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Crise d’identité professionnelle et professionnalisme sous la direction de Georges A. Legault, Québec : Presses de l’Université du Québec, 2003, 226 p., ISBN 2-7605-1215-0.[Notice]

  • Martin Robitaille

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  • Martin Robitaille
    Université du Québec en Outaouais

La question de l’identité devient un thème récurrent dans la littérature sociologique contemporaine. Qu’il soit question d’identité nationale, régionale, ethnique ou professionnelle, il n’en demeure pas moins un sujet des plus intéressants à constamment questionner. Peu importe l’angle de traitement, il faut se rappeler que la crise des identités, dans les sociétés occidentales, a comme source une vive tension entre l’universel et le particulier et que cette dernière oblige à un repositionnement constant des dimensions spatiales et temporelles de l’identité des acteurs sociaux. Cet ouvrage s’inscrit donc dans cette problématique identitaire plus large. Les auteurs croient fermement que la crise d’identité professionnelle au Québec ne peut se situer que dans le cadre d’une analyse macrosociologique qui intègre les dimensions sociales, professionnelles éthiques et personnelles. Pour montrer comment la crise d’identité professionnelle a des effets sur le professionnalisme, les valeurs professionnelles et la visée éthique des professions, les auteurs proposent une approche de la construction des identités qui repose sur une dimension psychologique qui inclue une composante personnelle de l’identité professionnelle et une composante sociale qui se traduit par la dimension communautaire constitutive de cette identité. Cette relation est au coeur d’un « mouvement incessant entre l’héritage provenant d’une appartenance et l’appropriation provenant de la médiation subjective de l’héritage dans la construction du soi ». La crise d’identité se manifeste donc lorsqu’il y a une remise en question des valeurs et des régulations sociales. Elle peut aussi apparaître dans les lieux d’appartenance professionnelles où les références identitaires sont remises en question et cela particulièrement lorsque notre identité entre en conflit avec nos actions. Afin de démontrer la thèse de l’existence d’une crise de l’identité professionnelle au Québec, le livre met en lumière, dans un premier temps, les résultats d’une enquête de Georges A. Legault réalisée auprès de représentants de plusieurs ordres professionnels québécois (17 ordres à exercice exclusif et 9 à titre réservé). Dans un second temps, l’ouvrage expose des textes de collaborateurs sur « plusieurs professions choisies en fonction de leur rôle paradigmatique » : les médecins, les travailleurs sociaux, les psychologues, les sages-femmes et les enseignants. Enfin, les auteurs proposent certaines pistes de solution afin que cette crise d’identité puisse devenir source de changements. Dans le premier texte, Georges Legault tente d’évaluer, au sein des ordres professionnels, l’ampleur de la crise d’identité professionnelle provoquée par le passage d’un mode de régulation moral à un autre davantage axé sur la protection du public et sur le contrôle des intérêts corporatistes. De fait, même s’il existe en réalité différents modèles de relations professionnelles (le modèle des actes professionnels, le modèle de l’intervention de l’expert et le modèle intersubjectif d’intervention) et que le discours actuel sur les professions ne permet pas de définir clairement le professionnel actuel, la multiplicité des identités marque bien les contours du professionnalisme et de l’éthique professionnelle. Ainsi, dans les groupes rencontrés, la crise d’identité toucherait non seulement l’identité professionnelle (être ou ne pas être professionnel) mais les valeurs professionnelles, soit « la pluralité de sens sur les valeurs et la formation à l’éthique professionnelle ». Les autres textes du recueil, basés sur des revues de littérature, permettent de démontrer, qu’au sein de professions particulières, il existe bel et bien une crise d’identité professionnelle. Dans le cas de la profession médicale, la crise se manifeste surtout dans le processus identitaire associé aux changements provoqués par la mise en place de nouvelles pratiques. Cette crise se manifeste d’autant qu’il existe actuellement une culture de pratique marquée par l’instrumentalisation et la technologisation des relations et une culture institutionnelle de gestion de tâches et d’actes qui fait fi des relations humaines …