Relations industrielles
Industrial Relations
Volume 35, numéro 3, 1980
Sommaire (31 articles)
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Distinction 1980 de l'Association canadienne des relations industrielles : Harry Douglas Woods / Canadian Industrial Relations 1980 Award: Harry Douglas Woods
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L’influence des « besoins supérieurs » sur la réaction de l’employé à certaines caractéristiques de sa tâche
Jean-Louis Bergeron et Jean-Luc Morin
p. 365–386
RésuméFR :
Le but de cet article est d'examiner l’influence modératrice des besoins dits supérieurs ou intrinsèques (besoin d'accomplissement, de développement personnel, de compétence) sur la relation entre les caractéristiques du travail normalement associées à l'enrichissement des tâches (e.g. complexité, autonomie, variété) d'une part et la satisfaction et la motivation de l'employé d'autre part. À la suite d'une revue de la littérature pertinente, les auteurs présentent et discutent les résultats d'une recherche effectuée auprès de 176 employés d'un hôpital du Québec. La conclusion résume les implications de ces résultats pour les chercheurs et pour les administrateurs.
EN :
The purpose of this article is to examine the moderating influence of superior (higher order) needs on the relationship between certain task characteristics normally associated with job enrichment and the employee's satisfaction and motivation. A review of the literature indicates that while the "main effects" of these characteristics are generally supported, studies dealing with the moderating influence of superior needs have produced conflicting or ambiguous results. One source of difficulty may be that most authors have adopted a ready-made questionnaire to measure four or five characteristics of the task, without determining the dimensions actually perceived by their particular sample group.
In this study, a factor analysis of 31 items borrowed from the literature or created by the authors produced four dimensions with adequate reliability: complexity and use of abilities, autonomy and influence, feedback and personal development, variety. The following hypotheses were verified with a sample of 176 hospital employees: 1. the four dimensions are related separately and jointly to job satisfaction and job motivation. 2. the relationships are stronger in the case of employees with higher intrinsic or superior needs.
In general, the hypotheses are well supported. With regard to main effects, there is one exception: variety does not correlate with motivation. The moderating influence of superior needs is usually strong. For instance, the correlations between "complexity and use of abilities" and job satisfaction are .03, .41 and .60 respectively for low, medium and high levels of superior needs. With motivation as the dependent variable, these correlations become .10, .26 and .48. Contrary to the hypotheses, however, the relationships between "autonomy and influence" and both satisfaction and motivation are not influenced significantly by the level of superior needs.
The discussion of these results bear on the following points: the usefulness of factor analysis for studies of this kind, the ambiguous role of "variety" as a potential determinant of satisfaction and motivaton, the choice of superior (or higher-order) needs as possibly the most appropriate moderating variable, the unexpected findings with "autonomy and influence" as the independent variable.
The conclusion points out that a distinction should be made between the process of job enrichment and the simple presence or absence of characteristics associated with an enriched job. The theoretical and practical importance of the results obtained is also discussed at some length. Readers are reminded that several other studies have produced different results and that very few studies have shown a negative moderating influence on the relationships between such job characteristics and employees' reactions. This would seem to indicate that administrators do not stand to lose much by attempting to enrich all jobs, provided the process itself is carried out with some caution.
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Settlement of First Collective Agreement: An Examination of the Canada Labour Code Amendment
S. Muthuchidambaram
p. 387–409
RésuméEN :
The purpose of this paper is to examine the rationale behind and provisions of a recent amendment to the Canada Labour Code, where the parties negotiating a first collective agreement are unable to reach agreement and have met all the legal requirements precedent to a strike or lockout, the Minister of Labour may direct the Labour Relations Board to inquire into the dispute and if advisable settle the terms and conditions of the first collective agreement. That agreement will be binding on the parties and in force for one year. The reactions of the organized labour and employers to this amendment are also discussed.
FR :
La conclusion d'une première convention collective de travail donne souvent lieu à un conflit prolongé. Il en a toujours été ainsi au Canada comme aux États-Unis. Le remède traditionnel des injonctions a été jugé tout à fait inefficace: c'est trop peu et trop tard. Reconnaissant cette situation, quatre gouvernements canadiens — La Colombie Britannique, le Manitoba, le Québec et l'État fédéral — ont modifié leur Code du travail respectif. Le présent article analyse les raisons qui sous-tendent et justifient cette modification auCode canadien du travail.
Selon ce changement, quand les parties aux négociations d'une première convention collective de travail sont incapables d'en venir à une entente et qu'elles ont suivi tout le processus juridique préalable à la grève et au lock-out, le Ministre peut ordonner au Conseil d'enquêter sur le conflit et, s'il l'estime opportun, de fixer les dispositions de la convention collective.
Suite à cette requête du Ministre, le Conseil peut déterminer les dispositions d'une convention collective qui régit les parties et devient exécutoire, sauf si celles-ci sont subséquemment modifiées par écrit par les parties elles-mêmes. Cette convention restera en vigueur pendant une année à compter de la date de sa détermination par le Conseil.
La modification à la loi prévoit aussi certaines lignes directrices et certains critères que le Conseil doit suivre lors de l'établissement de la première convention collective. Celui-ci doit donner aux parties l'occasion de présenter une preuve et de faire des représentations. Le Conseil doit, entre autres choses, tenir compte de ce qui suit: a) de la mesure dans laquelle les parties ont ou n'ont pas négocié de bonne foi dansun effort pour s'entendre entre elles sur le contenu de la première convention collective; b) s'il en existe, des conditions de travail négociées collectivement pour des salariés remplissant des fonctions identiques ou similaires dans des situations identiques ou similaires à celles dans lesquelles se trouvent les salariés de l'unité de négociation; c) de tout autre sujet que le Conseil estimera de nature à l'aider à mettre au point des conditions équitables et raisonnables dans les circonstances.
