Résumés
Abstract
The industrial relations system at Magna International is an example of an integrated, coherent, non-union human resource management strategy. It includes significant mechanisms of worker voice and conflict resolution as substitutes for union representation. Potential labour-management conflicts associated with Taylorized labour processes are often translated into group problem-solving. Redistributive conflicts are re-framed as mutual gains through profit-sharing. Corporate communications promote an ethos of competitiveness. Individualized pay and promotion schemes, segmented internal labour markets, and the exposure of individual plants to competitive pressures, promote cultures of labour cooperation in the pursuit of productivity gains. The success of this union avoidance model is situated in a context of the erosion of unionized labour relations, the disciplinary effects of precarious labour markets, and the vulnerability of workplaces to transnational competitive forces. Continued success is predicated on Magna’s ability to survive sectoral and macroeconomic restructuring forces which are, in large measure, beyond management’s control.
Résumé
Magna International, avec un chiffre d’affaires de 22 milliards de dollars, passe pour le fournisseur le plus diversifié au monde dans l’industrie de l’automobile et emploie 82 000 personnes dans 224 usines, réparties dans 21 pays. Au Canada, avec ses 22 000 employés dans 61 usines, Magna est l’employeur le plus important dans le secteur de l’automobile. Son succès repose en grande partie sur sa stratégie de relations du travail, qui demeure presque totalement sans syndicat. Son habileté à tenir le syndicalisme à distance réside dans son modèle de gestion des ressources humaines, qui comprend des mécanismes d’expression des salariés et de solution de conflit, jouant un rôle de substitut aux fonctions syndicales de représentation et de règlement des griefs. Jusqu’à un important degré, les désaccords sur la productivité du travail et du contrôle managérial sont transformés en problèmes susceptibles d’être résolus entre les travailleurs. Le modèle de Magna inclut une politique de rétribution en termes de compensation monétaire, de promotion et de sécurité d’emploi, qui prend en compte les attitudes positives des travailleurs à l’endroit des objectifs de productivité et de qualité. Les cultures de réciprocité patronale-syndicale dans les usines sont enrichies par un réseau corporatif décentralisé, où chaque usine fonctionne comme un « centre de profit » quasi indépendant.
Au Canada, Magna établit ses usines dans des marchés du travail semi-périphériques, où les salaires et la sécurité d’emploi sont faibles et où le coût de la vie est raisonnable quand on le compare à celui des régions urbaines. Il faut ajouter que cette entreprise recrute un grand nombre d’immigrants. Ces politiques de marché du travail ont contribué à l’élaboration d’un modèle sans syndicat de gestion des ressources humaines fort, cohérent, compliqué. C’est là un modèle qui cadre bien avec le type actuel de relations en l’absence de syndicat et qui prend de l’ampleur en mettant l’accent sur la culture d’entreprise, sur des systèmes de communication à l’échelle de l’entreprise, sur des équipes de travail bien encadrées, des taux de salaires au-dessus de la moyenne, des arrangements salariaux flexibles et des cheminements de carrière individualisés. Ce modèle est influencé par la contrainte croissante du marché du travail et de la concurrence qui s’ensuit pour des emplois entre les travailleurs et qui s’intensifie.
En cherchant à connaître les raisons qui ont permis au procès de travail hautement taylorisé d’éviter la syndicalisation chez Magna, alors que la plupart des autres usines de fabrication d’autos au Canada, aux États-Unis et au Royaume-Uni sont syndiquées, cet essai soulève un certain nombre d’enjeux pour l’avenir du syndicalisme. Dans le modèle de Magna, les travailleurs vont se tourner vers la direction plutôt que vers les syndicats ou les partis politiques pour se donner « un refuge dans un monde sans âme ». Dans la mesure où des variantes du modèle de Magna deviennent de plus en plus typiques, cela indique un déclin des caractéristiques clefs des relations patronales-syndicales qu’on retrouvait au coeur de la politique ouvrière au Canada et ailleurs après la Seconde Guerre mondiale. Le démantèlement actuel de l’accord légitimant le syndicalisme d’après-guerre et l’affaiblissement de l’autonomie de l’économie nationale qui lui servait de fondement ont favorisé l’apparition d’une nouvelle phase de « firme-providence » et de syndicalisme d’entreprise. Magna personnifie ce modèle d’un retour aux bonnes manières envers les « bons travailleurs ». Ce modèle veut remplacer la coercition par la persuasion, les relations du travail formelles par les relations humaines, la rémunération sur une base collective par un régime de rétribution individualisée.
