]. Cette caractéristique est centrale pour les personnes malgré quelques nuances, dont celui du Tribunal irano-américain de réclamations (ci-après TIAR)[113]. Même si pour les États la notion de consentement n’est pas unique à l’arbitrage, il est possible d’établir un spectre sur lequel les conventions spéciales et autres accords pour statuer sur un cas particulier distinguent cette méthode de règlement.
Si la précédente caractéristique concernait l’autorité et la compétence de l’instance juridique, cette deuxième caractéristique différenciant les tribunaux d’arbitrage des cours internationales porte plutôt sur la légitimité des décideurs aux yeux des parties au différend et aux yeux du public. Elle relève, plus précisément, de la sélection et de la rémunération des arbitres et des juges en droit international. Pour que les tiers neutres rendant des décisions contraignantes soient perçus comme légitimes, ils doivent rendre des comptes – d’une manière qui ne compromette pas leur indépendance ni leur impartialité – aux personnes qui seront éventuellement affectées par ces décisions de près ou de loin[114]. Cet objectif est atteint de manière différente dans l’arbitrage et le règlement judiciaire.
En droit interne, le magistrat, payé par l’État, est un « juge public[115] » qui s’impose aux parties d’un différend, celles-ci n’intervenant pas dans sa sélection. L’État (dit, le souverain) tire sa légitimité du mandat de la population et transfère sa prérogative d’établir la justice à ses représentants, les magistrats[116]. Leur légitimité provient du fait que l’État les a choisis au nom du peuple et afin de rendre la justice pour lui[117]. Aux États-Unis, par exemple, certains juges sont élus[118]. Les juges français, eux, sont recrutés suite à un concours spécifique et entrent en fonction après avoir été nommés par le président de la République[119]. Au Canada, seuls les avocats inscrits au barreau depuis au moins 10 ans peuvent prétendre à être choisis par le gouvernement et nommés par le gouverneur à une cour fédérale[120].
La situation est similaire, mais plus nuancée, en droit international public général. Dans plusieurs cours internationales, la sélection des juges est indépendante de la volonté des parties à un différend spécifique. À la Cour pénale internationale (ci-après CPI), par exemple, une assemblée des États partis élit les juges[121]. À la CIJ, l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité de l’ONU élisent les juges parmi les listes de candidats proposées par les groupes nationaux d’États, bien que l’État partie à une affaire a tout de même la possibilité de nommer un juge ad hoc[122]. Les États sont toutefois généralement plus réticents à consentir à la compétence d’une cour internationale sans avoir leur mot à dire, au moins de manière oblique, sur l’identité et la sélection des décideurs lorsque leur responsabilité internationale peut directement être mise en cause. À titre d’illustration, à la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après CEDH), les juges sont élus par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe à partir d’une liste de trois candidats proposés par l’État partie dont le juge doit être élu[123]. Ainsi, pour les États, la légitimité des parties tierces qui tranchent des différends internationaux provient toujours de leur rôle dans cette sélection[124], mais leur engagement est généralement plus limité ou indirect dans les cours internationales[125]. D’ailleurs, plusieurs centaines de millions de dollars sont investis chaque année dans ces cours par les États, qu’ils participent ou non aux différends pendants devant celles-ci[126].
En comparaison, dans un arbitrage international (par exemple, entre des personnes dans un arbitrage commercial international ou des États dans un arbitrage interétatique), la légitimité de l’arbitre provient de sa sélection par ces parties et s’inscrit donc dans le cadre d’une justice dite « privée[127] ». L’arbitre n’est ainsi ni un membre de l’appareil judiciaire de l’État[128], ni un membre du gouvernement[129], ni même une quelconque autre émanation de l’État[130]. L’arbitre est rémunéré par les parties au différend[131]. Les modalités de sa sélection offrent une véritable spécificité à l’arbitrage. Sophie Nappert rappelle d’ailleurs que, dans le contexte de la création de la Cour permanente de justice internationale (ci-après CPJI), le Comité consultatif de juristes incluait en 1920 la désignation des arbitres comme caractéristique distinctive de l’arbitrage par opposition au règlement judiciaire[132].
En arbitrage d’investissement, le rôle des parties dans la sélection des décideurs est aussi fondamental dans les faits, même s’il est loin de constituer un « droit » des personnes dans l’ordre juridique international. Pour les personnes, la légitimité des décideurs en droit international public dépend de la manière dont elle est abordée et correspond à une combinaison des sources de légitimité en droit interne et en droit international : elle est assurée par le choix que fait son État d’origine, en tant que son représentant en droit international[133], de lui donner ou non la faculté de nommer un ou plusieurs décideurs. Néanmoins, il serait exagéré d’affirmer, comme certains auteurs se risquent de le faire[134], qu’il s’agit d’un droit des personnes à choisir leurs décideurs en arbitrage d’investissement[135]. Le TIAR, notamment, qui est reconnu comme une forme d’arbitrage international, statuait sur les demandes qui lui étaient indirectement soumises par les États-Unis et l’Iran dans leur exercice du droit de protection diplomatique[136] et ses membres étaient nommés exclusivement par ces deux États[137].
Malgré ce contre-exemple, le rôle des parties dans la sélection des décideurs représente réellement une spécificité de l’arbitrage. Il peut être remarqué, entre autres, dans le RDIE traditionnel où les investisseurs étrangers se sont communément vus octroyer le pouvoir unilatéral de nommer un arbitre dans plus de trois mille ALEs[138]. Tout bien considéré, une caractéristique qui distingue communément l’arbitrage du règlement judiciaire en droit international est la possibilité pour les parties d’avoir un représentant neutre sur l’instance juridique appelée à trancher le différend.
La troisième caractéristique qui différencie l’arbitrage du règlement judiciaire en droit international est le critère de permanence. Celle-ci repose sur deux aspects connexes. Le premier est institutionnel ; il est question de la temporalité de l’instance et de la sécurité d’occupation des décideurs. Le deuxième aspect est fonctionnel ; il concerne le mandat des décideurs et leur rôle dans l’élaboration du droit[139].
L’arbitrage international est typiquement ad hoc ou institutionnel, alors que le règlement judiciaire se déroule invariablement dans des instances juridiques permanentes[140]. En arbitrage, les arbitres sont choisis par les parties au cas par cas après que le différend ne survienne, afin de se prononcer sur un différend particulier ; le tribunal arbitral est démis après avoir rendu une sentence finale. À l’inverse, le règlement judiciaire préexiste à la question qui doit être tranchée[141]. Les juges bénéficient généralement, en droit interne, de l’inamovibilité à vie[142] ou jusqu’à l’âge de la retraite obligatoire[143] et, en droit international, d’un terme déterminé qui varie en durée et en ce qui concerne la possibilité de réélection[144]. Néanmoins, le critère de permanence est l’un des aspects sur lesquels la comparaison ou l’analogie entre les cours internes et internationales est la plus ténue. Ce critère est particulièrement fluide en droit international, tel que le démontrent les exemples des chambres et comités de la CIJ[145] et des emplois à temps partiel à l’Organe d’appel de l’Organisation mondiale du commerce (ci-après OMC).
Du point de vue des sources formelles du droit international, la temporalité de l’instance et la sécurité d’occupation ne sont pas nécessairement déterminantes. La Convention de New York reconnaît d’ailleurs qu’autant les tribunaux d’arbitrage ad hoc que les instances d’arbitrage permanentes peuvent rendre des sentences arbitrales exécutoires[146]. Les travaux préparatoires de la Convention confirment que même une instance permanente de règlement des différends peut être considérée comme un arbitrage[147].
Toutefois, ces aspects institutionnels affectent considérablement, en pratique, le mandat des décideurs et leur rôle dans l’élaboration du droit. En arbitrage international, des panels tripartites ad hoc entendent le plus souvent les affaires[148]. Les arbitres, décideurs privés, rendent justice pour les parties[149]. Même s’ils se réfèrent matériellement à d’autres décisions et ont contribué indirectement au développement du droit international[150], ils n’appliquent pas la « loi du précédent » et leur opinion n’est rien de plus, en théorie, que celle d’individus nommés pour résoudre un différend juridique spécifique[151]. Comme les tribunaux arbitraux sont destinés à trancher uniquement le différend qui leur est soumis et sont dissous à l’issue de la procédure, des affaires similaires peuvent potentiellement trouver des conclusions différentes, voire contradictoires, d’un tribunal arbitral à l’autre[152]. En outre, il n’y a pas de possibilité d’appel pour revoir les décisions en fait ou en droit ou alors pour assurer la cohérence de celles-ci à long terme[153]. Les dissidences y servent plus à exprimer le point de vue de l’arbitre nommé par une partie qu’à assurer le développement du droit[154].
De l’autre côté, l’autorité du juge d’une cour internationale provient d’un mandat public et ses décisions sont, par nature, un bien public[155]. Ils décident plutôt dans l’intérêt général et, bien qu’ils soient chargés de résoudre les affaires devant eux, ils contribuent à l’élaboration cohérente des règles dans un domaine spécifique du droit international, car « [t]hey sit on the body’s bench and decide a series of cases[156] ». Concrètement, le TIAR, une forme d’arbitrage singulière[157], a créé une jurisprudence qui représente une contribution significative au développement du droit international[158], particulièrement dû au volume des sentences décidées par un nombre limité de membres.
Le cas de la CIJ illustre mieux encore l’incidence de la permanence d’une instance juridique sur son rôle dans l’application et le développement cohérent du droit international public. Selon l’article 59 du Statut, « [l]a décision de la Cour n’est obligatoire que pour les parties en litige et dans le cas qui a été décidé[159] ». Cet article a été interprété comme reconnaissant seulement que les États tiers ne sont pas liés par la décision rendue dans un différend particulier[160]. La CIJ a elle-même noté que, « [p]our autant que les décisions en question contiennent des conclusions de droit, la Cour en tiendra compte, comme elle le fait habituellement de sa jurisprudence ; autrement dit, quoique ces décisions ne s’imposent pas à la Cour, celle-ci ne s’écartera pas de sa jurisprudence établie, sauf si elle estime avoir pour cela des raisons très particulières[161] ».
D’ailleurs, dans les négociations sur la création de cette nouvelle cour internationale au milieu du 20e siècle, on a noté les caractéristiques que cette méthode de règlement judiciaire devait posséder pour permettre la progression de l’ordre juridique international :
Only such a court should succeed in “forming a series of precedents” and possibly develop a body of international law: “The Court of International Justice, being composed of judges, permanently associated with each other in the same work, and […] retaining their seats from one case to another, can develop a continuous tradition, and assure the harmonious and logical development of International Law”[162].
En effet, les juges de la CIJ entendent tous chacune des affaires, ce qui contribue à créer une jurisprudence constante et à assurer l’uniformité du droit[163]. Dans la même veine, bien que les cours internationales ne prévoient pas toujours un mécanisme d’appel, d’autres moyens, tels que les révisions et les dissidences, aident au développement du droit international[164]. L’arbitrage et le règlement judiciaire, en résumé, sont des méthodes sensiblement différentes de règlement de différends internationaux. Cette conclusion découle de la distinction entre celles-ci dans les sources formelles du droit international, mais surtout de la pratique de ce droit dans les deux derniers siècles. Émergent de cette pratique trois caractéristiques : celle du consentement, de la sélection des décideurs et du critère de permanence. Ces caractéristiques sont maintenant comparées à la situation du SJI.
III. La SJI et l’institutionnalisation progressive de l’arbitrage d’investissement
Le SJI a déjà fait l’objet de plusieurs analyses et les auteurs se sont référés à cette instance juridique de manières variées. Sophie Nappert fait valoir que le SJI s’éloigne de l’arbitrage international[165]. Céline Lévesque avance que le SJI est simplement un système « sui generis[166] ». August Reinisch[167], tout comme Catherine Kessedjian et Lukas Vanhonnaeker[168], parle d’une institution « hybride ». Bien qu’il y ait une part de vérité dans chacune de ces affirmations, la dernière est la plus convaincante. En effet, l’application au SJI de la grille d’analyse développée précédemment révèle que cette instance est issue d’un croisement entre un tribunal arbitral et juridictionnel. (A) En précisant cette affirmation, il ressort de cela que le SJI constitue une forme davantage institutionnalisée d’arbitrage d’investissement. (B) De plus, l’UE et le Canada cherchent avec cette proposition à répondre à certaines préoccupations liées au RDIE traditionnel, mais risquent, ce faisant, d’en créer de nouvelles.