La substance de cette modification indique une orientation nettement différente de ce qui se faisait jusqu'ici. Le CCRT, à l'initiative exclusive du Ministre, a maintenant le pouvoir d'exercer juridiquement sa compétence en vue de régler un conflit d'intérêts en autant qu'il s'agisse d'une première convention collective.
Étant donné que la stipulation duCode du travail de la Colombie Britannique concernant la première convention collective est le prototype de la modification duCode canadieny l'expérience de cette province en la matière depuis 1974 témoigne que la modification auCode canadien du travail peut atteindre son objectif sans dissuader de la libre négociation collective. La lettre et l'esprit de la décision du CCRT dans l'affaire deRadio Mutuel confirme en partie cet optimisme prudent. Il est cependant quelque peu prématuré de prédire l'efficacité à long terme de cette politique touchant l'arbitrage de la première convention collective. Une telle prédiction devrait se fonder sur une étude approfondie de ce qui est advenu à ces syndicats à l'expiration des premières conventions imposées par des tiers.
Les provinces canadiennes qui n'ont pas adopté de législation en matière d'arbitrage de la première convention collective devraient songer à d'autres mesures en lieu et place de ces conventions imposées par une tierce partie. L'une d'entre elles serait de voir s'il ne serait pas possible de renforcer les syndicats par une plus grande flexibilité en matière d'accréditation de façon à permettre aux petits syndicats de s'allier et de donner naissance à des unités de négociation plus réalistes et plus viables, ce qui pourrait empêcher un employeur donné de faire échec aux négociations ou de détruire les syndicats nouvellement accrédités. Si de telles mesures ne sont pas possibles, ces provinces devraient songer sérieusement à insérer dans leur législation du travail les dispositions relatives à l'arbitrage de la première convention collective.
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Contemporary Personnel Practices in Canadian Firms. An Empirical Evaluation
Laird W. Mealiea et Dennis Lee
p. 410–421
RésuméEN :
This study empirically evaluates current personnel practices in 216 Canadian firms. Specifically, 33 decision areas are considered in an attempt to determine the role of Canadian personnel departments in the organization's decision making process. Also evaluated is the possible impact of size, ownership and geographic differences on the level of involvement by personnel departments.
FR :
Les conclusions suivantes découlent du rôle que jouent d'une façon générale les services du personnel dans les entreprises canadiennes.
1. Bien que l'autorité et l'influence des services du personnel au Canada puissent sembler considérables, il faut noter que cette autorité et cette influence varient d'un secteur de décisions à l'autre. En fait, on peut conclure qu'elles s'étendent d'un degré élevé de participation à une participation minime ou nulle suivant le secteur de décisions que l'on considère.
2. Il est important d'observer que des différences notables existent entre les divers types de décisions au sein des cinq domaines majeurs de décisions. Ici encore, l'influence des services du personnel s'étendent d'une participation considérable à une participation minime ou nulle dans chaque domaine de décisions, à l'exception de celui de la formation et du développement.
3. Les services du personnel, qu'on retrouve dans les grandes entreprises, exercent plus d'influence et d'autorité que ceux des sociétés plus petites. Cette observation est conforme à la thèse selon laquelle plus les entreprises deviennent grandes et complexes, plus il y a tendance à utiliser le personnel de cadre. Aussi faut-il noter que dans les grandes entreprises, on retrouvera généralement au sein du service du personnel un directeur ou un vice-président assigné au personnel qui occupe un rang élevé à l'intérieur de la structure administrative. Au contraire, dans les sociétés de moindre importance, le service du personnel se trouvera à un échelon plus bas dans la structure administrative et il ne sera pas dirigé par un cadre supérieur de l'organisation. Résultat: dans ces petites entreprises, les fonctions dévolues à la direction du personnel peuvent être déléguées à des cadres ou gérants de rang moins élevé parce que le service du personnel n'est que peu identifié ou occupe un rang peu important au sein de l'organisation. De pareilles caractéristiques permettent d'expliquer les résultats d'ensemble qui ressortent de la présente étude.
4. Lorsqu'on considère les différences relatives à la possession et au contrôle de l'entreprise, on constate que les services du personnel qui relèvent de sociétés américaines ont plus d'autorité et d'influence que ceux des entreprises canadiennes. Il est possible que la délégation de pouvoir de l'entreprise-mère américaine à sa filiale canadienne puisse expliquer les différences dans les politiques concrètes touchant le personnel.
5. Les services du personnel ont tendance à être moins engagés dans les décisions d'importance même dans les cas où ces décisions relèvent de la compétence du service du personnel. Les décisions principales sont celles qui touchent aux politiques de base et aux changements en profondeur dans le fonctionnement de l'organisation ou qui peuvent avoir des conséquences graves sur les individus ou sur les unités administratives. Par exemple, si les services du personnel fonctionnant au sein de grandes sociétés peuvent participer activement à la détermination des stratégies de négociations, ils participent rarement à la fixation des concessions majeures au cours de ces négociations. De même, si les services du personnel participent activement aux décisions relatives au regroupement des emplois en vue de l'établissement des classes de salaires, ils ne participeront que rarement aux décisions qui déterminent les types de salaire au rendement qu'on veut implanter, à l'étendue de ces systèmes ou aux écarts en matière de politiques de salaires.
Finalement, l'étude conclut que le rôle des services du personnel dans les entreprises canadiennes en est un de nature complexe. En outre, un rôle d'une pareille complexité semble convenir, compte tenu du dynamisme et de la complication du milieu dans lequel les entreprises canadiennes fonctionnent. Par conséquent, la clef de la réussite consiste à reconnaître cette complexité et à l'accepter là où elle est appropriée. Toutefois, il faut aussi reconnaître que cette étude n'a pas tenté d'établir exactement la complexité des services du personnel au Canada, non plus que l'utilisation qui en est faite. C'est cependant ce qu'il faudrait entreprendre si l'on veut tirer le maximum d'efficacité d'un organe qui devient de plus en plus important au sein des entreprises.
