Au cours des dernières années le changement organisationnel et l’importance du développement des compétences des employés figurent parmi les principaux défis auxquels sont confrontés les spécialistes des sciences du travail et des ressources humaines. Le gestionnaire, souvent le gestionnaire en gestion des ressources humaines, devient un facilitateur (Demers 1999), celui qui peut mettre en place et promouvoir les conditions pour que les membres de l’organisation fassent les changements attendus. Par ailleurs, encore trop peu d’attention n’a été accordée aux raisons et aux conditions de nouvelles formes de participation, autre qu’économique, des employés et des entreprises (Keller 1995). Dans cette optique, ce numéro thématique de Relations industrielles/Industrial Relations (RI/IR) présente des éléments de réflexion et des résultats de recherche empirique portant sur deux domaines d’action chers aux ergonomes et susceptibles d’apporter un point de vue nouveau à d’autres spécialistes des sciences du travail. Le premier domaine est celui de la formation des acteurs des milieux de travail par une démarche participative qui mène à la transformation de situations de travail. Le second a trait à la contribution de l’analyse du travail, telle que réalisée en ergonomie, pour concevoir une formation professionnelle de qualité. La formation est un domaine de pratiques et de recherches réinvesti par divers spécialistes du travail, notamment par les ergonomes (Teiger et Montreuil 1996). Depuis le début des années 90, un réseau international de chercheurs et d’intervenants en ergonomie s’est organisé autour du thème « ergonomie et formation » et leurs travaux présentés en symposium lors des congrès triennaux de l’International Ergonomics Association depuis 1991 montrent l’importance et la pérennité de ce thème (Quéinnec et Daniellou 1991 ; International Ergonomics Association 1994, 1997, 2000). Le découpage suggéré dans ce numéro thématique s’appuie sur ces travaux. Par ailleurs, le lecteur moins familier avec l’ergonomie pourra consulter un numéro thématique précédent de RI/IR (vol. 50, no 4) s’intitulant « L’ergonomie et les relations industrielles », et particulièrement l’article de Lamonde et Montreuil (1995) expliquant les fondements de l’ergonomie et ses liens avec les sciences du travail. Ce type de formation réfère généralement au contexte suivant : à la demande de représentants d’une entreprise ou des travailleurs, des experts ergonomes dispensent de la formation à des groupes composés de personnes provenant de divers services (par ex., production, ingénierie, entretien) et de divers niveaux (par ex., travailleurs, contremaîtres, chargés de projet). Une telle formation émane d’une demande initiale souvent formulée autour de problèmes de santé et de sécurité au travail mais, tôt ou tard, elle finit par englober des enjeux de productivité (quantité et qualité). L’objectif de ces formations consiste : (1) à outiller ces acteurs pour qu’ils puissent caractériser l’ensemble des paramètres qui définissent les situations de travail, (2) à identifier leurs effets sur l’activité de travail des personnes mais aussi sur les résultats quant à la production, et (3) à cibler les transformations qui permettent d’améliorer la situation. Lorsque la formation est terminée, ces personnes peuvent utiliser ces savoirs et expériences en participant à d’autres projets de transformation ou à des structures déjà en place dans l’organisation. De façon générale ces formations présentent les caractéristiques suivantes : Cette approche peut être située dans le cadre général de l’ergonomie participative (Noro et Imada 1991). Deux recherches interventions de cette nature sont présentées dans ce numéro (Bellemare et al. et St-Vincent et al.). Bellemare, Montreuil, Marier, Prévost et Allard présentent une intervention en ergonomie participative où l’on voit bien le contexte nécessaire à une formation visant l’action : les étapes de mobilisation dans les usines, de formation de ces acteurs et de transformation des situations de travail sont …
Parties annexes
Bibliographie
- Demers, Christiane. 1999. « De la gestion du changement à la capacité de changer : l’évolution de la recherche sur le changement organisationnel de 1945 à aujourd’hui ». Gestion, vol. 24, no 3, 131–139.
- Keller, Berndt K. 1995. « Rapporteur’s Report : Emerging Models of Worker Participation and Representation ». British Journal of Industrial Relations, vol. 33, no 3, 317–328.
- International Ergonomics Association. 1994. Proceedings of the 12th Triennal Congress of the IEA. Toronto : Association Canadienne d’Ergonomie/Human Factors Association of Canada, vol. 5, 68–138.
- International Ergonomics Association. 1997. From Experience to Innovation. Proceedings of the 13th Triennal Congress of the IEA. Tampere, Finland : Finnish Institute of Occupational Health, vol. 1, 291–453.
- International Ergonomics Association. 2000. Proceedings of the IEA 2000/HFES 2000 Congress. San Diego, Calif. : Human Factors and Ergonomics Society, vol. 2, 646–732.
- Lamonde, Fernande et Sylvie Montreuil. 1995. « Le travail humain, l’ergonomie et les relations industrielles ». Relations industrielles/Industrial Relations, vol. 50, no 4, 695–718.
- Noro, K. et A. S. Imada. 1991. Participatory Ergonomics. London : Taylor and Francis.
- Quéinnec, Yvon et François Daniellou, dir. 1991. Designing for Everyone. London : Taylor and Francis, 1738–1823.
- Teiger, Catherine et Sylvie Montreuil. 1996. « The Foundations and Contributions of Ergonomics Work Analysis in Training Programmes ». Safety Science, vol. 23, no 3, 81–95.