A. Est-ce que le SJI relève de l’arbitrage ou du règlement judiciaire ?
En appliquant au SJI les caractéristiques du consentement, de la sélection des décideurs et du critère de permanence, il appert que cette méthode de règlement de différends internationaux s’inscrit dans la lignée des réformes successives d’« institutionnalisation[169] » et de « judiciarisation[170] » de l’arbitrage international qui ont eu lieu au cours des trois dernières décennies. Autrefois une procédure aux règles et institutions rudimentaires[171], l’arbitrage international a connu un processus autosuffisant d’évolution institutionnelle marquée par l’introduction progressive, entre autres, de caractéristiques traditionnellement associées aux cours en droit interne et en droit international[172]. Le SJI représente un pas de plus dans cette direction. S’inspirant de l’Organe d’appel de l’OMC[173], il s’écarte de l’arbitrage international ad hoc et des procédures simples, dont beaucoup reposent entre les mains des parties au différend, sans toutefois abandonner certaines caractéristiques distinctives de l’arbitrage international.
Premièrement, la notion de consentement, telle qu’elle se révèle dans le SJI, permet de classer cette méthode de règlement dans l’ordre de l’arbitrage plutôt que dans celui du règlement judiciaire[174]. L’accord bilatéral des parties a lieu de manière très similaire, voire identique, à ce qui est prévu dans les TBIs du RDIE traditionnel. Pour l’UE et le Canada, le consentement asymétrique à la présentation d’une réclamation concernant un investissement étranger est contenu spécifiquement dans l’AECG et aux conditions que ce traité détermine.
Dans la présente, cet accord inclut l’application des règles de procédures communément utilisées en arbitrage international[175], mais aussi plusieurs autres conditions et limites qui servent à circonscrire l’offre d’arbitrage[176]. En particulier, l’AECG limite l’offre de recours à l’arbitrage uniquement aux violations alléguées des dispositions de fond de l’accord, comme c’est le cas de l’Accord de libre-échange nord-américain[177] et du Traité sur la Charte de l’énergie[178]. En comparaison, d’autres ALEs permettent généralement à un tribunal arbitral de trancher « tous » les litiges relatifs à des investissements[179], ce qui a été interprété comme couvrant les demandes fondées sur des protections autres que celles offertes par l’ALE lui-même[180]. Ces deux approches au consentement demeurent dans le domaine de l’arbitrage, mais les comparer illustre, dans l’ensemble, comment le consentement dans l’AECG est relativement limité.
Pour l’investisseur étranger, la soumission d’une réclamation au SJI est volontaire et emploie le processus d’« arbitration without privity », c’est-à-dire que l’investisseur accepte librement l’offre de l’État de régler le différend relatif aux protections contenues dans l’ALE en engageant une procédure arbitrale. En résumé, l’investisseur a d’autres alternatives : il peut choisir de son plein gré entre les cours internes de l’État hôte (et, dans une moindre mesure, de son État d’origine)[181] et l’instance juridique au plan international que constitue le SJI[182].
Deuxièmement, la question de la nature juridique de cette instance dépend en grande partie de l’importance que l’un accorde au choix des décideurs[183]. La sélection de ceux-ci permet d’assimiler le SJI non pas à de l’arbitrage commercial international, mais plutôt aux arbitrages interétatiques et aux cours internationales.
Tel que mentionné précédemment, il y aura une répartition au hasard des affaires au Tribunal à des panels tripartites composés de membres de chaque catégorie (ressortissants de l’UE, du Canada et d’un pays tiers)[184]. Cette disparition du choix des parties dans la sélection des décideurs (remplacée dans chaque différend par la sélection par rotation de membres des trois catégories) est l’aspect qui éloigne le plus le SJI du RDIE traditionnel[185], alors que la répartition des coûts par les parties au différend le rapproche de cette forme d’arbitrage[186].
Bien que les parties ne jouent aucun rôle dans la nomination des membres du Tribunal dans un différend particulier, l’idée d’avoir un « représentant » neutre sur le banc comme c’est le cas dans l’arbitrage interétatique – et dans certaines cours internationales – n’est pas abandonnée avec le SJI. Les investisseurs joueront vraisemblablement un rôle négligeable dans la sélection des décideurs préalablement au différend. Pourtant, les États, eux, ont choisi de nommer de leurs ressortissants en nombre égal au SJI. Du reste, la structure tripartite, avec un représentant de chaque partie signataire et un président neutre, reflète le fonctionnement de l’arbitrage :
States are wary of the international legal process, as an external check on their sovereignty, and have traditionally insisted on the unilateral right to appoint at least one arbitrator or judge to international tribunals. This is all the more understandable when one considers the generality and abstraction with which so much of public international law is formulated, the controversies as to their sources and interpretation, and the likely politicization of such disputes[187].
Cette situation n’est pas particulièrement surprenante puisque les États sont, encore aujourd’hui, favorables à l’idée d’avoir un représentant sur le banc en droit international public. D’ailleurs, la proposition reproduit étroitement sur ce point la structure du TIAR.
La logique et le bien pensé de cet aspect de l’AECG sont sujets à discussion. Choisir ses décideurs représente certes une source importante de légitimité des instances juridiques pour les États en droit international public[188] ; une interprétation de cette caractéristique pourrait faire valoir qu’une forme de représentation culturelle sur le SJI assure la légitimité démocratique de l’instance[189]. Cependant, si l’objectif de la proposition est de dépolitiser les différends relatifs aux ALEs, la sélection de ressortissants n’est pas forcément la meilleure voie à emprunter[190]. La mondialisation, par ailleurs, a atténué les différences entre les traditions juridiques et, parallèlement, la nécessité d’un membre de l’instance de sa propre culture[191].
Troisièmement, le critère de permanence juridique recoupe en théorie plusieurs aspects propres au règlement judiciaire même si, en réalité, la balance de ceux-ci fait en sorte qu’il s’agit plutôt d’arbitrage international institutionnalisé. Avant tout, les membres du Tribunal et du Tribunal d’appel sont nommés pour une période fixe qui est renouvelable une fois seulement[192]. Ces nominations pour des termes confèrent un aspect public au SJI, du moins en apparence. La proposition élimine également la question du « double hat », c’est-à-dire qu’elle interdit aux membres d’agir comme avocats et experts en arbitrage d’investissement. La proposition contient aussi un code de conduite pour les membres, bien que dans l’AECG ce code sera adopté ultérieurement par le Comité des services et de l’investissement[193].
En dépit de ces améliorations, aussi à l’aspect public, l’indépendance judiciaire des membres du SJI est un sujet de préoccupation dans les faits. Peut-être ceux-ci seront-ils formellement indépendants, mais ils n’auront pas de garantie d’emploi permanent (pas de salaire, de retraite, etc.). Concrètement, la plupart des membres auront besoin d’un autre emploi ou auront besoin d’être positionnés financièrement pour ne pas avoir besoin d’un revenu régulier. En effet, la proposition du PTCI prévoit une provision annuelle de 24 000 euros pour les membres du Tribunal et de 84 000 euros pour les membres du Tribunal d’appel[194]. Bien que cette dernière semble raisonnable, elle représente certainement une réduction de salaire importante pour la plupart des arbitres et avocats actuels.
La SJI contient aussi un mécanisme d’appel interne qui a pour but avoué d’assurer la cohérence des décisions. Le Tribunal d’appel a le pouvoir de réexaminer des décisions suite à des erreurs de droit ou des erreurs manifestes dans l’appréciation des faits, en plus d’examiner les motifs d’annulation figurant actuellement dans la Convention CIRDI[195]. Dans les dernières années, une incohérence alléguée dans l’interprétation des articles de droit matériel dans les ALEs a soulevé des questions de légitimité dans l’arbitrage d’investissement[196]. Il a été souvent suggéré qu’un mécanisme d’appel soit établi de manière similaire à l’Organe d’appel de l’OMC[197].
En ce qui concerne la cohérence et la prévisibilité des décisions, il est probable que celles-ci seront améliorées en raison du nombre limité de membres du Tribunal et du Tribunal d’appel, chacun siégeant pendant une période relativement longue. Cette conclusion doit cependant être tempérée par plusieurs considérations et questions qui restent sans réponse dans la proposition de l’AECG. Il est surprenant, a priori, que la proposition n’adresse pas la valeur de précédent des décisions du Tribunal et du Tribunal d’appel. Une pratique s’est développée à la CJI[198] et à l’Organe d’appel de l’OMC[199] de sorte qu’avec le temps les décisions de ces instances ont pris une force de précédent. Au regard de l’approche en arbitrage d’investissement de codifier les meilleures pratiques établies en droit international, on aurait pu s’attendre à ce que la proposition adresse (plus qu’implicitement) la question de la valeur des décisions vu son objectif avoué d’assurer le développement cohérent du droit international relatif aux ALEs.
Ensuite, si le pouvoir du Comité des services et de l’investissement d’outrepasser les décisions du SJI répond de toute évidence aux préoccupations des États de demeurer maîtres de leurs ALEs, il s’accorde toutefois plus difficilement avec l’intention déclarée des parties signataires de transformer le RDIE traditionnel en incluant dans le SJI des garanties procédurales souvent associées aux cours nationales et internationales[200]. Non seulement ce pouvoir laisse paraître un certain manque de confiance envers les membres du SJI, mais il remet aussi en question la volonté des parties signataires de créer une cour réellement indépendante, car c’est le Comité qui aura le dernier mot sur l’interprétation de l’ALE.
Dans la même veine, la proposition semble tenir pour acquis que les membres du SJI, maintenant « réunis » dans une même instance, vont miraculeusement s’entendre sur de difficiles questions de fait et de droit, ce qui est loin d’être certain. Vu la pratique répandue de dissidences en arbitrage d’investissement, l’inclinaison de certains membres du Tribunal à faire valoir leur point de vue séparément est très probable et n’assurerait pas forcément la cohérence cherchée. La proposition s’attarde d’ailleurs peu à définir le rôle des dissidences dans le SJI ; l’ALE UE-Vietnam reconnaît simplement qu’elles sont permises, mais sans attribution à leur auteur[201].
Plus importante pour la présente caractéristique, la nature éphémère du SJI met en doute la possibilité de créer une cour et une jurisprudence unifiées. Comment ses membres devraient-ils raisonner ? Comment devraient-ils lier leur autorité à celle des autres institutions de gouvernance nationales et internationales [202]? Espère-t-on que les décideurs cessent de penser comme des avocats ? Les membres seront-ils capables de développer un éthos institutionnel ? Démontreront-ils une loyauté envers l’AECG [203]? Plusieurs facteurs institutionnels permettent de le questionner : le travail sur demande des membres, l’absence de secrétariat ou de greffier permanents[204] et l’absence de bureaux côte à côte comme l’ont souvent les juges. Tous ces éléments signifient que les membres n’auront pas nécessairement de moments où ils siègent ensemble – développant ainsi une camaraderie et une collégialité et parfois, selon les circonstances, des conflits et des frustrations – comme les juges des cours nationales et internationales.
Plus étonnement, la nature bilatérale de l’AECG impose une limite inhérente dans l’élaboration du droit. Dans sa proposition actuelle, il y aura un SJI pour chaque TBI signé par l’UE. Même si les membres parviennent à assurer la cohérence des décisions au sein de chaque accord, il restera probablement une interprétation différentielle des autres ALEs toujours en vigueur dans le RDIE traditionnel. Dans la mesure où ces différences sont rendues publiques, elles seront encore utilisées par les critiques du système pour discréditer l’idée de règlement des différends entre investisseurs et États[205]. Par exemple, plusieurs de ces critiques ne feront probablement pas la distinction entre l’AECG et le système général d’arbitrage d’investissement. Tout compte fait, le SJI ne résoudrait pas la « fragmentation »[206] du droit qui est l’une des plus virulentes critiques du RDIE traditionnel[207]. Par ailleurs, il n’est même pas clair qu’une cour multilatérale parviendrait à dispenser ces critiques vu le grand nombre d’ALEs et les différences dans la formulation de leurs articles respectifs. Sans un accord unique ou véritablement multilatéral pour régir l’arbitrage d’investissement, la cohérence et la prévisibilité souhaitée seront difficilement atteintes.