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Toward a More Competent Labour Force: A Training Levy Scheme for Canada
Roy J. Adams
p. 422–438
RésuméEN :
A Commission of Inquiry on Educational Leave and Productivity recommended the establishment of a training levy scheme in Canada. In this paper the author discusses why such a scheme is necessary, how it might work, what it might cost, and what it would accomplish.
FR :
Une des principales recommandations de la Commission sur les congés éducatifs et la productivité (instituée par Travail-Canada en 1978 et dont le Rapport a été remis en octobre 1979) consiste à imposer à l'industrie canadienne un prélèvement égal à un demi de un pour cent de la liste de paie annuelle. Toute entreprise qui ne consacrerait pas cette somme à la formation professionnelle en remettrait la différence au gouvernement. Par ailleurs, les entreprises qui l'utiliseraient à cette fin bénéficieraient d'un abattement d'impôt supérieur à l'argent ainsi dépensé. C'est la politique du bâton et de la carotte: on pénalise les entreprises qui n'assument pas leurs responsabilités; on récompense celles qui les acceptent.
Pourquoi une telle mesure? Comment peut-elle fonctionner? Quel en est le coût? Que peut-elle accomplir?
D'abord, pourquoi une contribution de l'industrie à un tel projet? La capacité de production d'une économie dépend de plusieurs facteurs, mais l'un des plus importants est la compétence de la main-d'oeuvre. Beaucoup d'études ont permis de constater que l'éducation favorise la croissance économique et la productivité. Et ceci s'impose au Canada parce que la grande majorité des adultes n'ont pas reçu une formation professionnelle systématique à l'école primaire et secondaire, celle-ci étant repoussée au niveau post-secondaire. Bien plus, l'enseignement post-secondaire est loin d'être toujours orienté vers la formation professionnelle. On peut même affirmer que la moitié des diplômés des universités ne travaillent pas dans des emplois découlant de la discipline qu'ils ont choisie.
Puisque la plupart des canadiens n'ont pas reçu de formation professionnelle, il faut faire en sorte que l'industrie prenne la relève, mais les faits démontrent que l'industrie n'offre que peu d'occasions aux individus d'acquérir les connaissances nécessaires pour qu'ils soient pleinement efficaces dans le monde du travail actuel. L'enquête effectuée par la Commission en 1978 a révélé que vingt pour cent à peine des entreprises favorisent la formation, que quinze pour cent des employés y participent et qu'ils n'y consacrent en moyenne que sept jours. Même si beaucoup d'adultes souhaitent acquérir une meilleure formation, de nombreuses barrières de temps, de coût et d'éloignement leur en rendent l'accès difficile. Les gens de la classe moyenne, déjà engagés dans des carrières intéressantes, en profitent tandis que ceux qui en auraient le plus besoin sont les derniers à y participer. D'autre part, le gouvernement dépense 600 millions par année, mais le programme ne répond pas aux attentes.
Résultat de cet état de choses: il y a un manque chronique de travailleurs qualifiés; les cadres des entreprises se font rares; les changements technologiques forcent une partie de la main-d'oeuvre à se retirer du marché du travail; dans l'ensemble, les travailleurs canadiens ne sont pas satisfaits de leurs chances de promotion et, finalement, le manque de formation pose des problèmes de discrimination et de productivité.
Dans les circonstances, la prescription d'un impôt à l'industrie aux fins d'éducation est la meilleure façon de corriger la situation actuelle, et cela pour plusieurs raisons. Les porte-parole de l'industrie se sont déclarés mécontents de l'enseignement secondaire tel qu'il est présentement donné. L'impôt leur fournirait le moyen d'obtenir des institutions d'enseignement des programmes qui répondent mieux à leurs besoins et les inciterait à investir dans le développement des ressources humaines. L'impôt aurait pour effet de répartir également sur tous le fardeau de la formation. Ce système permettrait de combiner les études scolaires et la formation en industrie.
Comment un tel projet peut-il fonctionner? D'une part, le gouvernement fédéral pourrait unilatéralement augmenter le fardeau des taxes des entreprises jusqu'à une somme égale à un demi de un pour cent de leur liste de paie, tout en leur permettant de déduire plus de cent pour cent des montants qu'elles auraient consacrés aux fins d'éducation si le taux de un demi de un pour cent est atteint. Chaque province pourrait voter une loi dans le même sens. En effet, la législation concurrente est désirable à la fois parce que l'éducation relève de la compétence des provinces et parce qu'il se peut qu'une province en particulier, si elle agissait de sa seule initiative, puisse hésiter à établir un nouvel impôt, de peur de placer dans une situation désavantageuse les entreprises qui se trouvent sur son territoire.
Une fois l'impôt établi, une grande firme pourrait entrer en contact avec une université ou un collège des environs et mettre au point un programme d'études qui serait en quelque sorte taillé sur mesure pour répondre à ses besoins en formation de main-d'oeuvre. Les entreprises de plus petites dimensions pourraient également se regrouper dans le même but.
D'autre part, les employeurs déduiraient non seulement les dépenses relatives à la formation, mais aussi le coût de la rémunération de ceux qui obtiennent congé pour suivre des cours. Les employés suivraient ces cours à raison de deux semaines à l'automne et ils auraient entre-temps des travaux à faire à la maison. Le principal objectif de cet impôt est d'encourager le développement de programmes d'études appropriés.
Ceci, cependant, ne veut pas dire qu'on négligerait pour autant la formation en usine, car il se trouvera toujours des travailleurs qui seront dans l'impossibilité de suivre des cours.
Quel serait le coût d'un pareil projet?
