Comptes rendus

Diane Lamoureux, Le trésor perdu de la politique. Espace public et engagement citoyen, Montréal, Écosociété, 2013, 111 p.[Notice]

  • Pascale Dufour

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  • Pascale Dufour
    Université de Montréal

Diane Lamoureux, professeure de science politique à l’Université Laval, propose dans le présent ouvrage une réflexion sur l’engagement citoyen dans l’espace public, en insistant à certaines occasions sur le rôle et la place des intellectuelles et des intellectuels dans cet engagement. Elle offre un retour réflexif sur des dizaines d’années de pratique (au sens de praxis) intellectuelle et militante. Connue pour ses nombreuses publications (notamment : Lamoureux 2001 et 2010; Lamoureux, Gervais et Karmis 2008), Lamoureux s’engage également aux côtés des luttes féministes, altermondialistes et progressistes du Québec. Elle a, par exemple, participé au Réseau de vigilance, qui réunit des groupes et des citoyens. Il a été mis en place en 2003 pour contrer les velléités du nouveau gouvernement libéral de passer outre la consultation-négociation avec les acteurs collectifs du Québec, syndicats et groupes communautaires inclus; elle a aussi fait partie du collectif D’abord solidaires et, plus récemment, du collectif Les profs contre la hausse. C’est donc un partage extrêmement riche qui est ici offert aux lectrices et aux lecteurs. L’ouvrage est essentiellement composé de textes déjà publiés, mais que Lamoureux a revisités sous l’angle de l’engagement dans la cité, et d’un texte inédit portant sur les mobilisations du printemps 2012 au Québec. Les mobilisations de 2012, autour du mouvement étudiant et avec celui-ci, sont un des éléments déclencheurs de la réflexion menée par Lamoureux sur le rôle et la place de l’intellectuelle critique dans la société québécoise. Le conflit social de 2012 a non seulement mobilisé mais aussi divisé les corps professoraux dans les universités et les cégeps, il a également mis la profession d’enseignant ou d’enseignante sur la sellette. Par exemple, le projet de loi n° 78 qui obligeait le personnel enseignant à donner leur cours, indépendamment des circonstances, a suscité de nombreuses questions sur le positionnement des intellectuelles et des intellectuels à l’égard de l’État et de leur employeur. Ces évènements sont ici une occasion de discuter les transformations des universités et de leur rôle au sein de la société québécoise, de revenir sur les changements récents de la vie politique et de proposer un déplacement du regard sur le politique, ce qui s’avère très stimulant. Selon ma lecture, le fil conducteur de l’ouvrage est le suivant : l’auteure propose une « autre » manière de penser le politique, à la fois sur le plan de la définition de ce qu’est l’objet du politique et sur le plan de notre capacité collective à le faire émerger, exister, et à le transformer. Le premier texte, « Hannah Arendt et le “ trésor perdu ” de la politique », part de l’idée développée par cette philosophe sur « le bonheur public » qui désigne le bénéfice que l’on retire sur le plan de l’expérience individuelle à participer à la vie publique. Comment mettre en acte ce bonheur public dans le monde contemporain, c’est-à-dire dans une démocratie représentative qui fonctionne selon le principe de la confiscation du politique par une élite (même si elle est élue)? Lamoureux explore l’idée de la nécessité de travailler sur le lien horizontal entre concitoyens et concitoyennes (par opposition au lien vertical qui relie la personne élue à ceux et celles qui participent à l’élection), sortant d’emblée la discussion du politique formellement institué. La question n’est pas le gouvernement, ni même la gouvernance, mais bien l’existence du politique entre les individus et, par ricochet, de l’action collective de ces individus devenus sujets politiques. L’auteure soutient que c’est en cherchant à travailler sur la mise en acte et en oeuvre de la concitoyenneté que chaque personne peut contribuer à faire exister le politique. Elle apportera, …

Parties annexes