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Les jeunesses au travail : regards croisés France-Québec, Sous la direction de Christian Papinot et Mircea Vultur, Québec : Presses de l’Université Laval, 2010, 336 p., ISBN : 978-2-7637-9089-3; ISBN-PDF : 9782763710891.[Notice]

  • Jonas Masdonati

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  • Jonas Masdonati
    Université Laval

Cet ouvrage est le résultat de nombreux échanges que les auteurs ont entretenus, depuis 2004, au sujet de l’insertion professionnelle des jeunes au Québec et en France. Le défi de proposer des contributions s’attaquant de manière croisée à ces réalités fort différentes est de taille, comme le soulignent d’ailleurs, dans l’introduction, Christian Papinot et Mircea Vultur. Les directeurs de ce collectif posent d’abord les jalons de ce qu’est, aujourd’hui, la jeunesse au travail, en relevant notamment son allongement et la désynchronisation des seuils d’entrée dans la vie adulte. Les jalons sont aussi posés quant à la vision des jeunes adoptée dans l’ouvrage : d’une part, ils sont considérés comme des acteurs de leur destinée, mais des acteurs dont la liberté est sujette à des contraintes imposées par le contexte socioéconomique; d’autre part, la catégorie « jeunesse » varie selon la société et le moment historique. Ceci porte les auteurs à proposer une analyse des effets sociétaux qui différencient les jeunesses au Québec et en France, ce qui constitue un bon point d’ancrage pour les 12 chapitres du livre. La structure de l’ouvrage est très logique : il est composé de six parties, chacune proposant deux chapitres sur un même thème, le premier du point de vue de la France, le deuxième du point de vue du Québec. La première partie questionne de manière générale la problématique de l’insertion professionnelle des jeunes. Dans un texte particulièrement éclairant, José Rose nous renseigne sur les principaux effets de l’émergence de nouveaux statuts d’emploi et sur l’essor du travail précaire. L’auteur illustre aussi le rôle des partenaires de l’insertion dans ce processus, bien qu’une de ces logiques d’acteurs (celle du jeune) ne soit pas très approfondie. Il propose également des réflexions sur l’évolution souhaitable des politiques de formation et sur la nécessité d’appréhender la catégorie « jeunesse » en termes de génération. Il en découle une définition de l’insertion professionnelle centrée sur la question des changements « d’état [de scolaire à actif], d’espace social [de l’école à l’entreprise], et de pratiques [de la formation à l’activité productive] » (p. 38). Dans le deuxième chapitre, Richard Legris, Guylaine Baril et Catherine Ouellet présentent une vue d’ensemble de la situation des 15-29 ans au Québec. On constate notamment une présence croissante des jeunes sur le marché du travail, des taux de chômage sensibles à la conjoncture, des salaires inférieurs à la moyenne et une augmentation de la fréquentation scolaire et du travail à temps partiel. Ce chapitre comporte des analyses moins poussées que le premier, ce qui invite à la prudence face aux conclusions proposées. La prise en considération d’autres variables, comme le statut socioéconomique et l’origine des jeunes, aurait vraisemblablement fait émerger un portrait moins positif. Dans la deuxième partie sont abordés les phénomènes de l’allongement des études et de la surqualification. La situation française est décrite dans le chapitre 3 où Pierre Merle fait état de l’existence d’un lien entre diplôme, accès à l’emploi et qualité de l’insertion, mais aussi de variations de ce lien suivant, entre autres, la rareté du diplôme et la conjoncture. Ces constatations sont d’ailleurs révélatrices d’une tendance à l’affaiblissement relatif du rendement du diplôme pour l’insertion. La remise en question de la théorie du capital humain et la mise en évidence de déterminismes sociaux dans l’accès à l’emploi constituent la force de ce texte, en dépit d’un langage parfois trop technique. Dans le quatrième chapitre, Mircea Vultur aborde ce même phénomène, cette fois-ci au Québec. Il en vient à constater des tendances somme toute comparables à la France, montrant que le diplôme est aujourd’hui une condition nécessaire mais pas …