En 1978, le total des revenus tirés du travail au Canada s'établissait approximativement à $130 milliards dont $27 milliards pour les entreprises sans but lucratif. Étant donné que ce prélèvement est assimilable à un impôt qui ne s'appliquerait qu'au secteur privé, cela représenterait environ $515 millions. On peut espérer, toutefois, qu'un projet supplémentaire serait mis au point qui obligerait le secteur public à assumer sa part de responsabilité en matière d'éducation, ce qui permettrait d'arriver à une somme globale d'à peu près $650 millions par année. Le prélèvement fonctionnerait au départ comme une nouvelle taxe, mais la mesure stipulerait que si lesemployeurs dépensent aux fins d'éducation un demi de un pour cent de leur liste de paie, leur revenu imposable serait abaissé de cent vingt pour cent de la somme qu'ils auraient déboursée.
Si l'industrie consacrait à la formation la somme totale du prélèvement, il lui en coûterait $412 millions et la part de l'État serait de $103 millions. La réaction initiale du gouvernement et des employeurs est de trouver le projet trop onéreux. Une enquête récente a révélé que l'absentéisme coûte $21 millions chaque jour, soit $5 milliards par année. En regard de ce chiffre, $515 millions est une somme minime. Une réduction de dix pour cent de l'absentéisme rembourserait le coût du projet et il y aurait bien d'autres motifs pour démontrer que le fardeau financier est beaucoup moins lourd qu'il n'y paraît de prime abord, d'autant plus que plus de soixante pour cent du coût à absorber par les employeurs consisterait en du temps perdu qui ne se traduirait pas nécessairement par une baisse de la production.
Que peut-on accomplir grâce à ce système? À long terme, cette mesure permettrait d'avoir une économie davantage orientée vers les valeurs de l'éducation, d'ouvrir de nouvelles carrières aux jeunes et aux femmes, de mettre fin au manque chronique de travailleurs qualifiés, de favoriser la formation d'un corps de dirigeants plus compétents et, finalement, de faire réaliser à la productivité un bond marqué.
Pour conclure, il faut souligner que, s'il était judicieusement appliqué, non seulement ce programme serait-il payant en lui-même, mais il rapporterait aussi des dividendes aux individus, à l'industrie et à l'économie dans son ensemble.
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European Industrial Relations. A Resource for the Reconstruction of the American System
Solomon Barkin
p. 439–446
RésuméEN :
European industrial relations Systems have in the last two decades been creative and expansive and intimately integrated into their respective national economic, political and social fabric. Their experience provides a revitalized source of information on the roles of trades unions and collective bargaining in a democratic state and as a countervailing force to the power of business both on the national and international scenes.
FR :
Les régimes de relations professionnelles européens se sont montrés très innovateurs au cours des deux dernières décennies; ils se sont développés et ils se sont fortement intégrés à la vie sociale, politique et économique de leurs pays respectifs. Leur expérience est une source stimulante de connaissances pour la poursuite des objectifs du syndicalisme et de la négociation collective dans une société démocratique et une force capable de contrebalancer celle du monde des affaires tant sur la scène nationale qu'internationale. La présente étude les considère sous cinq aspects différents.
LE RAYONNEMENT DES SYNDICATS ET L'INFLUENCE DE LA NÉGOCIATION COLLECTIVE
Pendant que le système américain des unités de négociation engendre une mosaïque voilée de conflits de classe inspirés par la résistance des employeurs à la syndicalisation, le régime européen repose sur l'acceptation généralisée des syndicats et de la négociation collective. Les conventions prévoient pour toutes les unités concurrentes des régimes de conditions de travail uniformes.
LA REPRÉSENTATION DES EMPLOYÉS DANS L'ENTREPRISE
La législation et la pratique en Europe prescrivent généralement l'institution de mécanismes de représentation des employés à l'intérieur des établissements au moyen de conseils de travail ou d'autres organismes de nature semblable. Pour en assurer l'efficacité, les syndicats les contrôlent ou les remplacent par des conventions collectives ou, d'une façon encore plus pratique, par leurs propres agences représentatives, ce qui leur permet de jouir d'une influence marquée sur la politique et l'administration des relations professionnelles tant dans l'établissement que dans l'entreprise. Le taux de pénétration du syndicalisme au sein de la force ouvrière atteint de deux à quatre fois celui qu'on retrouve sur le continent américain; il s'étend d'ailleurs à toute la gamme des entreprises industrielles tant dans le secteur privé que public.
LA STRUCTURE DES SYNDICATS
Alors que les syndicats américains sont devenus une espèce de conglomérat, les organisations européennes ont conservé relativement stables leurs propres limites de compétence. Les fédérations centrales se sont montrées plus inflexibles au sujet de l'orientation des amalgamations. L'autonomie des syndicats nationaux est respectée, mais ils suivent fidèlement les politiques de la fédération nationale.
LES RELATIONS AVEC LE RÉGIME POLITIQUE
Les tactiques « lobbyistes » du syndicalisme américain font contraste avec la participation franche des syndicats européens aux mouvements ouvriers nationaux, y compris celui de l'aile politique. Le parti travailliste et les gouvernements de centre-gauche, au cours des dernières décennies, ont fait progresser considérablement les objectifs ainsi que les programmes des syndicats, et ils donnent aux mouvements syndicaux l'occasion d'accroître leur influence sur le développement et l'administration des politiques nationales tant au point de vue social qu'économique.
LES CONDITIONS DE TRAVAIL
Les conditions de travail, la garantie de la sécurité d'emploi et les services personnels de prévention et de réhabilitation ont augmenté d'une façon impressionnante au cours des dernières années. Pour la première fois dans l'histoire, ils dépassent les normes et les niveaux américains, principalement en Allemagne de l'Ouest, en Norvège, en Suède et en Suisse.
