Comptes rendus

Diane Trépanière Des pas sur l’ombre. Témoignages d’intervenantes en maison d’hébergement. Montréal, Les éditions du remue-ménage, 2004, 189 p.[Notice]

  • Geneviève Lessard

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  • Geneviève Lessard
    Université Laval

L’ouvrage Des pas sur l’ombre représente plus qu’un simple livre : c’est une véritable oeuvre d’art! Dès les premières pages, l’auteure nous plonge dans un monde d’émotions et de vécu, celui des spécialistes et des personnes-ressources, appelées des « intervenantes », en maisons d’hébergement, le tout agrémenté de photographies, de dessins, de poèmes et de lettres manuscrites qui ajoutent profondeur et vie à l’ouvrage. Cette publication rend un bel hommage au travail, trop souvent non reconnu, des intervenantes en maison d’hébergement qui luttent contre un problème social de grande envergure : la violence conjugale. « L’ombre vient de la lumière », écrit Diane Trépanière au début de son ouvrage (p. 14). Et cette lumière, ce sont les intervenantes en maison d’hébergement qui permettent, quotidiennement, à plusieurs femmes et enfants victimes de violence conjugale de retrouver l’espoir et de changer le cours de leur vie. Pour écrire ce livre, l’auteure a fait la tournée de 58 maisons d’hébergement du Québec et elle a rencontré plus de 300 intervenantes qui ont participé à des ateliers d’écriture sur la nature et le sens de leur travail en maison d’hébergement. Ces ateliers ont donné naissance à de magnifiques textes qui constituent le coeur de l’ouvrage. Comment définir le travail d’une intervenante en maison d’hébergement? Je crois qu’il faut lire l’ouvrage de Diane Trépanière pour faire le tour de la question, puisque ce travail implique une multitude de gestes, de tâches, de luttes, mais aussi de profondeur, de valeurs et de chaleur humaine. Selon Ginette, coordonnatrice d’une maison d’hébergement, « pour diriger une maison d’hébergement, il faut être spécialiste en travail social, levée de fonds, plomberie, gestion de personnel et de crise, habitation et architecture, développement social, et encore et encore » (p. 74). Être une intervenante en maison d’hébergement, c’est à la fois : Bref, c’est un travail où se côtoient ombre et lumière. L’ombre représente les défis à relever et les difficultés éprouvées ainsi que la douleur de constater les effets de la violence sur les victimes. Cependant, la lumière transperce cette noirceur lorsque les intervenantes assistent à de beaux processus de « dévictimisation » et de transformation dans la vie des femmes et des enfants aidés. Le témoignage de Guylaine est éloquant à cet égard : Trois thèmes définissant le travail des intervenantes en maison d’hébergement ressortent comme particulièrement importants, soit l’engagement, le féminisme et les conditions de travail. Concernant l’engagement, à constater la manière dont elles définissent leur travail et toute l’énergie qu’elles y consacrent, ces intervenantes sont visiblement des personnes très engagées, et ce, dans plusieurs domaines de leur vie : sur le plan social et politique pour lutter contre la violence conjugale; sur le plan humain et personnel pour savoir accueillir les victimes et leur permettre de retrouver leur dignité; et sur le plan spirituel aussi pour certaines, car un tel travail constitue presque une vocation et exige une grande profondeur d’esprit. Pour ce qui est du féminisme, être féministe signifie d’abord pour ces intervenantes être une femme et avoir un coeur de femme. Plusieurs expriment l’idée générale suivante : « Je crois que j’ai toujours été féministe au plus profond de moi. » C’est aussi aider d’autres femmes à pouvoir vivre pleinement leur féminité, en toute liberté, sans subir d’oppression et de violence. Donc, les intervenantes prônent évidemment les rapports égalitaires entre les hommes et les femmes. Bien que les intervenantes soient régulièrement placées devant une représentation sociale négative de la société en général par rapport au féminisme, elles persistent à se déclarer quand même féministes, ce qui témoigne une fois de plus de leur engagement. Certaines ont …