En somme, il est possible de défendre la qualification d’arbitrage du SJI. Il est basé sur le consentement bilatéral et limité des parties, il adopte l’idée d’avoir un représentant neutre sur le banc (bien que plus éloigné des parties au différend spécifique) et il est constitué de manière à rendre justice principalement pour les parties en cause plutôt que pour assurer le développement cohérent du droit dans l’arbitrage d’investissement plus largement. Il est vrai que le SJI introduit certaines nouveautés, principalement suivant le modèle de l’OMC (et du TIAR), et cristalliserait ainsi un système auparavant typiquement ad hoc en des institutions « permanentes » sur demande[208]. C’est d’ailleurs pourquoi la proposition de SJI représente un pas de plus dans l’institutionnalisation de l’arbitrage d’investissement.
B. Répondre efficacement à certaines préoccupations... mais en créer de nouvelles ?
Il est important de savoir si le SJI dans l’AECG est une instance de règlement judiciaire. Les parties signataires cherchent clairement à exploiter la légitimité de cette désignation. Peut-être qu’au final la Commission et le Canada ne se sont pas posé la bonne question. Plutôt que de mettre l’accent sur la dichotomie « arbitrage contre règlement judiciaire », ou « privé contre public », l’enjeu central aurait pu être de trouver le niveau optimal de judiciarisation en arbitrage d’investissement. Dans une contribution importante, Laurence Helfer se demande si le droit international relatif aux droits humains est devenu « overlegalized », ce qui aurait provoqué une réaction hostile de la part de certains États[209]. Des préoccupations semblables ont été soulevées par les spécialistes du droit commercial international[210].
Même si le SJI est considéré comme une cour internationale, il n’est pas clair à quel point cela sera utile étant donné le mécontentement envers les institutions internationales – et vis-à-vis l’UE en général[211]. Est-ce que l’UE souhaite vraiment créer l’équivalent d’une CJUE pour l’arbitrage investissement ? Ce n’est certainement pas le cas, surtout si cela veut dire d’élever le droit international au-dessus du droit européen. Reste que l’institutionnalisation proposée est surprenante dans un contexte où le mouvement de judiciarisation des dernières décennies s’est récemment essoufflé et où l’on voit plusieurs États en combattre vigoureusement les effets. Tel que l’écrit Fabien Gélinas, « [a]djudicative institutionalisation today is just as important as the legislative and executive aspects of institutionalisation which are so carefully avoided in treaty-making[212] ».
La proposition ambitieuse des parties signataires de l’AECG a manifestement été ébauchée dans l’optique de répondre aux inquiétudes exprimées par les États et par les organisations de la société civile par rapport au RDIE traditionnel[213]. Même s’il y a des changements importants et potentiellement bénéfiques dans la proposition, tout dépendamment du point de vue de chacun sur les défauts de l’arbitrage d’investissement[214], ces changements ne vont probablement pas assez loin[215]. En d’autres termes, autant les critiques que les partisans du RDIE trouveront des éléments qu’ils apprécient et d’autres qu’ils décrient. La proposition maintient l’arbitrage d’investissement indépendant des cours nationales (bien que moins indépendant des États). Elle prévoit un groupe de décideurs présélectionnés et des délais plus courts, ce qui devrait contribuer à la capacité des membres du SJI à rendre des décisions dans des délais raisonnables. La proposition prend également en compte et élimine certaines des préoccupations éthiques les plus flagrantes (même si quelques autres pourraient être introduites).
Bien que les efforts des parties signataires de l’AECG pour répondre aux préoccupations valables à propos du RDIE traditionnel doivent être applaudis, les préoccupations adressées et celles irrésolues suggèrent moins une philosophie globale à propos de l’arbitrage d’investissement qu’une réponse ciblée sur les points les plus sensibles du processus actuel[216]. De plus, comme c’est le cas avec toute nouvelle méthode créée dans le but de remplacer ce qui est considéré comme défectueux, elle comporte le risque de répondre efficacement à ces préoccupations tout en en créant, du même coup, de nouvelles.
Les parties signataires proposent une méthode de résolution des différends qui est unique et qui, conséquemment, n’a pas encore été mise en pratique. Le caractère limité de la proposition devrait permettre l’expérimentation[217] et la poursuite de réformes spécifiques sans modifier radicalement le régime tel qu’il existe aujourd’hui[218]. Ce qui demeure incertain encore aujourd’hui, particulièrement avec les processus de ratification nationaux en cours et les négociations sur la création d’une cour multilatérale des investissements, est de savoir si ou quand ces articles novateurs entreront en vigueur afin que le SJI puisse passer le test de la pratique.
Parties annexes
Notes
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[1]
Le Dr Garapon est un magistrat français et secrétaire général de l’Institut des Hautes Etudes sur la Justice. Il publie des ouvrages sur la justice et le droit et anime l’émission « Le bien commun » sur France culture.
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[2]
CE, Parlement européen, Le commerce pour tous : vers une politique de commerce et d’investissement plus responsable, Bruxelles, Union européenne, 2015 à la p 25 [Parlement européen, Le commerce pour tous]. Pour l’utilisation du terme « système juridictionnel public des investissements », voir CE, Commission, communiqué, « La Commission propose un nouveau système juridictionnel des investissements dans le cadre du TTIP et des autres négociations européennes sur les échanges et les investissements » (16 septembre 2015), en ligne : Union européenne <europa.eu/rapid/press-release_IP-15-5651_fr.htm>.
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[3]
La Commission des Nations unies pour le droit commercial international (ci-après CNUDCI) envisage aussi la création d’une cour permanente multilatérale des investissements, bien que cette réforme potentielle ne fasse pas – du moins pour le moment – l’unanimité parmi les diverses délégations des États : Luke Eric Peterson, « UNCITRAL Meetings on ISDS Reform Get Off to Bumpy Start, as Delegations Can’t Come to Consensus on Who Should Chair Sensitive Process », Investment Arbitration Reporter (9 décembre 2017), en ligne : IA reporter <www.iareporter.com/articles/uncitral-meetings-on-isds-reform-gets-off-to-bumpy-start-as-delegations-cant-come-to-consensus-on-who-should-chair-sensitive-process-entailing-a-rare-vote/>.
-
[4]
Accord économique et commercial global, Canada et Union européenne, 30 octobre 2016, [2017] JO L 11/23 [AECG ou CETA]. Le 21 septembre 2017, l’application provisoire de l’AECG a débuté, à l’exception du SJI : « La version réformée du SJI représente un aspect nouveau dans les accords commerciaux, qui fait toujours l’objet d’un débat public dans de nombreux États membres. Par conséquent, le choix des États membres, soutenus par la Commission, consiste à exclure le SJI du champ d’application du de l’AECG, ce qui signifie qu’il ne sera mis en oeuvre qu’une fois que tous les États membres auront achevé leurs procédures nationales de ratification » ; CE, Commission, Communiqué, « Le CETA, un accord commercial qui fixe une nouvelle norme pour le commerce mondial » (15 février 2017), en ligne : Union européenne <europa.eu/rapid/press-release_MEMO-17-271_fr.htm>. Suite à la révision juridique de l’accord, les communications publiques des signataires de l’AECG n’utilisent plus le terme « SJI », mais font maintenant plutôt référence au « mécanisme pour la résolution des différends relatifs aux investissements entre les investisseurs et les États » ; Affaires mondiales Canada, « Résumé des chapitres de l’Accord économique et commercial global » (14 juillet 2017) : Gouvernement du Canada <international.gc.ca/trade-commerce/trade-agreements-accords-commerciaux/agr-acc/ceta-aecg/chapter_summary-resume_chapitre.aspx?lang=fra>.
-
[5]
Accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Vietnam, Vietnam et Union européenne, janvier 2016 (texte convenu), en ligne : Commission européenne <trade.ec.europa.eu/doclib/press/index.cfm?id=1449> [ALE UE-Vietnam].
-
[6]
Accord de libre-échange entre l’Union européenne et Singapour, Singapour et Union européenne, avril 2018 (textes authentiques), en ligne : Commission européenne <trade.ec.europa.eu/doclib/press/index.cfm?id=961> [ALE UE-Singapour].
-
[7]
L’UE et le Mexique ont conclu, en avril 2018, un accord de principe sur la partie commerciale de l’Accord global UE-Mexique [AGUEM], incluant le nouveau SJI de l’UE : CE, Commission, New EU-Mexico agreement The Agreement in Principle and its texts, 26 avril 2018, en ligne :
Commission européenne <trade.ec.europa.eu/doclib/docs/2018/april/tradoc_156791.pdf>. Puisque le texte n’est pas encore disponible pour le public, cet accord n’est pas davantage couvert dans cet article.
-
[8]
Douglas Thomson, « ECJ to Rule on CETA Investment Court » Global Arbitration Review (6 septembre 2017), en ligne : Global arbitration review <globalarbitrationreview.com/article/1147140/ecj-to-rule-on-ceta-investment-court>; Dans son avis du 30 avril 2019, la CJUE a conclu que le règlement des différends dans l’AECG est compatible avec le droit de l’Union. Voir CJUE, Avis rendu en vertu de l’article 218, paragraphe 11, TFUE, A-1/17, [2019] EU:C:2019:341.
-
[9]
Dans le cadre des négociations de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ci-après ACEUM), le ministre mexicain de l’Économie, Ildefonso Guajardo, a noté que le pays envisageait de créer un organe permanent pour résoudre les différends entre investisseurs et États. Voir Cosmo Sanderson, « Mexico Proposes Permanent Dispute Resolution Body for NAFTA » Global Arbitration Review (30 novembre 2017), en ligne : Global arbitration review <globalarbitrationreview.com/article/1151247/mexico-proposes-permanent-dispute-resolution-body-for-nafta?utm_source=Law%20Business%20Research&utm_medium=email&utm_campaign= 8944140_GAR%20Headlines%2030%2F11%2F2017&dm_i=1KSF,5BPCC,NQEXH3,KK4AS,1>.
Les États-Unis, quant à eux, semblent réfractaires à l’alternative du SJI ou d’une cour multilatérale permanente. Voir Anthea Roberts, « UNCITRAL and ISDS Reform: Pluralism and the Plurilateral Investment Court » (12 décembre 2017), EJIL: Talk! (blogue), en ligne : <www.ejiltalk.org/uncitral-and-isds-reform-pluralism-and-the-plurilateral-investment-court/> [Roberts, « ISDS Reform »].
-
[10]
Entre autres, Shane Spelliscy, directeur et avocat général de la Direction du droit commercial d’Affaires mondiales Canada, a été nommé président du Groupe de travail III : Peterson, supra note 3. De plus, le Canada est l’un des instigateurs des récentes discussions informelles sur la création d’une cour multilatérale des investissements pour remplacer le RDIE traditionnel et les différents SJIs : Commission européenne et Gouvernement du Canada, « Discussion Paper : Establishment of a Multilateral Investment Dispute Settlement System », Genève (13 et 14 décembre 2016), en ligne : Commission européenne <trade.ec.europa.eu/doclib/docs/2017/january/tradoc_155267.12.12%20With%20date_%20Discussion%20paper_Establishment%20of%20a%20multilateral%20investment%20Geneva.pdf>.
-
[11]
Céline Lévesque, « The European Commission Proposal for an Investment Court System: Out with the Old, In with the New? » dans Armand de Mestral, dir, Second Thoughts: Investor-State Arbitration between Developed Democracies, Waterloo, Canada, Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale, 2017 à la p 60.
-
[12]
William Shakespeare, Roméo et Juliette, 1597, Acte 2, Scène 2 (« Scène du Balcon ») [traduction]. Voir Thomas Schultz et François Ost, « Shakespearean Legal Thought in International Dispute Settlement » (2018) 9:1 JIDS 1 à la p 20 (expliquant comment l’autorité du juge et de l’arbitre provient principalement des rituels symboliques entourant leurs fonctions).
-
[13]
Convention pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères, 10 juin 1958, 21 RTNU 2517 (7 juin 1959) [Convention de New York].
-
[14]
Convention pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d’autres États, 8 mars 1965, 575 UNTS 159 (14 octobre 1966) [Convention CIRDI].