En conséquence, nous devons nous demander si la politique et la pratique américaines de syndicalisation et de négociation collective aident à la réalisation des objectifs initiaux tels qu'ils furent spécifiquement définis en 1933. Si comme l'auteur le croit, ce parallèle peut conduire à une réévaluation en profondeur du régime américain de relations du travail et susciter de grands changements, il faut s'inspirer des régimes européens et de leurs expériences comme s'ils étaient une source de modèles à imiter dans la reconstruction des aménagements nouveaux à mettre au point pour notre continent.
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The Latent Function of the Production Council
A. Ben-Porat
p. 447–466
RésuméEN :
The author presents a functional analysis of the Production Council in Israeli industry. He first presents the P.C.’s manifest function and discusses its existence and reasoning. He then provides a latent function interpretation of the phenomenon and suggests that this interpretation adequately explains the phenomenon and contributes to its understanding within the enterprise context.
FR :
Par définition, une organisation possède des statuts qui déterminent sa structure, son fonctionnement, ses buts ou objectifs. En théorie, si les statuts sont rationnels et si l'organisation contrôle l'issue de certaines variables, elle peut atteindre sa fin. En pratique, cependant, on découvre souvent qu'une organisation s'éloignera de ses buts pour remplir une fonction qu'elle ne recherche pas. Il est souhaitable, en conséquence, de chercher à expliquer une pareille déviation afin de préciser la fonction de l'organisation.
Dans le présent article, nous présentons une analyse fonctionnelle du conseil de production dans l'industrie en Israël. Le conseil de production est un organisme formé d'un nombre égal de représentants des travailleurs et des employeurs. Deux représentants sont nommés, l'un par le conseil des ouvriers (un organisme électif qui représente les travailleurs dans l'entreprise en matière de relations professionnelles) et l'autre, par la direction. Les autres membres sont élus par le groupe qu'ils représentent.
Les fonctions réglementaires du conseil de production sont les suivantes: assurer la coopération entre les salariés et la direction de l'entreprise en vue de trouver les voies et moyens nécessaires au développement des entreprises industrielles; accroître l'efficacité et hausser la productivité; établir des méthodes de travail adéquates et les rémunérations au rendement. La fin explicite de l'accord relatif au conseil de production est de séparer nettement la compétence du conseil de production du régime de négociations collectives entre la direction et le conseil des ouvriers au sein de l'entreprise. Les procédés par lesquels le conseil de production exerce son activité sont établis dans cet accord. Les décisions du conseil de production lient la direction et le conseil des ouvriers, ce qui laisse les groupes sans beaucoup d'influence directe formelle sur le conseil de production.
En vue d'examiner le conseil de production dans l'industrie en Israël, nous avons utilisé la théorie fonctionnelle de Merton (1957) et de Stinchcombe (1968). Nous avons considéré ensuite trois propositions: a) la proposition de la fonction réglementaire qui rattache les modèles de comportement réels et normaux à cette fonction, selon l'accord formel du conseil de production; b) une proposition structurelle différente qui énonce que, même si les modèles réels diffèrent des modèles normaux, le conseil de production s'explique encore par sa fonction authentique; c) la proposition de fonction latente qui énonce que le conseil fournit aux parties dans l'entreprise une fonction différente de celle qui est manifestée dans les statuts.
Les trois propositions ont été examinées une à une. La proposition de fonction réglementaire est à rejeter comme explication valable du conseil de production. La deuxième proposition n'apparaît pas être une explication alternative et elle est aussi à rejeter. Les deux propositions ont été analysées à partir de données recueillies auprès d'un échantillon représentatif de 201 membres de conseils de production dans l'industrie en Israël.
La fonction latente semble fournir une explication valable du conseil de production dans l'entreprise. Touchant les limites imposées aux parties dans l'entreprise par la convention collective nationale dans l'industrie en Israël, le conseil répond aux besoins des parties dans l'entreprise d'être impliquées dans le processus de négociation. Le conseil de production est un mécanisme de négociations pour ces parties. Aussi longtemps que le conseil de production conserve cette fonction et continue à contribuer à de telles réalisations, les parties continueront à soutenir le conseil de production, quelle que soit sa fonction réglementaire.
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The Obsolescence of Bureaucracy
Alexander J. Matejko
p. 467–493
RésuméEN :
The bureaucratic model becomes more and more self-defeating in present time because it is highly inadequate to meet the challenges of the modem world. Literature on the alternative models of collective work is now available. These are also several highly encouraging practical experiences. Fewer and fewer people still trust that any substitute for bureaucracy is just unrealistic
FR :
En général, les individus perçoivent les organisations comme un ensemble de contraintes. On y observe une crise de l'autorité en tant que pouvoir légitime, qui pousse leurs membres à se comporter selon la volonté de ceux qui occupent les positions importantes à l'intérieur de l'organisation. Les divers types d'autorité qui se fondent sur le droit, la position, la compétence, l'attraction sociale ou la personnalité, bien souvent ne se renforcent pas les unes les autres. Dans ces circonstances, le dilemme de la direction désireuse d'assurer une coordination efficace de l'activité du personnel devient très critique. L'établissement d'un rapport optimal entre des intérêts techniques, sociaux et économiques, qui s'opposent souvent, apparaît comme une tâche extrêmement délicate.
Aussi, la prévision et la compréhension d'un événement ainsi que le degré de programmation anticipée qui met en lumière les réponses appropriées conformes à des exigences pressantes sont d'une importance capitale pour les organisations lorsque celles-ci ont à traiter de cas urgents. On peut faire face à ces cas urgents, en mettant au point des mécanismes variés d'adaptation, y compris l'esprit d'organisation. Et la nécessité de l'esprit d'organisation s'accroît suivant la progression de la division du travail.
