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Notre amie Hélène Rouch nous a quittées en février dernier. Militante féministe, éditrice et chercheuse engagée, elle a été à la fois pionnière et cheville ouvrière dans le féminisme français. Elle a oeuvré à l’inscription du féminisme dans les milieux de la recherche et de l’université française, et elle a également joué un rôle essentiel dans la transmission de la recherche féministe par son travail inlassable d’éditrice.
Biologiste de formation, ayant longtemps enseigné les sciences naturelles au secondaire, Hélène Rouch a joué un rôle déterminant dans l’introduction des recherches féministes dans le domaine des sciences dites pures. Plus particulièrement, elle s’est intéressée au rapport entre science, histoire sociale des sciences et pensée féministe, ce qui l’a conduite à examiner avec une grande originalité la question de la matérialité des corps à la lumière des faits nouveaux dans le domaine des biotechnologies. Ses travaux sur le corps enceint, sans verser dans le naturalisme, permettent de comprendre les limites d’une réflexion sur les femmes uniquement en termes d’autonomie et cherchent à penser les paradoxes de ce corps, ni tout à fait « un » ni tout à fait « deux ». Sans rien céder sur la rigueur analytique, elle arrivait à faire comprendre des notions complexes à un public profane en matière de culture scientifique.
Hélène Rouch participera à l’aventure du mouvement français de libération des femmes dès le début des années 70, dont les fameuses assemblées à l’École des beaux-arts et à ses premières publications, comme Le Torchon brûle. Elle travaillera également à l’organisation des journées du féminisme à la Mutualité en 1972. Elle s’engagera de 1980 à 1982 dans le séminaire Limites-frontières, aventure intellectuelle et militante. Elle contribuera en outre à l’introduction du féminisme dans le monde universitaire en travaillant à l’organisation du colloque « Femmes, féminisme, recherche » à Toulouse en 1982, aux Actions thématiques programmées du Conseil national de la recherche scientifique (CNRS), au colloque « Catégorisation de sexe et production scientifique » qui aura lieu à Aix-en-Provence en 1986, au colloque « Sexe et genre » en 1989, à la création de l’Association nationale des études féministes (ANEF) et au Centre d’enseignement, de documentation et de recherches pour les études féministes (CEDREF) de l’Université de Paris-VII.
Hélène Rouch a également accompli un travail colossal dans le domaine de l’édition : chez Côté-femmes, maison d’édition aujourd’hui disparue, où elle a rendu accessibles plusieurs classiques du féminisme, mais surtout dans la collection « Bibliothèque du féminisme » aux Éditions L’Harmattan, collection qu’elle a créée en 1989 avec sa compagne Oristelle Bonis et Dominique Fougeyrollas. Cette collection a permis de mettre à la disposition du public francophone plusieurs travaux originaux et de lui faire connaître des travaux de féministes étrangères.