Résumés
Abstract
This paper contrasts competing paradigms of a key issue in the employee-employer relationship: the application of the concept of progressive discipline. In a review of both the arbitral jurisprudence in the unionized sector, and the organizational behavior literature, the author illustrates two very different perspectives regarding the application of discipline in the workplace: one view is embodied in arbitral law and focuses on the corrective effects of discipline, while the other is embodied in behavior modification theory and emphasizes its negative effects. The notion of discipline is then discussed in a broader perspective by highlighting some current trends in human resource management, as well as alternative approaches to dealing with employee misconduct.
Résumé
Cet article met en relief la nature de paradigmes concourant différemment à l'application du principe de gradation des sanctions. L'auteure passe en revue la jurisprudence arbitrale du secteur syndiqué ainsi que la littérature traitant du comportement organisationnel en illustrant deux approches distinctes dans le suivi de la discipline sur les lieux de travail. La notion de discipline fait ensuite l'objet d'une discussion dans un cadre élargi où sont mis au jour certaines des tendances actuelles en gestion des ressources humaines, ainsi que les approches alternatives retenues en regard d'un comportement fautif de la part des salariés.
La tendance générale se dégageant de la jurisprudence arbitrale du secteur syndiqué consiste à considérer la gradation des sanctions comme un moyen de correction et de réhabilitation. Il appert, dans certains cas, que ces conceptions tirent leur origine des théories sous-jacentes du droit criminel. Alors qu'un certain nombre d'arbitres reconnaissent d'emblée que la discipline est une forme de punition, l'idée est souvent abandonnée sinon édulcorée.
Dans la littérature portant sur le comportement organisationnel, le concept de discipline prend racine dans la théorie du renforcement. De plus, la perspective organisationnelle assimile les concepts de discipline et de punition à une même réalité et leur confère ainsi une valeur d'interchangeabilité. Initialement, la punition faisait l'objet d'études expérimentales impliquant des animaux de laboratoire; elle s'avéra inefficace ou temporairement efficace et porteuse d'effets secondaires indésirables. En général, les spécialistes béhavioristes des organisations ne recommandèrent pas l'usage de sanctions.
Le relevé de la littérature étonne d'ailleurs en ceci que les recherches empiriques soutenant l'apport de chacun des paradigmes liés à la discipline au travail se font rares. En l'absence de vérification empirique, une question s'impose: la discipline constitue-t-elle une réponse appropriée au méfait dans les années 1990?
Le développement d'un modèle de ressources humaines axé sur la participation des travailleurs à la prise de décision et à la résolution de problèmes pourrait constituer un facteur important dans la conception du système disciplinaire. L'esquisse d'un nouveau scénario dévoile ici une tendance propre à encourager la délégation des responsabilités, la consultation et la recherche de consensus. Ce modèle de gestion des ressources humaines n'apparaît certes pas compatible avec le mode d'intervention unilatéral de la direction en matière disciplinaire (réprimandes, suspensions...).
La nature changeante de la main-d’œuvre constitue également une tendance à considérer. Généralement, celle-ci est mieux éduquée, mieux informée et plus encline à résister à l'autorité. Des méthodes mises au point jadis peuvent alors ne plus convenir à certains segments de la population active. Les études de cas rapportées dans la littérature sur les organisations font état des résultats positifs obtenus des suites de l'instauration d'un mode de régulation mettant désormais l'accent sur la responsabilisation de l'employé pris en faute. La procédure inclut un rappel, à l'employé concerné, des attentes de l'entreprise sous les formes écrite et orale et, en dernier lieu, un jour de congé rémunéré que celui-ci occupe par une réflexion personnelle sur son cheminement dans la compagnie.
L'auteure avance que l'usage d'une telle approche peut contribuer à atténuer les effets secondaires négatifs du suivi traditionnel de la discipline et qu'elle représente une vision plus positive et réfléchie de la recherche de l'ordre désiré. Du reste, elle semble s'harmoniser avec le transfert organisationnel de la responsabilisation et pourrait être mieux perçue par une main-d’œuvre plus qualifiée et raffinée.
Cet article suggère enfin que l'adoption du principe de gradation des sanctions en tant que mode de gestion unique et idéal relève peut-être du simplisme, eu égard à la complexité de la relation d'emploi vécue quotidiennement sur les lieux de travail. L'auteure enjoint employeurs et employés de reconsidérer la valeur des pratiques traditionnelles en matière de discipline et d'explorer d'autres alternatives; une ouverture quant au rôle de l'arbitre serait la bienvenue. L'importance des recherches empiriques mettant en relation les mesures correctives ou disciplinaires, leur efficacité et la performance au travail est finalement soulignée par l'auteure.