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Rares sont les ouvrages dont on peut dire que le titre en révèle le contenu. Celui-ci en est un. Son objet n’est pas de faire l’histoire du Conseil du patronat du Québec (CPQ) mais de présenter ses activités et prises de position officielles depuis son incorporation le 23 avril 1966 et son lancement public à l’automne de 1969. À cette fin, nul n’était mieux placé que son directeur général et président exécutif depuis le début.
Après une quarantaine de pages de documents et témoignages rédigés par des personnalités du monde de la politique et des affaires — appropriés mais un peu longs pour le lecteur ordinaire — commence la meilleure partie de l’ouvrage. Tous, même les spécialistes des relations du travail, y apprendront une ou plusieurs choses.
Par exemple, le CPQ est fondamentalement une fédération d’associations d’entreprises et d’associations d’employeurs. Qui croirait que de telles associations se comptent par centaines au Québec ? Le CPQ en regroupe plus d’une centaine dans ses rangs, à titre de membres dits associatifs, ce qui le rend très représentatif sous cet aspect primordial. Les grandes entreprises — et les autres aussi, petites et moyennes — forment l’autre catégorie ; le CPQ comprend présentement plus de 400 membres corporatifs, ce qui lui assure un financement adéquat. Le CPQ ne constitue lui-même qu’une petite entreprise, avec ses 14 employés permanents. Le gros travail qui s’y fait repose principalement sur les épaules de bénévoles, associatifs ou corporatifs.
La première moitié de l’ouvrage (chapitres 1 à 4) raconte, toujours sous forme de compilation, expliquée adéquatement, pour en comprendre le déroulement, les prises de position du Conseil dans trois domaines principaux : les relations du travail, l’économie, le problème linguistique et constitutionnel (dans cet ordre). On pourrait désigner la période visée par les termes suivants, selon les principaux événements de chaque décennie : 1970, les relations du travail dans le secteur public et parapublic ; 1980, l’ajustement à la présence du Parti québécois et à son option souverainiste ; 1990, les problèmes d’une économie au ralenti et d’un long déséquilibre des finances publiques.
La seconde moitié de l’ouvrage semble moins structurée, parce qu’elle regroupe plus de notions dispersées (chapitres 5 à 9) : la vie interne du CPQ, dialogue et concertation entre les parties concernées, sujets divers. Chaque sujet est aussi traité plus brièvement. Un problème revient un peu partout dans le volume, au gré des événements et des circonstances ; il mérite d’être souligné de façon particulière.
Il s’agit du rôle du CPQ et de son président, pendant toute la période à l’étude, par rapport au financement et au règlement des plaintes à la Commission de la santé et sécurité du travail (CSST) (voir par exemple aux pages 81, 266, 389, 400). Le financement de la CSST (ou celui des organismes équivalents dans les autres provinces canadiennes et les États américains) est propre et particulier au Québec : il est assumé tout entier par les employeurs. Mais les syndicats sont représentés à tous les échelons de la direction, au même titre que les employeurs, avec participation à la décision. Chaque réclamation à la CSST constitue un conflit possible entre les deux parties. Pourtant on entend rarement parler de tels conflits. Au fil des pages de ce livre, on comprend que les ententes y sont toujours le fruit de discussions sérieuses et prolongées, souvent difficiles entre les membres des parties intéressées. Les accords de consensus, même gagnés par des efforts considérables, n’attirent guère l’attention, et c’est peut-être mieux ainsi.
Les gens à la retraite ou d’âge un peu avancé ont participé aux événements rapportés ou ont été témoins des problèmes discutés dans cet ouvrage. C’est une revue de leur vie professionnelle que l’auteur les invite à refaire avec lui. Les plus jeunes y trouveront une compilation d’événements et de prises de position qui ont façonné notre monde actuel. Le volume constitue un instrument de travail indispensable pour toute analyse future plus approfondie.
Il faut noter que la langue utilisée est claire, dépouillée, concise. Elle se lit facilement. Quelques coquilles, ici et là, nous rappellent qu’aucun ouvrage ne paraît sans aucune faute.