Résumés
Abstract
The number of white-collar workers is rapidly increasing. If the trade union movement is to continue to play an effective role in the industrial relations system, it must recruit these workers. But so far, outside of the public sector of the economy, there is relatively little white-collar unionism in Canada. The major reason for this is that Canadian public policy on industrial relations is not very effective in curbing management opposition to white-collar unionism. The paper suggests several ways in which public policy might be made not only more effective in this regard but also deals with the problems arising from the growth of white-collar unionism.
Résumé
INTRODUCTION
Cet article est une version revisée d'une étude faite pour l'Équipe spécialisée en relations du travail afin de l'aider dans ses recommandations concernant le syndicalisme chez les cols-blancs au Canada. Il est évident qu'il n'engage que la responsabilité de son auteur et non de l'Équipe spécialisée Nous ne considérons cependant que les aspects du problème auxquels les politiques gouvernementales semblent les plus applicables, à savoir la croissance du syndicalisme chez les cols-blancs ainsi que les problèmes qu'elle crée.
Les syndicats sont nécessaires pour que les travailleurs aient voix au chapitre des décisions qui les affectent tant à l'intérieur de l'entreprise qu'au sein de la société globale. À supposer que la prise de décision démocratique soit une bonne chose, il s'ensuit que l'absence de syndicalisation chez les cols blancs et les cols bleus est un sujet qui prête à sérieuse réflexion. Tant et aussi longtemps que des groupes d'employés ne sont pas représentés dans la prise de décision, le processus et la structure démocratiques ne sont pas achevés. Il est alors logique de se demander comment aider à la croissance du syndicalisme dans ce secteur. Avant de tenter d'élaborer une réponse à cette question, il est nécessaire d'isoler les facteurs principaux favorisant ou retardant la croissance du syndicalisme chez les cols blancs.
LES CAUSES DE LA CROISSANCE DU SYNDICALISME CHEZ LES COLS BLANCS
Il y a plusieurs causes à la croissance du syndicalisme chez les cols blancs : a) certaines caractéristiques socio-démographiques des cols blancs, comme le sexe, l'origine sociale, l'âge et le statut dans la communauté ; b) certains suspects de leur situation économique comme le salaire, les avantages sociaux et la sécurité d'emploi ; c) certaines caractéristiques de leur occupation comme le degré de concentration de l'emploi par groupes, les chances de promotion, le degré de mécanisation et d'automation ainsi que le degré de proximité des travailleurs manuels syndiqués ; d) quelques caractéristiques du syndicalisme telles l'image qu'en a le public, leurs politiques de recrutement et leurs structures ; e) le degré auquel les employeurs sont prêts à reconnaître les syndicats de cols blancs ; f ) la mesure dans laquelle l'action gouvernementale favorise la reconnaissance syndicale.
Il est cependant impossible d'étudier ici les rapports qui existent entre chacun de ces facteurs et la croissance du syndicalisme chez les cols blancs. La recherche et l'expérience de plusieurs pays démontrent que trois des six causes ci-haut mentionnées sont d'une extrême importance dans le problème qui nous préoccupe. Ce sont : le degré auquel l'emploi de cols blancs est concentré dans de grands groupes, la mesure dans laquelle les employeurs sont prêts à reconnaître les syndicats de cols blancs et la portée de l'action gouvernementale favorisant la reconnaissance syndicale.
Plus le degré de concentration de l'emploi est grand, plus grande est la possibilité de syndicalisation chez les cols blancs. Il semble que nous puissions expliquer cette affirmation en disant que plus les employés réalisent leur besoin pour le syndicalisme et plus les syndicats sont intéressés à les recruter, plus leur emploi est concentré. Mais il se peut que ce besoin particulier ne soit pas rencontré soit parce que les employeurs refusent de reconnaître les syndicats, soit parce qu'ils établissent des politiques destinées à décourager ou à défendre à leurs cols blancs d'adhérer à ces associations. Généralement, les syndicats, surtout en Amérique du Nord, n'ont jamais été capables de forcer les employeurs à les reconnaître. Ceci a donc exigé l'introduction de politiques gouvernementales facilitant le travail des syndicats et rendant la résistance des employeurs plus difficile.
L'ENCOURAGEMENT DU SYNDICALISME CHEZ LES COLS BLANCS PAR LES POLITIQUES GOUVERNEMENTALES
Ce qui précède démontre que même si la concentration de l'emploi crée un besoin pour le syndicalisme chez les cols blancs, il est improbable qu'il croisse à moins que l'opposition patronale soit maîtrisée par les politiques gouvernementales. Nous avouerons néanmoins que même si les politiques gouvernementales canadiennes prétendent annuler cette opposition patronale, elles sont loin d'être efficaces.
Il y a sûrement plusieurs façons de rendre plus efficaces les politiques canadiennes sur ce point.