-
[15]
Cet article se concentre sur des enjeux de théorie juridique et politique plutôt que sur la reconnaissance et l’exécution des sentences du SJI. À ce sujet, voir par ex August Reinisch, « Will the EU’s Proposal Concerning an Investment Court System for CETA and TTIP Lead to Enforceable Awards? – The Limits of Modifying the ICSID Convention and the Nature of Investment Arbitration » (2016) 19:4 JIEL 761 [Reinisch, « EU Proposal »]. Contra Jansen Calamita, « EU model for ISDS incompatible with ICSID Convention, argues leading academic », Global Arbitration Review (8 mars 2017), en ligne : Global arbitration review <globalarbitrationreview.com/article/1129866/eu-model-for-isds-incompatible-with-icsid-convention-argues-le-ading-academic>.
-
[16]
Voir infra, partie I.B. Pour des raisons politiques, la Commission a tenu à présenter la SJI comme un règlement judiciaire afin de répondre aux critiques publiques du RDIE traditionnel en tant que système supplantant l’autorité des cours nationales : Catherine Kessedjian et Lukas Vanhonnaeker, « Les différends entre investisseurs et États hôtes par un tribunal arbitral permanent. L’exemple du CETA » (2017) 53:4 RTD eur 633 à la p 636 (« La sémantique est importante et le vocabulaire choisi par les négociateurs nécessairement fluctuant compte tenu de la charge politique négative que revêt la référence à l’arbitrage »).
-
[17]
Jean de La Fontaine, L’Âne portant des reliques, 1668, Livre V, Fable 14.
-
[18]
Voir généralement Tania Voon et Andrew D. Mitchell, « Denunciation, Termination and Survival: The Interplay of Treaty Law and International Investment Law » (2016) 31:2 ICSID Rev 413.
-
[19]
Joshua Karton, The Culture of International Arbitration and The Evolution of Contract Law, Oxford, Oxford University Press, 2013 à la p 116. Malgré cet avantage, les arbitrages sous la Convention CIRDI nécessitent également la coopération des cours internes pour recouvrir les dommages-intérêts accordés contre un État si ce dernier refuse de se conformer à la sentence arbitrale.
-
[20]
F. A. von der Heydte, L’individu et les tribunaux internationaux, Académie de droit international de La Haye, 1962, vol 107, Leiden, Brill aux pp 287–359, 310. L’idée que l’arbitre est l’agent des parties qui l’ont nommé était valable aux 19e et 20e siècles dans le cadre de la théorie de l’organe commun. Toutefois, cette conception est largement abandonnée aujourd’hui. L’argument élaboré dans cet article est plutôt que les parties à un différend en droit international sont attachées à la possibilité de nommer l’un des décideurs dans l’affaire : voir infra, partie III.A.
-
[21]
Il est question dans la présente seulement d’arbitrage international et non pas d’arbitrage national légalement obligatoire. Gérard Cornu définit ce dernier comme « l’arbitrage auquel la loi, par exception, impose de recourir pour la solution d’un litige ». L’exemple d’arbitrage forcé le plus connu en France est celui de la Commission arbitrale des journalistes instituée par la Loi du 29 mars 1935 et l’article 761–65 du Code du travail pour déterminer les indemnités de licenciement. Or, il n’est pas traité de ces cas d’arbitrage forcé, car ils constituent de simples emprunts de régime réalisés par le législateur et appliqués à des juridictions d’exception : Vocabulaire juridique, V° Arbitrage – forcé ou obligatoire à la p 66.
-
[22]
Voir Stephan Wilske et Martin Raible, « The Arbitrator as Guardian of International Public Policy? Should Arbitrators go Beyond Solving Legal Issues? » dans Catherine A. Rogers et Roger P. Alford, dir, The Future of Investment Arbitration, Oxford, Oxford University Press, 2009 à la p 272. Même si l’arbitre international est, comme l’ont éloquemment évoqué deux éminents avocats, une « legal creature with a predominantly judicial function », son opinion ne représente – en théorie – rien de plus que celle d’un individu appelé à résoudre un différend juridique spécifique sur le plan international. Voir Tony Cole, The Structure of Investment Arbitration, New York, Routledge, 2013 à la p 147.
-
[23]
L’UE a publié sur son site Web des projets de chapitres du PTCI sur le commerce des services, l’investissement et le commerce électronique, qui comprenaient une proposition visant à créer un Tribunal et un Tribunal d’appel : voir CE, Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (proposition), novembre 2015, en ligne : Commission européenne <trade.ec.europa.eu/doclib/ docs/2015/november/tradoc_153955.pdf> [Proposition PTCI]. La proposition a été présentée pour discussion aux États-Unis et rendue publique le 12 novembre 2015.
-
[24]
ALE UE-Vietnam, supra note 5; ALE UE-Singapour, supra note 6.
-
[25]
AECG, supra note 4, s F, art 8.27 aux paras 2–3 (« Le Comité mixte de l’AECG peut décider d’accroître ou de réduire le nombre de membres du Tribunal par multiples de trois »); Proposition PTCI, supra note 23, s 3, art 9 au para 2. Il y a neuf membres du tribunal dans l’ALE UE-Vietnam (supra note 5, s 3, ss 4, art 12 au para 2) et six membres dans l’ALE UE-Singapour (supra note 6, s A., art 3.9 au para 2).
-
[26]
AECG, supra note 4, s F, arts 8.27–28.
-
[27]
Ibid, art 8.39.
-
[28]
Proposition PTCI, supra note 23, s 3, art 9 au para 12. Comparer AECG, supra note 4, s F, art 8.27 au para 12 : « Afin que leur disponibilité soit garantie, une rétribution mensuelle, dont le montant est établi par le Comité mixte de l’AECG, est versée aux membres du Tribunal » (nos italiques).
-
[29]
AECG, supra note 4, s F, art 8.27 aux paras 11 et 14; Proposition PTCI, supra note 23, s 3, art 9 au para 11.
-
[30]
Sur les arbitres nommés par les parties, voir généralement Jan Paulsson, « Appointing Arbitrators – Moral Hazard in International Dispute Resolution » (2010) 25:2 ICSID Rev 339.
-
[31]
AECG, supra note 4, s F, art 8.27 au para 5 (les mandats de membres initiaux sont d’une durée de six ans). Comparer Proposition PTCI, supra note 23, s 3, art 9 au para 5 (les termes du mandat des juges ont une durée de neuf ans).
-
[32]
Ibid, s F, art 8.27 au para 7; Proposition PTCI, supra note 23, s 3, art 9 au para 7.
-
[33]
Voir généralement Susan D. Franck, « The Legitimacy Crisis in Investment Treaty Arbitration: Privatizing Public International Law through Inconsistent Decisions » (2004) 73:4 Fordham L Rev 1521.
-
[34]
AECG, supra note 5, s 3, art 10 au para 2.
-
[35]
Ibid, s F, art 8.28 aux paras 3–5.
-
[36]
Proposition PTCI, supra note 23, s 3, art 10 au para 12. Dans l’AECG, la décision sur la rémunération des membres du Tribunal d’appel n’a pas encore été prise, mais le montant sera vraisemblablement similaire.
-
[37]
Ibid, s 3, art 10 au para 14.
-
[38]
L’AECG requiert que les membres se conforment aux Lignes directrices de l’Association internationale du barreau (« International Bar Association ») sur les conflits d’intérêts dans l’arbitrage international, alors que le Comité des services et de l’investissement adoptera ultérieurement un code de conduite pour les membres du Tribunal : supra note 5, art 8.30 au para 1 et art 8.44 au para 2. Dans la proposition du PTCI, un code de conduite était annexé au traité : supra note 23, Annexe II (« Code of Conduct for Members of the Tribunal, the Appeal Tribunal and Mediators »). Cette approche a aussi été retenue dans les deux autres accords publics : ALE UE-Vietnam, supra note 5, c 8, s 3, ss 4, art 14 au para 1; ALE UE-Singapour, supra note 6, s A, art 3.11 au para 1.
-
[39]
Voir par ex Jonathan Brosseau, « Applicable Ethical Framework » dans Stefan Kröll, Andrea K. Bjorklund et Franco Ferrari, dir, Cambridge Compendium of International Commercial and Investment Arbitration, Cambridge, Cambridge University Press, publication prévue en 2019.
-
[40]
AECG, supra note 4, s F, art 8.30 au para 1; Proposition PTCI, supra note 23, s 3, art 11 au para 1.
-
[41]
Ibid. Cette activité n’est pas explicitement interdite, mais les membres sont tenus de ne pas participer « à l’examen d’un différend qui donnerait lieu à un conflit d’intérêts direct ou indirect ». Bien que les arbitres nient avec véhémence que leur jugement soit influencé par ces considérations, ils ont en apparence des raisons financières de plaire aux avocats qui les ont nommés dans le RDIE traditionnel. Par exemple, il serait tout à fait possible que l’avocat d’une procédure devant le SJI nomme, dans une procédure contemporaine ou ultérieure devant un tribunal arbitral du RDIE traditionnel, un de ces mêmes membres comme arbitre. Cette situation pourrait potentiellement soulever des enjeux éthiques.
-
[42]
Ibid, art 8.30 au para 2; Proposition PTCI, supra note 23, s 3, art 11 aux paras 2–3.
-
[43]
Proposition PTCI, supra note 23, s 3, art 9 au para 8, et art 10 au para 6.
-
[44]
Ibid, s 3, art 9 au para 8 et art 10 au para 6; ALE UE-Vietnam, supra note 5, c 8, s 3, ss 4, art 14 au para 1; ALE UE-Singapour, supra note 6, s A., art 3.11 au para 2.
-
[45]
Ibid, s 3, art 9 aux paras 13, 16, et art 10 aux paras 13, 15.
-
[46]
Convention CIRDI, supra note 14.
-
[47]
Le CPA a été instauré par la Convention de La Haye pour le règlement pacifique des conflits internationaux de 1907, 18 octobre 1907, RT Can E3-1994/14 (entrée en vigueur : 26 janvier 1910).
-
[48]
AECG, supra note 4, s F, art 8.27 au para 16; ALE UE-Singapour, supra note 6, s A, art 3.9 au para 16.
-
[49]
ALE UE-Vietnam, supra note 5, c 8, s 3, ss 4, art 12 au para 18.
-
[50]
AECG, supra note 4, s F, art 8.23 au para 2.
-
[51]
Voir Cas Mudde, « Europe’s Populist Surge » Foreign Affairs (17 octobre 2016), en ligne : Foreign affairs <www.foreignaffairs.com/articles/europe/2016-10-17/europe-s-populist-surge>.
-
[52]
Voir par ex Corporate Europe Observatory, « No Global ISDS Court for Corporations » (14 mars 2017), en ligne : Corporate europe observatory <corporateeurope.org/international-trade/2017/03/no-global-isds-court-corporatio/ns>.
-
[53]
CE, Résolution du Parlement européen du 8 juillet 2015 contenant les recommandations du Parlement européen à la Commission européenne concernant les négociations du partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI), [2017] JO C 265/35.
-
[54]
CE, Le commerce pour tous, supra note 2 à la p 21.
-
[55]
CE, Parlement européen, Les dispositions concernant les investissements dans l’accord économique et commercial global entre l’Union européenne et le Canada (AECG), Bruxelles, Union européenne, février 2016 à la p 4 : Union européenne <trade.ec.europa.eu/doclib/docs/2013/december/tradoc_151960.pdf>.
-
[56]
CE, Commission, Multilateral Reform of Investment Dispute Resolution, SWD (2017) 302 final, 13 septembre 2017, en ligne : EUR-Lex <eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/HTML/?uri=CELEX:52017SC0302&from=EN>.
Cecilia Malström est une femme politique suédoise, présentement commissaire européenne au commerce, et anciennement commissaire européenne aux affaires intérieures et ministre des Affaires de l’Union européenne.
-
[57]
Ibid, ss 3.1, 6.2.
-
[58]
CE, Commission, AECG : l’Union européenne et le Canada s’entendent sur une nouvelle approche en matière d’investissements dans l’accord commercial, Bruxelles, 29 février 2016 : Commission européenne <trade.ec.europa.eu/doclib/press/index.cfm?id=1469&serie=1087&langId=fr>.