On note de forts éléments collectivistes dans les organisations bureaucratiques modernes qui déploient plusieurs techniques de manipulation afin de rendre leurs membres sujets d'obligations d'abord, puis ensuite seulement de droits. Toutefois, la différenciation socio-culturelle plus grande qui existe dans les sociétés modernes contre-balance cette tendance. Quand des groupes au sein d'une organisation ressentent la nécessité d'être fortement différenciés, mais requièrent aussi d'être rigoureusement intégrés, il est nécessaire pour l'organisation de développer des mécanismes d'intégration plus compliqués. Les mécanismes d'identification sont très forts considérés globalement (la consommation de masse), mais ils ont beaucoup moins d'influence sur les individus et les petits groupes. Même dans les pays totalitaires, l'efficacité de ces mécanismes paraît plutôt douteuse.
Dans les organisations traditionnelles, la structure sociale était dominante, relativement stable et fondée sur la coutume, tandis que dans les organisations modernes, la techno-structure, la structure administrative et la structure sociale sont relativement indépendantes les unes des autres, suivent leur propre cheminement dynamique et interfèrent. La fonction de coordination s'accroît, mais, dans une grande mesure, elle est coupée des structures énumérées ci-dessus et sa valeur est de nature purement rationnelle. Très souvent, cette rationalité engendre le doute ou même une mauvaise utilisation lorsqu'il lui faut relever un défi qui dépasse de beaucoup la compétence de la direction. C'est à ce moment qu'une crise d'autorité peut saper la stabilité de l'organisation et entraîner une division entre les diverses structures.
La loyauté envers l'organisation est alors exposée à des dangers même si des hommes dévoués (organization men) s'efforcent de maîtriser leurs désaccords en matière de savoir en s'impliquant à fond dans leur organisation. La caractérisation d'un rôle dans les organisations modernes n'est probablement fondée que d'une façon marginale sur l'engagement envers les organisations, mais elle tient à des engagements d'un type différent qui est souvent en état de conflit avec l'idéologie apparente des organisations. Tensions, rivalités, hostilités mêmes sont des facteurs d'importance majeure. Comme le déclarent Katz et Kahn, en se fondant sur des données empiriques, « l'expérience de situations de conflit en milieu de travail est généralisée ». Suivant les estimations américaines, la moitié des employés travaillent en conditions de conflits notables et d'un dixième à un tiers d'entre eux font l'expérience à un degré substantiel d'un rôle ambigü. À mesure que l'organisation grandit, il y a davantage de conflits, de retards, de maladies et de roulement de main-d'oeuvre. Dans les grandes organisations, il y a même anomie; l'acceptation du rôle qu'on y joue est diminuée; il y a plus de différentiation et, en même temps, il devient plus difficile d'humaniser l'ambiance au sein de l'organisation en la ramenant à quelques dimensions individuelles discernables. La contrainte totale est principalement accentuée dans les postes marginaux qui sont exposés à des pressions et à des prévisions qui se contredisent.
La disparité entre les ambitions et leur réalisation est une des sources principales du défaut d'adaptation. Les organisations caractérisées par des rapports tendus tant au plan vertical qu'horizontal peuvent changer plus facilement que celles dont les clivages sont plus marqués. La continuité et le changement dans les structures de performance varient en fonction des types de contraintes et de résistance parmi et à l'intérieur des structures de normes, de rapports humains et de ressources disponibles. Les incompatibilités et les oppositions apparaissent à la fois à l'intérieur des réseaux de systèmes et entre eux.
Avec la croissance du secteur public, les perspectives de tension dans les organisations complexes deviennent de plus en plus importantes qu'auparavant. L'idée de gouvernement considéré comme une institution de service qui ne doit pas être sujette à préemption par l'un quelconque des individus et des groupes qui combattent dans l'arène politique est mise en danger par des droits acquis derrière lesquels on se retranche. Les administrateurs ont tendance à développer des droits acquis sur les terrains ou dans les activités sur lesquels ils exercent leur compétence et leur autorité en observant le moins possible les règles formelles, parfois même en y passant outre. La croissance sans restriction de l'administration publique peut mettre en danger le rôle de la loi et la séparation des pouvoirs. Afin de se défendre de toutes les accusations possibles, la bureaucratie a pour stratégie de s'en tenir à la lettre de la loi.
Les organisations envisagées ici comme relativement complexes et comme des systèmes d'interaction relativement permanents aux frontières et aux acteurs spécifiques diffèrent dans leurs cultures respectives, c'est-à-dire que celles-ci ont un profil distinct formé de normes, de valeurs, de convictions, de façons de se comporter etc., qui caractérisent la manière selon laquelle les groupes et les individus s'allient dans l'accomplissement de leurs tâches. Dans les bureaucraties, la culture composante est en grande partie dictée par l'organisation formelle, entendue ici comme « une structure consciemment conçue s'adaptant aux conditions internes et externes, appuyés sur des activités de contrôle mises en place pour guider et régulariser la correspondance entre les activités réelles et les activités projetées ». Ceci est relié dans une large mesure au volume de croissance de l'organisation. Les grandes organisations ont tendance à être plus spécialisées, plus standardisées et plus formalistes que des organisations plus petites. Les plus grandes organisations se trouvent dans le secteur public et leur personnel est formé de fonctionnaires, c'est-à-dire d'un corps d'administrateurs institué selon des procédures bien établies en matière de sélection, de formation, d'évaluation, de rémunération, de discipline et de mise à pied.