1.— les politiques gouvernementales en matière de relations industrielles pourraient contenir une déclaration quant à la valeur du syndicalisme et de la négociation collective et quant au désir d'encourager la croissance de ces institutions.
2.— au lieu d'exiger d'un syndicat de prouver qu'il représente la majorité des salariés employés dans une unité de négociation, on pourrait demander qu'il ait la majorité parmi les voteurs.
3. — on pourrait introduire une procédure de vote rapide : ce moyen permettrait au syndicat de prendre un vote de représentation rapide à chaque requête en accréditation. Ce vote pourrait permettre au syndicat de pouvoir compter, à la suite d'un rapide tour d'horizon, sur, par exemple, trente pourcent des travailleurs composant l'unité de négociation.
4. — on pourrait accélérer le processus de reconnaissance en rendant la législation existante beaucoup moins technique et légale. Au lieu d'exiger, par exemple, que le syndicat prouve que la majorité des travailleurs dans l'unité de négociation soit des membres en règle de l'union (définissant « membres en règle » d'une manière extrêmement technique et légale), les désirs des employés pourraient être plus facilement et plus justement déterminés en demandant simplement qu'ils fassent parvenir à la C.R.T. une pétition désignant le syndicat par lequel ils veulent se faire représenter.
5.— le syndicat devrait avoir autant de chances de communiquer avec les employés que peut en avoir la direction de l'entreprise. Si un employeur s'adresse à ses employés au sujet de la syndicalisation sur les heures et lieux du travail, on pourrait exiger que les syndicats aient les mêmes facilités. Ou encore si la partie patronale communique avec les employés par la poste, on pourrait exiger que le syndicat ait accès à la liste d'adresse.
6.— on devrait enlever le droit à l'employeur de se présenter devant la Commission dans le but de s'opposer à une requête en accréditation ou d'appuyer une demande de révocation d'accréditation syndicale.
7. — le fardeau de la preuve dans les cas de pratiques déloyales devrait incomber à l'employeur.
8.— on pourrait réduire l'étendue des pratiques déloyales patronales en défendant tout changement unilatéral dans les salaires et les conditions de travail et en plaçant un moratorium sur tout congédiement à partir du moment où les employés ont envoyé une pétition à la Commission pour la tenue d'une élection jusqu'au moment où cette dernière a lieu.
9. — là où ce n'est pas déjà le cas, la Commission, plutôt que les cours ordinaires, devrait avoir l'autorité de poursuivre dans les cas de pratiques déloyales sans l'approbation préalable du ministre du travail.
10. — si la Commission trouve un employeur coupable de pratiques déloyales, une des sanctions pourrait être l'accréditation automatique du syndicat.
11.— on pourrait forcer l'employeur à négocier de bonne foi en prohibant tout changement unilatéral des salaires et des conditions de travail après que le syndicat eut été accrédité. En plus, on pourrait permettre aux deux parties de demander l'aide d'un arbitre indépendant dont la décision lierait les parties, et ce durant la période de non-maturité des négociations, i.e. trois à cinq ans suivant l'accréditation.
12. — un dernier moyen par lequel les politiques gouvernementales pourraient encourager la croissance du syndicalisme serait de s'assurer que tous — incluant ceux détenant des postes de direction, de supervision, professionnels ou confidentiels — sont couverts par les clauses de protection qu'elles émettent.
LES PROBLÈMES CRÉÉS PAR LA CROISSANCE DU SYNDICALISME CHEZ LES COLS BLANCS ET LES POLITIQUES GOUVERNEMENTALES
En faisant l'hypothèse que la politique canadienne de relations industrielles ait été amendée suivant les suggestions ci-haut mentionnées et qu'il en ait résulté une croissance significative du syndicalisme chez les cols blancs, il s'en suivrait une série d'implications sujettes à une prise de position de la part des politiques gouvernementales. Parmi ces implications, notons la nature de l'unité de négociation, la nature de l'agent de négociation, le contenu de la négociation collective et la méthode de règlement des conflits.
LA NATURE DE L'UNITÉ DE NEGOCIATION
Le fait d'exclure des personnes employées à des postes de direction, de supervision, à caractère professionnel ou confidentiel de la partie des lois du travail —la prévention des conflits d'intérêts — n'a pas tellement pour but de les exclure de toute unité de négociation, mais plutôt de s'assurer qu'elles ne font pas partie des mêmes unités de négociation que les autres employés. Le fait d'inclure dans la même unité de négociation du personnel de cadre et des employés ordinaires peut créer de sérieux conflits d'intérêt, ce qui n'est pas à désirer.
La réponse n'est pas d'exclure le personnel de cadre, professionnel ou non, de la portée de la législation, mais de stipuler que toute personne qui dirige effectivement le travail d'un autre employé ne soit pas incluse dans la même unité de négociation que cet employé.
