Résumés
Résumé
La croissance de la proportion des travailleurs indépendants au sein de la main-d’oeuvre, ainsi que les nouvelles caractéristiques de ces travailleurs, expliquent sans doute qu’on ait vu naître des associations vouées à leur promotion, à leur défense ou à leur représentation. L’objectif de cet article est d’analyser l’action collective organisée mise en oeuvre par des associations regroupant des travailleurs indépendants, du point de vue des logiques d’action qu’elles introduisent et des nouvelles règles qu’elles contribuent à créer dans le champ des relations industrielles. Après avoir exposé le cadre analytique et la méthodologie de recherche, nous présentons et illustrons cinq logiques d’action idéal-typiques : entrepreneuriale, syndicale classique, syndicale élargie, professionnelle et des normes minimales universelles.
Chacune de ces logiques introduit dans le champ des relations industrielles un nouveau problème ou une nouvelle réalité, qu’il s’agisse de travailleurs indépendants pour lesquels une entité, qui n’a pas le statut légal d’employeur, contrôle des pans importants de la prestation de travail, de travailleurs mobiles qui font affaire avec plusieurs donneurs d’ouvrage, voire exercent plusieurs métiers; de travailleurs professionnels qui évoluent hors de l’orbite du système qui régule les professions reconnues, et finalement de travailleurs précaires, faussement désignés comme autonomes.
Chacune mobilise une identité particulière, qui souvent diffère des identités traditionnelles en relations industrielles. Chacune finalement intervient au moins partiellement pour transformer les règles du jeu. Si certaines plaident pour le maintien ou du renforcement des règles actuelles, qui définissent le travailleur indépendant comme un entrepreneur, d’autres favorisent l’extension à certains groupes de travailleurs indépendants de la protection offerte aux salariés par les lois du travail, alors que d’autres encore promeuvent la mise en place de nouvelles règles, visant la négociation à l’échelle sectorielle de conditions minimales de travail pour des entrepreneurs indépendants.
D’autres recherches seraient nécessaires pour mieux appréhender l’impact de ces nouveaux acteurs et de ces nouvelles règles sur les conditions de travail des indépendants, sur les acteurs traditionnels du champ des relations industrielles et sur le modèle de représentation collective.
Mots-clés :
- acteurs collectifs,
- représentation collective,
- identité,
- travailleurs autonomes,
- travailleurs indépendants
Abstract
Growing proportion of self-employed in the workforce and new characteristics of those workers explain the setting up of associations dedicated to their promotion, defence or representation. The aim of this article is to analyze the organized collective action implemented by associations representing self-employed workers, in terms of their logics of action and new rules they help to create in the field of industrial relations. After outlining the analytical framework and research methodology, the article presents and illustrates five ideal-typical logics of action : entrepreneurial, “classical” union, “enlarged” union, professional and universal minimum standards.
Each of these strategies introduces in the field of industrial relations a new problem or a new reality : self-employed for which an entity that has no legal status of employer controls significant portions of the performance of work; mobile workers contracting with several owners, even performing several occupations; professional workers who operate outside the orbit of the system that regulates recognized professions; precarious workers, falsely designated as autonomous.
Each mobilizes a particular identity, which often differs from traditional identities in industrial relations. Each is at least partially aimed at transforming the institutional rules, by promoting changes in the legislation or some form of bargaining with “labour deployers.” While some argue for maintaining or strengthening existing rules, which define the self-employed as an entrepreneur, others favour the extension to certain groups of self-employed of the protection afforded to employees by labour legislation, while others promote the establishment of new rules aimed at bargaining sector-wide minimum conditions of work for independent contractors.
Further research is needed to better understand the impact of these new actors and new rules on self-employed working conditions, on the traditional actors in the field of industrial relations and on the model of collective representation.
Keywords:
- collective actors,
- workers representation,
- identity,
- self-employed workers,
- independent workers
Resumen
El crecimiento de la proporción de trabajadores independientes dentro de la mano de obra, así que las nuevas características de estos trabajadores, explican que se vea la emergencia de asociaciones orientadas a la promoción, defensa y representación de los :trabajadores independientes. El objetivo de este artículo es analizar la acción colectiva organizada empleada por las asociaciones que agrupan los trabajadores independientes, desde el punto de vista de las lógicas de acción introducidas por ellas y de las nuevas reglas que dichas asociaciones contribuyen a crear en el campo de las relaciones industriales. Después de exponer el marco analítico y la metodología de investigación, presentamos e ilustramos cinco lógicas de acción ideal-tipo : empresarial, sindical clásica, sindical amplia, profesional y de normas mínimas universales.
Cada una de estas lógicas introduce un nuevo problema o una nueva realidad en el campo de las relaciones industriales : que se trate (a) de trabajadores independientes por los cuales una entidad que no tiene el estatuto legal de empleador controla partes importantes de la prestación de trabajo; (b) de trabajadores móviles que contractan con varios contratistas de obra o que ejercen varios oficios; (c) de trabajadores profesionales que evolucionan fuera de la órbita del sistema que regula las profesiones reconocidas; o, finalmente, (d) de trabajadores precarios, erróneamente designados como autónomos.
Cada lógica moviliza una identidad particular que muy seguido difiere de las identidades tradicionales en las relaciones industriales. Cada una interviene, al menos en parte, para transformar las reglas de juego. Si algunas de ellas solicitan el mantenimiento o el reforzamiento de reglas actuales que definen el trabajador independiente como un empresario, otras favorecen que ciertos grupos de trabajadores independientes beneficien de la protección acordada a los asalariados por las leyes laborales; mientras que otras identidades promueven la implantación de nuevas reglas con mira a la negociación a nivel sectorial de condiciones mínimas de trabajo para los empresarios independientes.
Nuevas investigaciones serian necesarias para captar mejor el impacto de estos nuevos actores y de estas nuevas reglas sobre las condiciones de trabajo de los independientes, sobre los actores tradicionales del campo de relaciones industriales y sobre el modelo de representación colectiva.
Palabras clave:
- actores colectivos,
- representación colectiva,
- identidad,
- trabajadores autónomos,
- trabajadores independientes
Parties annexes
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