-
[59]
Peter Mazereeuw, « More Changes Coming to Canada-Europe Trade Deal’s Controversial Investment Court: Freeland » The Hill Times (31 octobre 2016), en ligne : The hill times <www.hilltimes.com/ 2016/10/31/changes-coming-canada-europe-trade-deals-investment-court-freeland/86011>.
-
[60]
Cecilia Malmström, « Proposing an Investment Court System » (16 septembre 2015) Commission européenne, Politiques, informations et services (blogue), en ligne : <ecuropa.eu/commission/commissioners/2014-2019/malmstrom/blog/proposing-investment-court-system_en>.
-
[61]
Philippa Webb, International Judicial Integration and Fragmentation, Oxford, Oxford University Press, 2013 aux pp 1–3.
-
[62]
Voir par ex Gary Born, « A New Generation of International Adjudication » (2012) 61:4 Duke LJ 775 (comparant une nouvelle génération de tribunaux internationaux aux organes juridictionnels traditionnels de droit public international).
-
[63]
Les contributions sur le sujet se concentrent principalement sur les points communs entre ces deux méthodes de règlement : voir par ex Alain Pellet, « Judicial Settlement of International Disputes » dans Rüdiger Wolfrum, dir, Max Planck Encyclopedia of Public International Law, Oxford, Oxford University Press, 2013 au para 25; Cesare Romano, Karen J. Alter et Shany Shany, « Mapping International Adjudicative Bodies, the Issues, and Players » dans Cesare Romano, Karen J. Alter et Yuval Shany, dir, The Oxford Handbook of International Adjudication, Oxford, Oxford University Press, 2014 à la p 4 [Oxford Handbook].
-
[64]
V.V. Veeder, « The Alexander Lecture : What Matters About Arbitration » (2016) 82:2 Arbitration: The International Journal of Arbitration, Mediation and Dispute Management 153 à la p 160. V.V. Veeder est un avocat et arbitre international anglais spécialisé, entre autres, dans le droit de l’investissement étranger, l’arbitrage international et le droit de la concurrence.
-
[65]
Ibid (« [t]here is some idea that investment arbitration, with an existing registry, can somehow be morphed with an international investment court, so as to produce the best of all possible worlds. This would, I suggest, be a grave mistake […]. Arbitration in the form of ISDS can co-exist separately with an international investment court, just as it does with state courts and other tribunals »).
-
[66]
David D. Caron, « The Nature of the Iran-United States Claims Tribunal and the Evolving Structure of International Dispute Resolution » (1990) 84:1 Am J Intl L 104 à la p 109.
-
[67]
Voir Samantha Besson, « Legal Philosophical Issues of International Adjudication » dans Oxford Handbook, supra note 63 à la p 419 (« The fact that international jurisdiction may not always be compulsory, general, and centralized merely affects the various functions of international adjudication that may be attributed in the international legal order as a whole, and not the adjudicative function itself »).
-
[68]
Philippe Couvreur, The International Court of Justice and the Effectiveness of International Law, Leiden, Brill/Nijhoff, 2016 à la p 18.
-
[69]
Charte des Nations Unies, 26 juin 1945, 1 RTNU XV (entrée en vigueur : 24 octobre 1945), art 33 au para 1 [Charte].
-
[70]
Ibid, art 36 au para 3 (« d’une manière générale, les différends d’ordre juridique devraient être soumis par les parties à la Cour internationale de Justice conformément aux dispositions du Statut de la Cour »).
-
[71]
Andreas Zimmermann et al, The Statute of the International Court of Justice: A Commentary, 2e éd, Oxford, Oxford University Press, 2012 à la p 676.
-
[72]
Tel que l’ont justement noté d’éminents praticiens, il n’y a pas de définition universellement adoptée de l’arbitrage : Gabrielle Kaufmann-Kohler et Antonio Rigozzi, International Arbitration : Law and Practice in Switzerland, 3e éd, Oxford, Oxford University Press, 2015 aux pp 1–6.
-
[73]
Convention de New York, supra note 13, art I au para 2 et art V.
-
[74]
Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 19 décembre 1966, 999 RTNU 171, art 14 [PIDCP].
-
[75]
Convention de Vienne sur le droit des traités, 23 mai 1969, 1155 RTNU 331 (entrée en vigueur : 27 janvier 1980), arts 31–32 [Convention de Vienne]. Voir aussi Institut international pour l’unification du droit privé (Unidroit), Principes relatifs aux contrats du commerce international, 2016, aux arts 4–5 [Principes Unidroit]. Le Handbook on the Peaceful Settlement of Disputes Between States, préparé par le Secrétariat de l’ONU à la demande de l’Assemblée générale, épouse la structure de la Charte, développant la distinction entre l’arbitrage et le règlement judiciaire : OLA/COD/2394, New York, Nations Unies, 1992 aux pp 55–80 (« Arbitral tribunals […] are essentially of an ad hoc nature, and are composed of judges selected on the basis of parity by the parties to a dispute who also determine the procedural rules and the law applicable to the case concerned. International courts and tribunals, by contrast, are pre-constituted inasmuch as they are permanent judicial organs whose composition, jurisdictional competence and procedural rules are predetermined by their constitutive treaties » à la p 66) [Handbook on Peaceful Settlement].
-
[76]
Convention des Nations unies sur le droit de la mer, 10 décembre 1982, 1834 RTNU 3 (entrée en vigueur : 16 novembre 1994), art 287 [CNUDM] (permettant le recours au Tribunal international du droit de la mer, à la CIJ, à un tribunal arbitral, ou à un tribunal arbitral spécial).
-
[77]
Gary Born, International Commercial Arbitration, Alphen aan den Rijn, Kluwer Law International, 2014 à la p 50 (notre traduction) [Born, International Commercial Arbitration].
-
[78]
Bryan A. Garner, dir, Black’s Law Dictionary, St Paul, Minnesota, Thomson Reuters, 2014 à la p 433 (notre traduction).
-
[79]
Voir Gérard Chabot, « Un tribunal arbitral conventionnel ne constitue pas une juridiction au sens de l’article 234 CE », Commentaire (2015) n° 24 La Semaine Juridique Edition Générale (décrivant une acceptation substantielle de la justice). Voir aussi infra, n° 92.
-
[80]
François Terré, « Juges ou arbitres, ils disent tous qu’ils rendent la justice. S’ils la rendent, c’est qu’ils l’ont prise. A qui et pourquoi ? » : Justice étatique et justice arbitrale, présenté devant la Chambre du Commerce et de l’Industrie, 24 septembre 1997, en ligne : Association française d’arbitrage <www.afa-arbitrage.com/afa/uploads/2016/08/Manifestation-1997-Justice_arbitrale_et-_justice_etatique_par_Francois_Terre.pdf>.
-
[81]
Pellet, supra note 63 au para 25.
-
[82]
Handbook on Peaceful Settlement, supra note 75 à la p 55; Gabrielle Kaufmann-Kohler et Michele Potest, Can the Mauritius Convention Serve as a Model for the Reform of Investor-State Arbitration in Connection with the Introduction of a Permanent Investment Tribunal or an Appeal Mechanism?: Analysis and Roadmap, Genève, Center for International Dispute Settlement, 2016 au para 86. À noter, les États ne sont pas habilités à créer des instances juridiques en violation des règles impératives (jus cogens) du droit international : Hugh Thirlway, The Law and Procedure of The International Court of Justice: Fifty Years of Jurisprudence, Oxford, Oxford University Press, 2013 à la p 693.
-
[83]
Voir Alexandra Huneeus, « Compliance with Judgments and Decisions » dans Oxford Handbook, supra note 63 à la p 437.
-
[84]
Cour internationale de justice, 18 avril 1946, art 59 [Statut CIJ]; Convention CIRDI, supra note 14, aux arts 53–54; CNUDM, supra note 76, annexe VI, art 33; AECG, supra note 4, s F, art 8.27.
-
[85]
CJUE, République slovaque c Achmea, Demande de décision préjudicielle formée par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne), C-284/16 [2017], ECR I-699 au para 89. La CJUE s’est positionnée dans cette affaire sur la compatibilité d’un traité bilatéral d’investissement (ci-après TBI) intra-UE avec le droit de l’UE (Jugement [2018] au paras 58–59). Selon une interprétation restrictive ou minimaliste de la décision, la Cour aurait seulement déterminé que les TBIs intra-UE contenant des clauses étendues de droit applicable sont incompatibles avec l’ordre juridique de l’UE, car ils ont un effet négatif sur l’autonomie du droit communautaire. Selon une interprétation extensive ou large, la CJUE aurait définitivement écarté la compatibilité des procédures d’arbitrage d’investissement intra-UE avec le droit de l’UE, concluant que tous les TBIs intra-UE sont incompatibles avec l’ordre juridique de l’Union; Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, 25 novembre 1957, JO C, 326/47 (entré en vigueur : 1er janvier 1958) [TFUE]. Voir aussi Committee on the Rule of Law and International Investment Law, Rapport préliminaire de la Conférence de Sydney, Association de droit international, Sydney, août 2018 aux pp 27–28 (Andrea K. Bjorklund et Andreas R. Ziegler, corapporteurs), en ligne : International law association <www.ila-hq.org/images/ILA/DraftReports/DraftReport_Investment_RuleofLaw.pdf>.
-
[86]
Christian Tomuschat, « Article 33 » dans Bruno Simma et al, The Charter of the United Nations: A Commentary, 3e éd, I, Oxford, Oxford University Press, 2012 au para 31.
-
[87]
James Crawford, Brownlie’s Principles of Public International Law, 8e éd, Oxford, Oxford University Press, 2012 à la p 720 (notes de bas de page omises). La transformation de plusieurs systèmes spécialisés de droit international ressemble d’ailleurs à celui du RDIE traditionnel par les SJIs : voir infra, partie III.A.
-
[88]
Romano, Alter et Shany, supra note 63 aux pp 3–5. Voir aussi Couvreur, supra note 68 à la p 18 (« Notwithstanding the general considerations and objectives pursued by establishing a permanent judicial institution, the judicial settlement of international disputes involves several rules and procedures drawn from arbitral practice »).
-
[89]
Stephen J. Toope, Mixed International Arbitration: Studies in Arbitration Between States and Private Persons, Cambridge, Grotius, 1990 à la p 385.
-
[90]
Christine Gray et Benedict Kingsbury, « Developments in Dispute Settlement: Inter-State Arbitration Since 1945 » (1993) 63:1 Brit YB Intl L 97 à la p 98.
-
[91]
Voir par ex Lucy Reed, « International Dispute Resolution Courts: Retreat or Advance? », Brierley Lecture 2017, présentée à l’Université McGill, 12 septembre 2017 [non publiée] (présentant les caractéristiques de la nouvelle Singapore International Commercial Court).
-
[92]
Les ALEs, à l’instar d’autres accords internationaux, représentent un moyen par lequel les États mettent en valeur leur souveraineté; ils sont le résultat de la négociation de droits et obligations juridiques entre les États pour les investisseurs étrangers : voir Tarcisio Gazzini, « States and Foreign Investment: A Law of the Treaties Perspective » dans Shaheeza Lalani et Rodrigo Polanco Lazo, dir, The Role of the State in Investor-State Arbitration, Leiden, Brill/Nijhoff, 2015. Voir aussi Kessedjian et Vanhonnaeker, supra note 16 (« La caractéristique la plus importante [de l’arbitrage d’investissement], mais également la plus critiquée, est l’élévation de l’investisseur — un acteur privé — au même niveau que l’État – un acteur public »).
-
[93]
CJE, Dorsch Consult Ingenieurgesellschaft mbH c Bundesbaugesellschaft Berlin mbH, C-54/96, [1997] ECR I-4983 au para 23. Encore une fois, la jurisprudence de la CJE – aujourd’hui la CJUE – sur la qualification de juridiction des tribunaux arbitraux relève du droit communautaire, et non pas du droit international.
-
[94]
Stephan W. Schill, « W(h)ither Fragmentation? On the Literature and Sociology of International Investment Law » (2011) 22:3 Eur J Intl L 875 [Schill, « Fragmentation »].
