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Réguler l’économie : l’apport des organisations patronales, Dirigé par Danièle Fraboulet, Michel Margairaz et Pierre Verrus (2016) Rennes : Presses universitaires de Rennes, Coll. Pour une histoire du travail, 340 pages. ISBN : 978-2-7535-4757-5[Notice]

  • Yasmine Mohamed

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  • Yasmine Mohamed
    Doctorante, Département des relations industrielles, Université Laval

Ce livre est le fruit d’un programme de recherche pluridisciplinaire et internationale, mené pendant sept ans, sur les organisations patronales en Europe. Il analyse le rôle des organisations patronales dans la régulation économique et financière en Europe durant les 19e et 20e siècles. Plusieurs questions inspirent cet ouvrage, mais la question principale s’avère la suivante : « De quelle manière les organisations patronales ont participé à la modification du contenu, de la hiérarchie et du poids relatif des règles ? ». Les réponses à ce questionnement se trouvent dans 28 chapitres, regroupés en deux grandes parties et rédigés par plusieurs mains. La première partie examine la régulation économique par l’État et par le marché, alors que la deuxième partie aborde la régulation économique par branche et par secteur. Avant de commencer, il est intéressant de souligner que la définition d’organisation patronale utilisée par les auteurs est large. Certaines organisations sont des associations, par exemple, la Société industrielle de Mulhouse, tandis que d’autres constituent des cartels, tel le Cartel des peigneurs de laine de Roubaix-Tourcoing. Il y est mentionné, également, que l’Association italienne des hôteliers a réduit les coûts de production à travers la régulation du « marché du travail » et a adopté un système de prix transparent qui a permis de réduire la concurrence par la publicité des prix. En effet, le rôle de l’État est plus déterminant en Italie qu’en Suisse, et ceci est lié au système politique de ce pays qui est plus centralisé. Le livre aborde aussi des questions intéressant les spécialistes en relations du travail. Plusieurs contributions portent sur le travail des enfants, le travail de nuit, la santé et la sécurité au travail, et le dialogue social. Par exemple, en 1827, la Société industrielle de Mulhouse (SIM) a proposé la règlementation du travail des enfants. Toutefois, la réaction de l’État ne fut pas rapide. En 1833, la SIM revenait à la charge en présentant une proposition plus concrète grâce à un rapport qui se concentrait sur l’aggravation du mal en raison de l’extension du machinisme et du remplacement croissant des adultes par des enfants dans les ateliers. Par la suite, la SIM a présenté un projet de loi prévoyant l’interdiction du travail des enfants de moins de huit ans, ainsi que la fixation d’une durée maximale de la journée de travail à huit heures par jour. Les industriels mulhousiens souhaitaient que leurs initiatives deviennent obligatoires pour tous. Toutefois, Stoskopf relève la contradiction des discours et des pratiques lorsqu’il s’agit d’appliquer les mesures sur les deux principales activités à Mulhouse, soit la filature et l’indiennerie : « Ce que veulent les industriels de la SIM, c’est la philanthropie obligatoire pour tous, mais pas au-delà de ce qu’exige le fonctionnement de l’industrie ». La réflexion sur le rôle des organisations patronales a traversé l’Atlantique. Laroche a examiné le cas d’une association québécoise, Réseau Trans-Al, qui a influencé également la régulation économique à travers sa participation au règlement des aspects sociaux du travail. Cette association a été créée afin de répondre aux problèmes collectifs des entrepreneurs du secteur de la transformation de l’aluminium. Toutefois, elle a évolué sans cesse dans le temps pour s’adapter aux différentes transformations institutionnelles et juridiques. De facto, le champ d’action du Réseau Trans-Al était d’abord limité au niveau régional, toutefois, avec le temps, l’association est devenue un acteur légitime au niveau provincial, connu pour sa capacité à évoluer et à modifier son environnement institutionnel. Elle est maintenant un acteur de premier rang dans la mise en place de mesures relatives à la formation, à l’innovation et au développement technologique dans …