EN :
Velázquez’s Democritus (ca. 1630) presents a unique encounter: not only are there few depictions in which the Greek philosopher appears with a sphere that shows an actual map, but Velázquez used a court jester as a model for Democritus, thus placing the philosopher within a courtly space. When we study the painting in relation to the literary interests of the Spanish Golden Age and its socio-political circumstances, we can see the figure of Democritus as far from just another instantiation of a conventional trope. The philosopher’s smile and his crepuscular globe entrap the viewer in a semiotic game with pedagogical and ethical goals. While the scholarship on the painting has dwelt extensively on the identification of the figure, this essay moves beyond the superficial aspects of subject identity in order to explore how the painting articulates and requests a profoundly philosophical engagement. I thus examine Democritus in relation to contemporary literary and philosophical themes, many of which were present in Velázquez’s own personal library: the period’s understanding of the philosopher, cartographic spheres, and treatises on laughter. Considered in this manner, Velázquez’s figure is not responding to the folly of humanity in general, as is commonly the case in representations of the philosopher, but is rather presented through a courtly prism in which conquest, geography, and politics are inescapably interrelated. Velázquez’s Democritus emphasizes the philosophical and moral qualities of a learned and decorous laughter, which performs a critical and ethical role framed by Spain’s political difficulties.
FR :
Le Démocrite de Velázquez (c. 1630) représente une rencontre exceptionnelle entre divers éléments. En effet, rares sont les représentations montrant le philosophe grec avec un globe terrestre dessinant une carte géographique crédible; plus encore, Velázquez a pris comme modèle un bouffon de cour, plaçant ainsi le philosophe dans le contexte courtisan. Lorsqu’on examine le tableau en relation avec l’actualité littéraire de l’âge d’or espagnol et dans son contexte sociopolitique, la représentation de Démocrite s’avère ici bien plus qu’un trope conventionnel. De fait, le sourire du philosophe et son globe prennent le spectateur au piège d’un jeu sémiotique dont les objectifs sont pédagogiques et éthiques. Tandis que les chercheurs se sont surtout penchés sur l’identification du personnage, cet article cherche à aller au-delà de la reconnaissance de l’identité du sujet, et se donne pour but d’explorer la manière dont le tableau définit et requiert un engagement profondément philosophique. J’examine donc Démocrite dans ses rapports aux thèmes littéraires et philosophiques de son époque, que l’on retrouve en grande partie dans la bibliothèque de Velázquez lui-même : en particulier, la perception que l’on avait alors de ce philosophe, l’histoire des globes terrestres, et les traités sur le rire. Dans cette perspective, ce tableau de Velásquez ne fait pas référence à la folie inhérente de l’humanité, ce qui est généralement le cas dans les représentations du philosophe, mais cooemnte plutôt le monde courtisan dans lequel conquête, géographie et politique sont irrémédiablement liés. Le Démocrite met ainsi en lumière les qualités philosophiques et morales d’un rire savant et bienséant, qui tient un rôle critique et éthique dans le contexte des difficultés politiques de l’Espagne.