Comptes rendus

Balthazar Lovay, Marianne Schweizer et Jehane Zouyene (dir.), Whore Power. Travailler, Lutter, Diffuser – Archives militantes du Centre Grisélidis Réal de documentation internationale sur la prostitution, Genève, Les presses du réel, 2022, 248 p.

  • Laure Sizaire

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  • Laure Sizaire
    Université libre de Bruxelles

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Avant de rentrer dans les détails de ce livre, il faut revenir sur le parcours de Grisélidis Réal, qui traverse tout l’ouvrage. Née en 1929 à Lausanne dans une famille lettrée, elle reçoit une éducation bourgeoise et stricte contre laquelle elle se révoltera. Après avoir suivi des études d’arts décoratifs, elle se marie à 20 ans et donne naissance à un fils. Elle se sépare rapidement de son époux et a un deuxième enfant avec un autre homme. Elle tente néanmoins de sauver son mariage en ayant un autre enfant avec son mari, mais le couple divorce malgré tout. Elle commence à se prostituer par nécessité alors qu’elle se trouve en Allemagne avec un amant schizophrène et violent, accompagnée de deux de ses enfants. Ce séjour se conclut par un passage en prison pour avoir vendu de la marijuana à des soldats américains, et c’est là-bas qu’elle commence à peindre et à écrire. De retour à Genève, elle obtient une bourse lui permettant de se consacrer à son premier ouvrage, Le noir est une couleur (1974). Abandonnant pour un temps la prostitution, elle est forcée d’y revenir par manque de moyens, mais c’est en participant à la Révolution des prostituées, déclenchée à Paris en 1975, que Grisélidis Réal va entrer dans une lutte qu’elle ne quittera plus jamais : « le refus absolu de toute injustice » et, au coeur de cette quête, la reconnaissance des droits des personnes prostituées. De là, elle reprend la prostitution comme un acte militant, pour être du côté des personnes concernées, et parce que, selon elle, « de l’argent, du temps, de la liberté, c’est là [dans ce métier] qu’on en trouve le plus ». En tout, Grisélidis Réal a exercé la prostitution pendant trente ans – elle cesse de travailler en 1995 – mais elle revendiquera cette activité jusqu’à sa disparition et au-delà, comme en témoigne sa pierre tombale, sur laquelle figure l’épitaphe « Écrivain, peintre, prostituée ». En 1982, elle participe au lancement de l’association Aspasie, dont le but est de défendre les droits des TdS, de les accompagner et de les rendre visibles. En son sein se réunissent des acteur·trice·x·s de différents horizons, non seulement des TdS, mais également leurs allié·e·x·s. Grisélidis Réal décède en 2005 et lègue un fonds d’archives qu’elle a constitué pendant plus de 30 ans et qui réunit des correspondances, des coupures de presse dans de multiples langues, des échanges de courriers entre elle ou Aspasie et d’autres centres d’aide aux TdS à travers le monde, des documents officiels, juridiques, administratifs, des brochures produites par des lieux de défense ou d’accompagnement des TdS, ainsi que des dépliants pour des événements culturels (spectacles de théâtre, projections) touchant de près ou de loin au travail du sexe. L’écriture de Grisélidis Réal est omniprésente dans ces archives, que ce soit à travers ses correspondances ou dans les post-it accolés ici et là avec des mentions telles que « traduire », « urgent, urgent, urgent! », « à photocopier », « classer de toute urgence », témoignant de la ferveur avec laquelle elle s’est mise à la tâche durant toutes ces années et de sa « dévotion à la cause des TdS » (p. 93). Onze auteur·e·x·s ont plongé dans cette accumulation de savoirs, retraçant une lutte internationale pour les droits et la dignité des TdS, encore peu visible précisément en raison d’un manque d’archives pour la documenter et en garder la mémoire. La diversité des contributions constitue une richesse indéniable de l’ouvrage puisque les auteur·e·x·s se trouvent aussi bien en recherche universitaire, dans le travail du sexe, le monde de …

Parties annexes