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Les nouveaux cadres du dialogue social : Europe et territoires, Sous la direction de Annette Jobert, Bruxelles : Peter Lang, 2008, 267 p., ISBN 978-90-5201-444-9.[Notice]

  • Frédéric Hanin

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  • Frédéric Hanin
    Université Laval

L’ouvrage dirigé par Annette Jobert sur les nouveaux cadres du dialogue social est issu d’un travail collectif de recherche réalisé en 2004-2005 pour le Commissariat Général du Plan. Il est constitué de quatre chapitres principaux qui explorent, dans une diversité de contextes, les enjeux du dialogue social au niveau européen et au niveau territorial. Les chapitres peuvent être lus à peu près indépendamment les uns des autres, l’introduction et la conclusion permettant d’approfondir les enjeux d’ensemble liés à la question du dialogue social. Les textes de l’ouvrage cherchent ainsi à caractériser l’évolution du dialogue social en Europe, et plus particulièrement en France, en croisant deux dimensions en pleine transformation : le niveau européen avec principalement les comités d’entreprise européens et le niveau territorial avec les régulations locales du travail et de l’emploi qui se sont développées notamment dans le contexte de la décentralisation des pouvoirs administratifs de l’État. Trois hypothèses ont guidé les recherches sur les nouveaux cadres du dialogue social. La première hypothèse est que « la pertinence de l’espace de la négociation collective et du dialogue social dépend moins de l’objet de ce dialogue [...] que de la capacité des acteurs collectifs à se structurer dans cet espace et à y engager une action collective » (p. 15). Le premier chapitre du livre traite à travers trois situations, en Allemagne, en France et en Italie, des initiatives des acteurs syndicaux pour se saisir de l’occasion que représente la mise en oeuvre de nouvelles régulations territoriales pour construire une action collective. Malgré la conclusion plutôt négative des auteurs sur cette capacité, les expériences décrites sont très enrichissantes pour repenser les formes de l’action collective syndicale. La seconde hypothèse est que « les nouvelles scènes du dialogue social n’enrichissent pas simplement la négociation collective mais déterminent une reconfiguration de ses cadres traditionnels » (p. 16). Le chapitre 3 sur la configuration européenne de la branche des télécommunications propose une analyse très fine des implications du cadre européen de la régulation sur les entreprises françaises. Tous les cadres du dialogue social sont alors en reconfiguration : la contribution de l’activité économique à la notion d’intérêt général, la régulation étatique du secteur, l’organisation industrielle du secteur, le contenu de la négociation collective (avec notamment le thème de la mobilité sociale), la définition d’un métier, la gestion des retraites, les stratégies patronales et syndicales. Le thème de l’européanisation du dialogue social devient alors un prélude à une plongée dans les nouveaux « mondes » du travail et les sources possibles de régulation, qu’elles soient qualifiées ou non de traditionnelles. La troisième hypothèse de recherche est que « la diversification des sources de régulation engendre inévitablement des tensions et des conflits entre organisations, entre normes et entre territoires que des constructions juridiques s’efforcent de limiter » (p. 16). Le chapitre 2 sur les territoires et les branches sous le Front populaire permet de bien situer les constructions juridiques dont les acteurs contemporains du dialogue social ont hérité et dont ils s’inspirent souvent comme idéal-type. Cela va du contrat collectif qui régule l’accès local à un métier, aux décrets qui fixent des normes minimales du travail, en passant par la « législation contractuelle » qui réglemente le travail sur des sujets précis à partir d’ententes entre les acteurs collectifs, ou encore le dispositif d’extension par l’État des conventions collectives. Tous ces dispositifs juridiques visent ainsi à réguler les conflits et les tensions dans le monde du travail, qui sont nombreux à l’époque, et peuvent connaître des prolongements politiques importants. La qualité de l’analyse des matériaux historiques permet également de bien comprendre les enjeux sociaux des …