Recensions

Michèle Rioux, Christian Deblock et Laurent Viau, dir, L’ALENA conjugué au passé, au présent et au futur, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2015[Notice]

  • Adèle Mauthès

Diplômée de la maîtrise en science politique, politique internationale et droit international, à l’Université du Québec à Montréal.

L’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) a récemment célébré son vingtième anniversaire. À l’époque de sa signature, l’ALENA était véritablement un précurseur des accords de libre-échange et a inspiré une panoplie d’autres accords commerciaux internationaux. Vingt ans plus tard, le modèle est critiqué ; l’intégration économique en Amérique du Nord est limitée et dépassée par des modèles d’intégration positive qui correspondent mieux au monde interconnecté d’aujourd’hui. Dirigé par Michèle Rioux, professeure au Département de science politique de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et directrice du Centre d’études sur l’intégration et la mondialisation (CEIM), Christian Deblock, professeur titulaire au Département de science politique de l’UQAM et chercheur au CEIM, et Laurent Viau, titulaire d’une maîtrise en science politique de l’UQAM, l’ouvrage se veut un rassemblement d’études du modèle de régionalisme de l’Amérique du Nord. Des chercheurs de tous les horizons ont été mis à contribution ; les enjeux non seulement économiques, mais sociaux, politiques et juridiques sont couverts par la dizaine d’auteurs du livre. Au moment où l’ALENA est en renégociations à la demande du président américain, la lecture de cet ouvrage collectif s’avère éclairante et nécessaire. L’ALENA conjugué au passé, au présent et au futur s’inscrit dans la logique développée par Rioux et Deblock dans leurs divers ouvrages, c’est-à-dire que l’ALENA est un modèle d’intégration qui n’est plus conséquent aujourd’hui. Le livre est divisé en quatre parties où on étudie tour à tour des enjeux propres à l’ALENA. La première partie de l’ouvrage jette les bases théoriques des accords régionaux. Christian Deblock s’intéresse aux raisons qui poussent les États vers le régionalisme plutôt que vers le multilatéralisme. Il souligne les arguments économiques et politiques et retient surtout que le régionalisme s’explique par le besoin des États de s’inscrire dans la globalisation et de protéger leurs objectifs stratégiques, dont le commerce est partie intégrante. Ces arguments permettent ainsi d’expliquer l’adhésion des États-Unis à l’ALENA ; le bilatéralisme est moins désavantageux que la fermeture des frontières et représente une première étape vers un marché complètement ouvert. Au chapitre 2, Deblock analyse la politique commerciale américaine selon les approches réaliste et libérale. Son étude lui permet d’affirmer que les deux approches ont une vision similaire, voire même complémentaire, du régionalisme, qui permet de lier les États en eux et, ainsi, d’assurer leur sécurité. La seconde partie porte un regard plus précis sur le modèle d’intégration des Amériques et cherche à en expliquer l’émergence et le déclin. Dorval Brunelle et Christian Deblock postulent d’abord que le libre-échange entre les États-Unis et le Canada est inévitable et s’étonnent du temps qu’il aura fallu pour parvenir à un accord, au vu des relations serrées entre les deux pays. Deux paradoxes caractérisent cependant les relations commerciales canado-américaines : d’un côté, l’ouverture des frontières qui bénéficie surtout au Canada, et de l’autre, l’étonnement suscité par l’accord, étant donné une relative absence de politique commerciale intérieure au Canada. Malgré ces incohérences, l’accord de libre-échange canado-américain est apparu comme la seule solution au déclin de l’économie canadienne et à l’émergence de l’option indépendantiste au Québec. Les chapitres suivants s’intéressent plus particulièrement aux relations canado-mexicaines. Michèle Rioux et Christian Deblock avancent que les deux pays ont signé l’accord afin d’accéder au marché américain et de relancer leur économie, alors que les États-Unis souhaitaient plutôt retrouver une position de force dans l’économie mondiale. Afef Benessaieh, Marie-Paule L’Heureux et Christian Deblock postulent que les relations entre le Canada et le Mexique se sont réchauffées sous l’ALENA et grâce à leur collaboration pour assurer leurs intérêts respectifs et mutuels face au géant américain. …

Parties annexes