Le problème principal que pose ce modèle à la politique ouvrière est le lieu du pouvoir. Les principales contraintes qui, de plus en plus, viennent encadrer la subordination des travailleurs résident dans les pressions de la concurrence transnationale, qu’elles soient réelles ou non. Ces contraintes, qui se voient renforcies par la présence de l’Accord de libre-échange nord-américain, de l’Organisation mondiale du commerce, et d’un éventail d’accords commerciaux bilatéraux, ne peuvent être traitées de manière efficace sur les lieux mêmes du travail. Tout en s’affichant comme une hyper-décentralisation des relations du travail au niveau de l’usine, le modèle de Magna se présente à la fois comme un symptôme et une cause d’un effritement de la politique ouvrière. Les racines de la décentralisation des relations du travail se trouvaient dans l’accord même d’après-guerre, qui était composé d’une multitude de conventions collectives locales dans les marchés primaires du travail fortement syndiqués. L’effilochement de l’accord est venu renforcir la décentralisation du syndicalisme et a donné une impulsion au modèle Magna.
L’impact d’un tel modèle sur la politique ouvrière et le syndicalisme est important. Au moment où les identités ouvrières se développent presque exclusivement au niveau des usines, des lieux de travail, des groupes de travail, il survient une diminution du sens de l’intérêt collectif des travailleurs dans les secteurs de l’industrie (la base du syndicalisme d’affaires) et quand on considère ces derniers comme classe sociale, c’est la base même d’une démocratie sociale et d’autres types de politique ouvrière qui est en cause. Un regain des formes antagonistes du syndicalisme ne peut se produire seulement et uniquement qu’au niveau de l’entreprise individuelle ou du lieu de travail, dans un contexte de restructuration du marché du travail actuel. C’est de là qu’une logique de partenariat, de syndicalisme coopératif, de modèle sans syndicat, tire son origine.
Les mêmes forces peuvent offrir des conditions favorisant la montée éventuelle d’une nouvelle phase de militantisme ouvrier et de syndicalisme d’opposition. La nature de la dérégulation croissante de bien des aspects de la concurrence du marché fait en sorte que de plus en plus de travailleurs vont faire face à une précarité plus grande sur le marché du travail. Encore que Magna connaît un certain succès à tenir le syndicat à distance, cela est dû à son habileté à offrir un certain degré de sécurité d’emploi et de rémunération. Ceci vient entamer l’habileté de l’entreprise à demeurer concurrentielle, qui dépend en grande partie des conditions politiques et économique au sein de la société, ces conditions échappant au contrôle même de l’entreprise. Même à court d’un revirement de l’économie, des stratégies politiques pour une nouvelle classe ouvrière peuvent se développer chez Magna. Il s’agirait d’une vision alternative qui offrirait au travailleur une sécurité d’emploi basée sur les années de service, une attribution de pouvoir fondée sur des ententes formelles et un fonds de pension respectable. Dans un environnement où la capacité de Magna à soutenir la concurrence devrait s’amenuiser, la sécurité d’emploi et les niveaux de salaire des travailleurs permanents seraient menacés et la nature fortement à risque du régime de partage des bénéfices chez Magna serait également en danger. Dans un tel scénario, il peut s’avérer difficile pour Magna de rencontrer les exigences de sécurité d’emploi venant des salariés et les mécanismes d’expression des travailleurs deviendraient vulnérables. De telles contradictions peuvent affaiblir les piliers de la réciprocité patronale-syndicale, qui ont jusqu’ici conforté les travailleurs dans leur dévouement à l’amélioration de la productivité et de la qualité chez Magna. Elles peuvent également miner son modèle d’évitement du syndicalisme. Alors même que les modèles les plus forts de relations du travail au niveau des usines peuvent seulement offrir des refuges temporaires de sécurité d’emploi pour les travailleurs, des possibilités d’un regain du syndicalisme sont indéniables.
Resumen
El sistema de relaciones industriales en Magna International es un ejemplo de una estrategia integrada y coherente de gestión de recursos humanos sin sindicato. Esta incluye mecanismos significativos de representación laboral y de resolución de conflictos como sustitutos a la representación sindical. Los conflictos potenciales patronal – sindicales asociados a un proceso de trabajo taylorista, son trasladados a un sistema de resolución de problemas. Los conflictos de redistribución son re-encuadrados en un sistema de beneficios mutuos a traves de la participación a las utilidades. Las comunicaciones corporativas promueven un ethos de competitividad. El salario y los planes de promoción individualizados, la segmentación de los mercados internos de trabajo y el hecho que cada fabrica esté expuesta a las presiones competitivas, promueven culturas de cooperación en el trabajo en busca de ganancias de productividad. El exito de este modelo de evitamiento sindical se sitúa en un contexto caracterizado por la erosión de la relaciones laborales en los medios sindicalazados, los efectos disciplinarios de los mercados de trabajo precarios y la vulnerabillidad de los medios de trabajo frente a las fuerzas competetitivas transnacionales. El éxito persistente se predice basado en la habilidad de Magna a resistir las fuerzas sectoriales y macroeconomicas de reestructuración que están, en gran medida, fuera del control de los gestionarios.
Parties annexes
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