-
[95]
En droit international public, le « consentement à être lié » est un terme technique « connoting the acceptance by a State that it is bound by a treaty ». Voir John P. Grant et J. Craig Barker, Encyclopaedic Dictionary of International Law, 3e éd, Oxford, Oxford University Press, 2009, s « consent to be bound ». Cette notion est ancrée et davantage définie dans les articles 11–15 et 17 de la Convention de Vienne, supra note 75. En droit commercial international, le consentement est compris sous son angle contractuel, soit que « [l]es parties sont libres de conclure un contrat et d’en fixer le contenu » : Principes Unidroit, supra note 75, art 1.1 (« Liberté contractuelle »).
-
[96]
Il est question de la relation des parties, c’est-à-dire du « Qui? ». Voir Andrea Marco Steingruber, Consent in International Arbitration, Oxford, Oxford University Press, 2012 au para 5.79. Ce spectre n’est pas seulement théorique; il a également des incidences concrètes. Par exemple, dans le cas d’un accord plurilatéral, où un nombre restreint d’États ont un intérêt particulier dans l’objet de l’accord, la possibilité d’une réserve est plus limitée que dans un accord multilatéral. Ce principe de droit international coutumier est codifié par l’article 20, paragraphe 2, de la Convention de Vienne : « Lorsqu’il ressort du nombre restreint des États ayant participé à la négociation, ainsi que de l’objet et du but d’un traité, que l’application du traité dans son intégralité entre toutes les parties est une condition essentielle du consentement de chacune d’elles à être liée par le traité, une réserve doit être acceptée par toutes les parties » (supra note 75).
-
[97]
Il est question de l’objet du litige, c’est-à-dire du « Quoi? ». Voir Born, International Commercial Arbitration, supra note 77 à la p 222 (« a further distinguishing characteristic of arbitration is that an arbitral tribunal is ordinarily selected […] for a specific dispute or category of disputes ») (nos italiques).
-
[98]
Besson, supra note 67 à la p 419.
-
[99]
Romano, Alter et Shany, supra note 63 aux pp 5–6. Le principe de société démocratique fondée sur l’État de droit repose également, bien que de manière plus indirecte, sur la notion de consentement des personnes : voir Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social: ou Principes du droit politique, Paris, Garnier Frères, 1960 [1762].
-
[100]
Caron, supra note 66 à la p 109.
-
[101]
Pour les États, leur consentement est toujours requis en droit international avant qu’ils se soumettent à la compétence d’une instance juridique. Néanmoins, « international adjudication has evolved in some fields and regions to the point that adjudication is often compulsory » (Romano, Alter et Shany, supra note 63 à la p 7). Bien que le terme « contraignabilité » soit un néologisme, il traduit une position très ancienne et solidement enracinée dans l’approche positiviste du droit international.
-
[102]
Voir Jonathan Law, dir, A Dictionary of Law, 9e éd, Oxford, Oxford University Press, 2018. La compétence obligatoire représente « [t]he capacity of an international tribunal to order and thus compel states to litigate a dispute before it ».
-
[103]
Romano, Alter et Shany, supra note 63 aux pp 5–6; Statut de Rome de la Cour pénale internationale, 17 juillet 1998, 2187 RTNU, art 12 au para 1 [Statut CPI] (« Un État qui devient Partie au Statut accepte par là même la compétence de la Cour à l’égard des crimes visés à l’article 5 »). Contra Reinisch, « EU Proposal », supra note 15 à la p 766. La compétence de ces cours internationales fait évidemment pâle figure en comparaison aux cours en droit interne : voir par ex Loi sur les tribunaux judiciaires, RLRQ c T-16, art 2 (« Les compétences de la Cour d’appel, de la Cour supérieure et de la Cour du Québec sont générales et s’étendent à tout le Québec »).
-
[104]
Statut CIJ, supra note 84, art 36 au para 2 (les différends d’ordre juridique peuvent avoir pour objet : « a. l’interprétation d’un traité; b. tout point de droit international; c. la réalité de tout fait qui, s’il était établi, constituerait la violation d’un engagement international; d. la nature ou l’étendue de la réparation due pour la rupture d’un engagement international »).
-
[105]
Caron, supra note 66 à la p 109.
-
[106]
Convention de New York, supra note 13, art II au para 2 (« [c]hacun des États contractants reconnaît la convention écrite par laquelle les parties s’obligent à soumettre à un arbitrage tous les différends ou certains des différends qui se sont élevés ou pourraient s’élever entre elles au sujet d’un rapport de droit déterminé, contractuel ou non contractuel, portant sur une question susceptible d’être réglée par voie d’arbitrage »). Voir aussi Franz Schwarz, « Limits of Party Autonomy in International Commercial Arbitration » dans Christina Knahr et al, dir, Investment and Commercial Arbitration: Similarities and Divergences, 3e éd, coll International Commerce and Arbitration, Utrecht, Pays-Bas, Eleven International, 2010 à la p 47 (expliquant comment une plus grande autonomie des parties dans l’élaboration de la procédure est considérée comme une caractéristique de l’arbitrage par rapport au règlement judiciaire).
-
[107]
Kaufmann-Kohler et Potestà, supra note 82 au para 93. Sur l’arbitrage interétatique, voir Caron, supra note 66 à la p 111 (« [I]nternational law leaves the structuring and conduct of the arbitration entirely in the control of the parties »).
-
[108]
Gary Born, International Commercial Arbitration, Austin, Wolters Kluwer Law & Business, 2009 à la p 219. M. Born émet cette observation concernant l’arbitrage commercial international seulement; il ne se prononce pas sur l’importance (ou non) du consentement en droit international public général.
-
[109]
CNUCED, Investment Policy Hub, en ligne : International investment agreements navigator <investmentpolicyhub.unctad.org/IIA>.
-
[110]
Jan Paulsson, « Arbitration Without Privity » (1995) 10:2 ICSID Rev 232. Voir aussi Convention CIRDI, supra note 14, art 25 au para 1 : « La compétence du Centre s’étend aux différends d’ordre juridique entre un État contractant (ou telle collectivité publique ou tel organisme dépendant de lui qu’il désigne au Centre) et le ressortissant d’un autre État contractant qui sont en relation directe avec un investissement et que les parties ont consenti par écrit à soumettre au Centre. Lorsque les parties ont donné leur consentement, aucune d’elles ne peut le retirer unilatéralement » (nos italiques).
-
[111]
Steingruber, supra note 96 au para 15.23 (« in investment arbitration—like in commercial arbitration—the attempt to emancipate arbitration from a State justice system is clear and unavoidable »).
-
[112]
Ousmane Diallo, Le consentement des parties à l’arbitrage international, Paris, Presses universitaires de France, 2010 (décrivant le consentement comme facteur de légitimation par excellence de l’arbitrage international).
-
[113]
Le TIAR impliquait un élément de contrainte, puisque les demandeurs américains n’avaient pas d’autre choix que de consentir à poursuivre leurs demandes devant le Tribunal s’ils voulaient être compensés et se voyaient interdire, en droit interne, d’intenter ou de poursuivre des actions devant les tribunaux américains : Accords d’Alger, déclaration du gouvernement, 19 janvier 1981, principe général B, art 11, en ligne : Pars time <www.parstimes.com/history/algiers_accords.pdf>; É-U, Reagan Executive Order (n° 12294), 24 février 1981, en ligne : US department of treasury <home.treasury.gov/> (mettant en oeuvre les dispositions des Accords d’Alger aux États-Unis, en ordonnant que les réclamations pendantes des Américains contre l’Iran devant les tribunaux américains soient suspendues et déférées au TIAR); Dames & Moore c Regan, 453 US 654 [1981] (confirmant l’autorité du président d’émettre cet ordre). Sur le consentement des États-Unis au nom de leurs citoyens dans le cas du TIAR, voir Andrea K. Bjorklund, « Reconciling State Sovereignty and Investor Protection in Denial of Justice Claims » (2005) Va J Intl L 809 aux pp 885–86 [Bjorklund, « Denial of Justice Claims »].
-
[114]
Guy Canivet, Mads Tønnesson Andenaes et Duncan Fairgrieve, dir, Independence, Accountability, and the Judiciary, Londres, British Institute of International and Comparative Law, 2006 (notant, dans leur étude comparative en droit interne, que la relation entre les pouvoirs de nomination et la responsabilité judiciaire est largement reconnue).
-
[115]
Romano, Alter et Shany, supra note 63 à la p 5.
-
[116]
Thomas Hobbes, Leviathan. With selected variants from the Latin edition of 1668, Indianapolis, Hackett, 1994, ch XXVI.
-
[117]
Robert J. Pushaw, « The Inherent Powers of Federal Courts and the Structural Constitution » (2001) 86:3 Iowa L Rev 735 aux pp 810–14.
-
[118]
En fait, la plupart des juges américains sont nommés, mais certains États américains continuent d’élire leurs juges; voir par ex Texas Election Code, 69th leg, ch 211, s 32 (entrée en vigueur : 1er janvier 1986), en ligne : <www.statutes.legis.state.tx.us/Docs/SDocs/ELECTIONCODE.pdf>.
-
[119]
Constitution française, 4 octobre 1958, arts 13 et 65. Voir aussi Ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, en ligne : <egifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000339259#LEGISCTA000006118274>.
-
[120]
Loi sur les juges, LRC C-1985, c J-1.
-
[121]
Statut CPI, supra note 103, art 36.
-
[122]
Statut CIJ, supra note 84, arts 4–10.
-
[123]
Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 4 novembre 1950, 213 RTNU 221, art 22 (entrée en vigueur : 3 septembre 1953) [Convention européenne des droits de l’homme].
-
[124]
Chiara Giorgetti, « Who Decides in International Investment Arbitration? » (2013) 35:2 U Pa J Intl L 431 à la p 463 (élaborant comment « [the] nominations of judges in international courts ares not simple, apolitical processes »). Sur les négociations concernant l’attribution des voix pour les élections, voir Ofer Eldar, « Vote-Trading in International Institutions » (2008) 19:1 Eur J Intl L 3; Ruth Mackenzie et al, Selecting International Judges: Principle, Process, and Politics, Oxford, Oxford University Press, 2010 aux pp 122–28.
-
[125]
Romano, Alter et Shany, supra note 63 à la p 5 (« The adjudicators are selected, elected, or nominated through a mechanism that does not depend on the will of the litigating parties »).
-
[126]
Cesare Romano, « The Price of International Justice » (2005) 4:2 Law & Prac Intl Cts & Trib 281 à la p 281. Par exemple, les budgets de l’OMC et de la CPI, portés par les États membres de ces institutions, sont assez importants et ne cessent d’augmenter : Voir Eduardo Zuleta, « The Challenges of Creating a Standing International Investment Court » dans Jean E. Kalicki and Anna Joubin-Bret, dir, Reshaping the Investor-State Dispute Settlement System, Leiden, Brill/Nijhoff, 2015.
-
[127]
Romano, Alter et Shany, supra note 63 à la p 5 (« Since the parties select the members of arbitral bodies, the mandate of arbitrators is circumscribed to administering “private justice” »).
-
[128]
Kaufmann-Kohler et Rigozzi, supra note 72 à la p 6.
-
[129]
Gary Born, International Arbitration and Forum Selection Agreements: Drafting and Enforcing, 4e éd, Alphen aan den Rijn, Kluwer Law International, 2013 aux pp 1–15.
-
[130]
Charles Jarrosson, La notion d’arbitrage, Paris, Librairie générale de droit et de jurisprudence, 1987 à la p 103. Malgré tout, concrètement, les arbitres sont souvent d’anciens hauts gradés du gouvernement à la retraite : Sergio Puig, « Social Capital in the Arbitration Market » (2014) 25:2 Eur J Intl L 387. Voir par ex Jonathan Brosseau, « From Canadian Minister to International Arbitrator: The Oral History of Marc Lalonde » (2016) 6:1 J Arb & Med 73.
-
[131]
Alec Stone Sweet et Florian Grisel, The Evolution of International Arbitration: Judicialization, Governance, Legitimacy, Oxford, Oxford University Press, 2017 à la p 27 (« The arbitrator owes [her] obligations foremost to those who pay her: the parties »).
-
[132]
Sophie Nappert, « Escaping from Freedom? The Dilemma of an Improved ISDS Mechanism », The 2015 EFILA Inaugural Lecture, présentée à Londres, 26 novembre 2015 à la p 10, en ligne : European Federation for Investment Law and Arbitration <efila.org/wp-content/uploads/2015/11/Annual_lecture_ Sophie_Nappert_full_text.pdf>.