Les phénomènes au sein des organisations complexes doivent être situés à l'intérieur même des frontières de l'organisation qui inclut des secteurs d'activité qui, au point de vue social, sont reconnus comme étant les limites de la compétence de l'organisation et sur laquelle elle a autorité. Le plus important de ces phénomènes est le pouvoir avec ses attributs fondamentaux de récompenses, de coercition, de soumission personnelle, de compétence et de légalité. Le pouvoir coercitif apparaît dans ses formes extrêmes dans les organisations totalitaires complexes. Toutefois, sous quelque régime que ce soit, le pouvoir joue un rôle majeur dans toutes les situations où le contrôle de ressources peu abondantes est une nécessité. Les fonctions et les dysfonctions des rapports de pouvoir sont un des principaux objets de l'analyse sociologique qui essaie d'expliquer comment les systèmes sociaux réagiront aux forces de changement en s'y adaptant, pourquoi l'ordre social se maintient malgré les pressions internes et externes qui poussent au changement, quelles sont les situations et les causes de conflits aussi bien que d'équilibre relatif, comment les systèmes disposent leurs conditions internes et leur développement pour convenir aux exigences externes, comment le processus de sélectivité répond au changement ambiant de fonctions. Il est d'importance primordiale de ce point de vue d'étudier comment les organisations complexes parviennent à un état qui inclut l'acceptation de l'autorité légitime et la soumission à ses exigences, soumission qui, pour bien des gens, s'étend à des actes qu'ils ne comprennent pas et qui peuvent violenter leurs propres valeurs. Le concept des types idéaux est particulièrement utile dans tout ce qui vient d'être cité.
L'élaboration d'un « type idéal » comme outil d'analyse sera d'autant plus abstrait qu'il aura été conçu de façon précise et exacte. C'est ainsi qu'il sera mieux en mesure de remplir son rôle qui consistera dans la formulation d'une terminologie, dans l'élaboration de classification et d'hypothèses.
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Élaboration et validation d’une échelle des agents de stress dans les organisations
Pierre-R. Turcotte
p. 494–514
RésuméFR :
Cette recherche a pour but d'expliciter les mécanismes du stress et d'établir puis valider une échelle hiérarchique des différents agents de stress dans les organisations.
EN :
The object of this research is to elaborate a model of organizational stress and to establish a hierarchical scale of various organizational stressors in addition to validating such a scale.
Many researchers, amongst them Beehr, Walsh and Taber have established, the fact that stress related to task role such as role ambiguity and non participation has an effect on fatigue, tension and job dissatisfaction. However, up to now, no effort has been made to take stock of the many different organizational stressors. Therefore, an organizational stressors scale was built using the Delphi Technique. The scale was then tested amongst 148 managers in 10 different organizations.
This research demonstrated that there exists a relationship between organizational stress and psychological stress manifestation such as aggressiveness, depression and concentration problems, as well as physiological stress manifestation such as insomnia, gastrointestinal and respiratory problems. This research has also proved that there is a relationship between high organizational stress scores and a high rate of use or abuse of pharmaceutical products such as stimulants.
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Unresolved Issues in Public Sector Bargaining in the 1980’s
Droit du travail
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La négociation collective dans les secteurs gouvernemental et paragouvernemental reconsidérée
Jean Cournoyer
p. 528–533
RésuméFR :
Après quinze ans d'expérimentation au Québec, un ancien ministre du travail sous deux gouvernements se demande s'il ne faudrait pas reconsidérer certains principes et certaines modalités du régime de négociation collective dans les secteurs gouvernemental et para-gouvernemental.
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La détermination des unités de négociation. Recherche d’une politique
Marc Brière
p. 534–555
RésuméFR :
Le distingué directeur de cette revue— à qui l'on me permettra de rendre hommage pour son éminente contribution, durant quelque trente-cinq années d'un labeur important et fructueux, à une meilleure compréhension des relations de travail dans notre société— m'a invité à laisser un instant mon rôle de juge pour tenter de me rapprocher de celui de « savant », me faisant ainsi un honneur auquel j'aurais mauvaise grâce d'être insensible.
Mon premier réflexe était de refuser cette aimable invitation, non pas par modestie ou timidité, mais par crainte des procès d'intention ou autres interprétations ou reproches que pourrait susciter un tel écart de conduite. Pour un juge, la façon normale, sinon la seule, de communiquer avec le monde extérieur n 'est-elle pas la délivrance et la publication de ses jugements? Et les juges du travail n'ont-ils pas mieux à faire qu'à prétendre faire oeuvre scientifique et concurrence aux docteurs du savoir? Chacun son métier, et les vaches n 'en seront que mieux gardées! Pensez, monsieur le juge, aux retards de la justice: que vos jugements courts et vite rendus! Le monde n 'a que faire de vos discours ou dissertations, non plus que de vos inutiles digressions, si justement fustigées sous le vocable d'obiter dictum, qui dérangent la belle ordonnance de la chose jugée et son confort juridique.
Et pourtant...
S'agit-il, comme l'on m'y invite si aimablement, de « contribuer à faire avancer la science »?— Peut-être bien en définitive, et tant mieux s'il peut en être ainsi. Je me garderai bien, toutefois, d'en avoir la prétention. Mon propos est plus modeste. J'ai accepté cette invitation dans l'espoir d'amorcer ou de renouer un dialogue. Car, dans le domaine des relations du travail tout particulièrement, le dialogue m'apparaît une impérieuse nécessité.
Je n 'ai jamais pensé que nos jugements devaient avoir le caractère de vérités absolues ou définitives. Leur autorité est bien relative, non seulement dans les cas d'espèce qu 'ils ont pour première fonction de trancher à l'égard des seules parties en cause, mais surtout dans leur dimension plus générale où ils ne sont que des jalons de recherche vers une meilleure justice et une meilleure compréhension de la réalité vécue.
La réalité des relations du travail dépasse largement le cadre judiciaire, même si ce que l'on appelle droit du travail doit y correspondre le plus possible, non seulement en tant que reflet et aboutissement, mais aussi en tant que dynamique d'évolution. C'est pourquoi il m'apparaît essentiel que les acteurs principaux des relations du travail, le patronat et les syndicats, participent à cette dynamique, non seulement en tant que plaideurs ou justiciables, mais aussi comme citoyens, et qu'à ce titre ils prennent part à la réflexion et à la discussion que l'élaboration des politiques administratives ou jurisprudentielles devrait normalement susciter, une part entièrement et « responsablement » assumée.
La critique des arrêts, dont il y a lieu de déplorer la pauvreté, voire même l'absence, devrait être un élément particulièrement fécond de ce nécessaire dialogue; et je ne pense pas à la seule critique juridique.