L'unité de négociation propre aux travailleurs professionnels est un point particulièrement délicat. Mais il semble être temps qu'on exige une façon flexible de déterminer des unités professionnelles de négociation. Ceci peut être fait en stipulant que les travailleurs professionnels peuvent décider, s'il y a lieu, du type d'unité de négociation dans laquelle ils veulent être inclus : leur décision serait sujette à approbation par la Commission.
LA NATURE DE L'AGENT DE NÉGOCIATION
Le fait d'avoir des superviseurs et des « supervisés » dans le même syndicat crée des difficultés qui peuvent être surmontées si la législation stipule que pour qu'un syndicat de travailleurs puisse être accrédité comme représentant de cadres, il doit former des locaux séparés et s'assurer que ces derniers ne seront pas sous le contrôle des travailleurs du rang. En plus, on pourrait traduire en pratiques déloyales le fait qu'un syndicat de travailleurs applique une sanction à un cadre pour avoir fait une tâche que l'employeur aurait pu exiger de lui.
Un syndicat local affilié à une centrale plus vaste n'est souvent pas considéré comme agent de négociation approprié pour des catégories de cols blancs tels les surintendants et les policiers. Mais il est difficile de voir quels conflits d'intérêt pourraient naître de l'affiliation de syndicats de cadres ou de policiers à des conseils de travail ou de métiers, à des fédérations provinciales ou au Congrès du travail du Canada. Ces organismes centraux n'ont aucun pouvoir d'ingérence dans les affaires internes de leurs affiliés. Leur fonction principale est de représenter les intérêts des employés à l'intérieur de la communauté. La consultation du monde du travail par les gouvernements au Canada signifie la consultation de ces centrales syndicales. Si les syndicats de cadres ou de policiers veulent participer à ce processus, il semble qu'il n'y ait aucune bonne raison les en empêchant. En fait, il est désirable qu'il le fasse en vertu des valeurs de la prise de décision de façon démocratique.
Le choix d'un agent de négociation pour les travailleurs professionnels pose un problème spécial. Quelques auteurs ont prétendu que les associations professionnelles détenant une autorité quant aux permis de travail à accorder ne devraient pas agir comme agents de négociation parce que :
« It would be undesirable to combine in one body the public interest function of licensing with the private interest function of bargaining. The possibility, however remote, of restricting numbers to improve self-interest is too great a public risk ».
Mais il est difficile de voir pourquoi le danger pour une association professionnelle de restreindre l'offre dans l'intérêt de ses membres ne serait soulevé qu'au moment de la négociation collective. Il y a peu de doute que la plupart des associations professionnelles restreignent déjà l'offre dans l'intérêt de leurs membres indépendamment du fait qu'ils s'engagent dans la négociation collective. Si ceci est considéré comme un problème, on ne le réglera pas en défendant l'accès des associations professionnelles à la négociation collective. Il n'y a qu'un moyen de régler ce problème : il appartient à une organisation publique d'émettre des permis de pratique et non à une organisation privée.
LE CONTENU DE LA NÉGOCIATION COLLECTIVE
Certains auteurs ont prétendu que la loi devrait protéger les droits de gérance en excluant certaines choses de la négociation collective. De tels arguments se basent sur le fait que les cadres ont certains droits exclusifs et prérogatives, mais Chamberlain a démontré avec clarté et vigueur qu'il n'en était pas ainsi. Il semblerait alors qu'il n'y ait pas de raisons valables pour lesquelles la loi empêcherait les syndicats d'essayer de participer à la prise de décision sur des points tels les promotions et les mises-à-pied. En fait, suivant les valeurs de la prise de décision démocratique, il n'y a pas de raison pour laquelle la loi devrait prohiber de telles choses.
LA MÉTHODE DE RÈGLEMENT DES CONFLITS
Il n'y a aucune raison valable pour laquelle le législateur traiterait les cols blancs différemment des travailleurs manuels en ce qui a trait à la méthode de règlement des conflits. Le fait que les travailleurs soient cols blancs ou cols bleus n'est pas pertinent. L'aspect important est à savoir si leur travail affecte un intérêt public vital. Si oui, il peut y avoir raison d'établir, par voie de législation, une méthode spéciale de règlement des conflits pour de tels travailleurs.
CONCLUSION
Nous croyons que le droit à la négociation collective pour tous les employés devrait être consacré dans une seule loi. Ceci éviterait aux gouvernements d'être exposés à une sorte de « maquignonnage » alors que chacun des groupes régi par une législation propre rivalise pour une position légale plus favorable. Cela rendrait également plus facile la présentation d'une politique intégrée de négociation collective avec des buts clairement cités. En plus, l'idée que certains se font quant au statut spécial ou plus grand des travailleurs professionnels aux yeux de la loi pourrait être dissipée. Mais en fait, ce n'est pas un point crucial qu'il y ait une ou plusieurs lois. Ce qui est crucial, c'est qu'il devrait y avoir une législation permettant à tout groupe d'employés dans la société de s'engager dans le processus de la négociation collective s'il le désire.
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