-
[133]
Christine M. Chinkin, Third Parties in International Law, Oxford, Oxford University Press, 1993 aux pp 120–23.
-
[134]
Charles Brower et Charles B. Rosenberg, entre autres, affirment qu’il s’agit d’un élément fondamental à la légitimité de l’arbitrage international : « The Death of the Two-Headed Nightingale: Why the Paulsson-Van den Berg Presumption that Party-Appointed Arbitrators are Untrustworthy is Wrongheaded » (2013) 29:1 Arb Intl 7. Voir aussi Alan Scott Rau, « On Integrity In Private Judging » (1998) 14:2 Arb Intl 115 (notant la « widely shared conviction that the ability to participate in the selection of arbitrators is critical to fairness » et que « to many […] the right to choose one member of the panel is the “very essence of arbitration” »).
-
[135]
Karl-Heinz Böckstiegel, « Commercial and Investment Arbitration: How Different Are They Today? – The Lalive Lecture 2012 » (2012) 28:4 Arb Intl 577 à la p 582 : « Some have suggested that, in view of such difficulties, all three arbitrators should be appointed by an institution. I do not agree with that proposal. One of the major reasons for the parties to agree on arbitration is that they have an influence to select judges of their own confidence. This cannot be replaced by an institution which cannot have the same detailed knowledge of all relevant circumstances of the particular case at hand at the beginning of the procedure ».
-
[136]
C. F. Amerasinghe, « Mixed International Arbitrations: Studies in Arbitration between States and Private Persons. By Stephen J. Toope. Grotius. Cambridge, 1990 » (1992) 7:1 ICSID Rev 290 à la p 290.
-
[137]
Accords d’Alger, supra note 113, règlement des réclamations, art III au para 1.
-
[138]
Michael E. Schneider, « President’s Message: Forbidding Unilateral Appointments of Arbitrators – A Case of Vicarious Hypochondria? » (2011) 29:2 ASA Bulletin 273 (« The basic paradigm in arbitration as we know it is for each party to appoint its arbitrator and for the two then to appoint a chairperson. The model has worked seemingly well for decades if not centuries »); Fabien Gélinas, « The Independence of International Arbitrators and Judges: Tampered with or Well-Tempered? » (2011) 24:1 NY Intl L Rev 1 à la p 28 [Gélinas, Independence] (« The party appointment system has emerged out of long-established and widely shared practices across the whole spectrum of adjudicative configurations »).
-
[139]
Dans la doctrine, le critère de permanence traite couramment du statut de l’instance juridique comme étant une fin en soi. L’argument ici est plutôt que la temporalité de l’instance engendre une conséquence importante, c’est-à-dire qu’elle détermine sa fonction – public ou privée – dans son régime respectif. Bien évidemment, toute règle de droit appartient nécessairement à un système juridique (Joseph Raz, The Concept of a Legal System: An Introduction to the Theory of a Legal System, Oxford, Clarendon, 1980, ch VII). Sans prendre position dans le débat sur la théorie des systèmes (« systems theory ») et la constitutionnalisation du droit international, il demeure que les cours régionales et internationales façonnent fondamentalement le régime juridique dans lequel elles évoluent par leur rôle fonctionnel même si elles ne sont pas véritablement « centralisées ». Sur le système général de droit international public et les systèmes spécialisés en droit international, voir Commission du droit international, Fragmentation of International Law: Difficulties arising from the Diversification and Expansion of International Law: Report of the Study Group, Doc off AGNU, 58e sess, Doc NU A/CN4/L682 (2006) (président Martti Koskenniemi) [Koskenniemi, Fragmentation].
-
[140]
Reinisch, « EU Proposal », supra note 15 à la p 766 (« Usually, the distinctive element is exactly the permanency […]: Judges are appointed for a certain period of time and for an undefined number of disputes, whereas arbitrators are appointed by the disputing parties for a specific dispute »).
-
[141]
Romano, Alter et Shany, supra note 63 à la p 5.
-
[142]
C’est le cas des tribunaux fédéraux américains : voir Vicki C. Jackson, « Packages of Judicial Independence: The Selection and Tenure of Article III Judges » (2006) 95:4 Geo LJ 965 aux pp 986–96.
-
[143]
C’est le cas des juges des tribunaux supérieurs et fédéraux et de la Cour suprême au Canada : voir R c Lippé, [1991] 2 RCS 114; Renvoi relatif à la rémunération des juges de la Cour provinciale (Î.-P.-É.), [1997] 3 RCS 3.
-
[144]
Les juges sont nommés pour neuf ans avec possibilité de réélection à la CIJ (Statut CIJ, supra note 84, art 13). Les juges sont également nommés pour neuf ans à la CPI, mais son Statut interdit la réélection (Statut CPI, supra note 103, art 36 au para 9). Après de longues délibérations, le consensus qui s’est dégagé était que les juges de la CPI ne devraient pas être rééligibles en raison de sa particularité en tant que tribunal pénal : Medard R. Rwelamira, « Composition and Administration of the Court » dans Roy S. K. Lee, dir, The International Criminal Court: The Making of the Rome Statute-Issues, Negotiations, Results, La Haye, Kluwer Law International, 1999 aux pp 156–57.
-
[145]
La possibilité de recourir aux Chambres constituées en vertu de l’article 26, paragraphe 2 (chambres ad hoc), a parfois été contestée par certains juges. Voir par ex Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Salvador c Honduras), Ordonnance, [1990] CIJ Rec 1 à la p 18 (opinion dissidente de M. le juge Shahabuddeen).
-
[146]
Convention de New York, supra note 13, art I au para 2.
-
[147]
Reinisch, « EU Proposal », supra note 15 à la p 767.
-
[148]
W. Laurence Craig, William W. Park et Jan Paulsson, International Chamber of Commerce Arbitration, 3e éd, Dobbs Ferry, New York, Oceana, 2000 au para 12.02.
-
[149]
Wilske et Raible, supra note 22.
-
[150]
Stephan W. Schill, « International Arbitrators as System-Builders » (2012) 106 Am Socy Intl L Proc 295 à la p 296 (« international arbitrators do not function simply as Montesquieuan bouches de la loi, who passively apply pre-existing legal rules to the facts of the cases. Rather, international arbitrators contribute significantly to making the rules and principles governing international economic transactions both private and public. This suggests that they operate in an increasingly public system of international arbitration that goes much beyond the settlement of individual disputes and that involves important elements of law-making in the transnational legal realm »).
-
[151]
Cole, supra note 22 à la p 147.
-
[152]
Par exemple, le tribunal de Glamis Gold a conclu que la « jurisprudence » des ALEs a convergé avec le droit international coutumier concernant la règle du traitement juste et équitable, alors que dans Merrill & Ring, la sentence pose une approche à deux scénarios concernant cette règle, avec une norme apparaissant dans le contexte des droits de l’homme et une autre dans le contexte commercial : Glamis Gold, Ltd c É-U, CNUDCI, (8 juin 2009) sentence finale au para 609; Merrill & Ring Forestry LP c Canada, CNUDCI, (31 mars 2010) administré par le CIRDI, sentence aux paras 201–10.
-
[153]
Voir généralement Karl P. Sauvant, dir, Appeals Mechanism in International Investment Disputes, Oxford, Oxford University Press, 2008.
-
[154]
Albert Jan van den Berg, « Dissenting Opinions by Party-Appointed Arbitrators in Investment Arbitration » dans Mahnoush H. Arsanjani, dir, Looking to the Future: Essays on International Law in Honor of W. Michael Reisman, Leiden, Martinus Nijhoff, 2010 à la p 821; Alan Redfern, « The 2003 Freshfields Lecture: Dissenting Opinions in International Commercial Arbitration: The Good, the Bad and the Ugly » (2004) 20:3 Arb Intl 223. Contra Gabrielle Kaufmann-Kohler, « Arbitral Precedent: Dream, Necessity or Excuse? The 2006 Freshfields Lecture » (2007) 23:3 Arb Intl 357.
-
[155]
Romano, supra note 126 à la p 281. Voir aussi Webb, supra note 61 aux pp 1–3.
-
[156]
Romano, Alter et Shany, supra note 63 à la p 5. La définition de cour internationale du Black’s Law Dictionary, précitée, met l’accent sur l’« autorité jurisprudentielle » de cette instance : Garner, supra note 78 à la p 433.
-
[157]
W. Michael Reisman, Systems of Control in International Adjudication and Arbitration: Breakdown and Repair, Durham, Duke University Press, 1992 à la p 11 (expliquant que le TIAR « processes both public and commercial international matters »).
-
[158]
George H. Aldrich, The Jurisprudence of the Iran-United States Claims Tribunal, Oxford, Oxford University Press, 1996 à la p 43. Examiné sous un angle macrosociologique, il apparaît que même un régime décentralisé comme celui de l’arbitrage d’investissement développera éventuellement une certaine cohérence interne (Andrea K. Bjorklund, « Investment Treaty Arbitral Decisions as Jurisprudence Constante » dans Colin Picker, Isabella D. Bunn et Douglas W. Arner, dir, International Economic Law: The State and Future of The Discipline, Oxford, Hart, 2008 à la p 265), bien que ce processus s’étirera vraisemblablement sur plusieurs années et au prix de certaines décisions potentiellement discutables.
-
[159]
Statut CIJ, supra note 84, art 59.
-
[160]
H. W. A. Thirlway, The International Court of Justice, Oxford, Oxford University Press 2016 à la p 133.
-
[161]
Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c Serbie, Exceptions préliminaires, Arrêt, [2008] CIJ Rec 15 à la p 412 au para 53 [Croatie c Serbie].
-
[162]
Couvreur, supra note 68 à la p 19.
-
[163]
Handbook on Peaceful Settlement, supra note 75 à la p 67 (« owing to the same characteristic as permanent institution, an international court such as the International Court of Justice appears to be better suited for developing uniform jurisprudence of international law than ad hoc arbitral tribunals »).
-
[164]
R. P. Anand, « The Role of Individual and Dissenting Opinions in International Adjudication » (1965) 14:3 ICLQ 788 à la p 793 (« Law is not static. It grows, and a dissenting opinion, by acting as a useful commentary on the decision of the Court, aids that development. Apart from the fact that several times by revealing certain facts not covered by the judgment it helps in a better understanding of what the Court intends, it sometimes influences the shaping and sometimes the altering of the course of law »).
-
[165]
Nappert, supra note 132.
-
[166]
Lévesque, supra note 11 à la p 61.
-
[167]
August Reinisch, « The European Union and Investor-State Dispute Settlement: From Investor-State Arbitration to a Permanent Investment Court » dans Armand de Mestral, dir, Second Thoughts: Investor-State Arbitration between Developed Democracies, Waterloo, Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale, 2017 à la p 351.
-
[168]
Kessedjian et Vanhonnaeker, supra note 16 à la p 634.
-
[169]
Jan Wouters et Nicolas Hachez, « The Institutionalization of Investment Arbitration and Sustainable Development » dans Marie-Claire Cordonier Segger, Markus W. Gehring et Andrew P. Newcombe, dir, Sustainable Development in World Investment Law, Alphen aan den Rijn, Kluwer Law International, 2011.
-
[170]
Stone Sweet et Grisel, supra note 131, ch 1. Voir généralement Benedict Kingsbury, Nico Krisch et Richard B. Stewart, « The Emergence of Global Administrative Law » (2005) 68:3 Law & Contemp Probs 15.
-
[171]
Yves Dezalay et Bryant G. Garth, Dealing in Virtue: International Commercial Arbitration and the Construction of a Transnational Legal Order, Chicago, University of Chicago Press, 1996, ch 1.
-
[172]
Stone Sweet et Grisel, supra note 131, ch 1.
-
[173]
Laura Puccio et Roderick Harte, De l’arbitrage au système juridictionnel des investissements : L’évolution des règles de l’AECG, Union européenne, Service de recherche pour les députés, 2017 à la p 1 (« Le SJI est inspiré de l’organe d’appel de l’Organisation mondiale du commerce […] sur le plan de la sélection ainsi que de la rémunération des juges ») (notre traduction).
-
[174]
Kaufmann-Kohler et Potestà, supra note 82 au para 98.