C'est dans cet esprit, esprit de recherche, esprit d'ouverture à la critique et au dialogue, non seulement avec les « savants », mais aussi et surtout avec les « acteurs » des relations de travail, que je présente ici, extraites d'un jugement que je commettais le 13 mars 1980 dans une affaire concernant l'INSTITUT DE RÉADAPTATION DE MONTRÉAL, certaines réflexions sur la détermination des unités de négociation.
Cette année marque le dixième anniversaire du Tribunal du travail et, l'an dernier, le département des relations industrielles de l'Université Laval soulignait, par son colloque annuel, le quinzième anniversaire de notre Code du travail. Cela pourrait suffire à justifier, pour tous les navigateurs en perpétuel mouvement sur la mer agitée des relations de travail, la nécessité défaire le point. Qu 'en est-il, notamment, de la question fondamentale qu'est la détermination des unités de négociation à l'aube du cinquantenaire du Wagner Act? Quel est le chemin parcouru? Quelle est la destination? Y a-t-il lieu de redresser la course?
*BRIÈRE, Marc, juge de la Cour provinciale, Tribunal du travail.
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L’expérience des dispositions anti-briseurs de grève selon le Code du Travail (Québec)
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Le devoir de représentation et les associations de salariés depuis l’entrée en vigueur du projet de loi 45.
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L’octroi de dommages-intérêts par un tribunal d’arbitrage dans le cas d’une grève contraire à la convention collective
Pierre Verge
p. 578–581
RésuméFR :
Par un arrêt unanime, la Cour Suprême du Canada renverse un courant jurisprudentiel bien établi de la Cour d'appel duQuébec. Elle affirme le pouvoir d'un tribunal d'arbitrage d'accorder des dommages-intérêts à un employeur victime d'une grève déclenchée pendant une convention collective. La convention collective dont il s'agissait prohibait une telle grève, mais ne contenait aucune mention expresse du pouvoir du tribunal d'arbitrage d'ainsi réparer un tel défaut d'appliquer cette disposition prohibitive.
• VERGE, Pierre, professeur, faculté de Droit, Université Laval.
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Décisions rendues par le Conseil canadien des relations du travail
Luc Martineau
p. 581–591
RésuméFR :
L'embargo sur le temps supplémentaire décrété par le syndicat doit être considéré comme illégal tant que les prérequis menant à l'acquisition du droit de grève n 'auront pas été respectés.
Société Radio-Canada et Syndicat des employés de production du Québec et de l'Acadie.
Dossier 725-54; décision du 5 décembre 1979, motifs de décision communiqués le 18 mars 1980 (no 236); Panel du Conseil: Me Marc Lapointe, président, Me Nicole Kean et M. Jacques Archambault, membres.
* Cette chronique a été préparée par Luc MARTINEAU, avocat, adjoint légal au président du Conseil canadien des relations du travail.
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Changements dans les législations du travail au Canada
Nicole Marchand et Michel Gauvin
p. 592–595
RésuméFR :
Ceci est le premier d'une série d'articles sur les principaux changements apportés à la législation du travail par les différentes administrations canadiennes. On y retrouvera des mentions aux projets de loi, règlements d'application et autres textes réglementaires ayant une importance significative. Le présent article fait état des modifications proposées ou adoptées entre le Ierjanvier et le 30 avril 1980
Recensions / Book Reviews
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Deux systèmes de relations industrielles en Belgique (textile et fabrications métalliques), par Thérèse Klein-Beaupain, Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 1979, 335 pp.
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Les syndicats indépendants au Québec : un aperçu de leur situation, par François Delorme et Diane Veilleux, Coll. « Études et recherches », Centre de recherche et de statistiques sur le marché du travail, Québec, ministère du Travail et de la Main-d’oeuvre, 1980, 95 pp.
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Company Organization and Worker Participation, by Ian B. Knight, London, Office of Population Censuses and Surveys, HMSO, 1979, 158 pp. / Boards of Directors in British Industry, by Christopher Brookes, London, Department of Employment, Research Paper no 7, 1979, 84 pp.
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The Shrinking Perimeter, by Hervey A. Juris et Myron Roomkin (eds), Lexington, Lexington Books, 1980, 226 pp.
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Developing Employee Relations, by Peter Warr, Stephen Fineman, Nigel Nicholson, and Roy Payne. Westmead, Farborough, Hants, England, Saxon House/Gower Press, 1978, 197 pp.
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The Public Service Alliance of Canada: A Look at a Union in the Public Sector, par Maurice Lemelin, Los Angeles, Institute of Industrial Relations, University of California, Monograph Series : 21, 1978, 184 pp.
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Public Access: Citizens and Collective Bargaining in the Public Schools, edited by Robert E. Doherty, Ithaca, New York, ILR Publications, New York State School of Industrial and Labor Relations, 1979, 100 pp.
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Rapport de la Commission d’enquête sur la négociation sectorielle, par Frances Bairstow, Murray Dubinsky et Richard C. Smith, Ottawa, Travail-Canada, décembre 1978, 252 pp.
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International Encyclopedia for Labour Law and Industrial Relations, by Roger Blanpain (ed.), Deventer, Netherlands, Kluwer, 1978.
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Les protocoles de retour au travail : une analyse juridique, par Claude D’Aoust et Louis Leclerc, Monographie no 6, Montréal, École de relations industrielles de l’Université de Montréal, 1980, 81 pp.
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Analyse empirique des décisions de rémunération de la Commission de lutte contre l’inflation, par David K. Foot et Dale J. Poirier, Ottawa, Commission de lutte contre l’inflation, 1970, 95 pp.
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Analysing Jobs, by M.B. Youngman, R. Oxtoby, J.D. Monk and J. Heywood, Epping, Essex, Eng., Gower Press, 1978, 157 pp.