-
[175]
AECG, supra note 4, s F, art 8.23 au para 2; ALE UE-Vietnam, supra note 5, ch 8, s 3, ss 4, art 7 au para 2.
-
[176]
Ibid, art 8.22 (« Exigences procédurales et autres exigences relatives au dépôt d’une plainte devant le Tribunal »); ALE UE-Singapour, supra note 6, s A, art 3.7 (établissant de nombreuses conditions à la présentation d’une réclamation).
-
[177]
Accord de libre-échange nord-américain, Canada, États-Unis et Mexique, 17 décembre 1992, RT Can 1994 n° 2, arts 1116–17 (entrée en vigueur : 1er janvier 1994) [ALENA].
-
[178]
Traité sur la Charte de l’énergie, 17 décembre 1994, 2080 UNTS 95; 34 ILM 360 (1995), art 26 au para 1 (entrée en vigueur: 16 avril 1998) [TCE].
-
[179]
Voir par ex Accord de libre échange entre la Chine et le Pérou, art 139 (entrée en vigueur : 1er mars 2010), en ligne : Organisation mondiale de la propriété intellectuelle <ipo.int/wipolex/fr/details.jsp?id=12394>.
-
[180]
Zachary Douglas, The International Law of Investment Claims, Cambridge, Cambridge University Press, 2009 aux pp 234–35.
-
[181]
En droit interne, plusieurs restrictions s’appliquent au recours contre les États étrangers, notamment relativement à leurs immunités juridictionnelles : voir par ex Convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens, Doc off AGNU, 59e sess, annexe, A/RES/59/38 (2004) 2. Voir aussi Bjorklund, « Denial of Justice Claims », supra note 113 aux pp 820–25.
-
[182]
Kaufmann-Kohler et Potestà, supra note 82 au para 88.
-
[183]
Comparer ibid au para 98 (préférant le consentement comme caractéristique déterminante de l’arbitrage); avec Nappert, supra note 132 (mettant l’emphase plutôt sur la sélection des décideurs).
-
[184]
Proposition PTCI, supra note 23, s 3, art 9 au para 2. Dans le cas de l’AECG, le financement effectif du SJI reste encore à décider.
-
[185]
En arbitrage international, Martin Hunter résume dans une formule bien connue les considérations qui jouent dans la sélection des décideurs, notant que l’arbitre idéal nommé par une partie est « someone with the maximum predisposition towards my client, but with the minimum appearance of bias ». Voir « Ethics of the International Arbitrator » (1987) 53 Arbitration 219 à la p 223. Dans le SJI, même si les États nommeront en amont unilatéralement les membres du Tribunal et du Tribunal d’appel, ni ces États ni les investisseurs étrangers ne pourront choisir après la naissance d’un différend leurs décideurs en fonction de leurs prédispositions concernant les faits et règles de droit applicables.
-
[186]
AECG, supra note 4, s F, art 8.39 au para 5. Voir aussi ALE UE-Vietnam, supra note 5, ch 8, s 3, ss 4, art 27 au para 4.
-
[187]
Jan Paulsson, The Idea of Arbitration, Oxford, Oxford University Press aux pp 153–54.
-
[188]
Mackenzie et al, supra note 124 à la p 165 (« Geographical representation is one important means by which selective representation courts acquire and retain their legitimacy, therefore states expect that they will have the opportunity to have a judge of their nationality on the bench, and, as we have seen from the interview data on nomination and election, they will often fight to get it »).
-
[189]
Même si tel est l’objectif, il est peu probable que le représentant de l’UE soit issu de l’État membre qui accueille l’investisseur étranger et dont la mesure est contestée. Cela a moins d’importance si c’est une mesure de l’UE qui est en cause, mais si c’est une mesure de l’UE et d’un État membre dont il est question, il n’y aura alors pas automatiquement de représentant « local » sur le banc.
-
[190]
Convention CIRDI, supra note 14, arts 38–39. On avance même que les juges de la même nationalité que les parties à une affaire devraient en être récusés dans le contexte d’une cour multilatérale d’investissement future. Voir Omar E. García-Bolívar, « Permanent Investment Tribunals: The Momentum is Building Up » (2014) 11:1 TDM 394.
-
[191]
Gélinas, « Independence », supra note 138 à la p 29.
-
[192]
Proposition PTCI, supra note 23, s 3, art 9 au para 5.
-
[193]
AECG, supra note 4, s F, art 8.44 au para 2.
-
[194]
Proposition PTCI, supra note 23, s 3, art 10 au para 12.
-
[195]
Ibid, s 3, art 29 au para 1.
-
[196]
Voir, entre autres, Anna Joubin-Bret, « The Growing Diversity and Inconsistency in the IIA System » dans Sauvant, supra note 153 à la p 137.
-
[197]
Voir, entre autres, Giorgio Sacerdoti et Matilde Recanati, « From Annulment to Appeal in Investor-State Arbitration: Is the WTO Appeal Mechanism a Model? » dans Jorge Alberto Huerta-Goldman, Antoine Romanetti et Franz X. Stirnimann, dir, WTO Litigation, Investment Arbitration, and Commercial Arbitration, Alphen aan den Rijn, Wolters Kluwer Law & Business, 2013 à la p 327 (répondant à la question titulaire généralement positivement).
-
[198]
Croatie c Serbie, supra note 161 au para 53.
-
[199]
Jacques Werner, « Limits of Commercial Investor-State Arbitration: The Need for Appellate Review » dans Pierre-Marie Dupuy, Francesco Francioni et Ernst-Ulrich Petersmann, dir, Human Rights in International Investment Law and Arbitration, Oxford, Oxford University Press, 2009 à la p 117 (mettant en avant que « [s]ince the WTO has instituted an Appellate Body, the decisions have greatly gained in respectability and hence acceptability. This is certainly the way to go [in investment arbitration] »).
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[200]
Panagiotis A. Kyriakou, « Does the TTIP Investment Court System Promote the Rule of Law Further than the Traditional ISDS Model? » (12 mai 2016), Cambridge International Law Journal (blogue), en ligne : <cilj.co.uk/2016/05/12/ttip-investment-court-system-promote-rule-law-traditional-isds-model/> (« the proposal envisages the possibility of binding treaty interpretations offered by the TTIP member-states, even pending a dispute. This brings up unpleasant memories from the Pope & Talbot saga, which tested NAFTA’s prospectivity »). En effet, il est à se questionner si cette possibilité enfreint le principe de non-rétroactivité des lois, qui serait une norme impérative du droit international (jus cogens). Voir Anthea Roberts, « Power and Persuasion in Investment Treaty Interpretation: The Dual Role of States » (2010) 104 Am J Intl L 179 à la p 202.
-
[201]
ALE UE-Vietnam, supra note 5, ch 8, s 3, ss 4, art 12 au para 12.
-
[202]
Ingo Venzke, « Investor-State Dispute Settlement in TTIP from the Perspective of a Public Law Theory of International Adjudication » (2016) 17:3 JWIT 374 à la p 396.
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[203]
La professeure Webb suggère que trois aspects affectent la capacité d’une instance juridique d’intégrer ou de fragmenter le droit international : l’identité, la procédure et le fond (supra note 61 aux pp 147–201). Le SJI obtient une faible note sur chacun de ses aspects.
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[204]
AECG, supra note 4, s F, art 8.27 au para 16. Voir aussi ALE UE-Vietnam, supra note 5, ch 8, s 3, ss 4, art 12 au para 18.
-
[205]
Marie Talašová et Jaroslav Kudrna, « There’s “no alternative” to investment arbitration, says Schreuer » Global Arbitration Review (22 décembre 2017), en ligne : Global arbitration review <globalarbitrationreview.com/article/1151619/theres-no-alternative-to-investment-arbitration-says-schreuer?utm_source=Law%20Business%20Research&utm_medium=email&utm_campaign=9015054_GAR%20Headlines%2022%2F12%2F2017&dm_i=1KSF,5D826,NQEXH3,KQWTS,1> (« Schreuer said the idea of a permanent court only makes sense if it is multilateral. A multitude of bilateral investment courts would lead to a “hypertrophic international bureaucracy” including hundreds of judges who may never see a case. It would also not address the “fragmentation of practice” that is one of the criticisms of the current ISDS system. A “centralised” judicial institution would create a “take it or leave it” situation. “I suspect quite a few countries would opt for ‘leave it’”, he added »).
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[206]
Pour aller plus loin sur le concept, voir Koskenniemi, Fragmentation, supra note 141.
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[207]
Schill, « Fragmentation », supra note 94.
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[208]
Gus Van Harten, « Is It Time to Redesign or Terminate Investor-State Arbitration? » (11 avril 2017) CIGI (blogue), en ligne : Centre pour l’innovation dans la gouvernance international <www.cigionline.org/articles/it-time-redesign-or-terminate-investor-state-arbitration> (avançant que la création d’une cour multilatérale « would proceed with a major expansion of foreign investor protections by institutionalizing them at the multilateral level »).
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[209]
Laurence R. Helfer, « Overlegalizing Human Rights: International Relations Theory and the Commonwealth Caribbean Backlash against Human Rights Regimes » (2002) 102:7 Colum L Rev 1832.
-
[210]
Voir par ex Judith Goldstein et Lisa L. Martin, « Legalization, Trade Liberalization, and Domestic Constituents: A Cautionary Note » (2000) 54:3 Intl Org 603; Joost Pauwelyn, « The Transformation of World Trade » (2005) 104:1 Mich L Rev 1.
-
[211]
Selon un sondage commandé par la Commission, soixante pour cent des Européens « ont tendance à ne pas faire confiance » à l’UE : CE, Commission, Eurobaromètre standard 79 printemps 2012, L’opinion publique dans L’Union européenne, premiers résultats, 2013, en ligne : Union européenne <ec.europa.eu/commfrontoffice/publicopinion/archives/eb/eb79/eb79_first_fr.pdf>.
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[212]
Fabien Gélinas, « Investment Tribunals and the Commercial Arbitration Model: Mixed Procedures and Creeping Institutionalization » dans Markus W. Gehring et Marie-Claire Cordonier Segger, dir, Sustainable Development in World Trade Law, La Haye, Kluwer Law International, 2005 à la p 590.
-
[213]
Voir par ex Pia Eberhardt et Cecilia Olivet, Profiting from Injustice: How Law Firms, Arbitrators and Financiers are Fuelling an Investment Arbitration Boom, Bruxelles/Amsterdam, Corporate Europe Observatory et Transnational Institute, 2012; Natacha Cingotti et al, Investment Court System Put to the Test, Amsterdam, Corporate Europe Observatory, 2016.
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[214]
Kessedjian et Vanhonnaeker, supra note 16 aux pp 640–55; Venzke, supra note 202 aux pp 387–99; Andrea K. Bjorklund, « The Legitimacy of the International Centre for Settlement of Investment Disputes » dans Harlan Grant Cohen et al, dir, Legitimacy and International Courts, Cambridge, Cambridge University Press, 2018,.
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[215]
Van Harten, supra note 208; David Schneiderman, « A CETA Investment Court Is Not the Solution » The Globe and Mail (24 mars 2017), en ligne : The globe and mail <www.theglobeandmail.com/report-on-business/rob-commentary/a-ceta-investment-court-is-not-the-solution/article29034167>.
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[216]
Voir généralement Robert W. Schwieder, « TTIP and the Investment Court system: A New (and Improved?) Paradigm for Investor-State Adjudication » (2016) 55:1 Colum J Transnat’l L 178 aux pp 193–208.
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[217]
Roberts, « ISDS Reform », supra note 9 (« Given the diversity of views of ISDS reform, and the likely reality of pluralism for many decades to come, it makes sense for states and institutions like ICSID, the OECD, UNCTAD and UNCITRAL to be looking at identifying and developing a range of incremental and systemic ISDS reform options. Some of these reforms might be best pursued bilaterally and others multilaterally. Some might be more suited to the UNCITRAL process and others less so. States are yet to make those decisions, but framing the options through the lens of pluralism is helpful in identifying the spectrum of reform options and the range of fora that might be involved »).
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[218]
Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement, « Reform of the IIA Regime: Four Paths of Action and a Way Forward » (juin 2014), en ligne : CNUCED <unctad.org/en/PublicationsLibrary/webdiaepcb2014d6_en.pdf>.